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[metis68]

La spiruline est utilisée en Afrique pour lutter contre les problèmes de malnutrition en supprimant les carences alimentaires.

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[Felicita]

L'algue de l'espoir

Beaucoup de fermes produisent de la spiruline en Afrique : très riche en protéines, cette plante permet de lutter efficacement contre la malnutrition et renforce les défenses vitales de l'organisme.

« Ma fille était souvent malade. Depuis qu'elle prend ce produit, elle se porte beaucoup mieux. » À presque 10 mois, le bébé de cette jeune Burkinabè ne pèse que 4 kg. Ses espoirs de guérison reposent sur la petite poudre verte qu'elle rajoute à la bouillie ou au tô de son bout de chou. Administrée aux enfants en carence alimentaire grave, la spiruline opère des miracles en Afrique.
Micro-algue bleu vert, elle était déjà connue des Aztèques, au Mexique, il y a trois mille ans. Dans les années 1940, un groupe de chercheurs européens en retrouve des traces chez les Kanembous, une ethnie des rives du lac Tchad. Sans être des plus riches, ils sont pourtant les seuls dans la région à ne pas souffrir de malnutrition. Leur secret ? Une étrange boue verte récoltée dans les eaux saumâtres et qui fait partie de leur alimentation quotidienne.
Connue sous le nom scientifique de cyanobactérie Arthrospira platensis, la spiruline est d'une richesse énergétique exceptionnelle : 60 % à 70 % de protéines, presque deux fois plus que le soja. Denise Ouédraogo, chef d'exploitation de la ferme de spiruline de Koudougou, au Burkina Faso, la recommande aux jeunes enfants et aux femmes enceintes. Tout comme le Dr Yaméogo, du centre de traitement ambulatoire sida de la Croix-Rouge de Ouagadougou. Ils n'hésitent pas à prescrire la spiruline à leurs patients. « Elle permet d'augmenter le confort nutritionnel », explique-t-il.
Plusieurs tests ont été effectués en Afrique, dont un au Foyer de charité de Bangui, en Centrafrique. Là-bas, on a mélangé 5 g de spiruline à de la sardine. Il s'agissait de prouver les effets des acides gras poly-insaturés sur des enfants atteints de kwashiorkor(*). Ces constituants lipidiques sont importants, notamment pour la formation et le maintien des membranes des cellules et de la peau. Les résultats sont remarquables : plus aucune trace d'oedèmes. Mieux, les enfants ont retrouvé l'appétit. Un enfant souffrant de malnutrition peut se rétablir avec 1 ou 2 g quotidiens de spiruline pendant six semaines.
Au Burkina, faute de moyens, « la spiruline est administrée comme complément alimentaire à tous les malades du sida qui n'ont pas accès au traitement antirétroviral », indique le Dr Yaméogo. Précision de Pélagie Sawadogo, chef d'exploitation de la ferme de spiruline de Loumbila : « Cela ne supprime pas le mal, mais contribue au renforcement du système immunitaire. » Même son de cloche du côté de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Pour le Dr Mohamed Hacène, son représentant au Burkina : « C'est une bonne approche. La spiruline a des effets bénéfiques sur la santé et rend de grands services aux malades très affaiblis, comme ceux qui souffrent du sida, mais il ne faudrait surtout pas en conclure qu'elle peut remplacer les antirétroviraux. »
Un Burkinabè infecté par le VIH devait débourser entre 50 000 et 80 000 F CFA (entre 76 et 122 euros) par mois pour un traitement antirétroviral. Depuis début mai, le prix a baissé, mais reste très élevé : entre 10 000 et 30 000 F CFA... dans un pays où le salaire moyen par mois équivaut à 50 000 F CFA. Un traitement à la spiruline exige un budget dix fois moindre. Un sachet de 25 g coûte aujourd'hui 550 F CFA, et une boîte de 70 gélules se vend à 2 500 F CFA.
Pour une promotion à grande échelle, l'OMS exige des études cliniques contrôlées. Mais « cela demande de gros moyens », murmure-t-on du côté des ONG. Résultat : pas l'ombre d'une analyse à ce jour. Cela n'empêche pas des ONG et des associations européennes comme Antenna Technologies et Technap de mettre en place des sites de production de spiruline autonomes dans de nombreux pays d'Afrique : Burkina Faso, Sénégal, Bénin, Centrafrique, Niger, Mali, Madagascar... « Il existe des dizaines de traitements de la malnutrition, mais aucun complément ne cumule autant de vertus thérapeutiques que cette algue microscopique », explique-t-on à Antenna. Une fois sa propre consommation satisfaite, l'Afrique se lancera-t-elle dans l'exportation de son « algue magique » ? En France, une boîte de 45 gélules de spiruline, utilisée pour la vitalité, la fatigue, la convalescence, la diététique du sportif, coûte environ 8 euros, quelque 5 000 F CFA. Un marché potentiel donc.

* Malnutrition grave. 230 millions d'enfants de moins 5 ans en souffrent aujourd'hui dans le monde, selon les chiffres de l'Unicef, et quelque 36 000 meurent chaque jour des effets combinés de la malnutrition et des maladies infectieuses et parasitaires.


jeune afrique.com 03/07/05