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Alain Anselin, Le refus de l'esclavitude...

 
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OGOTEMMELI
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MessagePosté le: Ven 09 Oct 2009 20:41    Sujet du message: Alain Anselin, Le refus de l'esclavitude... Répondre en citant

On était à la dédicace du nouvel ouvrage d'Alain Anselin (sorti le 08 octobre aux édition DUBOIRIS) qui s'est déroulée ce vendredi (16h-19h) à la maison Présence Africaine. Encore du très grand travail du génialissime Anselin!!!!

Le refus de l'esclavitude
de Alain Anselin, Paris, Editions Duboiris, 2009, 214p


Alain Anselin a écrit:
Notre histoire commence au siècle de Soundiata dans les étendues de sables et de savanes du Sahel par un hymne, aussi médiéval qu'africain, à la liberté. Ne pas commencer par là serait se priver de comprendre l'histoire de l'Afrique.

Ensuite d'y comprendre l'histoire de la traite. Et enfin, l'histoire des résistances à la traite. Car les résistances à la traite et à l'esclavage, qui sont l'âme de l'histoire de la Caraïbe, commencent en Afrique.

Le capitaine du Notre Dame de Bonne Garde, un bateau négrier destiné à approvisionner en bras serviles la Martinique, consigne dans son Journal de Bord le rédcit d'une révolte lancée en face des côtes du Dahomey par des "Nègres (...) qui s'étaient déferrés pour se tirer de l'esclavitude et ne se se trouvant pas contents de se tirer eux-mêmes, (...) voulaient suborner les autres."

Nous avons gardé pour titre de cette étude ce mot, parce que ce petit livre n'est rien d'autre qu'un hommage au Refus de l'Esclavitude qui a animé, à bord comme à terre, pendant plus de trois siècles, toutes les rébellions de dizaines de milliers de captifs africains destinés à l'esclavage de la plantation amricaine et caribéenne.

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Les Panafricanistes doivent s'unir, ou périr...
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OGOTEMMELI
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MessagePosté le: Ven 09 Oct 2009 20:43    Sujet du message: Répondre en citant

Note de l'éditeur a écrit:
A partir d'un travail de documentation impressionnant, Alain Anselin lève le voile sur un pan méconnu et peu mis en valeur de l'histoire de la traite.

Loin des idées reçues sur les bénéfices que les Africains auraient eux-mêmes tiré du commerce triangulaire, on découvre plutôt comment ils ont d'abord livré des combats acharnés contre les négriers, préférant souvent la mort à la déportation.

Avec ce livre, l'auteur démonte la manipulation historique visant à rendre les Africains largement responsables du sort que les négriers ont infligé aux esclaves dans les Amériques et les Caraïbes. Cette relecture des événements historiques permet de comprendre pourquoi l'héroïsme des résistants africains à l'esclavage a été très fortement occulté. Un ouvrage de référence sur le sujet.

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Yedidia
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MessagePosté le: Sam 10 Oct 2009 00:03    Sujet du message: Répondre en citant

Il manquait ce travail sur les résistances à la traite !
Il y a encore un gros livre à écrire sur les résistances africaines à la pénétration et à la colonisation.
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... si possible!
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PIPO .PCX
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MessagePosté le: Sam 10 Oct 2009 06:12    Sujet du message: Répondre en citant

OGOTEMMELI a écrit:
Note de l'éditeur a écrit:
A partir d'un travail de documentation impressionnant, Alain Anselin lève le voile sur un pan méconnu et peu mis en valeur de l'histoire de la traite.

Loin des idées reçues sur les bénéfices que les Africains auraient eux-mêmes tiré du commerce triangulaire, on découvre plutôt comment ils ont d'abord livré des combats acharnés contre les négriers, préférant souvent la mort à la déportation.

Avec ce livre, l'auteur démonte la manipulation historique visant à rendre les Africains largement responsables du sort que les négriers ont infligé aux esclaves dans les Amériques et les Caraïbes. Cette relecture des événements historiques permet de comprendre pourquoi l'héroïsme des résistants africains à l'esclavage a été très fortement occulté. Un ouvrage de référence sur le sujet.


Ne me flinguez pas, mais dans mon fort intérieur je reste dubitatif; peut-être y a-t-il eu des résistances familiales; mais je doute fort qu'il y ait eu une véritable résistance organisée et massive, condition qui aurait été nécessaire pour faire barrage à l'esclavage.

Et le même scénario est en train de se produire aujourd'hui sous nos yeux avec l'exploitation de l'afrique et son maintien forcé au sous développement. Et Seule une résistance organisée et massive peut arrêter le processus. Mais en sommes-nous capable?

Dans 4 siècles, nos descendants pourront aussi sortir les archives de grioo.com et autres pour démontrer qu'il y avait eu une résistance; mais "ceux qui savent voir", sauront que la meilleure ressource africaine (la majorité des gens de ce site) de cette époque là (la nôtre) pactisait et renforçait l'enemie.
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OGOTEMMELI
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MessagePosté le: Sam 10 Oct 2009 08:35    Sujet du message: Répondre en citant

PIPO .PCX a écrit:
Ne me flinguez pas, mais dans mon fort intérieur je reste dubitatif; peut-être y a-t-il eu des résistances familiales; mais je doute fort qu'il y ait eu une véritable résistance organisée et massive, condition qui aurait été nécessaire pour faire barrage à l'esclavage.

Et le même scénario est en train de se produire aujourd'hui sous nos yeux avec l'exploitation de l'afrique et son maintien forcé au sous développement. Et Seule une résistance organisée et massive peut arrêter le processus. Mais en sommes-nous capable?

Dans 4 siècles, nos descendants pourront aussi sortir les archives de grioo.com et autres pour démontrer qu'il y avait eu une résistance; mais "ceux qui savent voir", sauront que la meilleure ressource africaine (la majorité des gens de ce site) de cette époque là (la nôtre) pactisait et renforçait l'enemie.

Personne ne va te flinguer, mais tu ferais mieux d'aller regarder quand même le travail qui se fait sur ce sujet, afin de conforter ton opinion ; ou de l'amender...

Pour l'époque immmédiatement contemporaine, c'est bien de cela que parlait Yedidia : il reste aussi à faire le boulot, afin que des distraits comme toi ne focalisent pas sur les "élites" fabriquées par la colonisation, sans voir celles qu'elle a combattues et éliminées avant de nous fourguer les Eyadéma, Houphouët, Senghor, Sassou, Bongo, Bokassa, Biya, Deby, etc.

On voit surtout que les mêmes causes produisent les mêmes effets : quand l'adversaire est miltairement plus fort, il n'est pas inimaginable qu'il gagne la guerre. Comme la France des Fedherbe et autre Gallieni contre l'Afrique des Lat Dior Diop, Samory Touré. Comme les conquistadors ibériques contre les autochtones des Amériques...

Quand l'école afgricaine est encore celle imaginée par Jules Ferry, il n'est pas étonnant qu'elle fabrique des cohortes d'aliénés idolâtres de leurs bourreaux, larbinistes jusqu'à la moelle...

Bref, à moins que pour toi une résistance n'ait de sens que lorsqu'elle est victorieuse : comme à Saint-Domingue transformée en Ayiti par Toussaint Louverture, Dessalines et tant de valeureux autres...

Mais si les résistants devaient résister exclusivement lorsqu'ils sont sûrs de vaincre, alors les ancêtres des Africains-Caribéens et autres Africains-Américains n'auraient pas marronné, n'auraient pas incendié des plantations, empoisonné des Béké, harcelé la société plantationnaire jusqu'à ce que leurs descendants puissent lui survivre ; tant bien que mal...et qu'une lueur d'espoir restât toujours allumée, vacillante, mais suffisante pour mobiliser d'infimes énergies, de siècles en siècles...

L'histoire de la résistance héroïqsue des Nègres à leur domination séculaire est au moins aussi riche d'enseignements que celles des trahisons individuelles, familiales ou catégorielles, qui n'ont évidemment pas manqué. Sauf que les résistances sont trop souvent tues par ceux qui n'ont pas intérêt à ce qu'elles facent culture et triomphent DEMAIN des inévitables velléités de traîtrise...

Il n'y a pas que des Mobutu ou autres Tsvangiray, il y a aussi des Nkrumah et autres Lumumba : depuis des siècles, et il y en aura encore pendant des siècles ; aussi longtemps que nécessaire...

On gagne, ou on gagne!

NOTA : sur la taille des entreprises de résistances, l'empire de Samory Touré était plus vaste que 5 Frances métropolitaines et entièrement voué à combattre les colons. avant cela, la République des Lebou, ou celle de NGOLA JANGA, n'étaient pas de simples hameaux familiaux...
A contrario, ce furent des groupuscules de coupeurs de route et autres "brigands", "fripons" à la manière de Jen Ken qui ont prospéré au fil de décennies, notamment dans le Delta du Niger, pour constituer progressivement des aristocraties négrières déguisées en "royaumes", "élites" africains tranfiquants de bois d'ébène...
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ARDIN
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MessagePosté le: Sam 10 Oct 2009 10:38    Sujet du message: Répondre en citant

OGOTEMMELI a écrit:
PIPO .PCX a écrit:
Ne me flinguez pas, mais dans mon fort intérieur je reste dubitatif; peut-être y a-t-il eu des résistances familiales; mais je doute fort qu'il y ait eu une véritable résistance organisée et massive, condition qui aurait été nécessaire pour faire barrage à l'esclavage.

Et le même scénario est en train de se produire aujourd'hui sous nos yeux avec l'exploitation de l'afrique et son maintien forcé au sous développement. Et Seule une résistance organisée et massive peut arrêter le processus. Mais en sommes-nous capable?

Dans 4 siècles, nos descendants pourront aussi sortir les archives de grioo.com et autres pour démontrer qu'il y avait eu une résistance; mais "ceux qui savent voir", sauront que la meilleure ressource africaine (la majorité des gens de ce site) de cette époque là (la nôtre) pactisait et renforçait l'enemie.

Personne ne va te flinguer, mais tu ferais mieux d'aller regarder quand même le travail qui se fait sur ce sujet, afin de conforter ton opinion ; ou de l'amender...

Salut PIPO .PCX
Si jamais tu te retrouves dans la ville de Liverpool, n'hesites surtout pas a faire un tour au Musee International de l'Esclavage; tu seras surpris.
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PIPO .PCX
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MessagePosté le: Sam 10 Oct 2009 11:51    Sujet du message: Répondre en citant

ARDIN a écrit:
Salut PIPO .PCX
Si jamais tu te retrouves dans la ville de Liverpool, n'hesites surtout pas a faire un tour au Musee International de l'Esclavage; tu seras surpris.


Merci Ardin; je ne manquerai pas; une petite recherche sur Google me donne déjà un avant goût.
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Nubian
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MessagePosté le: Mer 21 Oct 2009 14:06    Sujet du message: Répondre en citant

" C'est précisément en face de l'ile à terre sur la presqu'île de Dakar que s'inventa la république Lebou contre le trafic négrier" p28

Alain anselin
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OGOTEMMELI
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MessagePosté le: Jeu 22 Oct 2009 12:40    Sujet du message: Répondre en citant

J'aurai beaucoup à (re)dire sur cet ouvrage d'Anselin, mais ne le ferai pas forcément ici où je me limiterai à essayer de rapporter l'essentiel du propos de l'auteur : comme on dit, pour critiquer, encore faut-il exposer de quoi il est question, en essayant de le faire du mieux possible...

Il y a donc eu de nombreuses résistances africaines aux déportations négrières, dit Anselin ; lesquelles résistances sont précurseuses de celles survenues sur l'Autre-Rive. En conséquence, la connaissance des unes peut éclairer la compréhension des autres...
Cette connaissance suppose la mobilisation, aussi bien des sources (orales) africaines que celle des sources européennes. Cependant, l'auteur n'a eu accès qu'à des sources nantaises relatives à des expéditions du XVIIIè siècle...

Compte tenu de ce que le port négrier de Nantes a affrété près de la moitié des expéditions françaises (estimées à 1425/3343 par Jean Mettas) de ce Siècle des Ténèbres, Anselin considère qu'une analyse des résistances africaines fondée sur l'exploitation des archives nantaises permet de se faire une idée générale des "résistances africaines à la traite négrière" ; d'où son sous-titre...

Sur ce point précis, et bien d'autres, de l'extrapolation du cas nantais du XVIIIè siècle au cas général de TOUTES les expéditions, à TOUTES les périodes, je ne suis pas du tout d'accord avec l'auteur. C'est pourquoi je choisis de réduire son étude au strict domaine de son espace-temps : Les résistances africaines aux expéditions nantaises du XVIIIè siècle...

Sur les raisons de cette restriction stricto sensu, je développerai mes arguments en d'autres lieux. Il suffit de rappeler ici que :
- les déportations négrières ont commencé au XVè siècle, dans des ciconstances qui ont évolué jusqu'au XVIIIè siècle ; les résistances ayant évolué également en fonction desdites circonstances...
- le seul port de Liverpool compte presque autant d'expéditions au XVIIIè siècle que toute la France, dont Nantes ne représente même pas la moitié. Ce qui limite, au moins statistiquement, la portée représentative du cas nantais...
- la position particulière de la France dans l'économie des déportations négrières, telle qu'elle n'a JAMAIS occupé une position dominante sur les côtes africaines ; se débrouillant (très bien...) à la périphérie des grandes puissances négrières que furent respectivement le Portugal/Espagne, la Hollande, la Grande-Bretagne et le Brésil...
- ce rôle périphérique des expéditions négrières françaises en Afrique surdétermine les modalités (conjoncturelles ou structurelles) des résistances africaines rencontrées par les négriers français ; lesquelles ne furent pas forcément du même type que celle opposée par le Roi Amador aux Béké portugais de Sao Tome, dès la fin du XVIè siècle...
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OGOTEMMELI
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MessagePosté le: Sam 24 Oct 2009 02:10    Sujet du message: Répondre en citant

Le propos essentiel d'Alain Anselin consiste (rapidement) en ceci :

1/ L'histoire des sociétés humaines obéit à une même loi de rapport de forces partout, en tout temps ; elle consiste dans la lutte des Dominés contre les Dominants. Quelque soit le discours idéologique sur la Liberté (cf. Charte du Manden, 1235) prôné par ces derniers, leurs pratiques sociales sont souvent en contradiction avec ce discours ; lesquelles contradictions culminent dans (pour ainsi dire) la "Lutte des Classes".
[A noter que le marxiste Claude Meillassoux est l'une des sources qu'a privilégiées Anselin dans son entendement de l'histoire de l'esclavage en Afrique Noire...]

2/ L'Afrique (aussi) a connu toutes les formes de servitude humaine, évidemment y compris l'esclavage ; celui-ci étant une forme particulière (et, somme toute, banale) d'exploitation des Dominés par les Elites. L'organisation de l'économie des déportations négrières procède ainsi d'une coalition des Elites européennes avec les Elites africaines, en vue d'exploiter les masses africaines comme marchandise anthropomorphe...
[A noter que sur ce point, Anselin se fonde beaucoup sur les travaux d'Ibrahima Thioub, une sorte de clône tropicalisé d'Olivier Pétré-Grenouilleau, qui sévit à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar.]

3/ Les résistances africaines s'entendent donc comme résistances des captifs, figures emblématiques des Dominés, contre cette coalition transatlantique d'élites cupides, mercantilistes ; aussi bien européennes qu'africaines.

Nota : alors que les trois premiers points ci-dessus constituent plutôt le background du discours d'Alain Anselin, les points suivants constituent la matière véritable de ce discours, là où se trouve la valeur ajoutée de ce travail. Bien entendu, si comme je le crois, le background est très problématique, alors la valeur ajoutée du discours pâtit nécessairement de l'instabilité de ses fondements épistémologiques...

4/ Ces résistances sont globalement de deux sortes : à terre (au départ, ou lors d'escales africaines), et à bord.
Bien entendu, les livres de bord des archives nantaises donnent davantage de renseignements relatifs à des résistances à Bord, et parfois lors d'escales africaines. Tandis que pour les résistances à Terre, il aurait fallu mobiliser d'autres sources, malheureusement fort peu disponibles. C'est pourquoi l'auteur s'en est remis principalement aux travaux de la regrettée anthropologue camerounaise Lucie Mami Noor Nkake portant sur les témoignages de descendants de captifs africains ayant échappé aux déportations négrières sur la Côte des Esclaves.

5/ Les résistants sont donc généralement des captifs embarqués, en voie d'embarquement, ou ayant échappé aux déportations. Les sources consultées par l'auteur font très rarement état de souverains africains ayant résisté, ayant organisé la résistance de leurs concitoyens. Nonobstant, le cas d'un certain "Roi Saa" est rapporté ; un bâtisseur de fortifications autour de son territoire, en vue d'empêcher les campagnes de razzias menées par les Elites d'Abomey...

6/ La coalition entre Elites africaines et européennes a produit des "corps sociaux" sur les côtes africaines, spécialisés dans l'économie des déportations négrières ; marquant indéniablement son institutionnalisation dans les sociétés africaines partenaires des négriers européens : il s'agit notamment du Yovogan et du Mafouk, qui sont de véritables "ministres du commerce" (triangulaire) avec les Blancs...

7/ Cette coalition peut être également saisie dans des pratiques comme l'envoie en "stage" en Europe de fils d'Elites africaines auprès de leurs partenaires européens ; ou encore l'inscription dans les armoiries d'un royaume africain du dessin d'un bateau négrier...
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Merikama
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MessagePosté le: Dim 25 Oct 2009 15:16    Sujet du message: Répondre en citant

OGOTEMMELI a écrit:
7/ Cette coalition peut être également saisie dans des pratiques comme l'envoie en "stage" en Europe de fils d'Elites africaines auprès de leurs partenaires européens ; ou encore l'inscription dans les armoiries d'un royaume africain du dessin d'un bateau négrier...

Salut le frère. En fait si j'ai bien compris, ce livre ne nous sort vraiment pas de l'imbroglio épistémologique de l'historiographie européenne de la mise en esclavage des Nègres. Vraiment dommage alors de la part d'un chercheur de la trempe d'Alain Anselin. Embarassed
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"L’esclave qui n’est pas capable d’assumer sa révolte ne mérite pas que l’on s’apitoie sur son sort. Cet esclave répondra seul de son malheur s’il se fait des illusions sur la condescendance suspecte d’un maître qui prétend l’affranchir". THOMAS SANKARA

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OGOTEMMELI
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MessagePosté le: Dim 25 Oct 2009 19:35    Sujet du message: Répondre en citant

Parent, Alain Anselin est effectivement un génialissime chercheur en archéologie linguistique, dont il propose un aperçu dans cet ouvrage avec (par exemple) son analyse de l'histoire du mot pour "cheval" dans les langues soudaniennes...

En mobilisant sa science pour l'étude du corpus des mots soudaniens relatifs aux diverses formes africaines de servitude humaine (ba dolo, djam, ka-nou-mon, etc.), il aurait très certainement déblayé du terrain...

Bref, on peut juger son livre sur le background théorique assez proche des thèses grenouilliennes. Mais, il vaudrait certainement mieux regarder surtout ce qu'apporte de nouveau Alain Anselin à travers ce travail : l'une des très rares études sur les résistances africaines au Yovodah...

Anselin est allé fréquenter les archives nantaises (où il a croisé Amady Ali Dieng, l'octogénaire compagnon de Cheikh Anta Diop) pour écrire son livre, tandis que certains se contentent trop souvent exclusivement de sources secondaires...

Ainsi, une nouvelle brèche est ouverte sur la connaissance "exhaustive" de l'histoire des déportations négrières. Maintenant, chacun est libre d'être d'accord ou pas avec l'interprétation qu'a faite l'auteur des informations de première main qu'il a mises à disposition : même en exprimant un désaccord, c'est toujours du travail de réflexion qui avance...
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MessagePosté le: Mer 28 Oct 2009 07:47    Sujet du message: Répondre en citant

QUESTION DES SOURCES

L'auteur a eu clairement conscience de certaines "limites" imposées par les sources qu'il a mobilisées. Mais, il me semble que d'autres difficultés, d'ordre plus général, posées par les archives nantaises des bateaux négriers lui ont échappé...
Alain Anselin a écrit:
Notre souci sera de ne pas tomber dans les travers qui feraient du point de vue de l'historien l'otage du livre de compte, sous-jacent même dans la dénonciation du trafic, ou dans son explication. Notre souci sera de retrouver le point de vue du captif sur le cauchemar triangulaire.
[...]
Le point de vue du captif apparaît souvent dans les archives écrites ou orales émanant des dominants, subordonné au point de vue de ceux-ci.
[pp.26-27]

Un très bel ouvrage de Karine Delaunay a fait le point sur l'ensemble des problèmes posés par les récits de voyages négriers et autres journaux de bord lorsqu'on les considère comme du matériau historiographique : Voyages à la Côte de l'Or (1500-1750) - Etude historiographique des relations de voyage sur le littoral ivoirien et ghanéen, éd. AFERA, 1994.

1/ Les livres de bord sont des documents officiels produits par des employés des compagnies négrières. A ce titre, ces documents livrent une version officielle des événements qu'ils relatent ; laquelle en tout état de cause est vouée à préserver les intérêts (économiques et stratégiques) des armateurs négriers...

2/ Depuis la fameuse "Controverse de Valladolid", l'usage et même parfois la loi européenne en matière de déportation négrière imposait que les compagnies négrières :
- s'approvisionnent exclusivement par achat de captif nègres ; sans recourir aux razzias
- n'achètent que des captifs nègres qui étaient déjà des esclaves dans leur propre société africaine ; ce qui les rendait par conséquent aliénables (achetables et vendables)...

3/ Une part considérable des déportations négrières a été le fait d'expéditions illégales, dites "interlopes" ; dont les récits de voyage et autres livres de bord reposent (quand ils existent) dans les archives familiales des protagonistes européens...

De ce qui précède, il résulte que se fonder seulement sur les livres de bord officiels pour appréhender les réistances africaines, c'est comme de rechercher dans les documents officiels de TOTALFINAELF, BOLLORE, AREVA, les principaux éléments de connaissance des trafics d'armes, rébellions ou coups d'Etat fomentés en Afrique par ces multinationales, dont en principe l'activité officielle n'est en rien liée à ce type de pratiques maffieuses...

L'échos persistant des résistances africaines dans ces documents négriers officiels est à mettre en rapport avec le fait qu'au XVIIIe siècle le "risque de révolte" était couvert par les polices d'assurance contractées par les armateurs...


P.S.
Voici le line d'intéressantes chroniques de révoltes relevées par Dieudonné Gnammankou dans la presse russe de l'époque (1730-1750) : http://www.grioo.com/forum/viewtopic.php?t=5596
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OGOTEMMELI
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MessagePosté le: Lun 02 Nov 2009 05:12    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
1/ Les livres de bord sont des documents officiels produits par des employés des compagnies négrières. A ce titre, ces documents livrent une version officielle des événements qu'ils relatent ; laquelle en tout état de cause est vouée à préserver les intérêts (économiques et stratégiques) des armateurs négriers...

J'ai vraiment pris conscience de ce point en lisant le récit de Ludwig Römer "marchand d'esclaves sur la côte ouest-africaine : Le Golfe de Guinée 1700-1750, éd. L'Harmattan, 1989

Ce négrier m'a fait comprendre que l'autocensure sur les réelles pratiques négrières des compagnies européennes était de rigueur parmi leurs employés :

L.F. Römer a écrit:
Voici donc le récit de la Côte guinéenne avec des descriptions que je n'ai trouvé traitées par aucun autre auteur. Bosman, que je juge le meilleur ayant traité de ce sujet, n'indique rien ou peu de ces choses ; quant aux autres auteurs leurs écrits sont remplis de mensonges.[...]
Je voudrais cependant dire une chose à ces messieurs de la Côte qui sans doute me blâmeront d'avoir décrit ces affaires trop clairement, et si quelques-uns de ceux qui m'ont connu sur la Côte vivent encore, ils m'accuseront d'avoir trahi ma promesse, à savoir qu'une fois réchappé je ne devais plus jamais penser à la Côte.

Pendant quelques années qui ont suivi mon retour, j'ai également été de l'avis de ceux qui pensent qu'on ne peut traiter de ce sujet sans offenser les convenances et la décence.

[p.224]

Rappelons que Römer est un allemand qui a bossé pour les Danois (Compagnie des Indes et de la Guinée) dans leur fort de Christianborg, pendant une décennie ; des années 1740 à 1749.

C'est en 1760 qu'il publia l'ouvrage cité ci-dessus ; soit longtemps après être rentré d'Afrique, et s'être désengagé de la Compagnie.
Ainsi la liberté de ton qu'il se permet dans une certaine mesure procède de qu'il n'est plus un employé des négriers au moment où il rédige son livre. Mais cette liberté ne va pas au délà de certaines limites, car le fond du propos de Römer est bel et bien "d'indiquer comment nos affaires sur la Côte auraient pu être mieux organisées"...

Or, en ce milieu du XVIIIè siècle, les mouvements abolitionnistes métropolitains battent leur plain ; ce qui met une "pression" supplémentaire sur les négriers écrivains, qui n'ont surtout pas intérêt à prêter le flanc aux critiques acerbes, voire aux velléités procédurières, des abolonnistes. En sorte qu'il n'y a pas plus "censuré" que les récits négriers du XVIIIè siècle, lesquels affichent une unanimité de façade sur les modalités très légalistes des pratiques négrières sur les côtes africaines, en flagrante contradiction avec la réalité ultra mafieuse de ces pratiques...

Pour briser cette unanimité, il suffit d'en référer aux récits non-officiels, notamment ceux des négriers "privés" qui ne bossaient pour aucune compagnie à charte, et ont dealé pour leur propre compte : c'est le cas très fameux de Canot (XIXè siècle), dont le récit rédigé par un journaliste abolitionniste est aux antipodes des cachoteries des livres de bord. C'est aussi le cas du "Journal de bord" de Jean-Pierre Plasse (daté de 1760) publié par l'un de ses descendants, près de 250 ans après son voyage sur les Côtes, dont les armateurs étaient un consortium privé...
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MessagePosté le: Mar 10 Nov 2009 22:09    Sujet du message: Répondre en citant

L.F. Römer a écrit:
Les Français n'ont pas du tout d'établissements sur la Côte guinéenne, sauf vers la rivière Sénégal et près de Fida [Ouidah] sur la Côte intérieure, emplacement sans aucune importance ; ces dernières années ils ont pourtant de grands mouvements de navires. Souvent ils ont essayé de s'établir sur la Côte de l'Or, mais ils n'ont pas usé des moyens adéquats ; voici comment cela s'est passé en 1744, quand ils ont voulu s'installer à annamaboe.

Ils pensaient qu'il suffisait d'entretenir un garçon nègre d'Annamaboe, fils de Corrantrin, pendant quelques années à Paris comme un prince, en l'appelant le Prince Empereur de la Côte de Guinée.

On constate l'inexactitude du rapport fait par le capitaine qui l'avait amené jusqu'à Paris, au fait que Fanti où est situé Annamaboe, n'est nullement le plus grand empire de la Côte de l'Or. Il y a, en outre, en Fanti, des villes bien plus importantes qu'Annamaboe, et dans la ville d'Annamaboe même des cabucers ou des rois qui sont dix fois plus puissants que ce Corrantrin dont le fils fut amené en France par le capitaine français.
[pp52-53]

Je produis cet extrait au soutien de ce que les France était une puissance négrière de second plan sur les côte africaines ; ce qui a déterminé dans une large mesure la manière de procéder de ses négriers, notamment telle qu'ici décrite :

Arrivée parmi les derniers sur les côtes africaines, la France ne pouvait y imposer sa loi dans un système économique des déportations négrières qui avait déjà plus de deux siècles avant la création de la première compagnie négrière française (celle de Saint-Malo)...

Les principaux points stratégiques étaient occupés par le Portugal (à Sao Tome et dans le bassin Kongo) et par les Pays-Bas dans le Golfe de Guinée (Côte de l'Or + Côte des Esclaves). Les Français (et les Anglais) se sont donc rabattus sur les côtes sénégambiennes ( et quelques sites secondaires du Golfe de Guinée) ; lesquelles ne jouaient plus qu'un rôle périphérique à partir de la fin du XVIIè siècle, après avoir été le premier pôle des déportations négrières entre 1450 et 1550, au temps où l'archipel du Cap Vert et Madère étaient les centres névralgiques du "Commerce de Guinée". On se rappelle d'ailleurs que le tout premier fort crée en Afrique Atlantique était celui d'Arguin (1460) sur les côtes mauritaniennes, à une époque où Madère était le premier exportateur de sucre en Europe...

Ainsi, n'ayant jamais pu occuper une position monopolistique en Afrique, les Français ont été souvent en situation précaire dans leurs négociations avec les protagonistes négriers des côtes africaines ; ceux-ci fussent-ils Européens, Eurafricains, voire Négro-africains. Disposant très rarement de moyens militaires conséquents pour razzier, et étant souvent obligés de se conformer aux règles de monopoles imposées par les véritables puissances négrières du cru, les Français se sont progressivement spécialisés dans le recrutement d'affidés locaux, et autres complices intéressés, pour essayer de sortir leur épingle du jeu...

L'extrait de Römer donne une idée de la façon dont procédaient les Français pour s'allier des collaborateurs locaux : les capitaines négriers français étaient réputés pour affubler n'importe quel quidam des côtes africaines de titres farfelus, afin d'inciter leurs commanditaires royaux français à investir davantage de moyens militaires et logistiques dans "le Commerce de Guinée". Ce que la Couronne française ne fit jamais, aussi bien par avarice qu'en raison de choix stratégiques telles que les Français oeuvraient surtout à renforcer leur position géostratégique en Europe continentale, face à des concurrents qui avaient engagé d'énormes moyens sur les mers, en Afrique et aux Amériques...

Bref, de la même manière qu'au XXè siècle le prestidigitateur Valery Giscard D'Estaing transforma un bidasse de l'armée coloniale française en Empereur de Centrafrique (Jean Bedel Bokassa), ses prédécesseurs des siècles négriers convertissaient tout nègre docile et surtout cupide en "Roi", "Vice Roi", etc. Ce sont ces pantins que l'historiographie française de la "Traite négrière" nous sert sempiternellement comme étant des "Elites" africaines qui étaient "les maîtres du jeu" en Afrique...

Cette propagande négrière avait par ailleurs l'insigne avantage de permettre aux compagnies négrières de sauver les apparances, en respectant officiellement les lois imposant que le trafic négrier fût entrepris uniquement avec des autorités africaines légitimement reconnues comme telles...par ceux qui en avaient le plus grand besoin pour poursuivre leurs intérêts sur les côtes...

"Le Roi Pite à Mesurade", "le roi nègre André de Saint Pau" et son fils nommé "Petit Marabout", ainsi que les "courtiers" nommés "Marabous, Grand Louïs, Grand Cazaly et le Petit Cazaly" ; "Grand la Paix, nègre, prince de Mesurade" (Anselin, pp105-106) sont autant de complices farfelus que se fabriquent les négriers français sur les côtes sénégambiennes : les lointains ancêtres systémiques de nos Eyadema, Bongo, Bokassa, Sassou, qui n'étaient rien avant que la France n'en fasse des "dictateurs" ; et sont devenus "Tout" (notre malheur) par la suite, au fil de décennies de loyaux services rendus à leurs parrains contre de considérables prébendes...

De tout ce qui précède, il résulte qu'Alain Anselin a trop facilement accepté la légende des "élites" africaines coalisées avec leurs homologues européennes pour exploiter les masses nègres :
1/ d'une part, on ne comprend pas pourquoi cette coalition n'eût pas également pour but d'exploiter les masses blanches d'Europe

2/ d'autre part, la sociologie des personnels des bateaux négriers montre bien que les équipages n'étaient pas constitués d'élites européennes. Or, ce sont ces équipages (parfois formés de soldats démobilisés, de vagabonds, malfrats et autres repris de justice) qui dealaient avec leurs complices locaux sur les côtes africaines...

3/ enfin, tandis qu'aucune élite blache ne s'est jamais retrouvée esclave en Amérique, de très nombreux complices africains des négriers européens furent déportés à leur tour comme esclaves aux Amériques. Ce qui atteste bien que la situation socio-professionnelle d'un Nègre dans l'économie des déportations négrières ne pouvait guère le protéger indéfiniment du risque de finir "bois d'ébène" : une condition à quoi l'exposait systémiquement le simple fait qu'il fût Nègre...

En conséquence, la théorie de la "lutte des classes" me semble peu adéquate pour décrire ce qui avait toutes les caratéristiques structurelles d'une "Lutte des Races" : le simple fait d'être Nègre exposait n'importe quel Africain à devenir "Bois d'Ebène" ; indépandamment de sa complicité avec, ou de son hostilité au système européen des déportations négrières...
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MessagePosté le: Jeu 12 Nov 2009 04:47    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
Ainsi, n'ayant jamais pu occuper une position monopolistique en Afrique, les Français ont été souvent en situation précaire dans leurs négociations avec les protagonistes négriers des côtes africaines ; ceux-ci fussent-ils Européens, Eurafricains, voire Négro-africains. Disposant très rarement de moyens militaires conséquents pour razzier, et étant souvent obligés de se conformer aux règles de monopoles imposées par les véritables puissances négrières du cru, les Français se sont progressivement spécialisés dans le recrutement d'affidés locaux, et autres complices intéressés, pour essayer de sortir leur épingle du jeu...

D'aucuns connaissent le fameux cas du "Prince Aniaba" d'Assinie accueilli (en stage de Bountyisme) à la cour du Roi Louis XIV, où il a été introduit par des investisseurs négriers français désireux d'intéresser le Roi Soleil à une implantation plus conséquente sur les Côtes de Guinée (voici l'article de Grioo qui en parle)...

Mêmes les arguments religieux seront mobilisés pour convaincre la Couronne française d'engager davantage de moyens étatiques (infrastructurels, militaires, administratifs, etc.) en Afrique...

Par ailleurs, une monographie très instructive a été faite par Gérard Chouin sur le cas dit du "Royaume Eguafo" : Eguafo, un royaume africain "au coeur françois (1637-1688) - Mutations socio-économiques et politique européenne d'un Etat de la Côte de l'Or (Ghana) au XVIIè siècle, éd. AFERA, 1998.

Ici encore, le Français en général et l'auteur en particulier, veut faire croire qu'Eguafo, un village de la Côte de l'Or, aurait été un "royaume africain" ; sans pouvoir en apporter aucune preuve convainquante dans son ouvrage. En fait, les habitants de ce village qui était à environ 11 kilomètres des côtes, avaient établi un campement côtier de pêcheurs et de caboteurs (Akitekyi), qu'ils entreprirent de transformer en port négrier, en vue de concurrencer l'immense fort hollandais d'El Mina, dont les villages africains alentours monopolisaient le commerce des marchandises européennes dans l'hinterland de la région ; au détriment de localités un peu plus éloignées du Fort comme l'était Eguafo...

En tout état de cause, cette monographie donne à voir comment les tentatives d'implantations françaises sur les côtes africaines étaient particulièrement périlleuses, étant sévèrement combattues par les vrais barrons du bled qu'étaient en l'occurrence les Hollandais. Lesquels n'ont pas hésité à lever à maintes reprises une armée indigène managée par des officiers blancs, afin de mater les Français et leurs alliés. C'est l'occasion de souligner que, certes les forts européens n'avaient pas un nombreux personnel blanc (rarement une vingtaine), mais ceux-ci pouvaient recruter du personnel local, lui distribuer des rames, l'encadrer, en vue de combattre tel élite africaine hostile et d'imposer telle autre docile. Or, comme la France n'avait (presque) pas de fort, elle pouvait beaucoup plus difficlement entreprendre ce "travail de terrain" auquel étaient rompus Portugais et Hollandais (voire Danois, Anglais plus tard ; et autres Suédois)...

Pour notre propos, la conséquence majeure de cette situation structurellement faible de la France sur les côtes africaines réside en ce que les négriers français :
- pouvaient très rarement essuyer des révoltes ou résistances à terre ; puisque justement ils n'avaient pas pied-à-terre ;
- rencontraient rarement des protagonistes hostiles, car ayant la mobilité que procurait leur navire négrier (par opposition à l'inertie d'un fort négrier), il leur suffisait d'éviter les endroits de la côte où on n'en voulait pas ("Côte des Males Gens", par exemple) ;
- accostaient uniquement là où ils avaient des affidés locaux, voire là où ils étaient plus ou moins tolérés...

Pour ces raisons, les récits des négriers français, qui pour l'essentiel connaissaient l'Afrique seulement depuis leur bateau, sont des sources très limitées pour une étude approfondie des "résistances africaines à la traite négrière". Pour la période considérée, faute de disposer de sources africaines, il conviendrait de compléter les archives françaises avec celles des Etats européens massivement implantés sur les côtes africaines, dont certains y possédaient des colonies insulaires depuis le XVè siècle : l'histoire des résistances à l'égard de ces implantations est très différente de celle à l'égard des navires et de leurs personnels...

Römer a écrit:
C'est une chose certaine qu'un navire peut faire du commerce sur la Côte guinéenne avec moins de frais qu'une forteresse. Si un capitaine de navire voit qu'il n'y a pas de commerce pour lui à un endroit, ou qu'il se fait trop lentement, il peut aller ailleurs. Par contre, un fort doit se résigner à son sort et attendre qu'une meilleure conjoncture se présente là où il se trouve.

Cependant, si une nation n'a pas de factor sur la Côte (comme c'est le cas des Français), un capitaine rencontrera plus de diffucultés sur la Côte de l'Or. Les Nègres, ainsi que les Européens sur la Côte, considèrent que les Français n'y appartiennent pas, et ils doivent, par conséquent, payer plus cher que les autres ce qu'ils veulent acheter.

[p.174]

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MessagePosté le: Sam 14 Nov 2009 08:31    Sujet du message: Répondre en citant

Alain Anselin a rapidement cité Walter Rodney dans son ouvrage ; peut-être s'est-il fondé sur son travail pour proposer sa théorie de la coalition des élites. En tout cas, Rodney indique très clairement que la collaboration des rois et nobles africains était indispensable à l'établissement de l'économie des déportations négrières, et que cette collaboration ne manqua pas. Où l'on peut voir que cette théorie des "Rois nègres vendeurs de Bois d'ébène" n'est pas une invention d'OPG, pas plus que d'Alain Anselin :
Walter Rodney a écrit:
It must be borne in mind that when the Europeans arrived they dealt with the Africans throught the ruling class. Only the ruler of a given area could grant the lançados permission to reside and trade there, and only he could extend protection to them subsequently.

The responsability for slave trade, as far as Africans themselves bear part of this responsability, lies squarely upon the shoulders of the tribal rulers and élites. They were in alliance with the European slave merchants, and it was the mass of people that they jointly preyed.

The law of the land was the king's law, administred by himself and the nobility. When this law made into the handmaid of the slave trade, this came about because the ruling class so desired, knowing that it was they who stood to benefit from the perversion of justice.

[...] Apart from the unlikely possibility of being sold by the king, the noble could be certain that the law offered him protection. In Sierra Leone in the mid eighteenth century, the rich still only paid fines if they were guilty of crimes, except where the offender transgressed any basic rule of the Poro.

Where slave trading was concerned, the noble remained to a large extent inviolate because, if captured, he was almost always returned to his own people on payment of a ransom. Even the fearsome Bijagos were prepared to offer captured nobles for ransom in return for two commoners or five oxen. Up to the end of the eighteenth century, the ruling class on the Upper Guinea Coast continued to follow this practice of ransom for their own security.

If a noble was actually sold to the Europeans, he still had an excellent chance of recovering his freedom. [...] It therefore seems to have been the convention that nobles were not to suffer servitude, and that every effort should be made to secure the release of any noble who inadvertently fell into the hands of the slave traders.

[A History of the Upper Guinea Coast, 1545-1800, pp114-116]

Je reviendrai sur cet extrait pour dire en quoi consiste mon désaccord avec l'auteur...
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