Dévasté par le séisme qui a secoué en Janvier dernier la patrie de ses parents - et où beaucoup de ses parents vivent encore - Altidore s’est alors déconcentré. Son travail, c’est footballeur, et une saison n'a jamais été plus importante que la dernière, avec Hull qui se battait pour ne pas descendre en division inférieure en Premier League anglaise et la Coupe du Monde qui était dans seulement quelques mois.

Mais comment pouvait-il se concentrer sur un match alors que les gens mouraient? Alors que les enfants étaient devenus orphelins et vivaient dans la rue? Alors qu’un pays qui fait partie de son héritage était dans la souffrance?

“C'était déprimant, décourageant pendant un certain temps ", déclarait Altidore ce mercredi. "Même pendant que je jouais au football, parfois, le football n'était même pas dans mon esprit. C'était tout simplement le pire des états esprits possibles dans lequel je pouvais être, à jouer dans le plus grand championnat au monde, pour une équipe qui essayait d’éviter la relégation. On a besoin que tous les joueurs soient là. "

Prêté à Hull par Villarreal en août dernier, les attentes envers Altidore étaient élevées, lui dont on espérait qu’il s’intégrerait bien en Premier League. Les joueurs de champ américains ont eu un succès grandissant en Angleterre, et le grand attaquant meurtri a un bon toucher près des buts.

Mais les Tigres ont été décevants, et Altidore n’a pas été d'un grand secours. Il n’ a marqué que deux buts - un en Championnat et un en Coupe de la Ligue, la troisième compétition en importance en Angleterre - et a raté les deux derniers matchs de la saison après avoir donné un coup de tête à Alan Hutton de Sunderland qui avait jeté le ballon sur lui.

Tenter d'expliquer les luttes Altidore finit par ressembler à autant d'excuses. Écoutez-le parler d’Haïti, et vous commencerez alors à comprendre.

Ses parents, Joseph et Giselle, ont quitté leur pays pauvre pour les États-Unis il ya environ 35 ans. Aucun d’eux ne parlait anglais. Giselle avait 300 $ en sa poche, Joseph en avait 500. Avec le temps, Joseph est devenu ingénieur et Giselle infirmière, et le couple et leurs quatre enfants se sont finalement installés à Boca Raton, en Floride.

Haïti n'était cependant jamais loin. Giselle et Joseph y avaient laissés leurs frères et sœurs, et ils y amenaient parfois leurs propres enfants en visite.

"Quand on y allait, on restait trois semaines", déclare Altidore.

Bien qu'il soit né dans le New Jersey et ait passé toute sa vie aux États-Unis, la connexion avec Haïti était si forte qu’Altidore a au moins envisagé la possibilité de jouer pour ce pays. Mais il aurait fallu obtenir un passeport haïtien et, probablement, renoncer au passeport américain.

"C’était là une décision vraiment difficile", dit-il," parce que toute ma famille avait des passeports américains. "

Il montra plutôt sa loyauté en portant un bracelet aux couleurs à la fois d’Haïti et des États-Unis.

"Chaque fois que j'en ai l'occasion, je fais toujours l'éloge de mes gens en Haïti", indique Altidore. "J'essaie juste d'équilibrer un peu des deux, et faire preuve de respect pour les deux pays."

Le père d’Altidore était en visite en Angleterre lorsque le tremblement de terre de 7,0 degré d’amplitude a frappé. Les lignes téléphoniques et les connexions Internet ayant disparues, ils ont passé des jours à essayer de savoir si plus d'une douzaine de membres de leur famille étaient en sécurité. Altidore lança des appels sur Twitter, demandant à ses fans de prier pour Haïti et donner de l'argent. Il est également apparu à CNN chez “Larry King Live ” et à ESPN pour attirer l'attention sur l'effort de secours.

" Transportez-vous là-bas et imaginez à quel point vous auriez-peur et vous seriez déchiré ? S'il vous plaît faites tout votre possible pour les aider. Je vous en prie ", disait l’un de ses tweets.

Malgré la place précaire occupée par Hull en Premier League, le manager Phil Brown donna à l’attaquant deux semaines de congés. Altidore envisagea de se rendre en Haïti et rechercher ses parents disparus, mais décida finalement qu'il devait rester en Angleterre pour aider Hull et rester en forme pour les échéances avec l’équipe des États-Unis en Coupe du Monde.

Peu importe combien il essayait, il n’arrivait cependant pas à arrêter de penser à Haïti.

"Je n’arrivais pas à me concentrer sur le football pendant les trois, ou quatre mois suivants", dit-il. "C’était difficile de ne pas cliquer sur les nouvelles, de ne pas entendre parler d’Haïti et puis, d’aller faire des recherches et faire toutes ces choses."

Le temps a atténué son désespoir, et Altidore ressemble de nouveau à ce gars de 20 ans insouciant. Il sait bien que la Coupe du Monde pourrait être déterminante pour son avenir professionnel; appartenant toujours à Villarreal, une bonne performance en Afrique du Sud pourrait lui valoir un autre prêt ou un transfert définitif.

Et dans une motivation plus proche de son cœur, la Coupe du Monde est l'occasion d'attirer l'attention sur la situation de détresse continuelle en Haïti.

" Mon seul message serait juste d'imaginer comment vous vous sentiriez si c'était votre fils ou votre fille de ... 5, 6, 7 ans et vivant dans la rue", indique Altidore. "C'est difficile pour moi d’y penser tous les jours, et c'est la raison pour laquelle je suis heureux de pouvoir avoir cette chance d’essayer de me représenter non seulement moi-même, mais eux aussi."