Posté le: Jeu 16 Aoû 2007 12:32 Sujet du message: Symbolisme des couleurs en Afrique
Les commentaires qui vont suivre proviennent de la lecture du livre d'Oscar Pfouma intitulé L'Harmonie du monde, anthropologie culturelle des couleurs et des sons en Afrique depuis l'Egypte ancienne, éd Menaibuc, 2000.
Selon Serge Sauneron cité par Pfouma, "la lumière, pour les Egyptiens, est une pluie de petites particules lumineuses (photons), comparable à la fine poussière qui sort d'un tamis (nkr)". Théophile Obenga observe en outre que les Kmtyw concevaient aussi la lumière comme un faisceau d'ondes dont les vibrations se propagent dans l'espace. Bref, une connaissance très ancienne de certaines propriétés de la lumière est attestée en Afrique, notamment les corrélations entre lumière et couleur...
R.E. Denett a écrit:
The idea of colour [awo] is first perhaps obtained from the Rainbow Oshumare [= sd m r3 en égyptien ancien], who is reported to be a great snake [...] [Nigerian studies, 1968]
Selon Oscar Pfouma :
-Noir = couleur des origines : mort/vie, renaissance ou résurrection...
-Blanc = la lumière. Pour les Bambara, c'est la couleur du Sud, région où séjournent les ancêtres...
-Rouge = savoir-sagesse. Mais aussi son envers, ie la puissance destructrice (de Seth, par exemple)...
- Bleu = paix et sérénité de l'initié. Egalement couleur d'Amon...
- Vert = fertilité, regénération
- Jaune = éternité, "couleur de la chair des Dieux"...
D'autres interprétations existent, qui sont parfois en contradiction avec celle-ci. Ce serait intéressant d'en rapporter ici, afin d'essayer de voir/comprendre les différences ou similitudes des symboles... _________________ http://www.afrocentricite.com/ Umoja Ni Nguvu !!!
Les Panafricanistes doivent s'unir, ou périr...
comme Um Nyobè,
comme Patrice Lumumba,
comme Walter Rodney,
comme Amilcar Cabral,
comme Thomas Sankara,
Et tant de leurs valeureux Ancêtres, souvent trop seuls au front...
Dernière édition par OGOTEMMELI le Lun 03 Sep 2007 09:11; édité 1 fois
Viviana Pâques a proposé un autre symbolisme des couleurs en vigueur, notamment, dans la région de Tidikelt où le :
- Blanc = couleur du Ciel, correspondant à l'Est. Cette couleur évoque le Feu "symbolisé par la pierre, et, mieux encore, le météore ou la montagne".
-Rouge = couleur de la Terre, correspondant à l'Ouest. Cette couleur évoque l'Eau symbolisée par "la grotte (ou mieux la nappe d'eau sous la montagne) et le fer.
- Noir = Nature (la Terre en tant que biosphère) et correspondant au Nord. Le noir symbolise la fécondité ; c'est la couleur du Serpent Triple ou Arbre Cosmique...
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En Afrique, l'opposition entre Osiris le Noir, et Seth le Rouge, les âmes fondatrices de Nekhen, entre Km, le Noir, et Dsr le Rouge documente de la manière la plus ancienne connue un étymon des mythes de fondation, des discours de pouvoir et de culture africains. [...]
La formation du lexique des couleurs, la morphologie même de la langue, de son appareil lexical s'est opérée à partir des catégories de base du spectre africain des couleurs dont les extrêmes sont le rouge et le noir.
[...] le rouge fait l'objet d'une grande mobilité sémantique, ordonnée de la vie à la mort. [...] Théophile Obenga ne distingue pas moins de cinq "rouges" en mbochi, aux emplois rituels et aux champs sémantiques encore peu étudiés. Le rouge Tso symbolise le pouvoir, sa puissance agressive. Le rouge mondo, plus clair, est associé au blanc, pembe, dans les cérémonies gémellaires conduites par le nganga. Le rouge du sec n'est pas le rouge de l'humide et leur rapport au noir diffèrent nécessairement.
La vie est rouge (E. Mveng), la puissance, le désordre et la guerre sont rouges (T. Obenga), les fibres de la mort sont rouges (M. Griaule) et le pays des morts aussi (Textes des Pyramides). De même la sécheresse et la stérilité (L. De Heusch).
[...] les Egyptiens avaient l'habitude de peindre rituellement leur corps avec un pigment rouge. Il ne s'agit pas d'un rite de dévotion séthien, mais bien d'un rite pastoral que l'Egypte partage avec l'univers culturel des vachers de l'Afrique, et même de l'Inde, voire avec la Caraïbe.[...]
Le rouge est aussi la couleur de la force brutale, de la violence de la nature, la couleur de Seth et d'Ogun, les dieux guerriers de l'Egypte, de la Nigeria et d'Haïti. [...] le rouge est enfin la couleur de la mort et de la stérilité. [...] Le rouge est la couleur du deuil Yoruba. [...]
Dans la symbolique haïtienne des couleurs, conclut excellement Maximilien Laroche, ce n'est pas le blanc, mais le rouge qui est le contraire du noir. [...]
L'opposition entre Seth le rouge et Osiris le noir, entre T3 dsrt, la terre rouge, et T3 kmt, la terre noire, le limon du Nil, ne doit faire ni écran ni illusion. [...] C'est que kmt peut être un collectif : "les Noirs" comme l'a très bien montré Cheikh Anta Diop (1977, 92).
L'opposition du Noir et du Rouge ne doit rien à des conflits de "races" riveraines, ni à la texture des sols. Elle est interne à la culture égyptienne, comme elle l'est à la culture bantoue, et à la culture ouest-africaine et saharienne.
Elle y est même structurante, comme l'est l'opposition de Gervilen et de Manuel dans les Gouverneurs de la rosée ou celle du Mardi Gras et du Mercredi des Cendres du carnaval martiniquais ; l'hybris et la culture ; les masques du Taureau Rouge débordants de vie, et le dieu sacrifié, appelé à renaître, dans la sagesse mystérieuse du deuil. Le Mardi du canarval martiniquais est au fond le jour de seth, et le Mercredi celui d'Osiris.
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Posté le: Mar 11 Sep 2007 16:40 Sujet du message:
Arara Dajome a écrit:
Ce à quoi je vois associé le rouge en Egypte c'est à la colère, à l'agressivité (cf. les expressions coeur rouge visage rouge=furieux), la stérilité du désert, Seth, les étrangers à peau claire, etc...
Le rouge est symbolique de la victoire, est associée à la force (cf le sang de l'ennemi en Egypte) En Haïti effectivement comme l'a souligné Ogotemmeli, le route représente la force, les adeptes du vaudou porte un foulard rouge sur la tête lors des cérémonies.... _________________
"- A quoi est due la chute d'Adam et Eve ?
- C'était une erreur de Genèse."
(Boris Vian / 1920-1959)
Ce à quoi je vois associé le rouge en Egypte c'est à la colère, à l'agressivité (cf. les expressions coeur rouge visage rouge=furieux), la stérilité du désert, Seth, les étrangers à peau claire, etc...
Anselin, à la suite d'Obenga, souligne qu'en Afrique "[...] le rouge fait l'objet d'une grande mobilité sémantique, ordonnée de la vie à la mort"...
D'abord, il n'y a pas qu'une seule nuance de rouge ; ensuite c'est le contexte de performance d'une couleur qui en détermine la signification. Car, bien entendu, aucune couleur ne possède de signification en-soi, ni à Kmt, ni ailleurs. Aussi, les éléments que tu signales ne sont pas contradictoires avec ceux évoqués ci-avant...
Cathy a écrit:
Le rouge est symbolique de la victoire, est associée à la force (cf le sang de l'ennemi en Egypte) En Haïti effectivement comme l'a souligné Ogotemmeli, le rouge représente la force, les adeptes du vaudou porte un foulard rouge sur la tête lors des cérémonies....
Wouj, Vè, Nwè : Twa koulè ba an drapo !
Nous savons que de nombreux documents font état des drapeaux arborés par les esclaves lors des grands événements qui ont précédé la révolution anti-esclavagiste de 1848, mais nous ne pouvons affirmer que ces drapeaux portèrent les trois couleurs rouge-vert-noir.
Nous savons aussi que Jean Kina, lors de la rébellion d'esclaves au Carbet en 1801, déploya les couleurs rouge et noir des rebelles à l'image de leurs frères d'Haïti, de Louisiane, de Jamaïque et de Guadeloupe. Mais c'est véritablement en 1870 que l'association des couleurs rouge, vert et noir est apparue dans nos luttes.
Les trois couleurs rouge, vert et noir disposés en bandes horizontales sont le symbole de lutte des noirs aux Etats-Unis d'Amérique pour leur libération.
C'est depuis 1968 que la signification du triangle rouge et des quadrilatères vert et noir existe pour symboliser notre Martinique, en 1971, grâce à l'action du MNLM (Mouvement National de Libération de la Martinique).
A la fin du mois de septembre 1870, le sud de la Martinique s'embrasait sous le coup d'une révolte populaire qui entraîna la destruction d'une trentaine d'Habitation de Békés. De Rivière-Pilote à Saint-Anne, de Saint-Esprit au Vauclin en passant par Sainte-Luce et Rivière-Salée , plus d'un millier de Martiniquais en armes se dressa contre l'arbitraire des possédants et des forces coloniales.
L'élément qui servit de détonateur à ce que l'histoire a retenu sous le nom de l'INSURRECTION DU SUD, fut l'altercation violente entre le nègre Léopold Lubin et le Français Augier de Maintenon. Altercation qui se termina devant les tribunaux où le premier fut condamné à 5 ans de réclusion au bagne de Cayenne.
Indignés devant une telle injustice, des nègres de toutes conditions à la tête desquels se distinguèrent Eugène Lacaille , Louis Telga ou encore Rosalie Soleil, levèrent un grand vent de révolte. La France venait d'être vaincue par la Prusse à Sedan et dans les rues de nos villes du Sud, la population dansa aux cris de "Vive la Prusse!"[...] la Martinique faillit, en septembre 1870, basculer dans l'indépendance.
L'un des éléments, rarement souligné par les historiens, est le fait que les insurgés arborèrent à plusieurs reprises des foulards ou des bandeaux rouge-vert-noir en signe de ralliement.[...] Nous ne savons pas quelle signification exacte les insurgés attribuaient à ces trois couleurs, mais il n'est pas difficle de le deviner :
Le Rouge : pour la révolte contre l'injustice.
Le Vert : pour le pays, ses arbres et ses champs
Le Noir : pour la couleur de la peau
Les Panafricanistes doivent s'unir, ou périr...
comme Um Nyobè,
comme Patrice Lumumba,
comme Walter Rodney,
comme Amilcar Cabral,
comme Thomas Sankara,
Et tant de leurs valeureux Ancêtres, souvent trop seuls au front...
Vraiment heureuse d’être tombée sur ce sujet que je trouve très intéressant. C’est vrai qu’on a rarement l'opportunité de se poser la question sur la symbolique des couleurs à Kama (en Afrique) qui est pourtant très importante car elle agit sur notre psychisme. Chaque civilisation a pourtant élaboré sa propre conception des couleurs. À l’heure actuelle, pour ce qui est de l’Afrique, notre perception n’est vue qu’à travers le prisme européen et a des conséquences négatives sur notre façon de penser et de nous penser de façon générale. Il n’y a pas plus énervant d’entendre à longueur de journée des expressions ou des mots comme broyer du noir, marché noir, jeudi noir, être sur la blacklist etc. C’est pour ça qu’il est très important d’avoir en tête notre propre symbolique. Je voulais donc savoir quelle était la traduction en médou neter (hiéroglyphes) et dans vos langues respectives de chacune des couleurs à savoir Noir, Rouge, Jaune, Orange, Vert, Bleu, Violet, Rose, Blanc, Gris, Marron (brun). Sont-elles déjà toutes prises en compte dans la culture africaine antique et actuelle ? Exemples : noir traduit par kem (renaissance, resurrection etc.), rouge par desher associé à Seth et blanc par hedj (détruire, anéantir, incomplet). Voilà pour les traductions que je connais. Et également qu’est-ce que vous pouvez nous en dire débarrassés bien sûr des préjugés du passé ? J’étais tombée une fois sur une dictionnaire fon où tout ce qui était positif renvoyait au blanc et le négatif au noir (la colonisation étant passée par là) j’étais très .
J’étais tombée une fois sur une dictionnaire fon où tout ce qui était positif renvoyait au blanc et le négatif au noir (la colonisation étant passée par là) j’étais très .
Salut Bahamadia,
Te souviens-tu de quel ouvrage il s'agissait exactement?
Merci d'avance,
Arara
Le dictionnaire sur lequel j'étais tombé appartenait à une collection. Je crois que le titre était "Parlons Fon". Pas sure.
Sinon, excuse mon ignorance, mais est-ce que tu peux me dire où tu as lu que le blanc était associé à la destruction et à l'incomplétude en Egypte pharaonique?
Dans les dictionnaires de hiéroglyphes : il y a Gardiner et Budge. Je crois que c'est plus Budge où tu auras les traductions. Tous les références sont dans les livres de René-Louis Parfait Etilé et surtout dans ce livre : ETUDE SUR UNE CIVILISATION AFRICAINE, L’EGYPTE ANTIQUE.
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