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Sembène Ousmane (1923-2007), l'ingénieur des âmes
03/07/2007
 

Pierrette Herzberger Fofana revient sur la vie et l'oeuvre de l'écrivain et cinéaste sénégalais Sembène Ousmane, pionnier du cinéma africain, et militant engagé, décédé en juin 2007 à Dakar
 
Par Pierrette Herzberger- Fofana
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L’Allemagne à l’heure de l’Afrique

Pour la plupart des Africains présents à Düsseldorf, Sembène Ousmane évoque des souvenirs scolaires liés aux lectures et devoirs d'école. Aussi, nombreux sont les Africains qui sont venus voir le film « Faat Kiné » après avoir connu les oeuvres de l'auteur dans leurs salles de classe respectives à Brazzaville, à Kinshasa, à Lomé, à Ouagadougou ou à Dakar.

La présentation du film a été précédée d’une communication sur «le rôle de la femme au Sénégal: l’héroïsme au quotidien», faite par l'auteur de ces lignes, et d’un débat aux côtés du cinéaste et des membres du comité organisateur de «Jappo».

Le débat a tourné autour de la situation de la femme dans un pays en développement, de la polygamie, des relations parents-enfants au Sénégal. Les questions sur l’islam ont suscité un vif intérêt de la part du public. Elles ont provoqué une discussion animée sur les rapports entre l’islam et le christianisme. La cohabitation pacifique qui règne entre ces deux religions révélées a surpris plus d’un spectateur Allemand habitué à voir brandir le spectre d’un islam destructeur.



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La soirée a été consacrée à la lecture, en allemand, de certains passages du roman de Sembène Ousmane intitulé «Xala». Durant deux heures, le public a découvert l’humour caustique de l’écrivain et suivi avec intérêt les mésaventures de son héros qui après avoir cherché en vain un remède pour soigner son impuissance ou «xala» (en wolof) va s’exposer à la salive des mendiants.
Düsseldorf, ville de la mode et siège du gouvernement de la Rhénanie du Nord et de la Westphalie, a vécu à l'heure de l'Afrique. En effet, la projection du film «Faat Kiné» a réuni toute la presse locale et tiers-mondiste ainsi que les personnalités de la région et les amis du continent africain.

Sembène Ousmane fait partie des écrivains-cinéastes Africains qui jouissent d'une large audience au pays de Goethe, Schiller et Günther Grass. La plupart de ses romans sont traduits en allemand. En outre, certains de ses films, tels « Xala » «Camp de Thiaroye», «Guelwar» et « Mooladé » ont passé à plusieurs reprises, à la télévision, sur la deuxième chaîne nationale (ZDF). Ils étaient sous-titrés en allemand.

Au mois de décembre 2006, lors du Colloque sur les Mutilations Génitales Féminines à Berlin, le Président de la République Fédérale Allemande, Mr. Horst Köhler a fait référence au film de Sembène Ousmane « Moolade» dans son discours. Il a déclaré:


«Moolade ou le sortilège de l'espoir» est le titre du film que le cinéaste Sembène Ousmane a fait dernièrement. Il traite des mutilations génitales féminines de manière poignante. Sembène est l'un des plus grands cinéastes Africains. Il a plus de 80 ans. En Afrique, c’est un homme que l'on écoute. Il prend fermement position. Son point de vue nous parvient de l’Afrique ».

(Allocution du Président de la République Fédérale Allemande Horst Köhler lors de la conférence de la GTZ Berlin 12-13-Décembre 2006)


Le 8 juin 2007, alors que le maître du cinéma africain se trouvait à l'agonie, des jeunes du monde entier lui rendaient hommage à Cologne (Allemagne). Le visionnement de son film "Moolade" avait été organisé dans le cadre des Journées de l'église protestante «évangelischer Kirchentag».

Éléments biographiques
 
© opendemocracy.net  

L'écrivain Sembène Ousmane est né le 1er janvier 1923, à Ziguinchor, en Casamance (Sud du Sénégal). En 1937, il gifle le directeur de son école qui voulait lui apprendre le corse. Il est exclu de l’école primaire et il part à Dakar. Il devient pêcheur, mécanicien et maçon, puis finit militaire. En 1942, il est mobilisé dans l'armée française et intègre un régiment de tirailleurs. Il est envoyé au Niger, au Tchad, en Afrique du Nord, puis en Allemagne. Démobilisé à Baden-Baden (Allemagne,) il retourne en France où il milite dans le syndicat. En 1950, il adhère au parti communiste français (PCF) puis à la Confédération générale des travailleurs (CGT). Il milite contre la guerre d'Indochine et pour l’indépendance de l'Algérie. À cette époque-là, la France est en guerre au Vietnam. Avec ses collègues, il bloque le port de Marseille pendant trois mois pour empêcher l'embarquement d'armes destinées à l'Indochine.

Sembène travaille comme docker à Marseille et publie son premier roman u "Le Docker noir". Au cours d'une interview, il a affirmé que :

"Être docker à Marseille, c’est un métier très dur, mais on formait une famille qui m’a permis de découvrir, non pas la France, mais le peuple de la France".


Au sein du Parti Communiste français, il découvre la littérature en lisant les fameux "Cahiers du Sud", et prend goût au théâtre. Il fréquente le Théâtre national de Paris (TNP) et écoute les compositeurs classiques comme Ludwig van Beethoven.

En 1960, année de l'indépendance du Soudan Français et du Sénégal, qui formeront l'éphémère fédération du Mali, Sembène rentre au Sénégal, après un long périple à travers le Mali, la Guinée et la Côte d'Ivoire. C'est de ce voyage à travers l'Afrique que germe l'idée de faire du cinéma. L'analphabétisme et la précarité de la vie des masses populaires sont la source de son inspiration. Il souhaite transmettre une image réelle de l’Afrique, différente de celle qui est présentée dans la vision occidentale édulcorée d'un paradis colonial ou post-colonial.

De 1961 à 1963, il poursuit une formation cinématographique à l’École des Hautes Études Cinématographiques de l'Institut Maxim Gorgui à Moscou. ll apprend à manier la caméra sous la direction de Marc Donskoï et Serguei Guerassimov. Puis, il retourne au Sénégal. Ardent défenseur des langues nationales, il entreprend d'alphabétiser en langues africaines. En 1971, il créé un journal en wolof, "Kaddu".

Sembène Ousmane est père de trois enfants. Le 16 juin 2006, la commission nationale du ministère de la culture et du patrimoine classé sélectionnait les premiers “Trésors Humains Vivants” de l'histoire du Sénégal. Sembène y tient une place d'honneur.

L' OEUVRE ENGAGÉE DE L’ÉCRIVAIN CINÉASTE
 
© english.emory.edu  

Sembène Ousmane est l’un des rares écrivains Sénégalais de la première génération qui, mis à part la formation qu'il a obtenue en Russie, n’a pas fait d’études supérieures. C’est un Autodidacte. Il a publié de nombreux romans qui témoignent de son engagement politique. Son œuvre reflète son engagement politique et son adhésion au marxisme. Le romancier passe au crible la société traditionnelle, celle des indépendances et des politiciens véreux, comme en témoigne son roman "Le dernier de l'empire". Ses romans et ses films sont généralement des miroirs de la société africaine. Il a une vision panafricaniste qui se reflète dans ses œuvres. En effet, même s’il situe ses héros dans la société sénégalaise, les problèmes qu’il aborde se retrouvent ailleurs en Afrique.

Au cours de notre interview, Sembène a dévoilé sa conception du rôle de l'artiste. Il est d’avis que grâce au don qu'il possède, l'écrivain doit créer des œuvres car :


Créer, c’est participer à l’évolution de la masse, c'est-à-dire essayer d’être ce qu'on appelle l'ingénieur des âmes ou le forgeron de caractères
Sembene Ousmane (P.H.F. 1983/62)




Le Docker noir

Dans les années 50, l'Aîné des Anciens travaille comme docker à Marseille. À la suite d’un accident, Sembène doit demeurer en arrêt de travail pendant plusieurs mois. Durant cette période, il écrit son roman qui, en fait est un roman autobiographique. En effet, Diaw Falla est docker le jour et écrivain la nuit. Il confie son manuscrit à Ginette pour qu’elle l'aide à le faire publier. Cette dernière fait publier le roman sous son propre nom. Diaw la tue accidentellement. Il sera condamné. C’est une oeuvre tragique, où racisme et pauvreté entrent en ligne, mais surtout l’hostilité de l’entourage qui ne croit pas en ses capacités intellectuelles, et ce, uniquement en raison de la couleur de sa peau. Le seul soutien vient des frères de souffrance et d'espoir. Pourtant l'auteur met dans la bouche de l'un des protagonistes, une phrase combien révélatrice : «Ne mettez pas votre couleur en cause. Acceptez vos responsabilités d’aujourd’hui et celles de demain”.


O pays. Mon beau peuple

Après avoir servi dans l'armée française, le héros retourne au pays avec sa femme Française dans son village de Casamance. Les difficultés ne tardent pas à se faire sentir, car Faye va tenter d'insuffler dans le pays un vent d'innovation et de progrès bien opposé aux objectifs de l'administration coloniale. Ses compatriotes le considèreront comme un héros, lorsqu’il sera tué par l’un des mercenaires engagés par ses ennemis pour l’éliminer. À travers ce roman, l'écrivain nous offre l'image d'une Afrique tourmentée et révoltée qui veut se construire en rejetant une tradition aliénante.

 
 

Les bouts de bois de Dieu "Gottes Holzstücke"

Le roman a pour arrière-plan la grève des cheminots du Dakar-Niger, qui a eu lieu d’octobre 1947 à mars 1948. Thiès et Bamako sont les têtes de pont du mouvement de grève. Selon la tradition, on ne doit ni compter les êtres humains ni les nommer, afin d’éviter d’attirer le malheur sur eux. On utilise à cet effet un euphémisme : "Les bouts de bois de Dieu".

Le romancier livre une description détaillée des motifs de la grève, qui a duré cinq mois, et il dévoile les raisons qui poussent les cheminots à interrompre le travail. Elles résultent toutes de leur situation de travailleurs Africains comparativement à celle de leurs collègues Européens qui jouissent de privilèges sans commune mesure. Les revendications des cheminots peuvent se résumer en quelques mots: augmentation des salaires, allocations familiales, vacances annuelles, retraites et le droit de créer leur propre syndicat. La ligne de chemin de fer dessert les trois grandes villes : Dakar, Thiès et Bamako, qui deviennent les centres de la rébellion. Soutenus par leurs épouses, les grévistes organisent une marche et descendent sur Dakar, siège de l’administration coloniale.

La marche des grévistes marque le point culminant de la grève. Partis de Thiès, la ville du rail, les grévistes sont accueillis partout par une foule enthousiaste. Aux portes de la capitale, l’une des protagonistes, Penda, s’effondre sous les balles de la police. Les grévistes obtiennent gain de cause puisque l’administration est prête à engager des pourparlers et finalement accepte leurs revendications.


Ce roman, qui remet en question le système, est l’un des chefs d’oeuvre de la littérature africaine. Le caractère authentique des personnages et le style engagé de l’auteur confèrent au roman un cachet réaliste et vivant. L'ouvrage, un classique de la littérature africaine, figure au programme scolaire de la plupart des États d'Afrique francophone. L’auteur a obtenu le grand Prix littéraire de l'Afrique noire.


Voltaïque

Cette collection de treize (13) nouvelles se rapporte aux problèmes socio-politiques de l’Afrique contemporaine.

Plusieurs nouvelles ont pour personnage principal, la femme. Dans "La Noire de...", le romancier dépeint une jeune fille, domestique de maison, qui suit ses patrons en France. Elle finit par se suicider, car elle ne peut plus supporter la vie qu’elle mène avec eux. "Lettres de France" décrit une forme de mariage forcé. Une jeune fille est mariée à un vieil immigré qui réside á Marseille. L’union conjugale, dans de telles conditions, s´avère difficile. "Ses trois jours" traite du problème de la polygamie. Une jeune femme attend en vain que son mari vienne honorer sa couche, conformément aux lois islamiques, car c’est "son tour". L’auteur décrit les affres auxquelles est en proie la protagoniste lorsqu’elle constate que l’époux ne respecte pas ses engagements matrimoniaux.

L’Harmattan

Le roman fait partie d’une trilogie qui n’a jamais été publiée. Le thème principal du livre est le référendum du 2 septembre 1960 auquel les pays africains devaient répondre par "Oui" ou par "Non", s’ils adhéraient à la Communauté franco-africaine proposée par le Général de Gaulle. Le "Oui" signifiait accepter la communauté et le "Non" signifiait prendre l’indépendance immédiate.

 
 

Le Mandat suivi de Vehi-Ciosane ou Blanche-Genèse

Ibrahima Dieng a reçu un mandat de son neveu qui vit en France. C’est alors que commencent ses tribulations.
Comment retirer le mandat, puisqu'il ne possède pas de carte d'identité, un document indispensable pour obtenir l’argent? Comment obtenir une carte d'identité s'il n'a pas d'extrait de naissance? En outre, que faire pour ne pas être la proie de ses créanciers qui sont bien décidés à avoir leur part ?
Sembène décrit le petit peuple urbain à la lisière entre l’Afrique traditionnelle et celle de l’administration et de la bureaucratie tatillonne.

Vehi -Ciosane ou blanche- Genèse

L’auteur traite du thème de l’inceste dans un village traditionnel du Sénégal. Le roman a été mis en scène sous le titre de «Niayes ». Ici aussi Sembène s'inspire d'un fait vécu, comme il nous l’a déclaré dans notre entretien :

Les cas d’inceste existent chez nous et j'en ai été le témoin. Il faut que l'Africain ait le droit de les connaître, comme il y a des cas d'infanticide (ibid.PH.F p.62)

Xala traduit en allemand  
Xala traduit en allemand
 

Xala

L’homme d'affaires, El Hadj Abdou Kader Bèye, a décidé de convoler en noces, pour la troisième fois, avec une jeune ingénue. La nuit de noces, il est atteint de "xala" ou impuissance sexuelle. Selon la mentalité du pays, les co-épouses seraient à l’origine d’un telle malédiction. Le héros se met alors en quête de guérisseurs réputés du pays pour soigner son mal. Il néglige ses affaires et elles périclitent. Cette impuissance marque le début de sa déchéance sur le plan conjugal, économique et social. Il est exclu du groupement des opérateurs économiques, car il a perdu l’appui des banques.

Le héros se croit victime d’une malédiction. Le "xala" lui a été lancé par un paysan qu’il avait autrefois ruiné. La dernière scène s'achève sur une image quasi fantasmagorique: un groupe de mendiants, guidé par l’homme qu’il avait démuni, doivent lui cracher dessus afin de mettre fin à ce mauvais sort. Le protagoniste sent sa puissance virile lentement renaître, au fur et á mesure que la salive inonde son torse nu.
Cette satire met en exergue les maux dont souffre la société sénégalaise. La polygamie engendre parfois la destruction de la famille. L’intrigue, qui se situe en milieu bourgeois, permet à l’auteur de faire le procès de cette couche de la société.


Le dernier de l’empire

L’auteur considère ce livre comme une oeuvre de "fiction politique". Il retrace le parcours politique du Sénégal sous la première république. Le roman comporte deux tomes et l’intrigue se déroule en 6 jours. Le Président Léon Mignane a disparu mystérieusement après avoir fomenté un coup d’état dans le pays. La vacance du pouvoir est l’occasion pour les ministres de s’affronter et de régler leurs différends. Seul le doyen, Cheikh Tidiane fait preuve de lucidité.

Niwam suivi de Taw

Ce sont deux nouvelles dont l'écriture est incisive. "Niwam" retrace un fait divers: un homme, étranger à la ville, circule dans Dakar, en bus, en portant le cadavre de son enfant nouveau-né. "Taw" nous plonge dans le monde des bidonvilles, qui, selon l’auteur, est le creuset dans lequel se façonne l’Afrique contemporaine.

Guelwaar:

Dans un village, un chrétien est inhumé dans un cimetière musulman. Cela ne manque pas d'entraîner des bouleversements et des situations aussi grotesques qu'effrayantes. Le cinéaste dénonce les tares d’une société contemporaine, dans son vécu quotidien. Il montre également comment un conflit religieux peut éclater à tout moment sur la base d'un malentendu.

Les romans de Sembène Ousmane sont des fresques de la société contemporaine. L'auteur souligne les tares de la société africaine postcoloniale, où le pouvoir de l’argent prime sur toute autre considération et où les valeurs ancestrales sont foulées au pied. Tous ses romans sont des oeuvres de critique sociale. Il lègue à la postérité une riche filmographie et une oeuvre dense. L'infatigable cinéaste revendique un cinéma militant. Pour transmettre son message, il n’hésite pas à sillonner l'Afrique à la recherche du lieu propice où l'action doit se dérouler.

LES ŒUVRES CINEMATOGRPAHIQUES DU PIONNIER DU CINEMA AFRICAIN
 
 

Le pionnier du film africain a tourné des courts métrages, des documentaires et des films de long métrage. Sembène est conscient du niveau élevé du taux d'analphabétisme qui sévit dans les couches populaires. Il sait également qu’elles n’ont pas les moyens de s’acheter des livres qu’elles considèrent comme un luxe. L'écrivain abandonne donc la plume pour un certain temps et passe derrière l'écran qui lui permet d’atteindre le grand public. Dans l'interview qu'il m’a accordée, il y a quelques années, il a déclaré:

"Je prends mon cas: un livre écrit en français s'adresse au maximum à 20% de la population. Parmi ces 20% de lecteurs, peut-être 10% sont des lecteurs potentiels. Il reste maintenant 80% de la masse qui ne sont pas lettrés et dont le pouvoir d’achat ne leur permet pas d'accéder à la littérature, même s'ils le voulaient. Il reste donc peu de lecteurs. (P.H.F 1983/p. 58)

En mai 1987, le journal Libération a posé la question suivante à sept cents cinéastes : "Pourquoi filmez-vous ?" Sembène a répondu : "Je ne sais pas encore pourquoi je filme, mais tout un peuple m'habite et je dois témoigner de mon temps ».

Et, dernièrement, il affirmait :

En Afrique on ne fait pas de cinéma pour vivre, mais pour communiquer, pour militer
Sembene Ousmane


Ses films sont tous des témoignages d'un pan de l'histoire contemporaine. Il met à nu les défauts, mais aussi les difficultés que connaissent les héros et héroïnes pour parvenir à leurs fins. Sembène veut éduquer et faire connaître l'histoire d'Afrique, d'où le côté réaliste de la plupart des films qu'il présente.

En 1963, il tourne son premier court métrage : « L’empire Songhaï », un documentaire sur l'histoire du royaume du Songhaï.


Dans "Borrom Sarret" (Le charretier) il décrit le quotidien d’un charretier à Dakar et les tracasseries de l’administration. Le film a obtenu le Prix de la Première œuvre, lors du festival de Tours.

"La Noire de…" est le premier long métrage africain. C’est l'histoire d'un couple de coopérants qui ramènent leur bonne en France. Douna devient une chose que l'on se passe de famille en famille. Dans « La Noire de », la trame du film porte sur la problématique de l’exil et son cortège de souffrances ainsi que la perte d'identité de la protagoniste. L'auteur jette un regard critique sur un aspect de la période post-coloniale et les conséquences tragiques qu’elle entraîne pour la protagoniste, qui finit par se suicider. Le film a été primé lors du Festival Mondial des Arts Nègres (1966). Il marque les débuts du cinéma africain francophone.

Dans "Niayes", la mise en scène de "Vehi-Ciosane", un griot relate une histoire dramatique. Une jeune femme est chassée de son village, car elle est enceinte. Un travailleur saisonnier va être soupçonné. Finalement, il s'avère que son état est l'œuvre de son père.

"Manda-bi", tiré de son roman "Le Mandat", a également été présenté, en 1968, au festival du film de Carthage. Le ton est ironique et amusant. Le spectateur participe aux tribulations du héros, qui a reçu un mandat de Paris, et, qui fait tout pour se soustraire aux sollicitations de ses voisins et de sa famille.

Emitaï de Sembène Ousmane  
Emitaï de Sembène Ousmane
© shedhalle.ch
 

"Emitaï", paru en 1971, est un film historique. Il rapporte le rapt, par des Français, de jeunes gens en âge de combattre. Cela se produit dans un village également frappé par l'impôt obligatoire sur la récolte de riz. Le refus des villageois d’obtempérer aux ordres des forces de l'ordre va de pair avec une résistance farouche que les femmes opposent à l'autorité coloniale. Emitaï se termine par un massacre. L'auteur, fidèle à sa ligne de conduite, présente des images poignantes de femmes qui ont caché le riz récolté et les palabres des hommes qui s'en remettent aux dieux. Les femmes se rebellent au prix de leur vie. Sembène a déclaré : "Pour moi, "Emitaï" évoque une époque charnière, celle de l'Africain et de ses fétiches. L'administration coloniale d'alors et les hommes d'alors, puis le conflit entre le spirituel et le temporel ... Cette période évoquée mettait à nu les faiblesses des tabous, des dieux et faisait naître un nouveau sentiment encore inconnu par ces hommes et ces femmes".

"Taw" se déroule dans un centre urbain. Un jeune chômeur ne parvient pas à trouver un travail qui lui permettra de subvenir aux besoins de sa future famille. Les parents de sa fiancée ne veulent plus la garder, car elle attend un enfant.

Avec "Ceddo" (1976), le cinéaste entre en conflit ouvert avec les autorités. Il refuse de se soumettre à l'orthographe officielle. Bravant la querelle sur les géminations "cedo" ou "ceddo", qui animait les milieux linguistiques sénégalais. Sembène orthographie le mot avec 2 d, contrairement à l'ordonnance officielle qui stipule qu’il faut mettre un seul "d". En fait, il agit ainsi pour s’opposer au pouvoir de Léopold Sédar Senghor, tout comme, il fait précéder son prénom de son nom de famille et se fait appeler Sembène Ousmane et non Ousmane Sembène. Le film tombe sous le coup de la censure et il est longtemps interdit au Sénégal, durant la présidence de Léopod Sédar Senghor, officiellement pour une question de grammaire: les géminations. Sembène y traite de la question des conversions forcées des paysans africains à l'Islam, au XVIIe siècle. Il n'hésite pas à évoquer les pages les plus sombres de l'histoire d'Afrique : les conflits religieux du XVIIe siècle.

 
© shedhalle.ch  

"Xala" est une satire caustique de la bourgeoise urbaine qui lui a valu plusieurs distinctions

En 1992, Sembène tourne les films "Guelwar" et "Camp de Thiaroye". Dans "Camp de Thiaroye", il décrit les revendications des Tirailleurs Sénégalais confinés au camp de Thiaroye, lors de leur retour d’Europe, à la fin de la Seconde Guerre Mondiale.
En 1944, un bataillon de tirailleurs arrive au camp de transit de Thiaroye, au Sénégal, pour être démobilisé. Ces hommes reviennent d'Europe où ils ont combattu pour libérer le vieux continent du joug nazi. Leur fierté d'anciens combattants fait bientôt place à une désillusion amère devant les promesses non tenues de la « Mère-Patrie » concernant leur pécule de guerre et les humiliations et le racisme de la hiérarchie militaire. Ils organisent une mutinerie. La répression s'abat sur ces braves soldats. Il
s’ensuit un véritable carnage qui fera vingt-cinq morts et de nombreux blessés. Les meneurs seront emprisonnés. Ces soldats ont été massacrés par des gradés Français, en 1945, pour avoir osé réclamer à juste titre leur dû.

"Camp de Thiaroye" est un hommage aux tirailleurs Sénégalais”, des soldats Africains originaires de tous les territoires de l’ex Afrique Occidentale Française (A.O.F). Le film dénonce un événement douloureux pour l'Afrique et accablant pour la France. La répression violente de l’armée coloniale est le lourd tribut que les fils du continent ont payé.


Le film "Faat Kiné" fait partie d'une trilogie. Comme l’indique le sous-titre, il illustre l’héroïsme au quotidien de milliers de femmes en Afrique. Faat Kiné, propriétaire d’une station-service élève ses deux enfants, les pères ayant abdiqué leurs responsabilités au profit d'une vie d’insouciance. En effet, à l'âge de 20 ans, à la veille du baccalauréat, Faat Kiné se retrouve enceinte et doit abandonner ses études.

Sa mère, considérée comme responsable, est brûlée par son époux irascible, qui part du principe qu’elle n'a pas su inculquer des principes de chasteté à sa fille. La mère est répudiée et va vivre avec sa fille. Stigmatisée par cet accident, la mère ne peut se mouvoir qu'au prix d'un effort surhumain. Pourtant, son attitude lui confère une aura de dignité. Elle trouve dans la religion un palliatif à son tourment.
Le cinéaste présente trois générations de femmes qui gèrent leur vie conformément à leurs idéaux. La mère qui accepte son sort et se sacrifie en aidant sa fille à élever ses enfants.

Faat Kine  
Faat Kine
 

Faat Kiné, sa fille, appartient à la génération des femmes battantes. Elle se pose des questions sur son avenir. Elle se sent tiraillée entre son désir d'aller poursuivre ses études en Europe et celui de rester au pays pour découvrir le Sénégal profond. Faat Kiné parvient à éduquer ses enfants grâce à son courage et à sa ténacité. Faat Kiné s’est attelée à sa tâche et elle a acquis une indépendance économique qui la met à l’abri des aléas de la vie et des caprices de la gent masculine. Au lieu de se morfondre, elle gravit lentement les marches de l'échelle sociale.

Son ascension lui permet d'offrir à ses enfants une existence digne et un cadre propice à leur développement. Ils obtiennent le baccalauréat tous les deux. Hantés par l’idée que leur mère pourrait rester seule, le frère et la soeur décident de lui trouver un partenaire et font preuve de beaucoup d’imagination. La roue de l'histoire tourne au profit de Faat Kiné. Les deux pères essaient des tentatives de séduction et surtout se rappellent qu’ils ont des enfants bacheliers. Ils veulent jouir du labeur de Faat kiné. Les pères viennent comme des intrus, le jour où le frère et la soeur fêtent leur baccalauréat Une altercation a lieu entre le fils et son père. Le fils met finalement son père dehors et tous les jeunes s’associent à son acte en le poussant à sortir.

Les deux pères veulent s'arroger des droits et semblent oublier que, durant des années, ils avaient oublié de s'acquitter de leurs devoirs.


Nombre d'Africains émigrés depuis longtemps ont été quelque peu surpris du ton osé et des expressions verbales des enfants vis-à-vis des pères. Ils ont eu du mal à accepter, qu'au 21e siècle, la jeunesse africaine puisse remettre en cause l'attitude des parents, comme le film l'a montré. Le film a soulevé beaucoup de questions, mais surtout, il a donné une autre image de la femme africaine, c’est-à-dire, une image plus authentique et réelle, celle que les médias occidentaux ne présentent jamais.

Ils se complaisent plutôt à la caricaturer comme une femme d'une maigreur maladive avec un fardeau sur la tête, un bébé suspendu à un sein flasque et deux ou trois enfants pendus à ses basques. "Faat Kiné" c'est le symbole de l'Africaine du 21e siècle qui prend part activement au devenir du continent et qui effectue, chaque jour, un acte héroïque en bravant les difficultés quotidiennes. Elle accomplit sa tâche malgré les vicissitudes de la vie.

 
© Les Films du Paradoxe  

Son dernier film, "Molaade", tourné au Burkina-Faso, est un plaidoyer pour l'abolition d'une coutume qui est considérée aujourd'hui comme une violence à l' encontre des femmes et à leur intégrité physique. Ce Film est empreint de réalisme et d’émotions. Sembène Ousmane a dédié ce film "aux mères et aux femmes qui luttent pour abolir cet héritage d’une époque révolue". De nos jours, l’excision est pratiquée dans 28 des 53 États membres de l’Union africaine.

L’histoire du film met en scène Collé Gallo Sy, une mère excisée, qui avait soustrait son unique fille du rituel de l’acte de purification, organisé tous les sept ans. Cette année-là, quatre filles s’enfuient pour échapper à l’excision et cherchent protection ou Moolaadé auprès de Collé qui avait refusé que sa fillette soit " purifiée "c’est-à-dire passée par le rituel de "salindé." Collé protège ces jeunes filles des couteaux des exciseuses. Par cet acte, elle s'oppose à son mari et à sa famille, et en fin de compte, au village tout entier. Deux valeurs s’opposent : le droit d’asile et l’attachement à la tradition favorable à l’excision.


 
© Les Films du Paradoxe  

Mais l’attachement à cette pratique est profondément ancré dans les mentalités. Collé est battue en public par son mari aux cris de “Brise-là! ". Mais les chants guerriers des femmes de Mooladé triomphent de la loi des hommes. Leur courage et leur abnégation sont conformes à la tradition africaine. On décèle dans ce film des "accents d'une épopée homérique."

Le dernier film de cette trilogie a pour titre «La Confédération des Rats», une allusion à la corruption qui sévit dans la classe politique de maints États. C’est l’histoire d’un juge assassiné en pleine ville. "Il enquêtait sur l’enrichissement illicite. La presse fait des articles et attaque le gouvernement qui nomme un autre juge. Ce dernier va découvrir pourquoi on a tué son prédécesseur et ses découvertes vont faire trembler la Nomenklatura", racontait Sembène dans une de ses interviews. Le cinéaste n'a pas eu le temps de l’achever.
Dans Faat Kiné et Mooladé, il s'agit pour les femmes en question de s'assumer et de mûrir. Quelles que soient leurs motivations, elles mènent toutes les deux un combat à l'intérieur d'elles-mêmes et elles évoluent. Elles illustrent toutes deux ces héroïnes au quotidien dont le réalisateur se fait le défenseur.

Ces deux derniers films sont un hymne à la femme et aux mères d'Afrique.



Distinctions honorifiques

Tous les films de Sembène ont été primés ainsi que la plupart de ses romans. Il a, notamment, eu le Prix spécial du jury au Festival international de Marrakech, au Maroc et deux prix au Festival de Venise. En 1968, le Prix de la critique internationale pour "Le mandat", et, en 1988, le Prix spécial du jury pour "Le camp de Thiaroye".
Le voeu de prédilection de Sembène demeure la réalisation d'un film sur Samory Toury, ce grand résistant du 19e siècle à la pénétration coloniale française en Afrique de l'ouest

Sembène Ousmane était aussi l'un des fondateurs du Fespaco, festival du film africain qui se tient tous les deux ans, au Burkina Faso.

En 1993, le chef de l'État sénégalais lui décerne le Grand Prix du Président de la République pour les Arts et les Lettres pour l'ensemble de son œuvre littéraire et cinématographique.

En 2001, l’université Harvard de Boston lui remet le Prix Film Archive pour l’ensemble de son oeuvre.

Lors du festival de Cannes, en 2005, Sembène rappelait d'une voix teintée d'émotion que : "Le cinéma est en Afrique l’équivalent des cours du soir [...] C'est toujours une source d'enseignement permanent."

"Moolade" a été primé au Festival international du film de Cannes en 2004 . Il a obtenu le Grand Prix «Un certain regard ».

En 2006, le film est déclaré meilleur film du mois de juin, par l'académie protestante du film en Allemagne.

En novembre 2006, Sembène a reçu des mains de l'ambassadeur de France, accrédité à Dakar, les insignes d'officier de la Légion d'honneur de la république française.

LES RÉACTIONS DANS LE MONDE

Selon son assistant Clarence Delgado : "Il a souffert, mais il est mort dignement".

La communauté internationale, le monde de la politique et de la culture ont exprimé leur profonde tristesse et leur émotion à travers des messages de condoléances. Tous témoignent du capital de sympathie dont jouissait cet éminent écrivain-cinéaste.

Dans un communiqué le Président de la république du Sénégal, Maître Abdoulaye Wade, a fait part de son désir de rendre “un hommage solennel” à Sembène Ousmane, homme de culture et de lettres, pionnier du cinéma africain et intellectuel engagé”.

Monsieur Abdou Diouf, Secrétaire général de la Francophonie, lui a emboîté le pas en déclarant que :

«L'Afrique perd l’un de ses plus grands cinéastes et un fervent défenseur de la liberté et de la justice sociale". Je rends hommage au pionnier du cinéma africain, à l'artiste et à l'écrivain qui a, le premier, montré l'Afrique au monde entier. Il a su, avec le talent immense qui le caractérisait, dépeindre un Continent fier de sa culture tout en dénonçant les injustices qui perdurent ».

Le Président du Gabon, M. Bongo Ondimba, a adressé un message de condoléances, en ces termes, à son homologue Sénégalais :

"La disparition de cette grande figure emblématique de la culture africaine et universelle me plonge, comme vous pouvez l'imaginer, dans les méandres du souvenir et de la nostalgie [..].Sénégalais d’origine, patriote africain et citoyen du monde, Sembène Ousmane aura marqué son temps par son immense talent artistique qu’il déploya au service de la littérature et du cinéma notamment […] Son incommensurable œuvre dont les prémices prennent forme avant l’indépendance de son pays aura contribué jusqu' à la fin de ses jours à éveiller et à nourrir la conscience politique, sociale et artistique de millions d’élèves et universitaires africains"

Pour le ministre Malien de la culture Cheikh Oumar Sissoko

“Sembène est pour chacun de nous une espérance et un modèle ; puisse chacun s'en inspirer.[…]L'Afrique a perdu l'un des ses phares. L’homme n’a jamais fonctionné qu’en Afrique et pour l’Afrique»

Pierre Garcia, spécialiste du cinéma africain.

"Sembène s'est très vite imposé comme le porte-parole des peuples africains dans leur soif de reconquérir leurs écrans, de donner du sens à leurs images tronquées par les expériences coloniales'.
L'histoire du cinéma en général, comme celle du cinéma africain en particulier, lui sont redevables d'un énorme travail de défricheur et de témoin. Ousmane Sembène fut au lendemain des indépendances africaines, le témoin de la diversité et de la richesse des cultures ancestrales et contemporaines à la fois".


Le Mouvement pour la Démocratie et l'Interdépendance, parti politique de l'opposition nouvelle au Cameroun, par la voix de son secrétaire Administratif Europe, compatit à la douleur de sa famille et déclare que :

"C'est une grande perte de l'intelligence africaine. Vivement que son héritage soit poursuivi et que les gouvernants cessent de considérer les Hommes qui ont marqué l'histoire par leurs oeuvres comme des parias de la société. A l'image de ce monument, grand homme respecté, pendant les périodes difficiles sinon obscures de notre histoire, qui bataillait avec des moyens tellement dérisoires pour promouvoir notre culture, nous lui devons tout le respect qu'il a mérité".

Le ministre Français de l’Immigration, Brice Hortefeux, a fait part de son «émotion», estimant que:

"Avec la mort du grand cinéaste sénégalais, la Francophonie perd un artiste talentueux, qui portait sur le monde un regard chaleureux. Je pense, en particulier, au magnifique film Mooladé, qui avait été primé au Festival de Cannes en 2004. Ousmane Sembène avait su trouver les mots et les images pour témoigner en faveur des femmes africaines victimes de l’excision. Je transmettrai au Président WADE, que je rencontrerai ce soir, les condoléances du Gouvernement français.

Le délégué général du Fespaco, Baba Hama, a, de son côté, déploré "une grande perte pour le cinéma africain".

La ministre Française de la Culture et de la Communication, Christine Albanel, également porte-parole du Gouvernement français, a rendu un vibrant hommage en déclarant qu’avec le décès d'Ousmane Sembène "disparaît un des regards les plus perçants sur le présent et le passé de l'Afrique et l'une des figures fondatrices de son cinéma".
"Je rends hommage à Ousmane Sembène, écrivain, acteur et cinéaste Sénégalais (...) dont l'œuvre retrace avec conviction et engagement l'histoire de l'Afrique et de la condition humaine sur ce continent"

La Fédération Panafricaine des Cinéastes (FEPACI) à travers son secrétaire général, le cinéaste béninois Jacques Béhanzin, a qualifié la disparition de Sembène Ousmane, doyen du cinéma africain de :

"grande perte pour l' Afrique[…] Sembène Ousmane est mort et l’Afrique a perdu un leader, un modèle, un orienteur et un guide culturel » […] Le combat qu’a engagé Sembène pour la libération culturelle et sociale de l’Afrique à travers le cinéma doit être poursuivi puisqu’il s’agit d’un combat de tous les temps pour les fils du continent."

L'ambassadeur d'Algérie à Dakar, son Excellence M. Hamid Chebchoub a mis l'accent sur la vision panafricaniste du cinéaste:

"C'est une page de l'histoire du 7e art africain qui se tourne avec le décès de Sembène Ousmane, un Africain enraciné dans son Afrique natale dont il a partagé durant sa vie, toutes les souffrances et tous les espoirs et que ses films traduisent avec un grand talent; son décès est une perte pour l'Afrique, le Sénégal, mais aussi pour l'Algérie et les cinéastes algériens parmi lesquels Sembène compte beaucoup d'amis."

CONCLUSION

Sembène Ousmane, l'aîné des Anciens a porté haut l’étendard du cinéma africain. Ses œuvres ont franchi les océans et les mers et son nom s’est inscrit en lettres d'or au palmarès du film. Nous lui en sommes tous reconnaissants.

Par amour pour le Sénégal, son pays, il a jeté un regard honnête sur sa société et il a tenté, à sa manière, de faire assainir les mœurs de ses concitoyens. Il a dénoncé les travers des hommes et ceux du système. Ses préoccupations sont celles d’un homme épris de justice qui s’est porté à la défense des faibles et des opprimés. Son œuvre a été bien accueillie, car il a tenté de châtier les mœurs parfois en riant comme dans "Le Mandat" ou "Xala" (Castigat mores ridendo).

Sa vision allait bien au-delà de la société sénégalaise. Elle embrassait toute l’Afrique. Son prochain défi allait être le tournage d’un film sur "Samory". C’était son vœu ardent. Le ciel en a décidé autrement et il s’est éteint le 9 juin 2007, à Dakar. Le rideau est tombé pour la dernière fois, mais le maître passe le flambeau à la jeune génération. Elle aura à cœur de relever le défi, afin qu'il puisse reposer en paix sous la protection des ancêtres.


FILMS DE SEMBÈNE OUSMANE:

1963- Borrom Sarret
1965- Niayes adaptation de Vehí Ciosane
1966 - La Noire de...Adaptation d'une nouvelle publiée dans "Voltaïque"
1968- Le mandat (version française) Manda-bi (Version wolof)
1970 – Taw Prix du Lion d'Or à Asmara (Éthiopie)
1971- Emitai Prix de l'Ours d'or du Festival de Moscou (Russie) et
Premier Prix Afro-Asiatique du film à Tachkent, en 1972
1974- Xala Prix Spécial Karlovy-Vary (République Tchèque)
Médaille d’argent au Festival du film « Figueria « du Portugal
1977- Ceddo Special Award de Los Angeles
1990- Camp de Thiaroye .Grand prix du jury à Venise en 19
Prix UNICEF, Prix de la Jeunesse et du Cinéma Prix d'or Ciak
1992- Guelwar

OUVRAGES:

1956- Le Docker noir. Paris: Nouvelles Éditions Debresse, 1956, 219p. Roman 2e éd., 1973, Paris: Présence Africaine, 219p.
1957--O pays. Mon beau peuple. Paris: Amiot-Dumont, 1957.Roman
Presses de la Cité 1975, 187p. 2ed.1975, Press Pocket
1960-Les bouts de bois de Dieu. Banty Mam Yall. Paris: Le livre contemporain, 1960, 393p. Roman.
1962 - Voltaïque. Paris. Présence Africaine, 221p. Nouvelles
2ed. 1971.Paris: Présence Africaine, 221p.
1964-L’Harmattan T.1 Paris: Présence Africaine, 302p. Roman
1966- Véhi-Ciosane ou Blanche-Genèse suivi du Mandat. Roman.
Paris: Présence Africaine, 191p.
1973- Xala. Paris: Présence Africaine, 171p. Roman
1975 – Xala ou la vengeance des mendiants. Paris : Présence Africaine
1981- Le dernier de l’empire : roman sénégalais. T.1, Paris :
L' Harmattan 222p. Roman
1983 -Le dernier de l’empire: roman sénégalaise T.2, Paris : l'Harmattan
1987- Niiwam suivi de Taaw. Paris: Présence Africaine, 189p. Nouvelles
1990 - Guelwar. Paris:Présence Africaine. Mention spéciale lors du
Fespaco en 1993. Médaille lors du 49. Mostra à Venise


Dr. Pierrette Herzberger-Fofana

Professeur.Conseillère Municipale Erlangen. Allemagne Drherzbergerfofana@hotmail.com



Pierrette Herzberger-Fofana., "Sembène Ousmane, Forgeron de caractères". Un entretien avec le Romancier et Cinéaste Sénégalais. in: Komparatistische Hefte. Schwerpunkt Afrika. Heft 8, Focus Afrique en vue. Université de Bayreuth. 1983. No.8, p.53-64.
Pierrette Herzberger-Fofana., "L'Allemagne à l'heure de l'Afrique : "Faat Kiné", le film de Sembène Ousmane", in www.afrology. com
Sembène Ousmane signe "l’Aîné des Anciens" dans sa dédicace du film "Mooladé"
Le "Mandat" précédé de "Vehi Ciosane ou Blanche-Genèse"
- Photos à Düsseldorf : copyright P.H.F.





       
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