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Objectifs : surmonter la hausse de 83 % des prix alimentaires en trois ans ; éviter que 100 millions de personnes ne basculent dans la pauvreté ; trouver un « cadre global d’action » pour nourrir tout le monde. Réunis à Rome dans le cadre d'un sommet de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), près de cinquante chefs d'État et de gouvernement, ainsi que 2000 délégués, ont dés mardi 3 juin parlé de coopération, essentielle pour trouver des solutions. Sauf qu'évidemment, personne n'a réussi à se mettre d'accord. Retour sur la première journée de la conférence.
Biocarburants controversés
Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a répété que la production alimentaire allait devoir augmenté de 50% pour faire face aux besoins de la population d'ici 2030. Dans son discours d'ouverture, il a appelé à « un plus grand degré de consensus international sur les biocarburants », en partie responsables de la hausse des prix. En effet, la production de ces carburants verts passe par la conversion de terres agricoles à des fins énergétiques. Ce détournement d'une part de la production alimentaire explique entre 20 et 30% de la flambée des prix, selon le Fonds monétaire international (FMI).
Jacques Diouf, patron de la FAO, s'est insurgé : « personne ne comprend que des soutiens de 11 à 12 milliards de dollars en 2006 aient été utilisés pour détourner de la consommation humaine 100 millions de tonnes de céréales pour étancher la soif de carburant des véhicules ». Dans la foulée, Hosni Moubarak, président d’une Égypte durement touchée par les émeutes de la faim, a plaidé pour que soit freinée la production de ces carburants verts.
Ce qui a fait dire au Brésilien échaudé Luiz Ignacio Lula da Silva, dont le pays est le deuxième producteur d'éthanol derrière les États-Unis, que les biocarburants « n'étaient pas des bandits », mais qu'ils pouvaient au contraire « devenir un outil important pour sortir les pays de l'insécurité alimentaire ». Il s'est dit « scandalisé de voir l’énergie propre issue des biocarburants pointée du doigt, un doigt souillé de pétrole et de charbon ». À ses yeux, ceux qui doivent être blâmés sont les « puissants lobbies » qui, à coups « de rideau de fumée » prétendent « attribuer à la production d’éthanol » le boom « des prix des aliments ». Les autorités de Brasilia jurent que la production des biocarburants au Brésil n'est pas subventionnée – comme elle l'est en Europe ou aux États-Unis – et qu'elle n'empiète pas sur les terres arables consacrées à l'alimentation. Affirmations démenties par un expert de l'OCDE, qui réplique qu'elle « repousse indirectement les pâturages nécessaires aux bovins vers l’Amazonie ».
Le secrétaire américain à l'Agriculture, Ed Schafer, l'a rejoint sur ce point, estimant également que les biocarburants n'avaient pas un « impact important sur les prix » alimentaires – à peine 3%. Mais les États-Unis ont pour objectif de consacrer d’ici 2022 un quart de leur récolte de maïs à l’éthanol... Pas de consensus autour des biocarburants, donc. |
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Subventions agricoles pointées du doigt
Dans son discours, le secrétaire général de l'ONU a par ailleurs souhaité que soient abandonnées « les politiques économiques qui créent des distorsions de marché » et aggravent la crise. Autrement dit, les aides des pays de l'OCDE. Le directeur général de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), Pascal Lamy, a reconnu qu'il fallait « s'attaquer au problème des subventions qui créent des distorsions » des marchés et donnent un « avantage injuste » à certains pays.
Lula, lui, ne s'est pas gêné pour expliciter : « les subventions créent la dépendance, détériorent l’ensemble des systèmes de production et entraînent la faim et la pauvreté là où pourrait régner la prospérité. Il n’est que trop temps d’en finir avec elles ». Yvette Cooper, secrétaire britannique au Trésor, était d'accord. Elle a exhorté l’Union européenne à réformer sa politique agricole. « Je ne vois pas comment l’Europe peut trouver une justification à maintenir des prix bien supérieurs à ceux du marché mondial alors que les peuples d’Europe doivent se priver », a-t-elle argué.
Les contestataires
Quand ce n'était pas les subventions agricoles ou les carburants verts qui étaient remis en question, c'était l'institution onusienne elle-même. Pour l'Iranien Mahmoud Ahmadinejad, dont la présence au sommet était au moins aussi contestée que celle du très controversé Robert Mugabe, la solution consisterait à régler le problème en se passant carrément des Nations Unies. « Comment les mécanismes de l'ONU peuvent-ils améliorer la situation alors que certaines puissances imposent leurs décisions au Conseil de sécurité et l'instrumentalisent ? », a-t-il argumenté. Son homologue zimbabwéen, interdit de séjour en Union européenne mais dûment muni d'une dérogation, a quant à lui accusé les autorités du Royaume Unis, l'éternel ennemi, d'encourager les efforts des Occidentaux pour parvenir « à un changement illégal » du régime dans son pays, en l'affaiblissant économiquement. Ce à quoi Washington a répliqué que « sous la mauvaise gestion du président Mugabe, le Zimbabwe, qui était un exportateur de produits alimentaires, en est devenu un importateur net ».
Enfin, le président sénégalais Abdoulaye Wade a répété ses critiques contre la FAO, qui selon lui assiste les pays en développement comme « des mendiants », et a déclaré être « déçu » par l'agence de l'ONU.
Jacques Diouf n'a pas manqué de rappeler également que lors de la conférence sur la crise alimentaire en 1996, 112 chefs d'État et de gouvernement s'étaient engagés solennellement à réduire de moitié, d'ici 2015, la faim dans le monde. Pince-sans-rire, il a indiqué mardi qu'avec « les tendances observées [actuellement], cet objectif serait atteint en 2150 au lieu de 2015 ».
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