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Francophonie et extinction de masse des langues africaines

 
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Auteur Message
samuel
Grioonaute régulier


Inscrit le: 28 Jan 2005
Messages: 459

MessagePosté le: Mer 21 Juin 2023 10:55    Sujet du message: Francophonie et extinction de masse des langues africaines Répondre en citant

Extinction de masse des langues africaines

En Afrique dite francophone, on assiste en ce moment à une extinction de masse des langues maternelles indigènes, de nos langues maternelles, qui disparaissent lentement, dans l’indifférence générale, faute d’être enseignées à l’école, parlées à la maison et transmises de génération en génération. C’est un véritable génocide culturel qui est en train d’être perpétré par la francophonie et l’enseignement monolingue et exclusiviste du français dans nos écoles. Or, comme souvent en Afrique où le degré d’insouciance des gens devant l’imminence du danger reste encore un mystère insondable, personne ne semble en faire un motif d’inquiétude. Personne ne semble croire que c’est un problème.

Nos langues maternelles sont, partout, en train de céder la place au français dont les locuteurs augmentent sans cesse tandis que ceux de nos propres idiomes diminuent à une vitesse jamais observée dans le passé. Même chez ceux qui les parlent encore, nos langues maternelles sont en train de se réduire à un sabir indigeste au lexique sommaire, au vocabulaire appauvri sur fond d’un accent indéchiffrable qui se voudrait français, mais qui ne réussit qu’à installer la confusion dans l’esprit de ceux qui écoutent. Même dans des pays comme le Mali ou le Sénégal où certaines langues comme le bambara ou le wolof occupent une place éminente dans les échanges quotidiens, y compris dans les discours des dirigeants politiques ou les débats intellectuels, les mots et l’accent français contaminent presque chaque phrase car les locuteurs ne savent plus parler la langue sans placer, par-ci, par-là, un mot français pour compenser leurs lacunes.

Pire, dans des pays dits francophones comme le Gabon ou la Côte d’Ivoire et de plus en plus au Cameroun, une bonne partie des jeunes (peut-être jusqu’au tiers), sans avoir jamais migré ou vécu en Europe, ne parlent plus aucune langue africaine, aucune de leurs langues maternelles. On en recense des centaines de milliers, voire des millions dans certains de nos pays et leur nombre ne fait que grandir de jour en jour. Ce phénomène est aggravé par le fait que de nombreux parents refusent de parler dans nos langues à leurs enfants à la maison ou d’échanger dans nos langues avec d’autres interlocuteurs, même lorsque ceux-ci parlent ces langues. Parler français, en toute circonstance, est en train de devenir un réflexe pour nous tous. Beaucoup d’entre nous éprouvent même une « honte » à parler dans nos langues et au contraire une "fierté" à montrer que notre progéniture, qui s’applique à « ourler les R » comme disait Fanon, maîtrise mieux le français que nos propres langues maternelles.

Partout en Afrique francofolle, bien parler français est revêtu d’un grand prestige et assimilé à un haut degré d’intelligence au point où le premier critère pour juger de la « baisse du niveau scolaire » dans nos pays, ce n’est point l’inaptitude aux mathématiques ou aux sciences en général, mais bien plutôt le faible niveau de maîtrise du français. Ceux qui « parlent bien français » se font toujours féliciter mais personne n’aura l’idée de féliciter ceux d’entre nous qui parlent deux, trois, ou quatre langues nationales africaines. On fait porter le bonnet d’âne à ceux qui parlent mal le français (sans compter la stupide obsession de l’orthographe) et ils sont raillés et montrés du doigt comme on le faisait autrefois dans les cours de récréation. Le prototype de l’homme inculte, c’est, aux yeux de tous, celui qui parle mal le français ou celui qui ne le parle pas du tout. Et quand on s’avise de critiquer l’usage du français au détriment de nos langues, on s’entend toujours dire : « Et toi-même, c’est en français que tu parles, non ? » tout en oubliant de dire que si nous parlons français, ce n’est pas parce que nous avons librement choisi de parler français, mais parce que le français nous a été imposé à coups de chicotte par la violence institutionnelle coloniale. Sinon, il n’y a rien de spécial dans le français. Rien qui ferait que nous devions le préférer à n’importe quelle autre langue. N’importe laquelle de nos langues pourrait aisément remplacer le français dans nos échanges quotidiens, y compris au niveau international. Il se trouve seulement que nos langues ne sont pas enseignées à nos enfants, y compris sur notre propre sol, en particulier sur notre propre sol.

Si vous êtes Américain ou même Africain et que vous voulez apprendre une langue africaine aux États-Unis, il n’y a rien de plus facile car de très nombreuses universités américaines offrent des cours de langues africaines. Que ce soit le yorouba, l’amharique, le haoussa, le lingala ou le fulfulde que vous voulez apprendre, vous pourrez aisément vous inscrire pour ces cours et vous vous verrez délivrer des certificats et des diplômes en fin de parcours. Or, le même Américain serait étonné d’apprendre que s’il veut obtenir un diplôme ou un certificat pour l’étude de la langue africaine de son choix, il vaut mieux qu’il reste aux États-Unis car dans maints pays africains dits francophones, au mieux on enseigne des cours de linguistique africaine, mais il est impossible de se faire délivrer un certificat de langue boulou par exemple. Or, chaque année de nombreuses thèses en langue française sont soutenues sans que personne n’y voie d’anomalie. Les gens ne se rendent même pas compte que nous sommes en train de nous rendre ridicules aux yeux du monde entier car un Thaïlandais ou un Chinois ne comprendrait jamais une telle attitude.

Le résultat de tout cela, c’est que chaque décennie, nos pays, qui comptent des centaines de langues, en voient disparaître quelques-unes, car une langue qui n’est ni enseignée, ni parlée finit par mourir faute de locuteurs. Les langues dites « minoritaires » en particulier, celles qui n’ont, au mieux, que quelques milliers, voire quelques centaines de locuteurs, sont presque toutes en voie de disparition accélérée, partout sur le continent et personne ne semble croire que c’est un problème et un motif d’inquiétude. Elles le sont d’autant plus que l’urbanisation et les interactions avec des individus autres que ceux de sa propre communauté dans les villes, rend leur usage courant impossible,

Ce phénomène ne fait que s’accélérer au point de menacer même les langues les plus parlées. Seul le français gagne du terrain et nous serons bientôt 700 millions de locuteurs de cette langue sur le continent au point où les anthropologues et linguistes français, qui ne sont jamais à court d’idées pour nous embobiner, commencent à dire que le français est « une langue africaine ». Oui, vous avez bien lu : le français, disent-ils, est « une langue africaine ». On veut ainsi nous faire croire qu’il serait normal, naturel pour nous de parler cette langue étrangère qui nous a été imposée à coups de trique par la violence institutionnelle coloniale. Or, le fait que l’anglais soit enseigné comme première langue étrangère et parlé en tant que telle par les Thaïlandais, les Chinois, les Japonais, les Coréens, les Birmans ou les Papous fait-il de cette langue une langue asiatique ? Les linguistes n’ont-ils pas d’autres critères pour dire d’une langue qu’elle est « asiatique » ou « africaine » ?

Pourtant, devant de telles incongruités même les panafricanistes les plus en vue, à quelques exceptions près, semblent n’accorder aucune importance à cette question alors qu’elle est encore plus fondamentale que celle de l’occupation militaire de nos pays ou de l’imposition du système mafieux du franc CFA car elle conditionne notre libération mentale, culturelle et politique, une libération beaucoup, beaucoup plus difficile que les deux ci-dessus mentionnées. Notre lutte ne sera jamais complète tant que nous la mènerons dans la langue de l’autre avec pour finalité, au bout du compte, de consolider cette langue étrangère et la culture qu’elle porte dans nos futurs pays libérés. Dans ces conditions, nous ne serons jamais que des godillots et de pâles copies de l’original qui occupera toujours une position de domination symbolique et culturelle sur nous, jusque dans notre subconscient.

Tant que nous ne remplacerons pas l’enseignement monolingue et exclusiviste du français par l’enseignement de nos propres langues maternelles, nous serons toujours un marché captif (comme nous le sommes aujourd’hui plus que jamais) pour l’écoulement des produits culturels français (les livres, les films, les vidéos, la musique, le théâtre, les comédies, les journaux, les émissions de télévision, les spectacles en tout genre, les podcasts, les cours et les manuels, les produits pharmaceutiques français…) car la langue française n’est pas seulement un instrument de domination culturelle, c’est surtout un instrument de domination économique.

Tant que nous enseignerons le français au détriment de nos propres langues maternelles, nous ne serons jamais que des consommateurs passifs pour toutes les industries françaises car du seul fait que c’est cette langue que nous parlons en premier, c’est elle qui conditionnera tous nos choix de consommation quel que soit le domaine considéré. Dès lors, il suffit de penser au fait que dans tout juste quelques années nous serons 700 millions de francophones africains pour comprendre l’importance d’un tel marché pour le pays producteur de cette culture.

Contrairement à ce que les Français tentent de nous faire croire, la pluralité linguistique et ethnique n’est pas un obstacle à l’enseignement de nos langues ou même au choix d’une langue africaine commune soit au niveau continental, soit au niveau régional ou national de chaque pays africain.

Les Africains ne sont pas les seuls à avoir plusieurs ethnies et plusieurs langues parlées dans leurs pays. Il n’y a pas qu’en Afrique qu’il y a des ethnies et des langues différentes. La quasi-totalité des pays du monde sont pluriethniques et plurilingues. Il y a 250 ethnies et 250 langues différentes en Chine. Il y a des milliers de tribus, d’ethnies et de langues différentes en Inde. Beaucoup plus que dans aucun pays africain. Tous les pays d’Europe sont pluriethniques et plurilingues. Tenez! La microscopique Lettonie, qui a tout juste un million d’Habitants, a 3 langues parlées, toutes enseignées, et les Lettons prennent la parole en letton dans toutes leurs affaires diplomatiques. La minuscule Bosnie-Herzégovine a 4 langues parlées, toutes enseignées et les Bosniaques prennent la parole en bosniaque quand ils parlent sur la scène internationale. La Bulgarie? 10 langues différentes!!! La Fédération de Russie? 100 langues différentes!!!

Quand l’Allemand prend la parole à l’ONU. Il parle en allemand. Quand l’Arabe prend la parole à l’ONU, il parle en arabe. Quand l’Italien prend la parole à l’ONU, il parle en italien. Quand l’Indien prend la parole à l’ONU, il parle en hindi. Quand le Chinois prend la parole à l’ONU, il prend en mandarin.

Quand le Sénégalais prend la parole à l’ONU, il parle en….français !!! Est-ce normal?

BREF! EN DEHORS DE L’AFRIQUE, IL N’Y A AUCUN PAYS, JE DIS BIEN AUCUN PAYS AU MONDE OÙ LES GENS N’ENSEIGNENT D’ABORD ET EN PRIORITÉ LEURS LANGUES À LEURS ENFANTS. SI VOUS CONNAISSEZ UN SEUL PAYS, JE DIS BIEN UN SEUL PAYS, EN DEHORS DE L’AFRIQUE, QUI SOIT DANS CETTE SITUATION, NOMMEZ-LE.

EN DEHORS DE L’AFRIQUE, POUR TOUS LES ÊTRES HUMAINS, SUR TOUTE LA SURFACE DE LA PLANÈTE TERRE, ENSEIGNER SA PROPRE LANGUE À SES ENFANTS EST UN IMPÉRATIF, UNE ÉVIDENCE QU’IL SERAIT STUPIDE DE DISCUTER, C’EST-A-DIRE UNE QUESTION QUI NE SE POSE MÊME PAS. LES AFRICAINS SONT LES SEULS À ENCOURAGER LEUR PROPRE SUICIDE CULTUREL EN REFUSANT D’ENSEIGNER LEURS LANGUES À LEURS ENFANTS.

Or, le devoir premier de tout gouvernement est d’assurer la survie physique (c’est-à-dire la sécurité et la reproduction biologique dans le temps qui assure la permanence physique des individus qui composent le groupe) et la survie culturelle, en particulier de la langue (sans laquelle le groupe n’existe plus en tant que groupe distinct) des membres de la Société. En conséquence, c’est une stupidité sans nom et une démission inqualifiable que de promouvoir nous-mêmes le suicide culturel de nos communautés en maintenant l’enseignement monolingue et exclusiviste du français. C’est aussi un crime dont nous serons tenus comptables par les générations futures car le droit d’apprendre et de transmettre sa langue et sa culture maternelles, d'apprendre et de transmettre la culture et la langue de ses parents, pour tout enfant, est un droit humain fondamental. Priver un enfant de ce droit, sous quelque prétexte que ce soit, est un crime abominable.

Aussi, nous voulons la fin du génocide culturel perpétré par la France et la francophonie au travers de l’enseignement monolingue et exclusiviste du français dans toutes les néocolonies françaises au détriment des langues africaines et des cultures africaines qui meurent lentement mais sûrement faute d’être enseignées et transmises à nos enfants. Nous devons refuser ce suicide culturel qui consiste à refuser d’enseigner nos propres langues à nos enfants. Comme tous les autres peuples sur toute la planète Terre, nous devons enseigner en priorité nos langues à l’école et non le français. Le français n’a rien de spécial qui ferait que nous devions le préférer à nos propres langues maternelles.
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