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Jean-Claude Bassien, directeur général délégué de Crédit Agricole Indosuez Cheuvreux
06/06/2004
 

Après une maîtrise de droit et Sciences Po, Jean-Claude Bassien est le directeur général délégué de Crédit Agricole Indosuez Cheuvreux, société de bourse européenne du groupe Crédit Agricole
 
Par Paul Yange
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Jean-Claude Bassien  
Jean-Claude Bassien
 

Vous êtes originaires des Antilles. Y avez-vous vécu ou avez vous
toujours vécu en métropole ?


Je suis né en Guadeloupe en 1963 et j'y ai vécu 10 ans. J'ai fait une partie de ma scolarité primaire en Guadeloupe. Ensuite ma famille m'a envoyé en France métropolitaine poursuivre mes études car elle trouvait que c'était trop facile pour moi (j'avais un an d’avance). J'ai obtenu une maîtrise de droit à Sceaux, puis j’ai intégré Sciences Po Paris. J'avais originellement l'intention de me lancer dans le professorat, mais un de mes professeurs m’a dit que vu mon tempérament, il me verrait bien faire un doctorat puis l’Ena. Passé la surprise, (car je ne m'étais jamais vu postuler à l'ENA ou à Sciences Po), j'ai décidé de préparer le concours d'entrée à Sciences Po.

Avez vous connu des difficultés particulières au niveau de vos études ?

Je n'ai pas connu de difficultés dans mes études liées à ma couleur ou mes origines. Quand je suis arrivé en France, j'ai vécu à Massy Palaiseau, à Longjumeau, des banlieues que certains qualifieraient aujourd'hui de difficiles. J'ai vécu dans des cités, j'étais dans les communautés antillaises, notamment à Longjumeau, mais je n’ai jamais eu de problème à l'école ou avec les autres communautés. Si j'avais été un élève en difficulté, peut-être que j'aurais ressenti davantage le poids du système par rapport à mon origine. On m'aurait peut être aiguillé vers des filières technologiques ou d'apprentissage comme j'ai vu faire pour certains des camarades de ma "bande" de Longjumeau orientés de façon systématique vers les filières professionnelles à cause de leur incapacité à rentrer dans le moule scolaire. J'avais pourtant le sentiment qu'ils avaient le potentiel pour faire mieux que ce vers quoi on les avait aiguillé. Leur orientation était-elle liée à leur origine ? Ce serait trop facile de dire ça.

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La Guadeloupe  
La Guadeloupe
© Lonely Planet
 

A la fin de vos études avez-vous immédiatement travaillé dans le
secteur bancaire ?


J'ai fait Sciences Po dans le but de faire l'ENA, puis le conseil d'Etat pour me faire nommer dans les îles afin de contribuer au fonctionnement et au développement des Antilles en ayant un rôle institutionnel. En réalité je n'ai pas aimé ce que j'ai vu à Sciences Po, je n'ai pas aimé l'esprit carriériste des gens que je côtoyais. Et donc une fois arrivé en fin de cycle, j'ai choisi de m’orienter vers un autre parcours. J’ai voulu aller plus sur le terrain et j'ai choisi le social. Pour la première fois, on m'a parlé de ma couleur. Lorsque je suis allé voir le dispositif de Sciences Po Emploi, on m’a dit "mais il n’y a pas en France un seul directeur des ressources humaines qui soit noir. Vous êtes sûr de vouloir aller dans cette voie ?". Cela a définitivement scellé mon ambition. Finalement, j'ai atterri à la Bourse de Paris comme conseil des syndicats pendant deux ans.

Quel est le cheminement qui vous a mené de ce poste à celui que vous occupez aujourd’hui ?

J'étais conseil des syndicats de la bourse pendant deux ans, c’était l'époque des grandes restructurations financières en France, du premier gouvernement Balladur...le monde boursier était complètement chamboulé. Il y a eu sur le plan social énormément de novations (fin de la convention collective de la bourse, des fermetures de sociétés et des plans sociaux ...). Il y avait 7 000 salariés éclatés dans de petites entités, mais j'étais quasiment le seul à avoir une vraie compétence en droit social, ce qui m'a amené à participer à la négociation de la convention collective de la bourse, à assister les syndicats face aux employeurs, à intervenir dans beaucoup de sociétés de bourse pour conseiller dans la mise en place de plans sociaux.

A la fin de ce cycle, j'ai reçu des offres de beaucoup de sociétés de bourse avec lesquelles j'avais travaillé. Je n'étais pas intéressé au départ, mais j'en ai rencontré une où je n'étais pas intervenu et qui me semblait avoir un beau projet pour l'avenir. C'est l'entreprise dans laquelle je suis aujourd'hui, c’est à dire Cheuvreux. Je suis rentré chez Cheuvreux il y a maintenant 11 ou 12 ans. J'ai été recruté comme directeur du personnel, pendant quatre ou cinq ans, ensuite j'ai été secrétaire général, puis directeur général adjoint, et maintenant directeur général délégué.

L'accès aux métiers de la finance est-il plus démocratique pour les minorités dans les pays anglo-saxons ?  
L'accès aux métiers de la finance est-il plus démocratique pour les minorités dans les pays anglo-saxons ?
 

Quelles sont vos responsabilités au poste que vous occupez actuellement ?

Mes fonctions sont plus larges que les ressources humaines puisqu'en tant que directeur général délégué, j'ai les mêmes attributions que le directeur général, lui s'occupant plus de la partie commerciale, et moi des fonctions centrales, organisation, finances, ressources humaines, stratégie, international et contrôle interne.

En France, on dit généralement qu'il n'y a pas beaucoup de personnes issues de minorités qui sont présentes dans le secteur de la finance, à la différence des pays anglo-saxons. Est ce que vous avez la même analyse de la situation ?

C'est juste. En France, les minorités visibles sont moins présentes qu'ailleurs. On a des filiales dans huit pays en Europe, ce qui me permet de comparer. La différence est surtout marquée par rapport au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. Dans les autres pays européens, c'est pareil qu'en France. C'est très rare de voir un membre d'une minorité visible occuper un poste valorisant dans le milieu de la finance , c’est à dire analyste financier, vendeur, trader ou dirigeant de société...Alors qu’on les trouve plus fréquemment au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. Aux Etats-Unis on comprend pourquoi, en raison de la politique des quotas...Au Royaume-Uni, on trouve beaucoup d'indiens, des Noirs originaires des caraïbes britanniques et on les trouve plus facilement dans les fonctions commerciales.

Au Royaume-Uni, si on veut faire de la finance, il y a une filière identifiée. En France il faut connaître le circuit, il faut connaître le monde de la bourse. Et il faut savoir comment on y accède. L'accès s’est un peu démocratisé, mais la filière est un peu particulière alors qu'au Royaume-Uni cet univers est plus accessible pour tout le monde. Le métier de broker ou banquier d’affaires est très valorisé, et très jeune, on peut s'orienter vers ces métiers. De plus, au Royaume-Uni, il n'y a pas le frein des mathématiques comme mode de sélection. Je rencontre beaucoup de brokers qui ont un cursus très littéraire. Alors qu'en France on trouve énormément d'ingénieurs, ou de diplômés d'écoles commerciales passés par des filières "C" ou "S" qui sont des filières très sélectives, auxquelles les personnes issues des minorités ont du mal à accéder tôt car elles partent avec plus de handicaps au départ. Il y a une différence dans les systèmes éducatifs.

Le directeur des ressources humaines type en France ?  
Le directeur des ressources humaines type en France ?
© barreau-nantes.avocat.fr
 

Etant donné vos responsabilités, on peut penser que vous n'avez jamais été victime de racisme au cours de votre carrière. Est ce le cas ?

Frontalement jamais. Mais je dirais que j'ai parfois été dans la même situation qu'une femme, c’est à dire qu’à fonction égale, je devais montrer plus. Sans que cela soit exigé de manière objective, mais on le sentait. Je me souviens qu'une fois, j'étais en concurrence avec quelqu'un, non issu de minorité ethnique pour un poste, et il a fallu que la personne échoue à ce poste au bout d’un an pour qu’on me le propose. Alors que de mon point de vue, on aurait pu économiser un an. La seule chose que je dirai donc, c’est que j’aurais peut-être pu gagner un an dans ma carrière.

Parfois j'ai du en faire un peu plus que les autres, et je dirais que la force de caractère, et le fait d'assumer clairement ce que l'on est, aident. Pour moi la logique qui consiste à dire qu’il faut effacer son identité est une erreur. Il faut valoriser ce qui fait le tempérament et dans des métiers comme les métiers de la finance où il faut du caractère, de l'esprit de décision, de la volonté, ce sont des caractéristiques qu'on a peut être plus que les autres car on a dû se battre plus jeune. Il ne faut surtout pas gommer ça.

Il y a quelques personnes issues de minorités dans le monde de la finance que j'ai rencontrées. Et que je trouve parfois un peu "grises" dans leur approche des choses. C'est à dire voulant être "normales", se noyer dans la masse, faire disparaître leur différence alors que, selon moi il n'y a pas à le faire d'autant que les métiers de la finance sont des métiers où la personnalité est valorisée.

Pensez vous que ce qu'on appelle le "plafond de verre" existe, c’est à dire un niveau de carrière que des personnes issues des minorités ne peuvent dépasser ?

La question pourrait se poser de la façon suivante : est ce que je pourrais être le seul directeur général ou le président de la société ? Je pense que ce serait possible. Je pense aujourd'hui que mon origine ne serait pas un frein, mais je parle de mon cas particulier. Cependant, en France ce n'est pas facile. Par rapport à il y a quinze ans quand on me disait à Sciences Po qu'il n'y avait pas de directeur des ressources humaines noir, il n'y en a pas plus aujourd'hui. La situation n’a pas beaucoup évolué. Je ne pense pas que ce soit une volonté de bloquer la promotion de personnes issues des minorités, mais je pense que rien n'est fait pour la faciliter. Je pense qu’il y a quand même encore un frein (notamment dans tout le monde industriel) à voir des cadres dirigeants issus des minorités.

Sciences Po expérimente depuis 2001 un accès spécifique pour les élèves issus de ZEP (Zone d'Education Prioritaire)  
Sciences Po expérimente depuis 2001 un accès spécifique pour les élèves issus de ZEP (Zone d'Education Prioritaire)
 

Comment réagissent les personnes qui viennent rencontrer Jean-Claude Bassien, qui ne vous ont jamais vu et qui s'aperçoivent que vous êtes noir ?

Elles ne le disent pas, mais je vois parfois dans leurs yeux qu'elles sont surprises. Et d'ailleurs, dans les entretiens, ça me met en position de force, notamment lors des recrutements. Je le vois dans les yeux, jamais dans les propos, jamais dans les comportements parce que la fonction que j'occupe me protège énormément. J'ai eu à connaître des collaborateurs dans des fonctions différentes issus des minorités qui ont eu des problèmes, y compris dans mon entreprise, et j'ai dû intervenir pour régler ces situations, que ce soit des injures raciales ou des plaisanteries un peu trop lourdes. A chaque fois que je suis intervenu, les problèmes n'ont pas réapparu ensuite.

Aux Etats-Unis, le PDG de Merril Lynch est noir. En France, il serait l'équivalent du PDG de Bnpparibas, de la Société Générale, du Crédit Lyonnais...mais on a l’impression que ce n'est pas pour demain qu'on verra un Noir à la tête d'une banque "symbolique". Au vu de la stagnation de la situation des minorités, pensez-vous qu'une politique des quotas soit nécessaire ?

Je ne suis pas convaincu par la politique de discrimination positive ou de quotas. Je trouve que ça met toujours un bémol à la vraie valeur. Je préfère le mérite à une valorisation imposée. Le système américain a ses vertus, pour autant le PDG de Merril Lynch s'est imposé parce qu'il est le meilleur et il n'y en a pas cinquante ! Cette politique des quotas a ses limites aussi car au delà d’un certain niveau, la compétence doit primer.

Pour moi, le vrai problème est le problème de l'éducation et l’accès aux compétences. L'effort doit se porter sur les zones où se trouvent les difficultés. L'effort public doit être inégalement réparti, et ça ne me choquerait pas que le dispositif scolaire mette beaucoup plus l'accent sur les zones identifiées comme zones de difficultés scolaires plutôt que le système actuel qui a tendance à saupoudrer malgré les apparences. Je suis pour qu'il y ait au départ un véritable effort en faveur de l'égalité des chances, même si cela doit passer par une répartition inégalitaire des moyens publics. Certaines zones doivent être plus aidées que d'autres. Une fois que c'est fait, ensuite c'est au mérite que ça doit marcher.


Si vous aviez des conseils à donner à un jeune issu des minorités visibles qui veut faire carrière dans la finance, quels seraient-ils ?

Je lui dirais que son origine n'est en rien un handicap et il ne doit pas le prendre comme tel. Ce qui est important c'est d'avoir la bonne filière de formation et le bon début de carrière. Le problème de la finance en France est qu'elle demeure d’un accès relativement confidentiel, particulièrement la bourse. D'ailleurs, ce n'est pas compliqué, les gens qui travaillent dans la finance se ressemblent tous. Le profil type dans la finance est quelqu'un de sexe masculin, issu de l'ouest parisien, ayant fait une école de commerce ou d'ingénieur, et qui n'est pas issu de minorité ethnique. Ce n'est pas un hasard, la filière n’est pas partagée...


Crédit Agricole Indosuez Cheuvreux est une filiale de CAlyon (ex Crédit Agricole Indosuez). Elle opère dans les domaines d'activité suivants : l'intermédiation d'actions pour une clientèle institutionnelle internationale et l'exécution des ordres des clients particuliers du réseau du Crédit Agricole.

Mise à jour : Jean-Claude Bassien est devenu PDG de Crédit Agricole Indosuez Cheuvreux le 12 mai 2010.

       
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  Jean-Claude Bassien nouveau PDG de Crédit Agricole Indosuez Chevreux
 
Mots-clés
communauté noire   crédit agricole indosuez cheuvreux   diaspora afro caribéenne   diversité   jean claude bassien   
 
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