Joseph Ki-Zerbo, né le 21 juin 1922 à Toma (Burkina Faso à l'ouest), laisse derrière lui une grande carrière politique et culturelle.


Il se présenta en candidat libre au BEPC et au baccalauréat, et s’envole pour Paris, où il étudiera le droit et les sciences politiques à la Sorbonne, où il obtiendra sa licence puis l’agrégation en Histoire, bien que ce parcours était officiellement et pratiquement interdit aux « Nègres indigènes ». Avec Léopold Sédar Senghor, ils ne sont que deux professeurs agrégés dans toute l’Afrique noire à cette époque.


Il enseignera à Orléans puis à Ouagadougou après être passé par Paris (lycée Buffon) et Dakar à la fin des années 1950 et se lance dans l’arène politique. Il est à Paris un militant actif des associations d’étudiants africains en France, qui « faisaient la politique » et dénonçaient le système colonial.


Sous l’effet de la colonisation, la population de l’Afrique occidentale française (AOF) s’était divisée automatiquement en deux grands groupes, eux-mêmes subdivisés en six classes qui vinrent se substituer aux classes ethniques : la règle était que le dernier des Blancs venait toujours avant le premier des Noirs...


Il crée le MLN en 1958 (Mouvement de Libération Nationale), avec comme programme… rien de moins que : l’indépendance immédiate, les Etats-Unis d’Afrique et le socialisme. Ce mouvement prônera le « non » au référendum lancé cette même année par De Gaulle. Un référendum qui demandait aux colonies si elles étaient favorables à la création d’une communauté française. Le « oui » l’emporte largement y compris en Haute-Volta (actuel Burkina Faso) dans toutes les colonies à l’exception notable de la Guinée-Conakry, où le syndicaliste Ahmed Sékou Touré et ses camarades ont massivement choisi le « non ». Il part donc vivre en Guinée et abandonnera Dakar pour Conakry.


Il retourne dans son pays natal en 1960, lorsque l’indépendance est proclamée. Il participe à la chute du président Maurice Yaméogo, est élu député aux premières législatives multipartites de 1970, mais est éliminé lors du premier tour de la présidentielle de 1978. En 1983, il doit trouver l’exil à Dakar, suite au coup d’Etat de Sankara. Il opte pour le Sénégal, où il occupe la chaire d’histoire de la fameuse université Cheick Anta Diop. Il rentre finalement au pays en 1992 pour reprendre part à la joute politique.


Il n’appartiendra à aucun gouvernement, n’occupera aucune fonction officielle à la tête d’une quelconque organisation internationale. Ce n’est pas qu’il n’ait pas été sollicité, bien au contraire, mais il a été, un homme libre dans ses engagements, se refusant à « se laisser absorber, asservir culturellement ».


Il a par ailleurs été l’une des têtes pensantes du Collectif contre l’impunité, fondé au lendemain de l’assassinat du journaliste Norbert Zongo, en Décembre 1998.


Car l’investissement de Joseph Ki-Zerbo était aussi intellectuel et culturel. Il a été président du Conseil africain et malgache pour l’enseignement supérieur, membre du Conseil exécutif de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) et aussi écrivain.


Il écrit des ouvrages sur le continent africain qui font aujourd’hui référence pour de nombreux étudiants :

http://www.grioo.com/blogs/hbg/index.php/2005/12/30/692-une-selection-dauteurs-afro-antillais-incontournables




En conclusion, quelques unes de ses maximes :

« il n’y a pas de développement clés en mains, mais clés en tête »,

« ce qui manque à l’Afrique, c’est une pensée stratégique et globale avec des objectifs précis »,

« on ne développe pas, on se développe »,

« sans identité, nous sommes un objet de l’histoire, un ustensile utilisé par les autres », et surtout

« si nous nous couchons, nous sommes morts ».