Grioo.com   Grioo Pour Elle     Village   TV   Musique Forums   Agenda   Blogs  



grioo.com
Espace de discussion
 
RSS  FAQFAQ   RechercherRechercher   Liste des MembresListe des Membres   Groupes d'utilisateursGroupes d'utilisateurs   S'enregistrerS'enregistrer
 ProfilProfil   Se connecter pour vérifier ses messages privésSe connecter pour vérifier ses messages privés   ConnexionConnexion 

Situation en Guinée

 
Poster un nouveau sujet   Répondre au sujet       grioo.com Index du Forum -> Politique & Economie Africaines
Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant  
Auteur Message
Pakira
Super Posteur


Inscrit le: 01 Mar 2004
Messages: 1750

MessagePosté le: Lun 27 Mar 2006 22:16    Sujet du message: Situation en Guinée Répondre en citant

Jean-Marie Doré (Président de l’UNion pour le progrès de la Guinée) : “Les Guinéens sont à un point de saturation tel que le peuple va imposer le changement”

Le député Jean-Marie Doré est le président de l’Union pour le progrès de la Guinée (UPG) un parti d’opposition au régime du président Lansana Conté. Dans cet entretien qu’il nous accordé à la fin du mois de novembre 2005 à sa résidence au quartier Dixine, en plein cœur de Conakry, il affirme fortement sa foi en une Afrique débarrassée de la colonisation et de la domination française. Une profession de foi qui, selon lui, ne peut se réaliser que par la volonté des peuples africains à refuser la résignation en portant à leur tête des dirigeants assez patriotes pour impulser le développement de l’Afrique de façon solidaire. Dans cette première partie de cet entretien, il fait le diagnostic de la situation de son pays et martèle sa conviction que le changement est aujourd’hui inéluctable au pays de Sékou Touré.

Notre Voie: Monsieur le Président pouvez-vous présenter l’UPG pour nos lecteurs?
Jean Marie Doré: Nous sommes un parti de centre. Nous ne sommes pas un parti de gauche parce que la Guinée est un pays féodal. C'est donc une aberration de parler de la gauche ou de la droite. Nous prenons à gauche et à droite, toutes les idées qui peuvent constituer une ossature puissante pour l'équilibre de notre pays. La vérité est quelque part entre ces extrêmes. Et ce pays a besoin d'être gouverné au centre. Et nous somme au centre.

N.V.: Quels sont les grands points de votre programme économique et politique que vous essayez de faire partager à vos concitoyens?
J.M. D.: Les moyens dont nous devons disposer doivent nous permettre d'accélérer la formation par l'alphabétisation. Mais le support de tout ça, c'est la maîtrise de l'énergie. Nous ne pouvons rien faire sans énergie. Le courant est parti (NDLR : Il y a eu une interruption de la fourniture de l’électricité au cours de l’entretien). Nous sommes des privilégiés dans ce quartier. Mais il y a des quartiers où, depuis 2 ans, il n'y a pas de courant. Pour certains, depuis 3 ans, il n'y a pas d'eau courante. Ce n'est pas normal. Ça c'est à Conakry. A l'intérieur, si vous apercevez quelques lucioles, c'est le domicile du préfet, où il y a un petit groupe électrogène dont le service d'entretien vend le carburant parfois. Il n'y a pas de réseau électrique à N'Zérékoré. il n'y a pas de réseau à Siguiri. Pour nous, le plus important, c’est l'éducation, la formation, la maîtrise de l'énergie sans lesquelles on ne peut pas développer les télécommunications, l'autosuffisance alimentaire. Pas une politique basée sur la publicité, comme le fait le président Conté. Il dit qu'il est le roi des paysans alors que son peuple crève de faim. Il y a deux ou trois ans, le sac de riz coûtait 27000 francs Guinéens et aujourd'hui c'est entre 96000 et 100000 francs. Quel est ce roi fainéant qui n'est pas capable de donner à manger à son peuple? La terre guinéenne est fertile. Il faut soutenir l'agriculture. Il faut une banque de développement agricole. Il faut toutes ces institutions qui impulsent l'effort pour que les Guinéens soient renvoyés au travail de façon moderne. Parce que la plupart des paysans sont encore au stade de la houe en pratiquant le brûlis. Or le brûlis détruit la forêt. La forêt est une matière première renouvelable.
Tout cela est oublié dans le programme de Conté. A ce stade où nous sommes, il ne faut pas des programmes sophistiqués. Il faut d'abord le sous-bassement. A côté de cela, il nous faut une politique militaire qui est basée sur l'armée de métier et l'administration qu'il faut refondre complètement.Nous sommes le seul pays qui n'a pas une école nationale d'administration. Dans l'administration préfectorale, vous avez des instituteurs, des moniteurs d'enseignement, des comptables, des infirmiers. Vivant dans la crainte d'être renvoyé à la craie, le préfet n'a pas de conscience professionnelle à cause de ce déséquilibre entre le statut précaire du préfet et le retour à la profession de base. Donc il faut un corps de l'administration préfectorale qui a les garanties du métier.

N.V. : De l'extérieur de la Guinée, on a le sentiment que l'opposition guinéenne n'est pas active. Quelle est aujourd'hui la situation politique? Quel est votre regard sur la situation en Guinée ?
J. M.D.: Notre pays qui passe pour un Etat qui a le plus de chances potentiellement, en effet, marque le pas depuis de très longues années. On peut apporter plusieurs explications sur le retard général de la Guinée. Je m'attarde sur une de ces explications.
Après l'indépendance, le président Sékou Touré, par la force des choses et devant la pesanteur de la vie internationale, a dû s'orienter dans une coopération active et de plus en plus intégrée avec le monde communiste. Et la Guinée a vécu de la logique et dans la logique de ses relations avec le monde communiste. Il entendait en tirer profit pour lancer les bases de la gestion de notre économie et de l'organisation sociale. Dans cette voie, la Guinée a été logique avec elle-même. Elle a lancé de grandes unités industrielles, elle a lancé de grandes activités agro-pastorales qui ont réussi avec plus ou moins de bonheur. Mais, dans une organisation de masse, on ne privilégie pas l'individu, ce sont les résultats globaux. Ça a eu un effet sur le niveau de vie des gens qui, pendant la période coloniale, avaient un certain comportement et qui, après l'indépendance devaient s'accoutumer à un mode de vie nouveau. Ça a laissé des traces profondes dans la conscience des Guinéens. surtout que les Guinéens étaient déjà formés à l'école occidentale. C'est pourquoi, quand on critique Sékou Touré, on ne tient pas compte de ce chevauchement de la situation avant l'indépendance, de la situation pendant l'indépendance et la situation créee par la coopération active avec le monde communiste, de la part des gens qui ont été formés dans le moule de la vie occidentale. Lorsque Sékou Touré mourait, on avait 360 unités industrielles qui fonctionnaient à plein régime. Les activités agro-industrielles, les fabriques de chaussures, les fabriques de tissus, les fabriques de peinture. Tout ce qu'il faut pour faire vivre le monde. Et les activités minières rapportaient parce que le gouvernement veillait aux intérêts de l'Etat. Qu'il y ait eu la rupture le 26 mars à la mort de Sékou Touré qui a amené le 3 avril les militaires au pouvoir, je crois que le refus du système étatique imposé par Sékou Touré à cause de ses effets sur la vie de l'élite a amené l'armée à faire une erreur. C'est de répudier sans transition ce mode de vie qui était devenu pendant 26 ans la façon de vivre des Guinéens. Et du dirigisme total de Sékou Touré, on est allé de plain- pied dans une économie de marché en bradant la totalité des réalisations industrielles et agro-pastorales du régime de Sékou Touré, sans disposer de la classe moyenne sans laquelle on ne peut pas avoir une économie de marché qui tienne debout.
Il ne faut pas seulement compter sur les bailleurs de fonds étrangers sans qu'il y ait un support aux grandes entreprises minières et autres. C'est pourquoi la Guinée aujourd'hui vit déchirée entre la vie en économie de marché et le souvenir encore vivace du régime socialiste. Toutes choses qui ont eu pour effet de bloquer notre pays avec en plus l'incurie de la nouvelle classe dirigeante.
N. V.: Que fait l’opposition dont vous êtes une figure de proue, pour changer les choses ?
J.M.D. : Quand la loi sur les partis politiques est apparue en 1991 et qu'à partir d'avril 1992, on a commencé à créer les partis politiques, la Guinée a vu fleurir dans le champ politique près de 48 partis dont, aujourd'hui, environ 5 ou 6 sont de vrais partis qui ont une assise nationale. Les partis politiques ont commencé très fort pour arriver au changement en Guinée et constituer un gouvernement fort qui fasse le consensus des compétences et des valeurs, afin de commencer à mettre à la disposition du peuple de Guinée les richesses dont son sol recèle. Mais tout ce que je vous ai dit du système de Sékou Touré, avec son évolution vers l'économie de marché sans transition, a fini par créer une mentalité nouvelle chez les Guinéens. Cette mentalité nouvelle s'apparente à la fois à de la discipline sous le régime socialiste où il n'y avait pas de voleurs en Guinée. Aujourd'hui, la misère profonde a généré dans la tête des Guinéens une nouvelle mentalité, puisqu’avec cet Etat où la société ne met pas à la disposition les emplois et les conditions de vie décente, il faut vivre de débrouillardise. Alors le Guinéen vit au jour le jour. Si la Guinéenne et le Guinéen vivent au jour le jour, ça veut dire qu'ils ne font pas de projection. Alors le gouvernement joue sur ce registre. Nous avons des partis, nous avons des militants. Notre discours s'appuie sur ce que nous connaissons de leur rêve objectif, leur désir de préparer l'avenir de leurs enfants. Mais, comme ils vivent au jour le jour, comme le premier régime a imprimé à leur conscience la peur de l'Etat, de l'autorité de l'Etat, alors on est tiraillé entre le désir de changer et la peur de l'affrontement avec les pouvoirs publics. Certains vous diront que ce sont les leaders qui ne veulent pas prendre la tête des mouvements de contestation pour imposer le changement. Mais les militants ne sont pas des moutons. Nous ne pouvons pas les engager sans nous assurer que le jeu sera joué. Donc, aujourd'hui, la Guinée vit dans une situation de blocage total.

N.V.: A vous écouter, on peut penser qu’il n’y a pas d’alternative?
J.M.D.: L'opposition guinéenne est très forte potentiellement. Mais il y a des hommes qui n'ont pas pied en Guinée et qui vont vadrouiller à travers le monde et sabotent le travail de l'opposition. Si je ne le dis pas, je ne suis pas honnête. Le gouvernement est complètement fragilisé. C'est ce qui rend l'opposition coupable, et il faut le dire. Ce gouvernement n'est plus rien du tout. Il est miné par la corruption. Il est miné par l'impunité. Aujourd'hui, en Guinée, le Premier ministre se bat contre le président du patronat. Le Premier ministre, c'est tout juste s'il ne se boxait pas avec le ministre des Télécommunications au sujet de la quatrième licence de téléphonie à attribuer. Et le président de la République n'a pas d'énergie pour arbitrer. Il est absent de la scène politique.
Donc il y a un vide en face de l'opposition qui est potentiellement puissante. Mais c'est comme si ce gouvernement-là inspirait ou imposait, par la magie, par l'occultisme, la faiblesse ou la folie à certains dirigeants pour s'écarter du seul chemin qui mène au changement. Le départ de ce changement devait être ces élections communales (NDLR : les élections communales organisées en décembre). Parce que nous devions ramasser toutes les communes. J'ajoute que les communes, en Guinée, ne représentent pas grand-chose par rapport à ce qu'elles sont en Côte d'Ivoire où les maires ont une large autonomie d'actions pour gérer leur commune. Ici, je dirais que ce sont des appendices de l'administration. Mais, en dépit de tout, le fait de démontrer au gouvernement qu'il n'a plus la confiance de son peuple aurait constitué un grand départ pour imprimer un nouvel élan à la lutte de la population. Sortir la population de son apathie, de ce manque de perspective. Et c'est le rôle des partis politiques. Devant nous, le gouvernement est englué dans les détournements, dans la concussion. Le franc guinéen est passé en moins de trois ans de 1000 francs à 4500 francs guinéens pour un dollar. L'euro qui était, à un moment donné à 1500, est aujourd'hui à 5600 francs guinéens. Le prix du carburant est passé en 4 ans de 850 francs pour le litre de gasoil à 3600 francs. Et depuis, 10 ans, les salaires n'ont jamais changé. Le Guinéen est déchiré entre son ventre et le désir d'affirmer sa dignité. Si vous voulez, ce qui aurait provoqué un séisme en Côte d'Ivoire, au Mali, au Sénégal, même dans l'aile de Guinée Bissau, ce n'est pas une injure, ne provoque même pas un grondement de tonnerre en temps de pluie. C'est une situation de blocage. C'est bloqué, mais il suffit d'un rien pour qu'il y ait le changement.

N. V. : Monsieur le Président, est-ce que les différences d’appréciation entre partis politiques d'opposition sont d'ordre idéologique ou de simples questions d'ego des responsables des partis politiques?
J.M. D. : Oui, c'est l'ego. Il y a des gens qui pensent que c'est autour de leur personne que la Guinée doit construire son avenir. C'est une aberration qui frise la folie. Comment voulez-vous, dans ce contexte dont j'ai présenté la sociologie, que vous puissiez dire que c'est autour de vous que obligatoirement la Guinée doit se construire. Si vous n'avez pas le sentiment que l'évolution de l'opposition se fait autour de vous, alors vous devez casser l'opposition. Parce qu’il suffit qu'un grand parti sorte de ce front pour, psychologiquement, affaiblir ce front par rapport au courant d'opinion. Aujourd'hui, notre peuple est outré devant cette faiblesse extrême de jugement de certains leaders de l'opposition.

N.V. : Est-ce qu'on ne peut pas aussi attribuer ces difficultés de l'opposition à un manque de clarification de positionnement? Est-ce que les partis politiques savent exactement quel poids ils représentent en terme électoral? Chacun a-t-il pu évaluer son poids réel à travers des scrutins? Quel est le poids de l'UPG, du RPG et de l'UFR?
J. M.D.: Je ne peux pas faire de jugement sur la valeur du RPG et de l'UFR. Mais je vais parler de moi. En 2002, mon ami Siradiou, paix à son âme et moi avons participé à des élections que les autres ont boycottées. Mon parti a eu 35 députés sur 114. Comme ce gouvernement est la négation de l'Etat de droit, ils ont pris les 35 députés. Parce que le premier jour du lancement de la campagne, le président de la République a dit , dans un discours radio télévisé, qu'il lui faut 85 députés sur 114. Parce que, dans l'ancienne Assemblée l'opposition, par ses longs discours, selon lui, gênait le gouvernement. Donc il intime au ministre de l'Administration du territoire de lui donner 85 députés. Donc à partir ce scrutin, le ministre de l'Administration a mis de côté 85 députés sur 114. Il ne restait que 29. Le ministre devait répartir ces députés. Je n'ai pas participé à ce marchandage. On a appris qu'on nous a attribué 3 que nous avons refusés. Nous ne siégeons pas. Vous comprenez donc que nous sommes un grand poids dans ce pays. Rien ne peut se faire dans ce pays sans nous. Nous sommes aujourd'hui l'énorme espoir du peuple de Guinée, parce que notre idéologie se fonde sur l'unité nationale, sur le partage de la fortune nationale, sur une redistribution équilibrée de la fortune nationale. Qu'elle se puise en forêt, qu'elle se puise en Haute Guinée ou en Basse Guinée.
Alors, le peuple, les institutions qu'elles soient militaires, civiles, ont le regard tourné vers nous pour constituer la terre de salut, l'île pour les naufragés. Nous savons ce que nous représentons. C'est pourquoi, en dépit de ces errements de certains aventuriers de la politique, nous gardons la tête froide parce qu'il ne faut pas sous-estimer la population. Cette Guinée, nous l'avons vue au moment de l'indépendance. Nous étions dans des difficultés énormes. Les Français sont partis d'ici en emportant tout, même les chaises. J'étais fonctionnaire, inspecteur du travail à Conakry. Nous avons eu quatre chaises et quatre tables parce que tout a été embarqué dans les bateaux. Notre peuple a trouvé en lui les ressources nécessaires pour se tenir debout et garder le cap sur l'avenir maîtrisé.

N. V.: Face à vous, il y a le PUP et son chef le Président Conté. Comment jugez-vous son régime?
J. M.D.: Le Président n'a plus d'énergie. Il est malade. Je l'ai dit dans une interview à RFI. On m'a mis en prison. Mais les populations et les militants sont venus me faire sortir de la prison. J'ai fait 48 heures là-bas. Ils sont venus me chercher. Ils m'ont prié de sortir de prison. J’ai dit que le Président est malade. Donc la Cour suprême a commis une faute juridique énorme en le reconnaissant comme candidat. La Constitution dit que le candidat à la Présidence doit être en bonne santé. Donc quelqu'un qui souffre de tout son corps ne peut pas être candidat. Alors on dit que j'ai insulté le Président. Non, en tant que candidat, j'ai porté un jugement sur quelqu'un qui me disputait la place. Tout ça n'est pas grave, il ne faut pas trop penser à ces petits incidents de parcours. M. Conté est Guinéen comme moi. Je suis son compatriote, il est le mien. Mais ce qui n'est pas normal, c'est la façon dont il gère le pays. Et ce, de manière irréversible. Il ne peut pas corriger, il n'a plus la force en lui. Son système est tel qu'il ne peut pas trouver en lui la capacité de se régénérer, de se corriger. Donc, inéluctablement, il va y avoir la chute de ce système par écroulement, par implosion.

N.V. : Malgré les divergences entre vous et vos camarades de l'opposition, vous dites que vous avez espoir. Est-ce qu'il n'y a pas à craindre que ce déclic ne vienne pas parce que ça fait plus d'une vingtaine d'années que ça dure?
J.M.D. : Je suis Guinéen et je suis patriote. Il y a des choses que je ne peux pas dire par respect pour moi-même et pour mon pays. Parce qu’à mon corps défendant, je dois défendre l'honneur de ceux qui ont créé tout ça. Ce système ne peut pas ne pas s'autodétruire. Nous voulions organiser pour notre pays le rassemblement de cette opposition pour qu'on forme un gouvernement d'union nationale qui prenne en charge la gestion du pays. Parce que s'il n'y a pas de gouvernement d'union nationale, les solutions hardies seront interdites à un gouvernement qui serait issu d'un seul parti. Or ces partis ont démontré qu'ils ne peuvent pas gouverner ensemble. Il nous faut faire preuve d'imagination pour trouver des substituts à cette démission de l'opposition. Nous sommes en train de réfléchir.

N.V. : Est-ce qu'il n’y a pas à craindre que le régime ait de beaux jours devant lui en Guinée ?
J.M.D. : Non, la situation telle qu'elle est créée en Guinée ne permettra plus à un militaire de faire la pluie et le beau temps. Il faut obligatoirement avoir à l'esprit que les militaires pourront provoquer le changement. Ils peuvent être à la base du changement. Mais je ne vois pas logiquement, d'après ce que je sais, d'après ce qui a toujours été en Guinée, d'après ce qui existe, d'après ce que je suppose, que sera la Guinée, je ne vois plus un militaire qui va venir confisquer le pouvoir comme Conté l'a confisqué. Et transformer le pays en foire. Ce n'est pas possible.

N.V. : Est-ce à dire que vous êtes en attente d'un Aboubakar Salami comme au Nigeria ou d'un Wanke au Niger ou d'un Robert Guéi en Côte d’Ivoire ? Des militaires qui feront une sorte de pont, de transition ?
J.M.D. : Non, pas tout ça. Il n'y a pas de messie. Ce peuple va se lever et va imposer son vouloir. C'est inéluctable. Ça s'imprime dans la couleur du ciel. Ça s'imprime dans le paysage ça s'imprime dans les odeurs des tas d'ordures qu'il y a partout en ville. Tout cela est un appel au changement. Les Guinéens sont arrivés à un point de saturation tel que spontanément le peuple va imposer le changement. J'avais souhaité et je souhaite encore que mon frère Lansana Conté comprenne qu'en politique, chacun fait ce qu'il peut. Mais, pour des raisons qui tiennent à la métaphysique, il s'accroche à un pouvoir qui lui échappe physiquement, psychologiquement. Je vous donne un exemple. A l'Assemblée nationale, le règlement intérieur dit qu'à la rentrée parlementaire le 25 septembre, le projet de loi de finance doit être sur la table de chaque député. Au moment où je vous parle (NDLR : fin novembre 2005), le ministère de l’Economie et des Finances n'a pas encore élaboré le projet de loi de finance, et il n'est pas sûr qu'on puisse l'adopter au gouvernement avant avril. Et ça ne fait ni chaud, ni froid au gouvernement. On imprime les billets de banque comme on veut.
La Guinée est toujours un pays particulier. Quand on parle d'inflation en général, tout le monde a plein de billets mais n'achète rien. Chez nous, les billets n'achètent rien, mais ils sont rares. Personne n'a le billet pour tant il leur faut 4000 fois plus pour acheter la même chose qu'ils achetaient à 100 francs ou à 1000 francs.
La nature a horreur du vide. Donc une situation va venir se substituer à cette situation qui aurait pu être organisée. Mais elle sera organisée par la force des choses.

Demain la suite


Entretien réalisé par Guillaume T. Gbato

http://news.abidjan.net/presse/notrevoie.htm
_________________
"tout nèg a nèg

ki nèg nwè ki nèg klè
ki nèg klè ki nèg nwè
tout nèg a nèg

nèg klè pè nèg nwè
nèg nwè pa lè wè nèg klè
nèg nwè ké wéy klè
senti i sa roune nèg klè
mè nèg klè ké wéy klè a toujou nèg

sa ki fèt pou nèg vin' blang?
blang té gen chivé pli long?
pou senblé yé nou trapé chivé plat kon fil mang!!!
mandé to fanm...!
mè pou kisa blang lé vin' nwè?
ha... savé ki avan vin' blan yé té ja nèg!

a nou mèm ké nou mèm dépi nânni nânnan...
chinwa soti, kouli soti, indyen soti, blang soti
mèm koté nèg soti

avan yé sotil koté y fika
AFRIKA!!!"

Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
Pakira
Super Posteur


Inscrit le: 01 Mar 2004
Messages: 1750

MessagePosté le: Mar 28 Mar 2006 15:32    Sujet du message: Répondre en citant

JEAN-MARIE DORÉ (président de l’union pour le progrÈS de la guinée: “Pour faciliter la solution de la crise en Côte d’Ivoire, la France doit retirer la mission Licorne”


Le député Jean-Marie Doré est le président de l’Union pour le progrès de la Guinée. Dans cette seconde partie de l’entretien qu’il nous a accordé il y a quelques mois à Conakry, il n’a pas de mots assez durs pour dénoncer la politique criminelle de la France en Côte d’Ivoire. Il épingle au passage les chefs d’Etat africains francophones dont il dénonce la faiblesse devant le colon. Enfin, il appelle la jeunesse africaine à garder le cap de la lutte.
Notre Voie : La Côte d'Ivoire, pays voisin de la Guinée, traverse une crise depuis septembre 2002. En face du président élu Laurent Gbagbo, il se trouve une rébellion soutenue par certains pays de la sous-région, notamment le Burkina Faso, avec une implication visible de la France qui se bat à visage découvert aux côtés de la rébellion ivoirienne. Dans cette situation, nous n'avons pas entendu beaucoup l'opposition guinéenne. Parfois quand on l'a entendue, il est apparu que l'opposition guinéenne semblait acquiescer pour soutenir les positions de la rébellion. Pourquoi ?
Jean-Marie Doré : Je crois que c'est injuste de dire que l'opposition guinéenne ne s'est pas exprimée par rapport à l'UPG, notre parti. L'UPG, du fait que sa base principale est la région forestière, est intéressée au premier chef par tout ce qui peut se passer en Côte d'Ivoire ou au Liberia. A propos de la guerre au Liberia, par la force des choses, je me suis trouvé obligé d'affronter publiquement le président Conté parce que, par sa faute, la guerre a duré 13 ans au Liberia. J'ai combattu publiquement la politique de Lansana Conté au Liberia. Du geste et de la parole, j'ai combattu. De la même manière, je ne peux pas accepter que la situation empire en Côte d'Ivoire. Parce que, sur le plan sentimental, je me sens un peu Ivoirien. J'ai fait le collège à Daloa, puis le lycée à Abidjan où j'ai eu mon Bac. Ma région natale jouxte la Côte d'Ivoire et les peuples sont les mêmes. C'est en 1912 que notre pays a été partagé en trois. 70% donnés au Liberia, 20% donnés à la Côte d'Ivoire et 10% à la Guinée, et la capitale Bossou est restée en Guinée. Je ne trouve pas normal ce qui arrive à la Côte d'Ivoire. Je crois que les secousses dans les pays surtout dans les pays africains sont courantes. Mais, ce qui n'est pas normal, c'est que des pays qui nous donnent des leçons de civisme, de démocratie s'impliquent négativement dans nos pays et poussent à la rupture de l'équilibre au sein de nos pays. C'est cette analyse qui m'a conduit à dire publiquement ici à Conakry que je crois qu'il n'a pas été bien de la part de mon frère Laurent Gbagbo d'accepter les accords de Linas-Marcoussis. Je crois que j'ai été mal compris à un moment donné. Parce qu'on n'avait pas besoin de comprendre le système des relations internationales pour savoir que ce sont de mauvais accords. Comment voulez-vous qu'un gouvernement légal qui a failli être renversé par une rébellion puisse, sans qu'on démontre la nécessité, se voir imposer le chef de cette rébellion comme ministre de la Défense, de la Communication. Ça m'avait paru énorme sans que ce ne soit pour moi une condamnation de la rébellion. Je n'ai pas à me mêler des affaires intérieures de la Côte d'Ivoire. Mais, en spécialiste des problèmes politiques, j'ai trouvé que ces accords-là étaient inapplicables et portaient en eux les germes de la perpétuation de la crise. Je le répète encore aujourd'hui, je ne suis pas d'accord. La permanence de la crise en Côte d'Ivoire est inscrite en filigrane dans les accords de Linas-Marcoussis. Et, en tant que Guinéen qu’intéresse la Côte d'Ivoire, je ne dis pas que je condamne, mais je désapprouve fortement. Je désapprouve puissamment ces accords. Ces accords-là rendent impossible une solution de compromis. C'est la France qui a parrainé ces accords. Si c'était une affaire interne à la France, je ne me prononcerais pas. Parce que je n'ai pas de leçon à donner à la France. Mais, comme la France agit dans le cadre d'un pays qui est notre voisin et dont les crises rejaillissent sur la Guinée, alors automatiquement, je condamne sévèrement la propension de la France à s'immiscer dans les affaires de la Côte d'Ivoire de la façon que l'on sait. Dans la parenté africaine, j'aime tous les Africains, mais je commence par mieux distinguer les traits de celui qui est mon voisin. Je ne peux pas porter de jugement de valeur sur l'implication du Burkina Faso dans la crise ivoirienne.

N.V. Mais, vous semblez ignorer le rôle joué par des pays africains comme le Burkina faso ?
J-M.D. : Mais, que ce soit le Burkina Faso, le Mali, le Togo, le Ghana, la Guinée, la situation qui prévaut en Côte d'Ivoire est liée à la diplomatie française mal étudiée, mal conçue. Et on a beau réfléchir, on ne voit pas l'intérêt pour la France de faire cette politique. Même pour son propre intérêt. Ça ne peut qu'altérer les intérêts français en Côte d'Ivoire et faire réfléchir les voisins de la Côte d'Ivoire. Donc je crois que ça a été un échec de la réflexion française. C'est pourquoi, pour faciliter la solution de la crise en Côte d'Ivoire, la France doit retirer purement et simplement la mission Licorne. L'opération Licorne a foiré. J'ai suivi à la télévision française que des militaires ont bâillonné un type jusqu'à le tuer (affaire Mahé). Tout ça est généré par une mauvaise politique et beaucoup d'officiers ont été suspendus. La France est une vieille nation. Le général De Gaulle a dit qu'elle a une ressource inépuisable de sagesse quand elle le veut. La France doit donner une impulsion nouvelle, gigantesque de fait et de portée. Si elle annonce brusquement qu'elle met fin à la mission Licorne, la communauté internationale sera forte pour emmener à une solution interne à la crise. Parce que Laurent Gbagbo aura la sagesse de ne pas chercher à écraser tous ces gens qui se sont exprimés dans la rébellion. Parce que quand on est rebelle, ça veut dire qu'on n'est pas content. On n’a pas forcément raison de ne pas être content, mais quand ça devient un événement de masse, on est obligé de tenir compte de ça. Moi, je suis légaliste. J'ai écouté certains qui disent : “La légalité du pouvoir de Laurent Gbagbo est mise à mal parce qu’il y a ceci, il y a cela”. Mais, pour le moment, de tous ceux qui recherchent le pouvoir, il est le seul qui est sorti du suffrage universel.
Si on veut critiquer la qualité du suffrage universel qui a porté Laurent Gbagbo au pouvoir, il faut condamner Lansana Conté parce qu'il a eu 7% de participation des Guinéens aux élections de 2003 et je crois qu’à Conakry, moins de 10% des citoyens se sont déplacés pour aller aux urnes. Mais les ambassades sont accréditées auprès de Lansana Conté.
Laurent Gbagbo, nous connaissons tous les chiffres qu'il a faits. Aujourd'hui, je ne récuse pas les autres, mais aucun d'eux n'est sorti d'un suffrage, même contesté. Donc, aujourd'hui, la trace de la légalité constitutionnelle, Laurent Gbagbo en porte les stigmates. C'est pourquoi, si on veut enlever Gbagbo, alors on va multiplier le chaos en Côte d'Ivoire. Est-ce qu'il est de l'intérêt de mon pays, la Guinée, qu'il y ait le chaos en Côte d'Ivoire? Nous nous y opposerons.

N.V. : Dans votre développement, vous désapprouvez le fait que le président Gbagbo ait avalisé les accords de Marcoussis, puisque lui-même n'a pas participé directement à ces débats. En Côte d'Ivoire, certains estiment que, du fait de l'implication de la France aux côtés de la rébellion au moment de la signature des accords de Linas- Marcoussis, le rapport des forces militaires n'était pas en faveur de l'armée ivoirienne. Ce qui aurait amené le président Gbagbo à faire un choix tactique pour tenter de réorganiser son armée. Est-ce que ce n'est pas là un argument valable ?
J-M.D. : Ça peut l'être. Mais on ne peut pas juger un prince par des situations comme ça. Quand on est chef d’Etat, il faut assumer ses responsabilités. Peut-être que c'est vrai, l'état des rapports de force. Mais cette affirmation condamne encore la France parce que ça veut dire que si Laurent Gbagbo n'avait pas accepté le projet français, la France allait aider à le renverser. Mais c'est très grave pour les Français, ce raisonnement-là. C'est pourquoi je pense que si j'étais président de la République de Côte d'Ivoire, mon parti ne serait pas parti à Paris. On aurait négocié à Accra, à Lomé, à Dakar ou à Conakry.

N.V. : Les négociations ont commencé à Lomé ?
J-M.D. : Oui, il fallait changer de pays et ne pas partir en France. Parce que, moi Guinéen, je n'accepte pas que les problèmes africains soient réglés en Europe. Je refuse catégoriquement. Nous n'avons pas voté non ici pour que des colons viennent de nouveau.
La France est un pays ami ; nous coopérons beaucoup avec la France aujourd'hui. Elle finance des projets importants en Guinée, mais cela ne lui donne pas le droit de rendre la justice en Guinée. Ça non ! Parallèlement, le président Laurent Gbagbo, s'aidant de la Guinée, du Sénégal, s'aidant du Nigeria, autour du président Kufuor du Ghana, doit amener à un renouveau de confiance entre Blaise Compaoré et lui . Ça vous paraît difficile, mais c'est la condition de l'équilibre interne. Il ne faut pas que le président Blaise Compaoré ait le sentiment que la solution interne en Côte d'Ivoire se fait contre lui.

N.V. : Mais, en Côte d'Ivoire, on estime que le président Blaise Compaoré est allé un peu loin dans sa volonté d'annexion de la Côte d'Ivoire?
J-M.D. : La nouvelle chancelière d'Allemagne a rendu sa première visite à la France. Je relisais un document sur la Deuxième Guerre mondiale où, pour les Français, le diable, c'était l'Allemand. Aujourd'hui, les Français et les Allemands sont redevenus les piliers incontournables de la construction de l'Europe. Ça ne me gêne pas que demain, la Côte d'Ivoire et le Burkina, de nouveau amis, constituent une force d'un pacte en Afrique de l'Ouest. J'y crois.

N.V.: Pour revenir à votre souhait de voir la Licorne partir de la Côte d'Ivoire, la perception que nous avons en observant la politique française, qui est au passage difficile à comprendre, c'est que la colonne vertébrale de cette politique vise à évincer coûte que coûte le président Laurent Gbagbo?
J-M.D.: La France ne pourra pas. Chirac ne pourra pas. Est-ce que Laurent Gbagbo peut renverser Chirac? C'est un non-sens. Et je crois que la communauté internationale prend conscience de plus en plus du caractère de cette politique de la France de vouloir venir faire coûte que coûte la loi en Côte d'Ivoire. Les Nations unies, qui ont une mission là-bas, devaient avoir deux missions. Parce que j'ai écouté des officiers français dire que l'opération Licorne fait double emploi. Parce que les militaires de la mission Licorne n'obéissent pas aux ordres de la mission militaire des Nations unies. Ils font ce qu'ils veulent. Et, en provoquant la persistance du désordre en Côte d'Ivoire, ils nuisent à nos intérêts en Guinée. Nous sommes en train de construire un camp à Kankan, dans la région du Massanta, dans la perspective d'un afflux de réfugiés venant de Côte d'Ivoire ou de personnes déplacées venant de Côte d'Ivoire pour de nouveau s'installer sur notre territoire qui a tellement souffert de la longue présence des réfugiés libériens. Vous comprenez, la France ne nous indemnise pas des dommages que la Guinée vit à cause de sa mauvaise politique. Et, historiquement, c'est un grand malheur que la France soit venue avec ses soldats provoquer des désordres insensés en Côte d'Ivoire et retarder la nécessaire coopération au sein de la CEDEAO.

N.V.: Mais cela se fait avec le soutien des pays africains?
J-M.D. : Cette catégorie de chefs d'État qu'on a actuellement, c'est des gens faibles. Pour la sécurité de leurs économies déposées en Europe, ils sont prêts à tous les affaissements. Notre dignité doit nous conduire à renoncer à deux ans de coopération avec la France pour lui dire que sa présence-là nuit à la coopération. La France n’a pas à savoir si le futur président sera Laurent Gbagbo ou Bédié, ou encore Alassane Ouattara ou je ne sais pas qui encore. Le problème de la France, c'est d'entretenir des relations équilibrées avec une nation. C'est une mentalité colonialiste de vouloir deviner d'avance celui qui doit être digne de parler avec nous. Ce sont des mesquineries qu'on reproche à Gbagbo. Ecoutez, je connais beaucoup de choses. J'étais très lié au président Houphouet-Boigny. Quand il venait à Genève, j'allais le voir à son domicile. Beaucoup de choses qu'on reproche à Laurent Gbagbo, mais Bédié s'en est rendu coupable, Houphouet s'en est rendu coupable. Donc il ne faut pas retarder le développement de la Côte d'Ivoire, qui est un grand pays ami à nous. Aujourd'hui, la clé du problème, c'est la France. Il faut que la France quitte la Côte d'Ivoire.

N.V. : Mais qu'est-ce que vous leaders politiques guinéens et africains faites pour faire entendre cette voix. Parce que les organisations sous-régionales, notamment la CEDEAO, aujourd'hui l'Union africaine, se sont complètement discréditées aux yeux de l'opinion ivoirienne, aux yeux des patriotes ivoiriens ? Des chefs d'Etat comme Wade et d'autres ont pris des décisions incongrues difficiles à accepter. Certains chefs d'Etat africains demandent au président Gbagbo de désigner un rebelle comme Premier ministre. Qu'est-ce que vous dites, vous les leaders africains ?
J-D.M. : Je dois être logique avec moi. Je n'ai pas le droit de porter un jugement de valeur sur les chefs d'Etat africains nommément désignés. Mais, en général, les chefs d'Etat africains sont faibles. Surtout les francophones devant la France. C'est tout juste s'il ne baissent pas leur slip. Et c'est incompréhensible. Ce sont des gens qui ont été élus, qui ont la confiance de leur peuple pour la plupart et qui sont des chefs d'Etat représentatifs de leur peuple. Qui n'ont pas besoin de l'appui de quelqu'un au dehors. Qui ont des choses à échanger contre l'aide de la France.
Si on est un pays dépendant de la charité de la métropole, on peut comprendre que, pour nourrir son peuple, on soit obligé d'y laisser un peu de sa dignité. Mais des pays nantis qui ont les moyens, qui autorisent la libre expression de leurs opinions, quand ces pays-là se conduisent comme ça, nous sommes étonnés. Je ne dis pas ça parce que je suis contre les intérêts français, non ! Au temps de mon ami Sékou Touré, j'ai demandé qu'il prenne la responsabilité de se réconcilier avec la France. Parce que, dans l'ensemble francophone, la France avait de bonnes relations avec le Sénégal, avec la Côte d'Ivoire, avec les autres. C'est difficile de déployer une diplomatie active dans ce contexte-là, puisque tous ces gens sont des prébendiers de la France. Si tu ne vas pas, ce n'est pas bon. C'est parce que la France a quelque chose à donner à la Guinée et la Guinée a donné beaucoup. Donc je suis pour la coopération avec la France. Mais je suis en désaccord total que la France vienne avec ses troupes parce qu'elles ont des bombes, parce qu'elles ont des avions de guerre, parce qu'elles ont l'opération Licorne pour venir maintenir le désordre, le chaos et la confusion dans un pays qui est un modèle.
Beaucoup de grandes nations ont compris le problème ivoirien. Je partage totalement l'opinion américaine sur la Côte d'Ivoire. S'il était de mon pouvoir, je soutiendrais l'opinion américaine sur la Côte d'Ivoire. Elle va aider la Côte d'Ivoire à se retrouver, et, plus tard, la France comprendra qu'il était bon qu'il y ait cette solution. Mais la France gagnerait elle-même à dreconnaître que l'opération Licorne a échoué et qu'elle doit la retirer.

N.V. : Avec la question de la monnaie commune, de la politique commune de la défense, dans tout ce débat d'intégration, la Guinée donne le sentiment d'être en retrait par raport à tous les mouvements qui se font. Au niveau de l'UPG, qu'est-ce que vous dites ? Qu'est-ce que vous prévoyez ?
J-M.D. : La Guinée est en retard sur le plan monétaire. Parce que les gouverneurs des banques centrales se sont réunis plusieurs fois à Conakry et ont défini les critères de convergence. C'est-à-dire la discipline monétaire qu'il faut observer pour qu'on puisse avoir la même vision, la même technique de gestion. La Guinée s'est écartée à cause du désordre dans la gestion économique dont je parlais tout à l'heure. Mais, par contre, en matière militaire, la Guinée est prête à apporter le fruit de son expérience de défense pour que les choses s'arrangent entre les Africains. Malheureusement, le président Lansana Conté n'est pas discipliné en matière de droit. Au lieu d'aller officiellement dans cette voie de la coopération où la Guinée a beaucoup de capacités, il le fait clandestinement, en contournant les institutions. J'ai dit, un moment, qu’il faut aider la Côte d'Ivoire à retrouver son unité. Mais ce n'est pas clandestinement qu'il faut le faire. Parce qu'il faut que notre peuple soit averti, que nos soldats, nos armes soient impliqués à défendre la vérité constitutionnelle quelque part. Mais si, un matin, M. Guillaume Soro bombardait un village de Lola parce qu'il a reçu des bombes sur son territoire et qu’après enquête, on découvre que ces bombes ont été vendues par la Guinée, ça crée une situation confuse. Donc il faut que notre peuple, par ses institutions, l'Assemblée nationale notamment, approuve un accord de défense en bonne et due forme avec la Côte d'Ivoire, le Mali, le Burkina Faso et que ce ne soit pas une armée de mercenaires. Parce que, quand nos soldats tombent sur le champ d'honneur, il faut qu'on les célèbre et qu'on les glorifie. On ne peut pas célébrer le corps d'un mercenaire. C'est comme si nos soldats devenaient des mercenaires. Si la Côte d'Ivoire a besoin de nous pour lui fournir des armes et des hommes pour défendre la légalité de son système, il faut que ça soit discuté dans le cadre d'un accord régulier. Je suis contre la clandestinité.

N.V. : Président, au terme de cet entretien, quel message avez-vous à lancer à la jeunesse africaine, à la jeunesse ivoirienne en particulier, qui se bat les mains nues face à l'occupant français?
J-M.D. : La France devrait et doit nous apporter beaucoup. Parce que, pour ce qui nous concerne, elle nous a colonisés pendant 50 ans. On n'est pas resté longtemps une colonie. C'est notre trait de caractère. Mais nous n'acceptons pas quand elle fait n'importe quoi en Afrique. Si nous dénonçons ses errements militaires en Côte d'Ivoire, c'est pour qu'elle fasse mieux. Les gens sont debout en Afrique. Ils le sont en Côte d'Ivoire. Ils sont debout en Guinée Bissau, au Sénégal, en Guinée. Mais le poisson pourrit par la tête. Les leaders constitutionnels ou institutionnels africains sont faibles. Ce n'est pas pour rien que les Européens ont été féroces contre la génération de Sékou et de Nkrumah. Parce qu'ils prenaient le contre-pied de leurs thèses. Quand Sékou Touré est mort, il avait 10 millions de dollars et on sait d'où venaient ces 10 millions. C'est le roi d'Arabie Saoudite qui lui a donné cet argent. Mais les gens qui sont venus après n'ont vu dans le pouvoir d'Etat que la satisfaction matérielle, l'accumulation de l'argent, toutes les facilités que ça procure. Ils ont vendu la dignité de leur peuple. Moi, j'aspire à être président de la République de la Guinée. Je le serai, c'est incontournable. Je gouvernerai la Guinée pour son bien, pour sa dignité, pour renouer avec les vertus ancestrales.
La jeunesse africaine, qu'est-ce que je peux lui dire ? De faire attention. Ce n'est pas le plaisir du temps présent qui fait la grandeur d'une nation. C'est l'esprit du patriotisme. Il faut accepter les contraintes.

Interview réalisée
en Guinée par




Guillaume T. Gbato Coll. Benjamin Koré

http://news.abidjan.net/presse/notrevoie.htm
_________________
"tout nèg a nèg

ki nèg nwè ki nèg klè
ki nèg klè ki nèg nwè
tout nèg a nèg

nèg klè pè nèg nwè
nèg nwè pa lè wè nèg klè
nèg nwè ké wéy klè
senti i sa roune nèg klè
mè nèg klè ké wéy klè a toujou nèg

sa ki fèt pou nèg vin' blang?
blang té gen chivé pli long?
pou senblé yé nou trapé chivé plat kon fil mang!!!
mandé to fanm...!
mè pou kisa blang lé vin' nwè?
ha... savé ki avan vin' blan yé té ja nèg!

a nou mèm ké nou mèm dépi nânni nânnan...
chinwa soti, kouli soti, indyen soti, blang soti
mèm koté nèg soti

avan yé sotil koté y fika
AFRIKA!!!"

Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
Montrer les messages depuis:   
Poster un nouveau sujet   Répondre au sujet       grioo.com Index du Forum -> Politique & Economie Africaines Toutes les heures sont au format GMT + 1 Heure
Page 1 sur 1

 
Sauter vers:  
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas voter dans les sondages de ce forum



Powered by phpBB © 2001 phpBB Group