Après d'intenses tractations au siège de l'ONU, la résolution 1721 sur la Côte d'Ivoire, d'inspiration française, a été adoptée par le Conseil de sécurité. Elle maintient Laurent Gbagbo à la tête de l'État ivoirien pour une nouvelle année (jusqu'au 31 Octobre 2007), ce qui reporte d'autant l'organisation des élections.


Il faut en effet se rappeler que des élections présidentielle et législatives, initialement prévues pour Octobre 2005, avaient été reportées une première fois au 31 Octobre 2006, tandis que le mandat de Laurent Gbagbo était prolongé d'un an.


Cette résolution semble renforcer les pouvoirs du premier ministre de consensus imposé par la communauté internationale, Charles Konan Banny, mais ses pouvoirs ne sont renforcés qu'en apparence : il n'est toujours pas permis à Banny par exemple de nommer aux emplois militaires et civils.


Malgré l'échec avéré du tandem Gbagbo-Banny, la France n'a obtenu l'unanimité sur le texte qu'en cédant sur toutes les modifications qu'elle proposait. Paris aurait voulu en particulier que la résolution prime sur la Constitution ivoirienne, mais les États-Unis et le Royaume-Uni y ont fait obstacle. Pour eux, un État ne peut plus être considéré comme souverain si on s'attaque à sa Constitution (c'est d'ailleurs l'opinion officielle française, mais en d'autres lieux !!!).


La France vient de connaître une nouvelle désillusion. Elle touche du doigt les limites de son action en Afrique. Personne ne semble pressé de régler ce conflit, à part la France, à qui cela coûte 250 millions d'euros par an pour maintenir 4 000 militaires sur place. Tout le monde pense qu'il faut laisser mûrir la crise, et que la solution viendra des Ivoiriens (même si Chirac aimerait régler le problème avant son départ de l'Elysée).



Ce que l'on peut toutefois reprocher à la France dans cette affaire, c'est notamment de mettre un zèle particulier :


- à trouver une solution à un problème qui s'il est sérieux n'est pas aussi mortel que le Darfour, et qui tient davantage d'accointances entre individus (Chirac aimerait sans doute réinstaller Konan Bédié) que d'affaires d'Etat,

- à oublier que cette solution pourrait s'appliquer typiquement à un pays voisin de la Côte d'Ivoire, la Guinée où le président est malade, quasiment dans l'impossibilité de gouverner et que si rien ne s'y fait, c'est l'armée qui va s'en charger, or personne ne peut être un partisan des militaires pour conduire un pays quel qu'il soit (voir l'ouvrage d'Octobre 2006 de Dominique Bangoura chez L'Harmattan : « quelle transition politique pour la Guinée ? »),

- à n'avoir rien fait l'année dernière au Togo, cette république bananière où un fils de dictateur a remplacé son père après presque 40 ans de règne,

- de ne pas mettre la pression sur des dictateurs, ils ont tellement nombreux qu'une liste exhaustive n'est pas utile, mais de vouloir faire la morale, là où on l'y attend moins.




Bref, il est grand temps que le « dernier ? » représentant de la Françafrique, à savoir Chirac, s'en aille, pour laisser place à des relations franco-africaines renouvelées qui tiennent compte que les temps - donc l'Afrique - ont changé.


De toutes façons, il y aura de plus en plus de pays africains qui vont réclamer leur « indépendance » réelle débarrassée de la tutelle française, et si nous n'y faisons pas attention, c'est à coup de pompes dans le c..., qu'on va devoir quitter ce continent, alors qu'il y a pourtant beaucoup de compatriotes qui font du bon boulot et sérieusement, et qu'on ne doit en aucun cas amalgamer aux gouvernements français. Malheureusement, il devient de plus en plus à la mode de faire cet amalgame, et cela représente un beau gâchis...


On espère que les élections du printemps à venir apporteront une nouvelle ère des relations franco-africaines, il n'est pas interdit de rêver... même si cela va inéluctablement susciter son lot de troubles (Guinée, Côte d'Ivoire, Tchad, Centrafrique, Togo, RDC, Congo...).