Panafricain Super Posteur
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Posté le: Ven 30 Sep 2005 10:58 Sujet du message: Houphouët, Fulbert Youlou, Leon Mba et les independances |
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"Tous les leaders africains n'apprécient pas ces changements. Houphouët Boigny qui ne voulait pas de l'indépendance, se trouve contraint de la demander avec amertume. "Nous avons attendu la fiancée, un bouquet de fleurs à la main ; elle n'est pas venue, les fleurs ce sont fanées"
Des juristes français sont chargés de confectionner des constitutions à la carte, voire à la chaîne, pour les nouveaux Etats. On ne sera pas étonné que ces lois fondamentales des républiques africaines soient amplement marquées par l'empreinte de la constitution de la Ve république. Les gouverneurs sont incités à preparer leurs valises dans le calme.
Guy Georgy, gouverneur du Congo, se souvient de ce moment où l'histoire s'est accélérée.
Quelques jours avant l'independance, prévue pour le 15 août, Philippe Mestre directeur du cabinet du gouverneur s'aperçoit que le nouvel Etat n'a ni drapeau ni hymne national. Gerorgy se rend chez l'abbé Fulbert Youlou, qui comme Houphouët Boigny n'apprécie guere tout ce chambardement.
-on peut prendre le drapeau français, dit l'abbé congolais
-Impossible! s'exclame le gouverneur.
-Les autres ont pris quelles couleurs?
-Surtout le vert, le jaune et le noir, répond Georgy en se référant à un récent article de Paris-Match.
-Je prends les mêmes.
-Soit, on peut les mettre en biais...Il faut choisir un hymne.
-On pourrait arranger la Marseillaise fait l'abbé
-Ce n'est pas possible répète le gouverneur.
-Réglez ça. Faites quelque chose comme un cantique.
Georgy prend alors contact avec le directeur de radio-brazzaville qui n'est guère inspiré, mais suggère de voir du côté d'un accordéoniste de "la cloche pelée", un certain Georges Spadillère. A l'heure de la sieste, Georgy contacte le musicien qui croit à une blague quand il l'entend s'annoncer : "ici le gouverneur..."
Celui-ci se rend au domicile de l'accordéoniste et lui expose son problème. Le spécialiste des tangos et pasodoble le résout en deux temps, trois mouvements. Il faut maintenant les paroles. Un journaliste espagnol, Lopez est connu dans tout Brazza pour sa facilité à rimailler. Georgy lui expose le thème :"Après une longue nuit qui s'achève, debout!...Le soleil se lève..." Lopez ne se fait pas prier. Finalement, l'assemblée approuve le nouvel hymne national.
André Malraux arrive la veille du 15 août pour la passation des pouvoirs. Le soir, dans la fameuse "case De Gaulle", il entame la rédaction d'un discours hautement lyrique. Le lendemain, tout est prêt. A l'entrée du bâtiment où va se derouler la cérémonie, un aboyeur crie : "le président de la république..."
Des africains de dressent, soulèvent l'abbé, et le transportent jusqu'à son fauteuil en scandant : "indépendance, cha-cha" début de la chanson qui était à la mode de l'autre côté du fleuve, à Leopoldville, un mois et demi plus tôt, quand l'ex-Congo belge fêtait son indépendance avant de sombrer dans la guerre civile...
En sortant, l'assistance se range pour la cérémonie des drapeaux. Un officier français s'apprête à descendre le pavillon français pour hisser le drapeau congolais. "Non, je ne veux pas qu'on descende le drapeau français!...On ne peut pas séparer l'enfant de sa mère...", s'exclame l'abbé président. Finalement, l'étendard français reste en place et le congolais est monté à ses côtés....
Au Gabon qui fête son indépendance deux jours plus tard, le chef de gouvernement, Leon M'ba, est dans les mêmes dispositions que son collegue congolais. Après le référendum, il avait en effet demandé que le Gabon devienne un département français. En août 1960, lui aussi souhaiterait garder le drapeau tricolore...
Le Congo et le Gabon : voilà deux pays qui ne posent pas de problemes. Ce n'est pas comme la Guinée et le Cameroun!
Source : Pierre Pean, "l'homme de l'ombre" (éléments d'enquête autour de Jacques Foccart, l'homme le plus mystérieux et le plus puissant de la Vè république), ed fayard,1990[/b] |
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