Posté le: Mer 24 Mai 2006 06:03 Sujet du message: La page de Nathalie Yamb:l'Afrique et la france
Je consacre cette page a Nathalie Yamb, dont j'apprecie les analyses sur l'implication de la france en afrique en general et en cote d'ivoire en particulier:
Nathalie Yamb est une Journaliste camerounaise, Directrice de Publication et actuellement Directeur des Ressources humaines d’une multinationale basée à Yaoundé
La France veut créer une vacance à la tête de l`état ivoirien
Interview de la journaliste camerounaise Nathalie Yamb
Lettre ouverte N° 11157
Interview de la journaliste camerounaise Nathalie Yamb
Le jeudi 2 février 2006 - [3882 mots]
Dans un entretien téléphonique, Nathalie Yamb, Journaliste camerounaise, Directrice de Publication et actuellement Directeur des Ressources humaines d’une multinationale basée à Yaoundé revient sur les derniers événements d’Abidjan, consécutifs à la dissolution de l’Assemblée nationale par le GTI. Pour la consoeur camerounaise, cette manœuvre du Groupe de Travail international sur instigation de la France ne vise qu’un but : écarter Mamadou Koulibaly de la succession constitutionnelle, après le renversement du président Laurent Gbagbo par Paris.
Quelle est votre analyse de la récente dégradation de la situation en Côte d’Ivoire ?
La déclaration du GTI relative à la non prorogation du mandat des députés ivoiriens a été volontairement polémique. C’était un ballon d’essai qui devait permettre à la France de tester le niveau de mobilisation du mouvement patriotique ivoirien. La France espérait sans aucun doute avoir essoufflé la résistance après plus de trois ans de manœuvres, agressions, attaques et complots. Et pour le cas où la déclaration du GTI ne passait pas comme une lettre à la poste, le plan B était de faire intervenir une «élite» africaine à sa solde qui viendrait jouer les pompiers pour apaiser les esprits, en donnant l’illusion de recadrer le GTI et de se poser en sauveur de la souveraineté ivoirienne.
Illusion ?
Evidemment ! Si l’interprétation de la déclaration du GTI était aussi univoque que MM. Obasanjo et Konan Banny le disent aujourd’hui, il se pose la question de savoir pourquoi ils ont attendu trois jours et des pertes de vies humaines pour clarifier la situation. C’est ridicule ! Qu’est-ce qui empêchait M. Konan Banny, dès publication du communiqué et au vu des réactions qui ont suivi, de prendre la parole lundi matin pour indiquer que «le GTI n’a pas dissout l’Assemblée Nationale, il n’en a ni la compétence ni le pouvoir», comme il vient de le dire en reprenant mot pour mot le libellé du communiqué final de la rencontre Gbagbo-Obasanjo ? Non, le plan initial était de laisser planer le doute en espérant que soit la révolte accouche d’une souris, soit la situation se détériore suffisamment pour fournir à l’armée française le prétexte d’une intervention militaire à Abidjan.
Pour vous, la déclaration était équivoque ?
Non, la déclaration du GTI était claire et limpide et elle a été très bien interprétée par l’ensemble de la presse et les populations ivoiriennes.
Pour rappel, voici in extenso les points 4 et 5 de la déclaration du GTI en date du 15 janvier 2006 qui ont provoqué la révolte : « 4. Conformément au paragraphe 11 de la Résolution 1633 du CSNU relatif à l’expiration du mandat de l’Assemblée nationale, le GTI a tenu des consultations approfondies avec les parties ivoiriennes sur le fonctionnement des institutions de l’Etat. Le GTI a tiré la conclusion que le mandat de l’Assemblée nationale, qui a expiré le 16 décembre 2005, n’a pas à être prolongé.
5. Néanmoins, pendant la période de transition, le GTI recommande que le Premier ministre, en consultation avec le Chef de l’Etat, et se fondant sur l’expérience des anciens députés, puisse à sa convenance, leur confier des missions spécifiques en vue de la promotion de la paix et de la réconciliation nationale.»
Le GTI tire donc la conclusion que le mandat ne doit pas être prolongé et recommande que les députés de facto mis au chômage par lui soient placés sous la tutelle du Premier ministre ! Je ne vois rien d’équivoque dans cette déclaration. Maintenant, il serait utile que M. Schori explique comment sa tentative de décapiter le pouvoir législatif et de mettre la Côte d’Ivoire sous tutelle cadre avec les tâches et missions assignées au Groupe de Travail international par l’organisme qui l’emploie, à savoir l’Organisation des Nations Unies.
Vous voulez dire que le GTI a outrepassé ses droits ?
Oui, et pas qu’un peu. Il est totalement hors sujet ! En effet :
1. La Résolution 1633 à laquelle il se réfère dispose en son alinéa 2, que le Conseil de Sécurité de l’ONU «réaffirme son ferme attachement au respect de la souveraineté, de l’indépendance, de l’intégrité territoriale et de l’unité de la Côte d‘Ivoire» ;
2. Le paragraphe 11 de ladite résolution, auquel le GTI fait lui-même allusion, «invite le Groupe de Travail international, notant que le mandat de l’Assemblée Nationale prend fin le 16 décembre 2005, à consulter toutes les parties ivoiriennes, […] en vue de faire en sorte que les institutions ivoiriennes fonctionnent normalement jusqu’à la tenue des élections en Côte d’Ivoire et de tenir le Conseil de Sécurité et le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine informés à cet égard» ;
3. Le paragraphe 13 de ladite résolution exige enfin que le GTI «élabore dès que possible une feuille de route en consultation avec toutes les parties ivoiriennes en vue de tenir des élections libres, régulières, ouvertes et transparentes dès que possible et au plus tard le 31 octobre 2006 […]».
En clair, cela signifie :
- que le principe de la souveraineté et du respect de la Constitution ne saurait être remis en cause par quiconque, même et surtout pas par un employé ou un pays membre des Nations Unies ;
- que le Conseil Constitutionnel ivoirien, saisi dans le respect des règles par le Président de la République sur la prolongation du mandat des députés, s’étant prononcé dans son avis N° 2005-013/CC/SG du 15 décembre 2005 - soit un jour avant l’expiration dudit mandat et un mois avant les gesticulations du GTI - pour le maintien en fonction de l’Assemblée Nationale et la conservation de ses pouvoirs, il ne subsistait aucun doute sur la voie à suivre ;
- qu’en application du paragraphe 11 de la Résolution 1633, le seul et unique rôle du GTI aurait dû être de convaincre les parties réfractaires à la mise en œuvre de l’avis du Conseil Constitutionnel de l’accepter pour «faire en sorte que les institutions ivoiriennes fonctionnent normalement jusqu’à la tenue des élections» et à signaler toute entrave à ce processus au CSNU et au CPS de l’UA.
- Et enfin, cela signifie aussi que la feuille de route élaborée unilatéralement par le GTI sans consultation des parties ivoiriennes est nulle et de nul effet au vu des dispositions du paragraphe 13 de la Résolution 1633 et que son application ne s’impose donc à personne.
Mais, qu’avait à gagner le GTI à vouloir imposer la dissolution de l’Assemblée Nationale ?
Le principal souci du proconsul Pierre Schori en mission pour la France était d’écarter le danger incarné par Mamadou Koulibaly. En effet, selon la Constitution ivoirienne en son article 40, en cas de vacance de la Présidence de la République, c’est le président de l’Assemblée Nationale qui assure l’intérim. En l’état actuel des choses, cette personne est Mamadou Koulibaly. Pour la Chiraquie, M. Koulibaly, économiste de renom et africaniste pur sang, représente un danger encore plus grand que l’actuel chef de l’Etat. Ainsi, selon le Professeur Koulibaly, qui avait, rappelons-le, claqué la porte à Marcoussis, la situation ivoirienne «n`est ni un complot ni un malentendu, c`est du gangstérisme. C`est le président Jacques Chirac qui s`est mis dans la tête qu`il peut, avec la force des armes, et les marionnettes à qui il a donné ces armes, prendre le contrôle d`une petite économie africaine qui ne cherche qu`à devenir libre. C`est la vision néocoloniale de M. Jacques Chirac de l`Afrique qui le porte. Car, il ne faut pas l`oublier, il est né en 1932, et il n`a pas beaucoup évolué. Il reste prisonnier de son âge, de cette vision de l`époque : raciste et colonialiste. Et c`est lui qui est notre adversaire. C`est le sentiment que m`inspire cette crise ivoirienne qui dure depuis trois ans. Et je pense que chaque pays africain, pris individuellement, aura beaucoup de mal à se battre contre Jacques Chirac, parce qu`il utilisera toujours la violence de l`armée française. Et il enverra toujours ses légions assassines dans nos pays pour faire des coups d`Etat, pour renverser, pour tuer. Sauf que si nous nous levons tous ensemble, dans l`ensemble de tous les pays anciennement colonies françaises, pour revendiquer notre liberté ensemble et exiger la fin du diktat de l`Elysée sur chacun de nos pays, à ce moment-là, la France comprendra peut-être que c`est le moment de lever le pied. Et d`abandonner cette façon condescendante de considérer nos Etats, nos leaders, nos libertés».
La France envisage donc une vacance à la tête de l’Etat ivoirien ?
Je dirais même qu’elle y travaille activement. La tentative d’écarter au forceps Mamadou Koulibaly de la succession à la Présidence ivoirienne laisse présumer que la France planifie de façon intensive l’élimination physique du Président Laurent Gbagbo. Elle pourrait également faire assassiner le Président de l’Assemblée Nationale, et peut-être envisage-t-elle toujours cette option comme solution de dernier recours, mais la pilule serait naturellement beaucoup plus dure à faire avaler, même aux observateurs les plus francophiles de la scène ivoirienne, d’où sa tentative de le court-circuiter par la dissolution de l’honorable Institution. Toute cette action a été préparée de longue date. Notez que monsieur Ouattara est allé en Côte d’Ivoire en décembre 2005 pour enterrer sa mère. Il y a séjourné en toute sécurité, avec sa famille pendant plusieurs jours. Pourquoi n’y est-il donc pas retourné le 15 janvier comme annoncé initialement ? Parce qu’il savait qu’Abidjan serait en ébullition quelques jours plus tard ?
Quel rôle joue le Premier ministre Banny ?
Charles Konan Banny a des ambitions personnelles qu’il n’a jamais cherchées à dissimuler. Il veut être Président de la République et cela est tout à fait légitime. M. Banny ne peut cependant pas prétendre à la magistrature suprême en 2006, puisque la candidature du Premier ministre du Gouvernement de réconciliation est explicitement exclue, ce qui est normal si l’on considère que c’est lui qui est chargé de veiller à l’organisation et à la transparence des élections présidentielles à venir.
Je crois que M. Banny est tiraillé entre son envie de contribuer à l’effort de paix de son pays et celle de succomber aux sirènes chiraquiennes, qui lui ont fait miroiter la possibilité de prendre immédiatement les commandes de l’Etat pour une période dite de transition de trois ans, avant de légitimer le hold-up par une élection en 2010 qui l’installerait confortablement dans le fauteuil présidentiel pour une nouvelle période de cinq ans. Pour Chirac, il est crucial de «régler» le problème ivoirien avant l’élection présidentielle française de 2007. Pour Banny, il est tentant de pouvoir dès aujourd’hui réaliser l’ambition de sa vie et il est également vital pour lui d’avoir à sa disposition, tous les moyens de l’Etat pour assurer le succès de sa candidature le moment venu, ce qui n’est pas le cas actuellement.
Qui a la réalité du pouvoir en Côte d’Ivoire ? Gbagbo ou Banny ?
Il y a trois critères déterminants :
1. Qui signe les décrets et les lois pour l’Etat de Côte d’Ivoire et peut virer l’autre d’un coup de crayon ?
2. Qui peut actionner l’armée et se faire obéir d’elle ?
3. Qui détient aujourd’hui le soutien du peuple?
La réponse à ces trois questions est Gbagbo. Tout le reste n’est que gesticulations et a autant d’impact sur le fonctionnement de l’Etat ivoirien que le battement d’aile d’un papillon en Chine. A ce jour, le Président ne perd rien à laisser à Banny une chance de mener à bien sa mission qui est exclusivement, selon la résolution 1633, et il est utile de le rappeler, de mettre en œuvre l’opération de désarmement, démobilisation et réintégration, le démantèlement et le désarmement des milices, et l’établissement des conditions nécessaires à la tenue d’élections libres (au plus tard le 31 octobre 2006) tel que prévu dans le cadre des Accords de Marcoussis, d’Accra III et de Pretoria.
Si Banny réussit, tout le monde sera content, Gbagbo le premier, puisque cela signifiera la fin d’une guerre de plus de trois ans et le retour à la paix et à la légalité. Si Banny échoue - et il faut bien noter que l’échec serait celui de Konan Banny et de lui seul, puisque c’est Konan Banny qui doit exécuter les tâches susmentionnées -, alors il sera clairement établi qu’il n’y a pas de solution politique à la situation créée par la France en Côte d’Ivoire.
Pensez-vous que Charles Konan Banny réussira sa mission ?
Laquelle ? L’officielle ou l’officieuse ? L’absence de contestation de M. Banny face à la manœuvre illégale et anti-constitutionnelle du GTI a de quoi désagréablement surprendre, parce qu’en tant que citoyen ivoirien, et l’un des plus notables, et en tant qu’aspirant à la fonction présidentielle, on se serait plutôt attendu à le voir partager le matelas fleuri de M. Blé Gloudé devant l’ambassade de France ! N’oublions pas que le Président de la République prête serment devant le peuple souverain de Côte d’Ivoire, solennellement et sur l’honneur, de respecter et de défendre fidèlement la Constitution. Je crois que M. Banny a raté une occasion d’améliorer son curriculum patriotique et il serait utile pour lui de se souvenir que «patriote» n’a jamais été une insulte, mais que les dictionnaires Larousse et Robert s’accordent à donner des connotations négatives aux mots «rebelles» et «assaillants». Il reste à espérer qu’il saura se ressaisir et prendre ses distances avec les basses manœuvres impérialistes de la France pour se recentrer sur l’intérêt et le bien-être de ses compatriotes. L’une de ses premières actions devrait donc être la présentation devant l’Assemblée Nationale d’un chronogramme d’action strictement relatif aux missions qui lui ont été imparties par la Résolution 1633. Il est aussi impératif qu’il mette en application l’article 7 de ladite Résolution, qui dispose que «si un ministre ne participe pas pleinement [au Gouvernement de Réconciliation Nationale], son portefeuille doit être repris par le Premier Ministre». Ainsi, quand Guillaume Soro, qui est ministre d’Etat, ne juge pas nécessaire de participer aux deux premiers conseils des ministres de son gouvernement, il revient à M. Banny le soin d’en tirer toutes les conséquences.
Les populations et le FPI demandent le départ de la Force Licorne et de l’Onuci, considérées comme forces d’occupation alliées aux assaillants. Qu’en pensez-vous ?
Depuis novembre 2004 et le massacre à visage découvert des civils ivoiriens par l’armée française, on a atteint un point de non-retour en ce qui concerne la présence de Licorne mais également du 43ème BIMA sur le sol ivoirien. C’est d’ailleurs toute la question du bien-fondé des bases militaires françaises en Afrique qui est posée. Un récent sondage a notamment exposé que plus de 68% d’Africains sont pour le départ immédiat des troupes françaises du continent.
Quant à l’Onuci, je voudrais rappeler ici quelles sont ses missions, telles que définies par la Résolution 1528 du CSNU. Il s’agit de l’observation du cessez-le-feu et des mouvements de groupes armés, du désarmement, de la démobilisation, de la réinsertion, du rapatriement et de la réinstallation, de l’appui aux opérations humanitaires, à la mise en oeuvre du processus de paix, de l’assistance dans le domaine des droits de l’homme, de l’information et de l’ordre public.
Or, depuis la création de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire en février 2004, des armes ont continué à être livrées aux assaillants, des renégats continuent de traverser les frontières du pays par le Nord, les Forces Nouvelles, sommées de désarmer, n’ont toujours pas obtempéré. L’Onuci s’étale à Abidjan alors que la guerre est ailleurs, la télévision rebelle diffuse tous les jours des messages de haine, la manipulation médiatique est cautionnée par les Nations Unies, quand l’Onuci n’est pas elle-même à la source de la désinformation. La libre circulation des biens et des personnes n’est assurée qu’en zone gouvernementale et je me demande dans quelle mesure les cinq morts de Guiglo cadrent avec le devoir d’assistance aux opérations humanitaires et à la mise en œuvre du processus de paix !
Si l’Onuci ne remplit pas sa mission, alors l’Onuci doit partir. Les Etats-Unis viennent d’ailleurs de se prononcer contre l’augmentation des effectifs des Casques Bleus en Côte d’Ivoire, faisant ainsi barrage à une proposition de la France formulée par Kofi Annan. L’ambassadeur américain auprès des Nations Unies, John Bolton, évoque même l’éventualité d’un retrait pur et simple des troupes onusiennes de Côte d’Ivoire, mettant en doute la capacité de l’Onuci «à régler efficacement les problèmes de fond». Mais au-delà de l’Onuci, c’est l’Organisation des Nations Unies qui est remise en cause. Elle a montré ses limites. La façon dont Israël traite par-dessus la jambe toutes les résolutions du Conseil de Sécurité, l’Irak, le bourbier haïtien, les massacres de Srebrenica sans parler du génocide rwandais ou des dérives sexuelles des soldats onusiens dans les différents théâtres d’opération où ils sont affectés… Est-ce que l’ONU est aujourd’hui autre chose qu’une «pompe à fric» qui permet aux membres permanents du Conseil de Sécurité de se partager le gâteau et d’imposer leur toute puissance au reste du monde, sous le couvert d’une légalité octroyée par une «communauté internationale» manipulée par sept ou huit pays dits majeurs?
Que pensez-vous de l’attitude de Kofi Annan ?
L’attitude de Kofi Annan m’inspire beaucoup de regrets. Nombre de ses proches ont été très fortement impliqués dans les malversations qui ont entouré l’exécution du programme pétrole contre nourriture en Irak. La France a pris sa défense quand les USA, en représailles à son attitude peu conciliante lors de la guerre en Irak, où ses intérêts divergeaient des leurs, ont décidé de sonner la charge contre lui. Kofi Atta Annan est donc redevable à la France et il paie son dû en soutenant les intérêts français dans la crise ivoirienne. Tout Africain qui se respecte doit trouver bien peu seyante l’attitude aplatie adoptée par le Secrétaire Général de l’ONU.
Un mot sur les réactions des chefs d’Etat africains ?
Réactions ? Lesquelles ? D’un côté il y a les marionnettes de Paris, comme Bongo, Wade, Compaoré ou Toumani Touré, qui jouent avec zèle la partition composée par un Chirac trop heureux de constater qu’il y a encore quelques rares spécimens qui exécutent quand il décide. De l’autre, il y a tous ceux qui sont frappés d’un mutisme persistant. Ceux-là essaient d’occulter le fait qu’un nombre grandissant de leurs concitoyens exigent de façon de plus en plus pressante qu’ils prennent position dans la crise ivoirienne, mais les peuples d’Afrique sont bel et bien en train de reprendre la parole, après avoir été contraints à une aphonie collective pendant des décennies. Le jeu en vaut la chandelle. La tentative de mise sous tutelle de la Côte d’Ivoire est une question de souveraineté africaine. Si la France réussit sa manœuvre en Côte d’Ivoire, alors rien ne l’empêchera de réitérer sa «prestation» ad vitam æternam partout où ses intérêts la porteront : au Congo, en Centrafrique, au Cameroun ou ailleurs sur le continent. Il est aisé de constater que les populations africaines tolèrent de moins en moins la politique colonialiste du gouvernement français en Afrique. A chaque fois que la France tente une déstabilisation de l’Etat ivoirien, les réactions des Africains partout sur le continent sont de plus en plus excédées et il est clairement envisageable que des expatriés français, bien que ne se reconnaissant pas dans la politique de Jacques Chirac, soient les premiers à en ressentir les effets.
L’on reproche constamment au Président ivoirien d’utiliser la rue…
J’observe une dichotomie révélatrice du concept populiste. Quand des dizaines de milliers d’Allemands de l’Est descendent dans la rue pendant plusieurs mois pour réclamer la chute du mur de Berlin, on applaudit à tout rompre. Quand Viktor Ioutchenko organise les manifestations de centaines de milliers de personnes pour accéder à la présidence de l’Ukraine, la démarche est admirable et encouragée. Quand des milliers d’Ivoiriens issus de toutes les couches sociales se réunissent en sit-in pour réclamer le départ de leurs bourreaux, on les qualifie «d’émeutiers à la solde du Président de la République». Pourquoi ces manifestations ne seraient-elles pas spontanées ? Est-ce à dire qu’aujourd’hui un Africain n’a pas la capacité ou le droit de décider tout seul ce pour quoi il souhaite s’engager ? Charles Blé Goudé, le leader charismatique d’une jeunesse ivoirienne en mal d’indépendance, a crée le Congrès des Jeunes Patriotes en juin 2001, donc bien avant le début de la crise ivoirienne, et il n’a jamais appartenu au FPI. Mais si l’on en croit les médias occidentaux, il est une créature fabriquée de toutes pièces par Laurent Gbagbo pour contrer la guerre que la France a déclaré à la Côte d’Ivoire en 2002 ! L’accusation de populisme à l’encontre du chef de l’Etat ivoirien est le moyen pour eux de décrédibiliser tous les arguments que lui et ceux qui s’identifient à sa lutte avancent et de déplacer le débat loin de là où il doit être, à savoir des idées. Il est évident que si aujourd’hui ces mêmes manifestants descendaient dans les mêmes rues d’Abidjan pour réclamer avec la même verve le départ de l’actuel occupant du Palais du Plateau ou le retour de la Côte d’Ivoire dans le giron françafricain, alors AFP, Libération, France 2, RFI, Michèle Alliot-Marie ou le général Bentegeat n’hésiteraient pas à les ériger en monuments de courage mettant en péril leurs vies pour un noble combat !
Existe-t-il une solution pour la Côte d’Ivoire ?
Aujourd’hui, après avoir sorti de son chapeau des questions foncières, le soi-disant danger d’un génocide ethnico-religieux, la candidature – initialement disqualifiée au regard de la Constitution - d’un ancien premier ministre, Chirac, à court d’inspiration, ne se donne même plus la peine de cacher le vrai motif de la guerre qu’il mène à l’Etat de Côte d’Ivoire : son président ne lui convient pas, il est indépendant, africaniste et ingérable par l’Elysée. Il veut placer l’intérêt de ses compatriotes au-dessus de ceux de la France. Rendez-vous compte ! Cet Africain ne respecte vraiment rien ! Même déchue sur la scène internationale, la France de 2005 conserve une énorme capacité de nuisance en Afrique. Mais elle a aujourd’hui à sa tête quelqu’un de vieux et d’usé, obligé d’agir dans l’urgence. Jacques Chirac n’a jamais vraiment impressionné personne par ses talents de stratège politique. Hors course pour la présidentielle de 2007, lui et les quelques fidèles qui lui restent, au rang desquels on trouve Brigitte Girardin (porte-parole de Chirac au sein du GTI), Michèle Alliot-Marie ou Michel de Bonnecorse, sont soumis à la contrainte du temps. Cela se ressent de façon tangible dans leur gestion de la crise ivoirienne. Déconnectées de la réalité politique et sociale du terrain, leurs machinations échouent les unes après les autres et contribuent même à la mobilisation des Africains contre la France.
La solution ? Les élections. Cependant, compte tenu des éléments dont il dispose, Chirac n’a aucune intention de permettre la prochaine tenue d’élections libres et transparentes en Côte d’Ivoire. Il va donc tout tenter pour convaincre Konan Banny de l’aider à torpiller cette échéance. Pas sûr qu’il réussisse. Si Banny veut conserver ses chances pour 2011, il a tout intérêt à marquer l’esprit de ses concitoyens par sa participation active et fructueuse au retour de la paix et à la libération de la Côte d’Ivoire. Il est également nécessaire que les Africains s’approprient la maîtrise de l’information concernant l’Afrique, pour déchirer le voile de mensonges insidieusement injectés par l’Etat français à travers des médias acquis à sa cause. Cela commence à prendre forme. Enfin, je pense que Kwame Nkrumah avait un élément de réponse quand il disait: «Divisés nous sommes faibles. Unie, l’Afrique pourrait devenir, et pour de bon, une des plus grandes forces de ce monde.»
Interview réalisée au téléphone
(Retranscription : Anassé Anassé)
Par
Sylvestre Konin
Source : Le Courrier d'Abidjan (31/1/06) _________________ La vie est un privilege, elle ne vous doit rien!
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Dernière édition par M.O.P. le Mer 24 Mai 2006 06:13; édité 1 fois
La paix si possible, la guerre si nécessaire. L`analyste camerounaise Nathalie Yamb s`exprime après la visite de Denis Sassou Nguesso à Abidjan
Le lundi 10 avril 2006 - [1057 mots]
Thomas Sankara a écrit:
L’esclave qui n’est pas capable d’assumer sa révolte ne mérite pas que l’on s’apitoie sur son sort. Cet esclave répondra seul de son malheur s’il se fait des illusions sur la condescendance suspecte d’un maître qui prétend l’affranchir. Seule la lutte libère...
Monsieur Sassou Nguesso, en sa qualité de Président de l’Union Africaine, préconise donc comme solution de sortie de crise en Côte d’Ivoire de procéder simultanément à l’identification et au désarmement. Cela signifie qu’il veut rendre possible la modification de la démographie électorale en Côte d’Ivoire en permettant la naturalisation des bus entiers d’étrangers, armés ou non, venus du Burkina et du Mali, afin qu’ils puissent servir de vivier électoral au candidat soutenu par Paris. Il y a moins de dix jours, ce même Sassou Nguesso, cette fois vêtu des habits de Président de la République du Congo, a exclu la région du Pool des élections dans son pays, les rebelles qui y sont retranchés ayant refusé le désarmement avant l’échéance électorale. Si la situation n’était pas aussi grave, nous pourrions rire de voir cet individu vouloir faire avaler à son prochain un médicament qu’il refuse lui-même catégoriquement d’ingurgiter. Mais la dernière sortie du représentant de la Françafrique nous incite plutôt a redoublé d’attention et d’effort dans la lutte qui nous oppose à l’impérialisme français et à ses plénipotentiaires. En effet, il s’agit du énième stratagème que la France tente de développer pour orienter le dénouement d’une crise qu’elle a initié il y a quatre ans, afin de se débarrasser du Président Laurent Gbagbo, qui a osé remettre en cause le pacte colonial imposant la mainmise de la France sur la Côte d’Ivoire. Cette sortie est d’autant plus choquante qu’elle rend caducs tous les accords et résolutions précédemment signés ou adoptés pour résoudre la « crise ». Accra, Marcoussis, Tswane, la résolution 1633… On nous a tordu le bras pour nous les faire adopter, on nous a fait la guerre pour nous faire voter les lois en découlant, et maintenant que vient le tour des assaillants de s’y conformer, on nous dit de les ignorer !
La liberté ne nous sera jamais offerte. Nous devons la conquérir. Une liberté « octroyée », une liberté négociée est une liberté factice. La seule liberté qui tienne la route est celle qui est arrachée par la lutte des mains des tyrans et des colons. On ne fait pas de révolution en adoptant la politique du dos rond face à ses adversaires. On ne gagne pas son indépendance en faisant concession sur concession. La conquête de la liberté nécessite la reconnaissance de la beauté des angles. Il faut savoir dire non. Il faut savoir assumer son combat et le prix à payer pour parvenir à ses fins.
Ainsi que le disait Malcom X : "Il n’y a pas de révolution pacifique. Il n’y a pas de révolution non-violente. La révolution est sanglante. La révolution est hostile. La révolution ne connaît pas de compromis. La révolution retourne et détruit tout ce qui se met en travers de son chemin. Si vous n’êtes pas prêts à user de la violence, alors effacez le mot révolution de vos dictionnaires !"
Nous ne connaissons pas avec certitude la clé du succès. Mais la clé de l’échec est d’essayer de plaire à l’oppresseur. Nous ne détestons pas les français; nous détestons l’oppresseur. Et s’il arrive que l’oppresseur soit français, alors nous le détestons. Quand il arrêtera de nous opprimer, nous arrêterons de le haïr. En ce moment, en Côte d’Ivoire et en Afrique dite francophone, l’oppresseur, l’ennemi, c’est la France.
On ne peut pas plaire à tout le monde. Il faut cesser de vouloir séduire les autres. Il est important que nos leaders comprennent qu’ils doivent d’abord être aimés par leurs peuples, et non pas plaire à la France ou à la « communauté internationale ». Ils doivent s’atteler à ne pas perdre notre admiration. En 1946, nos parents et grands-parents admiraient Houphouët-Boigny. Mais dès lors qu’il a composé avec la France, le combattant Houphouët-Boigny est devenu un « collabo », dans le sens le plus négatif du terme. Il a lui-même contribué à enterrer un combat qui était le sien quelques années plus tôt. Aujourd’hui, la résistance est incarnée par Laurent Gbagbo. Qui ne devra jamais oublier qu’Houphouët-Boigny, en décidant de collaborer avec la France aux conditions des français, est devenu le fossoyeur de la Côte d’Ivoire.
Des milliers d’Ivoiriens ont perdu la vie dans la guerre que la France mène à l’Etat de Côte d’Ivoire depuis maintenant quatre ans. Il y a ceux qui sont tombés sous les tirs des français ou de leurs complices assaillants. Ceux qui ont été étouffés dans des sacs en plastique. Ceux qui ont été torturés, violés. Et ceux qui sont morts de maladie, de pauvreté, parce qu’ils ont eu la malchance de ne pas avoir pu fuir à temps les zones occupées par les protégés sanguinaires d’Alassane Ouattara et de ses donneurs d’ordre élyséens. Ceux qui sont tombés sont nos héros. Ils sont le tribut que nous avons payé pour la conquête de notre indépendance, de notre liberté. Et ils ne doivent pas être morts pour rien.
La masse populaire est souvent plus révolutionnaire que les élites. Les patriotes de tous âges et de tous horizons ont porté et continuent encore de porter les leaders actuels de la lutte de libération. Et ces derniers doivent veiller à ne pas se laisser distancer par leur base. Ainsi que l’exposait le président de l’Assemblée Nationale Mamadou Koulibaly : « La Côte d’Ivoire doit savoir que le combat qu’elle mène dépasse les limites de ses frontières et que les résultats, quels qu’ils soient, auront des répercussions sur la vie des autres pays francophones. En cela, elle a une responsabilité de leader. En cela, la Côte d’Ivoire a une obligation de résultat ».
Evidemment, nous voulons la paix. Si possible. Mais tout aussi naturellement, nous ferons la guerre. Si nécessaire. Nos ennemis sont tous ceux qui proposeront ou accepteront des compromis relevant du tabou inadmissible. Notre salut réside dans la clarté de nos exigences et de notre lutte. Comme l’a dit Kwame Ture (Stokely Carmichael) « Je suis pour l’Afrique. Quiconque cause du tort à l’Afrique, je lui marche dessus sans pitié et sans compassion. »
«Mieux vaut la mort que l’esclavage !» (Extrait de « Soundjata, Lion du Mandingue » par Laurent Gbagbo)
Nathalie Yamb _________________ La vie est un privilege, elle ne vous doit rien!
Vous lui devez tout, en l'occurence votre vie
L’objectif de la politique française en Afrique est d’une part de maintenir un contrôle politique sur les Etats africains francophones pour justifier le rang international de la France comme puissance mondiale, notamment à l’ONU, et d’autre part d’entretenir l’exploitation quasi monopolistique des richesses de ces mêmes Etats au profit des intérêts français.
Cette politique s’exprime par un soutien sans faille à des dictatures inféodées à Paris dont la mission est d’abord d’interdire un développement démocratique des pays africains dans la mesure où celui-ci pourrait remettre en cause le pouvoir et la pax franca qui en est la source, et ensuite de sécuriser la chasse gardée et les investissements français en écartant toute possibilité de réelle concurrence internationale dans ces économies. (cf. Les servitudes du Pacte colonial, de Mamadou Koulibaly, paru aux Nouvelles Editions Ivoiriennes)
L’autre pilier de cette politique est un système d’exploitation des économies africaines au profit d’une nébuleuse politico-économique communément appelée «Françafrique». Celle-ci rassemble d’un côté une poignée de groupes français disposant de positions hégémoniques voire monopolistiques dues à leurs relationnels politiques et non comme résultat d’une supériorité de leurs offres après une libre confrontation à la concurrence internationale. De l’autre, elle est composée d’un magma de réseaux qui trustent des «contrats d’assistance technique» plus ou moins réels ou pertinents et participent de façon active à la fuite des capitaux pour le compte des élites locales, au financement occulte des partis politiques français et à leur enrichissement personnel (cf. Affaire Elf).
Le maintien de ce procédé de domination néocolonial explique la passion française pour les changements de régimes (Burkina Faso), les élections truquées (Centrafrique, Togo), les rébellions préfabriquées (Côte d’Ivoire) en Afrique, afin de mettre hors d’état de nuire tout individu ou groupe menaçant d’affaiblir le système (Olympio, Sankara, Kérékou, Gbagbo…)
Socialisation du financement
Face au coût croissant qu’implique cette politique, la Françafrique a opté depuis plusieurs années pour une stratégie de privatisation des gains générés par le système et de mutualisation du coût de sa perpétuation.
Ainsi, l’aide qui sert à maintenir les élites vassales au pouvoir (quand elle est mal utilisée) et à leur donner un minimum de légitimité (quand elle est bien utilisée), est effectivement payée par tous les contribuables français et africains, mais seuls les membres – entreprises et particuliers – de la nébuleuse jouissent de toutes les retombées positives du fonctionnement du système.
De même, la stratégie qui consiste à instrumentaliser l’Organisation des Nations Unies (ONU), l’Union Européenne (UE) et même la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union Africaine (UA), permet à l’Hexagone de répartir le coût financier, militaire et diplomatique de sa politique sur des contribuables internationaux, alors que les bénéfices restent, eux, fermement en France. Ainsi, Paris a besoin d’au moins 10 000 hommes en Côte d’Ivoire pour atteindre ses fins, mais en faisant intervenir l’ONU, elle évite le coût financier, diplomatique et humain d’une telle force en faisant supporter 6 000 hommes par le contribuable international. En cas de renversement du régime Gbagbo, il est certain que ce même contribuable ne profitera d’aucune retombée et que l’ascenseur renvoyé par un nouveau pouvoir ivoirien ira directement et en totalité à Paris.
Résistance ivoirienne
Grain de sable dans cette machine rodée depuis des décennies, la victoire de Laurent Gbagbo aux élections organisées en 2000 dans le pays phare du système, la Côte d’Ivoire et qui remet ostensiblement en cause les mécanismes d’exploitation de son pays par la France. Sa survie politique est due à l’irruption imprévue sur la scène d’un peuple qu’une gestion paternaliste et clientéliste avait cru pouvoir contenir indéfiniment hors du champ politique. Mais l’existence en Côte d’Ivoire d’une réelle classe moyenne, instruite, organisée, jeune et ouverte sur le monde a entraîné un grand pan du peuple ivoirien à prendre en main son propre destin. En basculant dans l’arène et en maintenant le cap de la Résistance contre vents et marées, le peuple ivoirien a tout à la fois sauvé Laurent Gbagbo et montré la voie au reste de l’Afrique francophone.
Vision primitive et tronquée
Le malaise reflété par les médias hexagonaux face aux grotesques manœuvres françaises au Togo et en Côte d’Ivoire découle plus du dépit que d’un questionnement concret de la politique française en Afrique, dont le désengagement relève d’une rhétorique de relations publiques et non d’une quelconque réalité. En effet, l’axiome de ces médias demeure que la France ne peut avoir qu’un rôle positif en Afrique, parce que sa politique sur ce continent est basée sur la promotion de l’Etat de droit, de la démocratie et est mue par l’altruisme et la compassion pour ces «pauvres Africains» qu’elle s’échine à aider. Quand l’évidence ne cadre pas avec ce principe, il ne s’agit pour la presse française que d’erreurs faites par des exécutants maladroits et non d’une mauvaise politique.
Tant que cette vision infantilisante et manifestement ignorante des faits sera véhiculée, le lecteur occidental continuera à ne pas être informé de façon exhaustive et honnête. Une réelle remise en question de la politique française en Afrique doit donc commencer par une description claire de ses objectifs et son fonctionnement.
Nathalie Yamb
Auteur : Nathalie Yamb _________________ La vie est un privilege, elle ne vous doit rien!
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L’Afrique est stratégique: ses ressources minières et énergétiques, ses matières premières, ses espaces, ses populations en font le continent des enjeux du futur. L’importance tactique du marché africain est une évidence pour les acteurs économiques de premiers rangs que sont les Etats-Unis, les autres membres du G8 ou la Chine. Preuves s’il en faut: l’axe africain de la politique de Tony Blair, la tenue depuis trois ans du sommet sino-africain, qui fait apparaître son pendant France-Afrique comme une mascarade obsolète, l’intensification de la présence militaire américaine dans le pré carré francophone…
L’Afrique n’est donc pas pauvre, mais elle a été appauvrie. De façon constante, depuis la traite transatlantique jusqu’à nos jours, elle a été l’objet d’un système d’exploitation et de pillage des biens, certes relayé par des marionnettes locales, mais qui s’est néanmoins toujours inscrit dans le cadre d’un impérialisme historique. Ici plus qu’ailleurs, l’Occident s’est permis l’utilisation de tous les moyens nécessaires pour asseoir sa vision du monde, rançonner les richesses et faire de l’Afrique une dominée exemplaire. Aux méthodes primitives de l’époque précédant les indépendances fictives des années 60 ont succédé des formules plus pernicieuses comme l’aide au développement, la mondialisation, les plans d’ajustement structurels, la bonne gouvernance.
Le libre-échange a toujours été une arme employée par les plus forts pour imposer aux plus faibles l’ouverture de leurs marchés. "Aujourd’hui, la mondialisation, ça ne marche pas pour les pays pauvres du monde", reconnaît Joseph E. Stiglitz, ancien vice président et économiste en chef de la Banque Mondiale. Les dirigeants africains assujettis à l’Occident qui se font l’écho des vertus de la mondialisation prônée par les pays riches, sont de plus en plus contestés par leurs populations. Quel est l’intérêt pour l’Afrique de privilégier les cultures d’exportation aux cultures vivrières puisque les prix des produits qu’elle exporte sont fixés à la baisse par ceux là même qui les importent? Pourquoi lui proscrit-on le droit de faire usage de l’arme protectionniste pour défendre des secteurs sensibles et redresser des économies dévastées par des siècles de pillage, alors que cette même option a été utilisée (et continue de l’être) par l’Europe pour relancer une économie mise à mal par la Seconde Guerre mondiale? Comment l’instauration des quotas à l’importation du textile chinois en Europe cadre-t-elle avec la théorie du libre-échange? Les subventions accordées par le gouvernement américain à ses producteurs de coton au détriment des agriculteurs africains indiquent-elles qu’il y a des pays plus "mondialisables" que d’autres? La mondialisation est-elle autre chose que l’occidentalisation à outrance de l’économie mondiale ?
"Aussi longtemps que les lions n'auront pas leur historien, les récits de chasse tourneront toujours à la gloire du chasseur"
Un autre outil très efficace d’asservissement de l’Afrique est l’aide au développement. La perversité de ce concept usurpateur réside dans la dissimulation d’un système oppressif d’exploitation derrière la générosité apparente des institutions financières internationales et des pays donateurs. Le fonctionnement de l’aide au développement est antinomique au discours de solidarité qui y est lié. L’assistance apparente est en effet assortie d’une série de contraintes qui visent non seulement à astreindre le pays dominé à adopter des solutions peu adaptées à ses besoins réels, mais également à consolider les fondement économiques des pays riches.
L’utilisation des fonds est exclusivement déterminée par les pays donateurs, qui n’hésitent pas, quand il y va de leur intérêt, à ériger les causes de nos maux en solutions. Qui a décidé que la lutte contre le sida était essentielle pour l’Afrique ? Le sida est-il vraiment la cause de la misère africaine ou sa propagation rapide n’est-elle pas plutôt la résultante de la pauvreté, de l’analphabétisme, du chômage ambiants? Pourquoi l’éradication du paludisme n’est-elle pas une priorité pour le continent? La confidentialité de la lutte contre la drépanocytose est-elle totalement dissociable du fait que cette maladie n’affecte que les Noirs ? Les dons de riz dont les Occidentaux abreuvent les populations sous-alimentées des pays pauvres sont-ils vraiment la preuve de la grandeur d’âme des bienfaiteurs autoproclamés ou ne sont-ils pas plutôt une des causes principales de la famine qu’ils sont censés endiguer? Lorsque l’on sait que le riz envoyé au Niger, au Tchad, en Ethiopie à travers des organisations comme le Programme Alimentaire Mondial est acheté au prix fort par les gouvernements américain et européens à leurs producteurs nationaux sous forme de subventions, au détriment du riz cultivé en Afrique ou en Asie, meilleur marché et de qualité souvent supérieure, la question se pose avec beaucoup d’acuité.
Les règles du jeu sont définies par les puissants de ce monde, qui veillent scrupuleusement à confisquer les ressources financières et à sécuriser un retour sur investissement permettant de stabiliser leurs propres économies. Les fonds attribués aux pays pauvres sont ainsi rapatriés à leurs généreux donateurs soit au travers de multinationales prédatrices qui font partie intégrante du schéma ou soit par le biais de rétro commissions. Lorsque l’Agence Française de Développement accorde des fonds pour la construction d’une route ou la réfection d’un pont, mais que ce "don" est assorti de l’obligation d’attribuer le marché à une entreprise de BTP française, alors qu’une firme chinoise aurait pu effectuer les travaux à un prix défiant toute concurrence, il est nécessaire de s’interroger sur l’identité réelle du bénéficiaire final de l’aide. Qui se développe? Qui secoure l’autre?
Officiellement, l’octroi de l’aide au développement est conditionné aux principes de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption, mais concomitamment, les pays donateurs préfèrent de loin traiter avec des régimes corrompus plutôt que vertueux, qui viendraient perturber un système de remontée des fonds bien organisé. Le soutien constant aux administrations dépravées d’Omar Bongo, Blaise Compaoré et Mobutu, l’organisation des assassinats de Thomas Sankara et de Patrice Lumumba, le déclenchement de la guerre en Côte d’Ivoire pour renverser le président Gbagbo démontrent à quel point les Européens en général, et les Français en particulier, redoutent l’émergence d’interlocuteurs intègres, intelligents et africanistes. Alors que l’affaire Elf a fait éclater dans toute sa splendeur l’étendue de la corruption qui gangrène le pouvoir et la classe politique française, il est évident que la volonté de Jacques Chirac d’installer un homme du cru à la tête de l’Etat ivoirien est plus tenace que jamais.
L’Afrique est-elle tenue de rembourser une dette contractée par des dirigeants qu’elle n’a pas élus et qui lui ont été imposés? Puisque le principal de la dette a déjà été remboursé depuis belle lurette, pourquoi en est-on encore à batailler pour son annulation? Qu’est-ce qui justifie la strangulation des populations africaines par les bailleurs de fonds et les institutions financières internationales? Aussi surprenante qu’elle puisse paraître, la réalité est tout autre. L’Afrique a financé le développement de l’Occident. Aujourd’hui, l’Europe est redevable à l’Afrique. Néanmoins, il était jusqu’ici tout à fait impensable de formuler cette vérité. Tous les moyens médiatiques, politiques, économiques et psychologiques ont été mis en œuvre pour maintenir les Africains dans une posture de reconnaissance à l’égard de ceux qui les ont exploités. Après avoir rançonné leurs sols et sous-sols, leur avoir imposé des régimes dictatoriaux, corrompus et répressifs, dénié leurs aspirations à la démocratie, infligé un paternalisme spoliateur, les Occidentaux ne peuvent cependant pas s’attendre à de quelconques remerciements de la part des Africains, qui, de toute évidence, n’apprécient pas de la même façon que les hommes politiques français les bienfaits de la colonisation.
Sans l’Afrique, la France n’est rien
La propension de la France à infantiliser l’Afrique, sa volonté sans cesse réaffirmée de parler à la place de ses anciennes colonies, que Jacques Chirac vient d’ailleurs de réitérer à Bamako, démontrent, s’il en est besoin, que les politiques français n’ont pas compris que l’ère des états africains façonnés à la Jacques Foccart n’existe plus. Abasourdie par le rejet massif dont elle fait l’objet, la France assiste désemparée à la construction de pouvoirs indépendants. Nostalgique, elle n’arrive pas à discerner l’intérêt à avoir en face d’elle des vrais interlocuteurs, qui, comme le président ivoirien, ont gagné leur légitimité par les urnes, plutôt que des pantins qu’elle a choisis. La France redoute et combat par tous les moyens l’émergence d’une nouvelle génération d’Africains libres, parce qu’elle sait que sans l’Afrique, elle n’est rien. Elle a besoin du continent noir pour compter dans le collège des grandes nations. La France, qui avait su établir sa zone d’influence en Afrique en se posant comme rempart contre l’avancée du communisme sur le continent, n’a pas été en mesure d’anticiper l’impact de la chute du mur de Berlin en 1989 sur sa politique africaine et de l’adapter en conséquence.
Le "danger" communiste n’existant plus, c’est la légitimité de la mainmise française en Afrique qui est ébranlée. Son rôle de porte-parole de l’Afrique, que l’Hexagone avait gagné au prix de moult assassinats politiques, subventionnements de coups d’Etat, soutiens à des rebelles et génocidaires, installations et cautionnements de régimes fantoches, et qui jusque là ne lui avait pas été contesté par la communauté internationale, est remis en cause par le nouvel ordre géopolitique mondial qui sonne définitivement le glas d’une politique africaine d’un autre temps.
La Chine a plus fait pour le développement de l’Afrique que toute l’aide et les plans d’ajustement structurel du Fmi et de la Banque Mondiale réunis.
Les chaînes d’aliénation culturelle, sociale, économique et politique sont en train d’être brisées, même si le chemin à parcourir demeure long et parsemé d’embûches. Les axiomes édictés par le monde occidental sont de plus en plus contestés par une nouvelle génération d’Africains, pour qui le respect mutuel est la condition sine qua none de toute relation avec les anciennes puissances coloniales. L’Africain nouveau revendique donc le droit pour les peuples noirs à des relations commerciales d’égalité avec leurs anciens maîtres. Il exprime la nécessité d’établir des partenariats d’intérêt équilibré avec des pays émergents comme la Chine, l’Inde, la Corée, le Brésil ou l’Afrique du Sud. L’Afrique doit-elle fatalement continuer à servir de dépotoir pour des congélateurs et des frigidaires qui sont bannis en Occident à cause de leurs émanations de CFC dangereuses pour la couche d’ozone ?
Est-il normal que pour satisfaire ses aspirations à une meilleure qualité de vie, l’Africain soit obligé de recourir à l’achat de véhicules d’occasion et de fripes venues d’Europe? N’est-il pas plus légitime qu’il puisse avoir l’opportunité d’acquérir un véhicule simple mais flambant neuf de marque coréenne à cinq millions de Fcfa, plutôt que d’avoir à dépenser trois millions pour une guimbarde de troisième main de fabrication française? Est-il inéluctable d’avoir à dépenser de l’argent pour l’achat de vieilles vestes et cravates plutôt que de privilégier le port de boubous, de chemises et de robes tissés dans du coton produit et travaillé localement ? A qui profite réellement le maintien de l’Afrique francophone dans la zone Franc ? Pourquoi les pays africains qui, à l’instar de la Tanzanie, du Kenya, du Ghana ou du Nigeria, ont crée leur propre monnaie, s’en sortent-ils mieux que les soi-disant poids lourds de l’Afrique de l’Ouest et du Centre que sont la Côte d’Ivoire, le Sénégal ou le Cameroun?
“Ce qui m’effraie, ce n’est pas l’oppression des méchants; c’est l’indifférence des bons” (Martin Luther King)
La solution ne réside pas dans l’adhésion inconditionnelle au mouvement altermondialiste tel qu’il existe aujourd’hui, puisque même en son sein, l’Afrique est marginalisée. En janvier 2003, à Porto Alegre, une des plus célèbres figures altermondialistes françaises, leader d’une organisation vouée à la défense du Sud s’est ainsi "lâchée" face à un jeune intellectuel malien qui s’était timidement plaint de cette mise à l’écart: "Vous les Africains, vous n’avez rien à dire, vous n’êtes ici que grâce à la générosité de la France!" L’anecdote rapportée par l’écrivain Boubacar Boris Diop, associée au silence assourdissant des grandes figures altermondialistes européennes à propos de la guerre de la France en Côte d’Ivoire a fait comprendre à l’intelligentsia noire que le salut de l’Africain ne peut venir que de l’Africain lui-même. La résistance aux manœuvres dilatoires des Français et des élites africaines corrompues qui leur servent de relais s’organise. Le devoir de soutenir ceux qui ont le courage de poser les bonnes questions et de proposer des solutions qui placent le bien-être des Africains au centre de leurs préoccupations s’impose de plus en plus comme une évidence.
Laurent Gbagbo, Paul Kagamé, Robert Mugabe, Thabo Mbeki, Muhammar Kadhafi. Les leaders africains qui mettent en péril leurs intérêts font l’objet d’une diabolisation acharnée par les gouvernements occidentaux, relayée par des campagnes d’intoxication et de manipulation médiatique souvent reprises docilement par des médias africains décérébrés ou tenus par la politique du ventre.
Lorsqu’il est élu en 2000, Laurent Gbagbo veut réaliser son programme : rendre l’enseignement accessible à tous, instaurer l’assurance-maladie universelle et faire en sorte que chaque Ivoirien ait droit à un toit. Selon la journaliste belge Colette Braeckman, "désireux de calmer le jeu politique, il rétablit M. Ouattara dans ses droits, organise un Forum de la Réconciliation nationale et en 2001, le RDR emporte les élections municipales. Les perspectives économiques sont jugées bonnes par la Banque mondiale, qui promet de nouveaux crédits, la Côte d’Ivoire semble se redresser. C’est alors que le président Gbagbo prend la décision d’aller plus loin : il veut ouvrir le marché national, car il estime que son pays ne doit plus être la chasse gardée de la France". Les conséquences sont connues.
Depuis trois ans, la Côte d’Ivoire est plongée dans le chaos parce que son président a osé vouloir inventer un avenir couleur Afrique. Même si Jacques Chirac n’a pas réussi à éliminer le fauteur de trouble, il compte sur l’effet dissuasif de sa guerre en Eburnie pour annihiler toute velléité de récidive dans son pré carré. Le véritable défi à relever consiste à mobiliser des opinions publiques endoctrinées ou indifférentes pour lui faire comprendre que l’Africain du 21ème siècle ne tergiverse plus avec sa liberté et sa dignité. Et déjà, derrière le président Gbagbo, les voix de plus en plus nombreuses d’un continent en mutation s’harmonisent et une mélodie entêtante s’élève moderato cantabile: "Monsieur Chirac, il faut que vous le compreniez : nous voulons que vous partiez". _________________ La vie est un privilege, elle ne vous doit rien!
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Vous : Côte d'Ivoire : Enjeux de la crise pour la France et l'Afrique
«Le premier devoir d’un révolutionnaire est de rester en vie.» (Ernesto «Che» Guevara)
Par Nathalie Yamb
Les raisons de la crise ivoirienne sont à chercher bien au-delà d’une inimitié personnelle entre Laurent Gbagbo et Jacques Chirac. Le véritable enjeu de la guerre coloniale française en Côte d’Ivoire est la redéfinition des rapports entre la France et l’Afrique. Le processus de décolonisation politique et économique de son pays engagé par Laurent Gbagbo met en danger la domination de la France sur l’ensemble de son pré carré africain. «En fait, la présence française répond d’abord à des impératifs géostratégiques. Si la France se désengage de la Côte d’Ivoire, qui draine presque la moitié de la masse monétaire en Afrique de l’Ouest, elle peut dire adieu à son rôle de «gendarme de l’Afrique». Cette analyse du journaliste de VSD Antoine Dreyfus a le mérite d’éclairer sur les motifs profonds de la violence et de la virulence française dans le traitement du «problème» ivoirien, tant au plan médiatique que militaire et politique.
Depuis 1945, la classe dirigeante française, qui a toujours voulu pour la France un statut de puissance mondiale justifiant son siège de membre permanent du Conseil de Sécurité obtenu in extremis à la fin de la seconde guerre mondiale, ne s'est pas résignée à ce que son pays ne soit "qu'une" puissance européenne parmi d'autres. Pour être puissance mondiale, il faut que la France puisse peser sur les événements hors de l'Europe. Le seul endroit au monde où cela reste possible est l'Afrique noire francophone, seule zone d'influence qui lui est reconnue par les autres membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU, qui marchandent entre eux à partir de leurs zones d'influence respectives. «La France est grande lorsqu’elle monte sur les épaules de l’Afrique», disait au Figaro l’ambassadeur américain en Angola il y a quelques années. «La perte de l’influence française, si elle se confirme, sera lourde de conséquences pour Paris. Pas tant au niveau économique, car les intérêts français en Côte d’Ivoire se sont étiolés avec le temps. Mais parce que la Côte d’Ivoire aide à maintenir le rang de la France dans le monde, elle est le pays phare de l’influence de Paris en Afrique francophone», confirment les journalistes du Figaro Isabelle Lasserre et Pierre Prier.
Le désarroi du maître face à des états vassalisés qui s’émancipent
La France a donc besoin d'une cour d'états sycophantes en Afrique noire francophone qui puisse applaudir et soutenir toutes ses initiatives internationales. Depuis 1960, date des indépendances formelles, la politique française en Afrique consiste à bâtir et consolider un ordre néo-colonial où, pour assurer la pérennité de sa zone d'influence, la France n'a cessé de tisser un maillage serré d'institutions et de mécanismes destinés à arrimer les états africains à ses intérêts. Cette toile d'araignée va des accords de défense, crédibilisés par un réseau de bases militaires en Afrique, à la zone franc -entité étonnante aujourd’hui avec la disparition du franc-, en passant par des organisations «sous-régionales» comme la Francophonie. Le tout étant soigneusement verrouillé par le veto français dans les organisations financières de Bretton Wood, qui lui permet de couper l'accès aux financements internationaux à tout pays récalcitrant. Cet édifice, qui fonctionnait sans heurt tant que les Africains l'acceptaient avec leur bonhomie habituelle, devient précaire dès lors que les nouvelles générations d'Africains ne trouvent plus leur compte dans un système où l'équilibre des avantages et des inconvénients ne leur est plus nécessairement favorable. «L’exception française en Côte d’Ivoire n’existe plus, le rubicond a été franchi et la vitrine d’une décolonisation réussie a volé en éclats», d’après Antoine Glaser, directeur de la rédaction de la Lettre du Continent.
Une situation dans laquelle le principal pays du pré carré réussirait à s'affranchir de la tutelle néo-coloniale est donc inacceptable pour Paris car, de proche en proche, cela signifierait la fin de sa zone d'influence et le reflux de la France vers un statut de puissance européenne -situation que les élites françaises s'acharnent à éviter depuis un demi-siècle- et peut-être, en bout de chaîne, la fin du statut de membre permanent du Conseil de Sécurité. «La Côte d’Ivoire, c’est ce qui permet à la France d’être une grande puissance moyenne, de justifier son siège au Conseil de Sécurité des Nations Unies. C’est sa visibilité diplomatique», selon Albert Bourgi, professeur de relations internationales à l’université de Reims. Laurent Gbagbo est la personnification de la menace. C’est la raison pour laquelle Paris a décidé d’éliminer le président ivoirien, trop désireux de s’affranchir.
Le toujours très bien informé Canard Enchaîné, dans son édition du 17 novembre 2004, publie un document «confidentiel défense» qui officialise l’arrivée en septembre 2002 de trois mercenaires tricolores à Abidjan et leur exfiltration hâtive par la DGSE (services secrets français). «Au nom du gouvernement français, ils proposent leurs bons offices pour la mise en place d’un service de sécurité et de renseignement. Leur démarche a lieu moins de dix jours avant le 19 septembre, date d’un nouveau coup d’Etat avorté visant à renverser Gbagbo. Ce putsch a fait 300 morts à Abidjan […]».
Ceci explique également pourquoi les autorités françaises sont prêtes à engloutir des dizaines de milliards d'euro dans l'opération Licorne pour plusieurs années. Même si, comme l’exprime un officier français dans le Figaro du 22 novembre 2004, «il n’y a aucune raison que les choses s’arrangent. Je ne vois pas comment Licorne pourrait rester dans ces conditions».
Eternel négationnisme
Nonobstant le révisionnisme imprescriptible dont font preuve les hommes politiques et les média français, il est impossible d’ignorer la participation de la France dans les conflits africains. La classe politique hexagonale, quelle que soit sa couleur, a toujours fait preuve d’un incommensurable talent pour financer des coups d’Etat, soutenir des génocidaires, réprimer violemment toute velléité de contestation dans son pré carré. Est-il besoin de revenir sur la guerre du Biafra, avec son million de morts en entre 1967 et 1970, lorsque la France, pour élargir sa zone d'influence, soutenait les séparatistes ? Au Rwanda, l’engagement total de la France aux côtés de l’Etat-pion a conduit à l’extermination systématique des Tutsis. Entre 1990 et 1994, la France a livré régulièrement des armes, des munitions et son soutien logistique aux Forces armées rwandaises (FAR), alors que le gouvernement du président Habyarimana procédait aux premières épurations ethniques. Son soutien a été également financier et diplomatique. Jusqu’au 25 novembre 1994, la France a bloqué toute aide financière de la Banque Mondiale et de l’Union Européenne au nouveau gouvernement de Kigali.
Pendant l’ethnocide, la France a empêché la mise en accusation des auteurs du génocide lors de la Commission annuelle des Droits de l’Homme des Nations Unies et permis, dans le cadre de l’opération Turquoise commandée par le général Poncet, actuellement commandant de la force Licorne en Côte d’Ivoire, l’exfiltration au Zaïre des dignitaires du régime génocidaire. «Des soldats de notre pays ont formé, sur ordre, les tueurs du troisième génocide du XXe siècle. Nous leur avons donné des armes, une doctrine et un blanc-seing», accuse le journaliste français du Figaro, Patrick de Saint-Exupéry, dans son livre «L’inavouable : la France au Rwanda». La répression meurtrière de la rébellion upéciste, les purges sanglantes et les massacres perpétrés par les Français en mai 1955 ont fait plus de 100.000 victimes civiles camerounaises. La France a financé parallèlement le camp gouvernemental et la rébellion en Angola. Faut-il revenir sur l’implication de l’Hexagone dans les coups fourrés et les conflits aux Comores, au Bénin, au Soudan, au Tchad, au Liberia, en Centrafrique, en Guinée-Bissau, dans les deux Congo ?
Et le Cameroun dans tout ça ?
Quid du Cameroun ? Ce pays est la locomotive économique de l’Afrique Centrale. Qu’ils apprécient ou non la politique ou le bilan de leur chef de l’Etat, il n’en demeure pas moins que c’est très certainement grâce à son «manque de lisibilité» décrié dans les chancelleries occidentales que les Camerounais vivent en paix. Paul Biya est imprévisible. Il est souvent là où l’on ne l’attend pas. Son pied de nez à la France lors de la crise irakienne, lorsqu’il se rend à Washington pour soutenir ouvertement les Etats Unis, est l’un de ces actes impondérables tant médits en Europe. Stratège, le président Biya a diversifié la distribution des joyaux camerounais. Il a ainsi évité une dépendance économique exclusive à la France, même si l’assujettissement demeure incontestable.
Une licence de téléphonie mobile aux Sud-africains, le cobalt aux Américains, la bauxite à un consortium danois/sud-africain, le terminal à conteneurs à un consortium dont font partie plusieurs groupes français comme Bolloré, Socomar, Getma, mais dirigé par le géant danois Maersk, l’électricité aux Américains, les plaques minéralogiques aux Allemands…
En plus de la personnalité de M. Biya, la relative «exception camerounaise» peut s’expliquer en partie par le contexte historique. Ce pays n’a en effet jamais été une colonie française au sens juridique du terme, mais un protectorat et un territoire sous mandat de la Société des Nations (Sdn), ancêtre de l’Organisation des Nations Unies (Onu). Même si cela n’a pas changé grand chose au quotidien de l’indigène camerounais par rapport à l’autochtone du Gabon ou du Congo-Brazzaville, cela a quand même créé une certaine retenue.
Solution endogène
L’Afrique ne doit attendre aucune compassion de la part de ceux qui l’exploitent. La solution ne peut venir que des Africains eux-mêmes et de leurs gouvernants. Elle se dessine à l’horizon, les Ivoiriens en prennent le chemin. La rupture avec le système néo-colonial instauré par la France en Afrique sera difficilement sereine. La Côte d’Ivoire de Laurent Gbagbo en est la preuve. Mais l’Histoire s’écrit. Les idées, les équipes et les méthodes se renouvellent. Le temps de la braderie inconsciente des ressources, du pillage des patrimoines noirs par les pays occidentaux, de l’exploitation systématique de l’Africain sous le nietzschéen prétexte de sa condition de sous-homme, est en passe d’être inexorablement révolu. Qu’il soit Camerounais ou Ivoirien, il est noir et fier de l’être, mais humain avant tout, avec des aspirations, des valeurs et une identité revendiquées moderato cantabile, mais ça ira inéluctablement crescendo. «Le voudrait-elle, la France n’a plus les moyens d’influencer Abidjan et de renouer avec une politique africaine de grande puissance. Ni de cogérer l’appareil d’Etat ivoirien, comme elle l’a fait jusqu’au début des années quatre-vingt-dix», constate M. Bourgi.
Il est toujours périlleux de bâtir un empire sur des fondations bancales. «Après le coup d’Etat manqué de septembre 2002, les ambiguïtés de la politique française […] ont brouillé dans l’opinion ivoirienne la perception de la mission de l’armée française», continue Albert Bourgi. L’occupation de l’aéroport Houphouët-Boigny et des ponts d’Abidjan par les soldats français est ressentie comme un affront par l’Africain nouveau. La destruction de l’aviation ivoirienne par l’armée française comme une humiliation. La propagande et la désinformation des média gaulois, une insulte. Les images montrant soldats et snipers français en train de tirer sur la foule de manifestants ivoiriens devant l’hôtel Ivoire à Abidjan ont été uniquement retransmises par i-télé, chaîne d’information en continu de Canal Plus. Le Canard Enchaîné, qui a visionné le document filmé par les journalistes de la chaîne câblée, assène dans son édition numéro 4387 : «Ces images prouvent la nécessité d’une enquête approfondie. Et elles empêchent la France de se présenter comme la seule victime de ses sinistres journées». La censure, révélée le 21 novembre dernier par l’émission «Arrêt sur images» de France 5, a été assumée par les grandes chaînes de télévision hexagonales.
«A la différence de i-télé, nous sommes retransmis sur TV5 et diffusés dans le monde entier. Nous devons gérer l’information avec responsabilité», dixit la responsable de l’information de la chaîne publique France 2, interrogée par l’équipe de l’émission. Les intrigues cousues de fil blanc du gouvernement français sont également perçues comme une injure à l’intelligence. Le dénigrement vindicatif des leaders africains comme une vexation. La mort des civils Ivoiriens, une plaie. Mais rien ne semble pouvoir entraver le déroulement de l’Histoire. David contre Goliath. La fin n’est pas toujours celle qui paraît la plus évidente. «On est en train de perdre la Côte d’Ivoire. […] C’est d’autant plus dommage qu’entre Marcoussis et le laisser-faire, il y avait une troisième solution : soutenir Gbagbo à fond […]», regrette, amer, un officier français dans l’hebdomadaire de droite le Figaro.
Vers une interdépendance équitable à l’ère de la mondialisation
L’avenir est à une coopération équitable, dans le respect mutuel de chacun. Lorsque l’Africain est vendeur, il doit pouvoir, comme le Brésilien, l’Indonésien ou n’importe qui d’autre, poser ses conditions sans avoir à craindre les machinations de l’Elysée, pleurer ses morts abattus et décapités, consoler ses mères violées, regarder ses enfants grandir dans la misère et la détresse. Il est temps que la France fasse son deuil du «bon nègre rigolard, grand enfant et soumis». L’Africain veut acheter tricolore quand l’entreprise française propose la meilleure offre globale et non parce que son pays est une chasse gardée qui n’a pas d’autre choix que d’accepter tous les diktats.
Doit-on condamner un président du Tiers-monde parce qu’il veut prendre des initiatives politiques communes avec la France lorsque celles-ci sont dans l’intérêt bien compris de son pays, et non pas parce que son territoire est un état vassalisé voué à chanter les louanges du maître ou à lui servir d’écho ? Il est important pour tous que le principe universellement reconnu du «droit des peuples à disposer d’eux-mêmes» s’applique à ceux d’Afrique comme aux autres. Ce qui revient à dire que l’on laisse les Ivoiriens approuver la Constitution qui leur convient et non celle qui arrange le gouvernement français. Et que l’on laisse gouverner les dirigeants que les Africains ont eux-mêmes élus, même s’ils ne plaisent pas à l’Elysée. _________________ La vie est un privilege, elle ne vous doit rien!
Vous lui devez tout, en l'occurence votre vie
Telle une pirogue perdue au milieu d’un océan en furie, l’Afrique, en déliquescence, est en butte à tant de maux que les mots ne suffisent plus pour en décrire l’indigence…Hier, un homme que j'estime énormément m’a demandé pourquoi j’admire tant Laurent Gbagbo. Cela me semblait tellement évident que j’ai eu quelques difficultés à synthétiser mes pensées pour les coucher sur papier. Laurent Gbagbo est un génocidaire ! Laurent Gbagbo persécute Ouattara et les musulmans ! Laurent Gbagbo est un menteur, il ne respecte pas les Accords de Marcoussis ! Laurent Gbagbo a donné l’ordre de bombarder les cantonnements français ! Laurent Gbagbo doit quitter le pouvoir ! Laurent Gbagbo est un intégristes anti-français ! Que n’a-t-on pas entendu sur les ondes de Rfi, que n’a-t-on pas lu dans Le Monde, sur Afp ou à Libération ? Laurent Gbagbo, réincarnation de Faust ? Que nenni ! Analyse d’une propagande et d’un amalgame.
Scoop au JT de 20 heures sur France 2 : Côte d’Ivoire, plus de 520 manifestants anti-Gbagbo tués à Abidjan par les partisans du chef de l’Etat. Quand on sait que ladite manifestation n’a pas rassemblé plus de 50 personnes, dont les 4/5 sont rentrés chez eux en bonne santé et juste un peu furieux contre leurs commanditaires qui les avaient honteusement laissés choir, on pourrait presque rire du ridicule des informations colportées, n’en étaient les répercussions dramatiques. La France, adoubée experte dans l’art du génocide par sa participation active à la tragédie rwandaise, essaie de salir la réputation d’un homme réputé indocile qui, par son refus de se laisser instrumentaliser par les colonisateurs de l’Hexagone, est devenu ingérable. Quoi de plus facile que d’émettre des accusations sans en apporter les preuves ? L’effet néfaste d’une telle accusation est immédiat et le temps que l’on se rende compte que c’était de l’intoxication, tout aura été oublié.
C’est les avantages du fast food médiatique.
On stigmatise l’élan patriote des populations ivoiriennes, que l’on avait occulté et qui prend au dépourvu tous les cerveaux conspirateurs à l’œuvre. 800 000 personnes rassemblées au cœur d’Abidjan pour réclamer le départ des soldats français et scander leur refus des manipulations ouattaro-chiraquiennes, ce n’était pas prévu, et ça fait mal quand ça passe sur Cnn et Euronews. Alors, on crée des accroches percutantes pour détourner l’attention : "Les escadrons de la mort sèment la panique à Abidjan". On tue un proche du Rdr ? Les escadrons de la mort. On ne sait pas qui ils sont, on ne sait pas d’où ils viennent, mais bizarrement, on sait de façon absolue que c’est des proches de Simone Gbagbo. Pourquoi tant de mystères ? Pourquoi ne pas donner les noms de ces personnes ? Le flou artistique que l’on injecte est tellement plus pratique, puisqu’il permet distorsions et contrevérités. Et surtout, ce serait très embêtant d’avoir à reconnaître que ces gens n’existent pas.
On ne fait pas d’omelette sans casser des œufs. Ceux qui ont amené la guerre en Côte d’Ivoire essaient de se poser en victimes, maintenant que leur plan a échoué. Mais quand la ficelle est trop grosse, ça ne fonctionne pas. On peut tuer des hommes, mais un pays ne meurt jamais. Gbagbo a certainement beaucoup de défauts (...) Mais ce n’est ni un voleur, ni un assassin. Et à ce jour, personne, même les plus virulents de ses détracteurs, n’a pu prouver le contraire. On ne juge pas quelqu’un sur des insinuations, mais sur des faits établis.
Alassane Dramane Ouattara n’aime pas la Côte d’Ivoire. Son parcours le prouve. C’est un "serial loser", tellement obnubilé par l’idée de diriger le fleuron ivoirien, qu’il est prêt à tout pour parvenir à ses fins (...)
Jamais quelqu’un n’aura autant porté préjudice à la Côte d’Ivoire que Ouattara. Profitant du rêve panafricaniste bâclé d’Houphouët Boigny, il a obtenu la nationalité ivoirienne, bien plus glamour que l’identité voltaïque dont il jouissait jusque-là. Henri Konan Bédié, qui brillera par son incompétence jusqu’à ce qu’il soit renversé par le général Guéi, et avec qui Ouattara se disputa la succession politique d’Houphouët, créa alors le concept d’ivoirité, pensant pouvoir ainsi se débarrasser d’un adversaire politique trop gourmand. Seulement, le très peu courageux Bédié n’osa pas aller jusqu’au bout du processus initié par ses soins, un peu comme Bush père qui ne se débarrassera pas de Saddam Hussein alors qu’il en avait les moyens et l’occasion.
Ouattara, qui est certainement l’un des aspirants à la charge suprême ayant passé le moins de temps dans le pays qu’il convoite, occupé qu’il est à se carapater dans ses confortables logements en France dès qu’une petite étincelle s’allume en Côte d’Ivoire, décide alors de tout mettre en œuvre pour conquérir le pouvoir auquel aspire son ego hypertrophié. Il n’hésite pas à financer le putsch qui verra l’avènement du général Guéi en Père Noël. Seulement voilà, il n’est pas le seul à vouloir se délecter des enchantements conférés par le fauteuil présidentiel ivoirien. Ayant goûté à la douceur du calice, Guéi, soudainement frappé par une forme élitiste d’Alzheimer, se désolidarise de son mentor et revendique le pouvoir pour lui-même. Il n’est en effet plus question de laisser la place à M. Ouattara, comme cela avait été prévu lors de secrètes conspirations dans les quartiers chics de Paris.
Reprenant à son compte le concept de préférence nationale tropicalisée de Konan Bédié, le général-président organise un référendum relatif à la généalogie nécessaire pour prétendre à la magistrature suprême. N’est-il pas savoureux de se rappeler qu’Alassane Dramane Ouattara, en homme libre, mature et responsable, a lui-même appelé haut et fort ses partisans à voter "oui" à ladite modification de la Constitution, qui le disqualifiait d’office et qu’il conteste aujourd’hui à corps et à cri ? Hélas pour Guéi, ses tentatives de fraude électorale se solderont par l’échec que l’on sait et Laurent Gbagbo est élu.
Pour Ouattara, c’est la bérézina. Gbagbo, opposant historique d’Houphouët Boigny, qui n’a jamais transigé avec ses idéaux, est une option qu’il n’avait pas sérieusement envisagée et une personne qu’il ne pourra pas manipuler. Gbagbo élu au suffrage universel, porté par le peuple, c’est le renvoi aux calendes grecques de toutes les ambitions personnelles qui le dévorent. Alors il va falloir se faire plus inventif que jamais.
Un bouleversement de la démographie électorale s’impose. On réclame la naturalisation de tous les étrangers d’origine burkinabé ou malienne travaillant dans le Nord du pays. Et comme cela ne passe pas, on attise les haines, et l’on répand la peur parmi les naïves populations paysannes et trop souvent illettrées du Septentrion, en agitant le spectre d’une répression massive des musulmans par Laurent Gbagbo, qui durant toute sa carrière politique -et elle est longue- n’a jamais pensé à faire de la discrimination ethnique son cheval de bataille. C’est ainsi qu’est stylisée une pseudo menace de ségrégation religieuse, dont la finalité est de donner le pouvoir à un homme dont l’opportunisme politique va au-delà de considérations citoyennes ou morales. Alassane Dramane Ouattara n’a qu’un Dieu, c’est lui même. Poussé par l’ambition démesurée et mercantile de son épouse juive, Ouattara cherche à assouvir son appétit gargantuesque par tous les moyens, avec les conséquences que l’on sait.
Elève docile et policé des puissances occidentales, bien endoctriné par Bretton Woods, Ouattara est le fantoche qu’il faut à la France. Quand, avec l’appui logistique du machiavélique assassin de Thomas Sankara, dont les volontés expansionnistes n’ont d’égales que la pauvreté du pays qu’il dirige, il se tourne vers le gouvernement français pour lui demander son soutien, il l’obtient aisément. Et c’est ainsi que se mettra en place une implacable machine de déstabilisation et de manipulation politico-militaire épaulée à grands renforts de travestissement médiatique. L’Histoire retiendra l’insuffisance des capacités de Deus es machina de Chirac,Villepin, Ouattara et Compaoré face au volontarisme d’un peuple et au charisme d’un homme, Laurent Gbagbo, qui a su fédéraliser autour de lui les Ivoiriens de tous bords autour de la fierté d’appartenir à une nation digne à la conquête de sa liberté.
Laurent Gbagbo est un menteur. L’accord de Linas Marcoussis ? Les tribunaux du monde entier le diront : un aveu obtenu ou un accord signé sous la contrainte n’a aucune valeur juridique. Jacques Chirac, habitué à une gestion paternaliste de son pré carré africain, n’a pas toléré la fronde du jeune Laurent. Petit galopin, va au piquet ! Comment ça, non ?! Attends voir… Galouzeau va s’occuper de toi. Et maintenant qu’il te tord le bras gauche derrière le dos, vas-tu enfin accepter d’écrire cent fois "je ne contrarierai plus la mainmise de la France sur la Côte d’Ivoire" ? La France pouvait-elle vraiment espérer que cette mascarade serait fructueuse ? Cette France, qui magouille les élections en Polynésie, qui refuse l’indépendance de la Nouvelle Calédonie, qui occupe la Corse, voudrait obliger le président d’un état indépendant et souverain a confié à des excités les portefeuilles de la Défense et de l’Intérieur. Ahurissant ?
Pas tant que cela, quand on sait que le scénario a été écrit par Dominique de Villepin, artisan de la dissolution inopportune pour son camp de l’Assemblée Nationale française, cet homme si élégamment surnommé Néron par Bernadette Chirac, qualifié de "spécialiste des coups tordus" par Arnaud Montebourg et "soupçonné de démence par la classe politique française", selon l’hebdomadaire L’Express en décembre 2002.
Fin politicien, le président Gbagbo a cependant décidé de mettre en œuvre certaines dispositions du document de la honte. N’a-t-il pas accepté le pro rebelle Seydou Diarra comme premier ministre ? Ce même Seydou Diarra qui, à la tête d’une mission d’observateurs africains lors d’une élection présidentielle au Cameroun, a légitimé la victoire de Paul Biya en cautionnant les manipulations électorales du pouvoir en place (...) Laurent Gbagbo n’a-t-il pas fait voter par les députés la loi d’amnistie ? N’a-t-il pas fait entrer Guillaume Soro, Roger Bianchi, Henriette Diabaté et d’autres parrains d’assaillants dans le gouvernement ? Peut-on énumérer quelques actes de bonne volonté posés par les rebelles ? Un seul ? Non.
L’accord d’Accra prévoyait le désarmement des rebelles à partir du 15 octobre 2004. Mais, l’échéance atteinte, il a été déclaré caduque par Guillaume Soro et ses sbires. Comment pouvait-il en être autrement ? Pourquoi un accord initié par des Africains, signé en Afrique, aurait-t-il moins de valeur que le simulacre orchestré par des mangeurs de grenouilles nostalgiques de la Françafrique dans une banlieue parisienne ? Quel est l’avenir d’un Soro dans une Côte d’Ivoire libérée et une rébellion désarmée ? Redevenir porte-parole du mouvement estudiantin ? Il y a peu de chance. Se faire occire par les exaltés qu’il a subsidiairement dirigé et qui contestent son autorité depuis qu’il s’est installé dans des hôtels quatre étoiles à Abidjan, aux frais du gouvernement, alors qu’eux-mêmes galéraient à Bouaké et Vanvoua ?
Le bombardement des cantonnements français ? Laurent Gbagbo n’a jamais donné l’ordre de bombarder les baraquements français. Ce sont les positions rebelles qui ont été visées. Où étaient les neufs soldats tués ? Que faisaient les militaires français dans les bases rebelles ? Pourquoi la France a-t-elle si rapidement rapatriée ses morts, sans laisser les autorités ivoiriennes voir les corps et participer à l’enquête ? Qu’y a-t-il à cacher ? Qui a le plus à gagner de cette situation?
La mort des soldats français ne m’émeut pas. La mort est un des risques inhérents au métier de soldat. Cependant, ilest vrai que ça doit leur faire tout drôle d’avoir à compter des cadavres, alors que jusqu’ici, le travail des hommes de Licorne se bornait plutôt à faire la java au Brasero, à braquer des agences de la Bceao et à trousser de très jeunes filles consentantes ou pas en zones rebelles.
La mort des soldats français m’émeut. Parce qu’elle a donné aux colons français l’occasion de détruire les moyens de l’armée de l’air ivoirienne. Et que ce faisant, ils ont permis, encore une fois, aux rebelles d’éviter l’assaut final des Fanci et la libération des territoires occupés.
Laurent Gbagbo doit quitter le pouvoir. Fait rarissime en Afrique noire francophone, voilà un président démocratiquement élu au suffrage universel lors d’une élection qu’il n’a pas lui-même organisée, puisque c’est le putschiste Robert Guéi qui était au pouvoir lorsqu’il a gagné les élections. Ce même Guéi qui n’hésitera pas à faire tirer sur les manifestants descendus dans la rue rendre à mains nues la victoire volée au candidat Gbagbo. Il a été élu pour cinq ans. Pourquoi devrait-il quitter le pouvoir avant la fin de son mandat ? Jusqu’à la scission du pays, orchestrée par Ouattara avec l’aval de la Chiraquie et l’appui de son frère burkinabé Blaise Campaoré, le bilan économique de Laurent Gbagbo était resplendissant. La France n’aime pas les frondeurs. Jacques Chirac, cet apôtre de la paix, ce grand ami de l’Afrique, qui soutient ouvertement tous les dictateurs en place, du moment qu’ils lui font allégeance, est indisposé par l’indépendantiste Gbagbo. Evidemment, il détonne un peu dans le bataillon des Omar Bongo Ondimba, auteur du célèbre "chaque Gabonais a deux patries : le Gabon et la France", Gnassignbé Eyadema, Ben Ali, Paul Biya, Sassou Nguesso, François Bozizé et autres vaillants dirigeants du continent à la dérive…
Laurent Gbagbo ravive trop de souvenirs pénibles pour les adeptes de l’Afrique d’avant les factices indépendances politiques des années 60. Il y a trop de similitudes entre le camarade Gbagbo et les pères de l’Union des Populations du Cameroun. On ne veut pas d’un nouvel Um Nyobe, il faut se débarrasser de lui avant qu’il ne draine inexorablement son pays vers la libération du joug économique exercé par l’Occident. Peut-on vraiment laisser prospérer ce chantre de la coopération Sud-Sud ? La France, ténor du mouvement anti-américain contre la guerre économique menée par les Yankees en Irak, fait la même chose en Côte d’Ivoire. Et les mêmes causes produisant les mêmes effets, la grande Nation expérimente elle aussi à ses dépens les délices d’un bourbier sans fond.
La diabolisation de Laurent Gbagbo doit donc commencer. Aidé par certains média africains lamentables, qui reprennent, sans autre analyse, la propagande diffusée dans les média français par le quai d’Orsay, un portrait méphistophélique du combattant Gbagbo est savamment distillé.
La crise ivoirienne est l’occasion pour la France de s’essayer à une manipulation médiatique à échelle globale, comme cela avait été si bien effectué antérieurement par les Etats Unis, précurseur en la matière lors de la première guerre du Golf. La démission retentissante de Théophile Kouamouo, rédacteur au journal Le Monde, qui voyait systématiquement ses articles modifiés à Paris pour abonder dans le sens du gouvernement français et non pas dans celui de la vérité, a réussi à réveiller certains observateurs. Mais la crédulité a la vie dure et voilà donc Laurent Gbagbo estampillé dictateur sanguinaire, accusé de toutes les turpitudes. Son crime est d’avoir éveillé la conscience et réveillé la fierté de ses concitoyens. Le président a osé faire savoir aux tuteurs français que s’ils veulent pêcher dans le marigot ivoirien, ils doivent payer le prix qu’il faut pour le poisson qui en sort et non plus se servir gratuitement, comme ils avaient l’habitude de le faire jusqu’à son arrivée au pouvoir.
Alors Laurent Gbagbo doit partir. Mais voilà, non seulement il arrive à s’extirper indemne d’une machination abracadabrantesque, mais il a de plus le mauvais goût de rendre la monnaie de leur pièce à ceux qui, pour bassement assouvir leurs intérêts personnels, n’ont pas hésité une seconde à plonger le pays dont ils se prétendent ressortissants dans le chaos le plus total. Si tu apprends à quelqu’un à faire du pain, ne t’étonne pas qu’il devienne boulanger, dit un proverbe africain. D’après les scoliastes zélés de la politique ivoirienne, le nègre Gbagbo a juste le droit d’obtempérer aux ordres de Bwana Chirac, mais pas celui de dépasser le maître qui donne sans vergogne des leçons, en dépit du tintamarre assourdissant des casseroles qu’il traîne derrière lui. D’opposant lambda, Gbagbo est devenu chef de parti, et après quelques trébuchements, il a pris toute la stature d’un chef d’Etat très au fait de la stratégie politique. Alors, c’est clair, la France l’a décidé urbi et orbi : Gbagbo doit partir.
Laurent Gbagbo est un intégristes anti-français. Pour le gouvernement français, Laurent Gbagbo est l’homme à abattre. Comment peut-il oser défier la mère patrie ? La Côte d’Ivoire n’est-elle pas une excroissance du territoire français ? Qui est-il pour se permettre d’envoyer valser les donneurs d’ordre hexagonaux ? Ne faut-il pas préserver à tout prix les intérêts géostratégiques français dans ce pays qui dispose d’énormes ressources cacaoyères, gazières et pétrolières? Laurent Gbagbo est dangereux, parce qu’il conteste l’exploitation de son pays par la France. Il récuse l’application sélective des règles démocratiques universelles pour satisfaire aux diktats occidentaux.
Le climat anti-français qui règne en Côte d’Ivoire est uniquement le fait des politiciens français. Ces expatriés qui se massent dans la cour de l’ONUCI peuvent remercier les apprentis alchimistes de la smala Villepin pour la précarité de leur situation et le pillage de leurs biens. La politique de leur gouvernement les a mis en danger. A trop vouloir exacerber la haine ethnique, les Français ont réussi à se mettre dans la ligne de mire. C’est l’éternelle histoire de l’arroseur arrosé.
La Côte d’Ivoire est la boîte de Pandore de Jacques Chirac, ce grand homme, qui traitait encore il n’y a pas si longtemps l’African National Congress de Nelson Mandela de " parti tribal xhosa ". Laurent Gbagbo est mon héros. Il incarne, avec Thabo Mbeki, l’avenir du continent noir. Une Afrique prête non seulement à traverser le désert, mais à s’y implanter durablement, s’il le faut. Une Afrique qui ne transige pas avec les manipulateurs et les agresseurs. Laurent Gbagbo est un symbole. Il est le leader de la deuxième Intifada africaine. Hier, à Douala, dans la rue, j’entendais des jeunes Camerounais parler. Ils évoquaient la situation en Côte d’Ivoire. Uni sono, ils affirmaient qu’ils allaient " casser du français " au Cameroun si l’armée de Chirac touchait au président ivoirien Laurent Gbagbo. Afrique, ta nouvelle guerre de décolonisation a commencé.
Par Nathalie Yamb
Le Quotidien Mutations du vendredi 12 novembre 2004
Merci merci 1000 fois, à vous tous.
Merci pour le post M.O.P. _________________
"Un jour j'ai entendu ces noirs prendre la parole, ils m'ont transmis leur vécu, j'ai compris leurs aspirations et j'ai cessé d'être l'ombre de moi même"
Qu'est ce qu'un camerounais sinon un africain, qu'est ce que le cameroun
sinon un ensemble de frontières inutiles. Vive l'intégration continentale, les USA "united state of Africa" et tous nos enfants, pères et mères des caraïbes.
« Je parle de l’homme et de son refus de la pourriture quotidienne » (Frantz Fanon)
Le mercredi 9 novembre 2005 - [729 mots] – Le Courrier d’Abidjan
Rétrospective – L’analyste camerounaise Nathalie Yamb fait remarquer qu’en une année, les images apocalyptiques se sont déplacées, de manière frappante, d’une Côte d’Ivoire martyrisée par la France à une France déstabilisée par les «raisins de la colère» de ses enfants maudits.
Novembre 2004 : Sous le soleil, une foule de manifestants pacifiques en sit-in devant un grand hôtel. Ils sont jeunes et leurs armes : des pancartes aux slogans sardoniques, des balafons, des drapeaux. Derrière des rouleaux de barbelés, ils chantent, ils dansent et avec leur joie de vivre, ils narguent ces militaires retranchés dans la tour majestueuse. Tout d’un coup, les assaillants français se mettent à tirer dans le tas. Stupeur, panique, colère. La boucherie de l’hôtel Ivoire vient de commencer, se terminant avec le départ précipité de la junte française qui laisse derrière elle un amas de corps sans vie. 63 morts, des centaines de blessés. La veille, les hélicoptères tricolores bombardaient la population qui tentait de traverser les ponts, calcinant au passage humains et véhicules.
Novembre 2005 : Les images sont apocalyptiques. Des bâtiments, des voitures, des poubelles sont en flammes. Des hordes de jeunes encagoulés balancent des cailloux, des pioches, des cocktails Molotov sur des troupes de gendarmes, de policiers et de pompiers, qui reculent devant la charge. Dans la nuit embrasée, les explosions succèdent aux cris de rage dans un crépitement de violence. Couvre-feu, état d’urgence. Gaza, Beyrouth, Bagdad, le Darfour ? Non. Paris, Toulouse, Strasbourg, Lille.
Surprise pour personne sauf pour la classe politique française, la guerre des banlieues ravage l’Hexagone. Muré dans un autisme démultiplicateur de violence, le gouvernement s’entête à nier l’évidence : la France, cette « grande » Nation donneuse de leçons, est en proie à un conflit social et ethnique qui trouve ses sources dans la discrimination raciale et la pauvreté lampante auxquelles sont confrontées les populations issues de minorités.
La Côte d’Ivoire souffre d’avoir été colonisée par la France. Il suffit de faire un tour au Ghana, au Kenya, en Tanzanie pour se rendre compte que le handicap à surmonter par le pré carré français est de taille. L’Afrique Noire francophone porte sur son corps de longues et profondes scarifications : corruption, bâclage, obscurantisme, népotisme… Toutes les tares du colon français ont été inculquées à coups de fouet, de bottes et de kalachnikovs à l’Africain que l’on pensait dompté, ad vitam aeternam.
Les décennies se sont écoulées, la colonisation s’est camouflée dans les atours plus présentables de l’aide au développement, des accords de coopération et de défense, mais la réalité est restée la même. La croissance française passe par l’exploitation impudique de l’Afrique. Dès lors qu’un grain de poussière vient à se glisser dans ce mécanisme bien rôdé, la machine s’enraye.
La mue s’opère, irréversible. Des hommes libres, fiers et dotés d’une intelligence politique hors du commun accèdent à la magistrature suprême en Côte d’Ivoire. Sous la conduite de Laurent Gbagbo et de Mamadou Koulibaly, les Ivoiriens revendiquent le droit d’être libres de choisir. Il fait peu de doute qu’ils y arriveront. Soutenues par Thabo Mbéki, la libération et l’émancipation de la Côte d’Ivoire, et par extension celles de l’Afrique, avancent inexorablement. Pendant ce temps, la France, dirigée par Jacques Chirac, ne fait plus illusion : comparée à ses voisins européens, la patrie de Bécassine a revêtu ses haillons de pays en voie de développement. « Ce Chirac est nul. Il a tué l’Europe, abaissé la France. C’est le plus mauvais président qu’on ait jamais eu, nul de chez nul. Calamiteux !» Paroles de Dominique Paillé, député UMP des Deux-Sèvres.
En France, une grenade est lancée dans une mosquée en pleine prière, des Noirs et des Arabes sont brûlés, maltraités et terrorisés sans qu’aucun officiel ne juge utile de s’en offusquer. En Côte d’Ivoire, l’armée française assassine, braque, viole, intimide et étouffe des Africains dans des sacs en plastique sans que cela ne suscite une émotion particulière. Il serait temps que Chirac et Alliot Marie pensent à rappeler la Force Licorne, peut-être plus douée pour karchériser la racaille à Clichy-sous-Bois que pour renverser le Président Gbagbo. Et tous ces expatriés français en Côte d’Ivoire, que les média hexagonaux s’entêtent à présenter en victimes cloîtrées et terrorisées, de se dire, lors de leur promenade quotidienne en famille au bord de la lagune Ebrié, que finalement, il fait quand même mieux vivre à Abidjan qu’à Argenteuil.
Aujourd’hui, l’émotion n’est plus nègre. Elle est française.
Posté le: Jeu 29 Juin 2006 15:15 Sujet du message:
LIBRES, TOTALEMENT ET DEFINITIVEMENT
L’Histoire est une éternelle répétition et chaque révolution a ses acteurs qui réapparaissent de façon cyclique. L’accession d’Haïti à l’indépendance est riche d’enseignements et mérite d’être plus amplement étudiée en Afrique, afin de permettre une meilleure analyse des crises qui secouent le continent, en Côte d’Ivoire notamment.
« Je vous envoie, mon cher commandant, un détachement de cent cinquante hommes de la garde nationale du Cap, commandés par M. Bari, il est suivi par vingt huit chiens bouledogues. Ces renforts vous mettront à même de terminer entièrement vos opérations. Je ne dois pas vous laisser ignorer qu’il ne vous sera passé en compte aucune ration, ni dépense pour la nourriture de ces chiens. Vous devez leur donner des nègres à manger. Je vous salue affectueusement. » Lettre du général Rochambeau, successeur de Leclerc à la tête des troupes françaises chargées par Napoléon Ier de reconquérir Haïti, au général Ramel le 05 avril 1803.
1791. La révolution des esclaves qui bat son plein à Saint-Domingue est rejointe par Toussaint Louverture, qui en devient rapidement l’un des leaders charismatiques. Afin de mater le soulèvement, le gouvernement français y dépêche des troupes. Cependant, avant que l’expédition militaire ne débarque sur l’île, une insurrection éclate à Paris, la monarchie est renversée et la bourgeoisie esclavagiste chassée.
Face à l’évolution de la situation, Toussaint Louverture, au gré d’alliances versatiles, assoit son autorité sur Saint-Domingue et étend sa base populaire en fédérant de plus en plus d’opprimés, quasiment tous originaires d’Afrique, autour de son combat pour l’émancipation des Noir(e)s. Toussaint s’appuie notamment sur Jean-Jacques Dessalines, qui mène des attaques fulminantes contre leurs adversaires. Dans le camp adverse, les défections se comptent par milliers, les pions locaux de l’oppresseur sont démasqués et jetés en prison par leur propre soldatesque.
Entre temps, cependant, la révolution française s’est essoufflée, et la classe politique métropolitaine, nostalgique de l’opulence procurée par l’exploitation sans retenue des colonies, est de nouveau au pouvoir à Paris. Pour retrouver les mirifiques profits d’antan et satisfaire l’appétit vorace de la bourgeoisie, faisant fi de la mise en garde de Toussaint Louverture (« Nous avons su affronter des dangers pour obtenir notre liberté, et nous saurons affronter la mort pour la maintenir »), Napoléon décide le rétablissement de l’esclavage.
Traquenards et trahisons entre « amis »
S’ensuit une période trouble, conséquence de l’attitude ambiguë de Toussaint, qui, tout au long de son combat pour la liberté, n’a jamais envisagé l’indépendance totale de son île. Il doit faire face à l’exaspération d’une nouvelle génération d’hommes, anciennement esclaves, qui s’est débarrassée du postulat de son infériorité à l’homme blanc.
En répugnant à réprimer sévèrement ceux qui prônent le retour à l’ordre ancien, en rechignant à expurger les éléments douteux de son camp, et en refusant d’exposer et de clarifier les objectifs de la mission qu’il s’est assigné, Toussaint sème la confusion et la frustration parmi ses supporters et provoque la désagrégation du front anti-esclavagiste. Confronté à l’insurrection de ses propres forces, Toussaint se ressaisit et organise la résistance, qui va de succès en succès.
Nonobstant les victoires des résistants et la précarité des troupes françaises, Toussaint, adepte du compromis et de la négociation, demeure persuadé que le conflit avec Paris est une erreur catastrophique. Affaibli par cette conviction, il engage des tractations souterraines avec l’ennemi qui aboutissent à la conclusion d’un accord portant sur la réintégration de l’armée de Toussaint dans l’armée française et le maintien de ses gradés et généraux contre la garantie du non rétablissement de l’esclavage.
Toussaint vient de tomber tête baissée dans le piège tendu par Leclerc, qui, pour gagner du temps en attendant des renforts de la métropole, lui a dissimulé que le rétablissement de l’esclavage est non négociable et déjà effectif en Guadeloupe voisine. Peu après la signature de l’accord, Toussaint Louverture, qui se rend à une invitation-piège du général Brunet, est arrêté et déporté vers la métropole, où il décède en détention en avril 1803.
La mort plutôt que l’esclavage
Lorsque la nouvelle du rétablissement de l’esclavage est enfin confirmée, le feu de la révolte embrase l’île. Dessalines prend la tête de la rébellion et affronte le général Donatien Marie Joseph de Vimeur, vicomte Rochambeau, successeur de Leclerc, dont la seule mission et le plus grand plaisir sont l’extermination de la « racaille » Noire.
Jean-Jacques Dessalines ne souffre pas du même complexe que Toussaint Louverture envers la France. Son objectif est clair et unique : l’indépendance. Loin d’être effrayés par la cruauté et la brutalité des méthodes employées par Rochambeau, Dessalines et ses troupes s’en inspirent et appliquent la loi du Talion. La violence magistrale de la riposte dessalienne, soutenue par une population noire prête à mourir plutôt que de retourner à la condition d’esclave, est telle que le 29 novembre 1803, après plus d’un an d’atroces combats, Rochambeau et les troupes françaises vaincues quittent la partie Ouest de l’île de Saint-Domingue, qui est proclamée république indépendante d’Haïti le 1er janvier 1804.
Mais la France, qui n’arrive pas à digérer la défaite des troupes de Leclerc et le massacre des colons blancs, n’accepte pas l’indépendance d’Haïti. De connivence avec la communauté internationale, composée d’autres Etats colonisateurs qui ne souhaitent pas voir l’exemple d’Haïti contaminer leurs territoires, elle s’emploie à l’isoler, aussi bien économiquement que politiquement. Elle réclame le versement d’une indemnité pour prix de reconnaissance de l’indépendance de l’île. En 1825, soit plus de 20 ans après la victoire de Dessalines, Charles X signe un décret « concédant » l’indépendance en contrepartie du paiement de 150 millions de francs-or (plus tard réduit à 90 millions), somme payable sur 3 ans et qui correspond au budget annuel de la France. Jean-Pierre Boyer, gouverneur d’Haïti, accepte le marché, détruisant ainsi de façon pérenne l’économie du pays. Ironie suprême, Haïti sera obligée de contracter des emprunts notamment auprès de Paris, pour s’acquitter de cette dette odieuse, qu’elle achèvera de rembourser plus d’un siècle plus tard !
Les négriers contemporains préfèrent voir leurs victimes embarquer dans des trains, modernité oblige !
A la grande époque de l’esclavage, des Noirs prenaient une part active à la Traite en vendant leurs frères aux blancs. Ils étaient qualifiés de négriers, nom qui désignait également les navires qui emportaient les victimes de ce commerce inhumain. Ayant sacrifié la liberté de leurs concitoyens sur l’autel de leur enrichissement personnel, ces traîtres regardaient alors leurs frères, enchaînés et entassés dans des cales suffocantes, ramer vers leurs destins tragiques. Aujourd’hui comme jadis, la France s’appuie sur des hommes de main, des marionnettes locales, pour mener à bien son entreprise impérialiste. Les négriers contemporains en Côte d'Ivoire perpétuent cette triste tradition, même s’ils préfèrent voir leurs victimes embarquer dans des trains, modernité oblige, sans doute !
Comme Toussaint Louverture, Félix Houphouët-Boigny s’est battu pour sa patrie, la Côte d’Ivoire. L’abolition des travaux forcés dans les colonies est à mettre à son crédit. Mais Houphouët-Boigny n’ira jamais jusqu’au bout de son combat. Comme Toussaint, il lui est impossible d’imaginer une indépendance totale, en dehors du cadre institutionnel de l’Etat français. Et c’est ainsi qu’il signe lui aussi un accord avec l’oppresseur. C’était le 24 avril 1961 et jusqu’à ce jour, cet accord « de coopération et de défense », le Pacte colonial, entrave la liberté du peuple ivoirien aussi sûrement que les chaînes qui liaient les pieds et les poignets des esclaves de Saint-Domingue. Comme le père de l’indépendance haïtienne, celui de la Côte d’Ivoire est tombé dans le grossier traquenard de la France, qui fit semblant de concéder l’indépendance à son pays, pour mieux continuer d'exploiter ses richesses et aliéner son peuple en le maintenant dans la pauvreté, le sous-développement et l’ignorance.
Comme Napoléon autrefois en Haïti, Jacques Chirac se trouve aujourd’hui confronté à un peuple décidé à conquérir son droit à l’autodétermination. Il a beau avoir donné au général Poncet et à ses complices chefs d’Etat des pays frontaliers, trop heureux de s’exécuter, l’ordre de massacrer des hommes, des femmes et des enfants africains en Eburnie, rien n’y fait : le combat pour la liberté s’intensifie au contraire. Mais alors que la France du 21ème siècle continue d’appliquer les méthodes haineuses et sauvages de Rochambeau, les Ivoiriens, conduits par Laurent Gbagbo et Mamadou Koulibaly, sans jamais céder au découragement, privilégient l’arme du Droit et de la Légalité.
A Haïti, il a fallu douze ans de guerre, de trahisons, de carnages et de soulèvements pour aboutir à l’indépendance. Combien de temps faudra-t-il encore à la Côte d’Ivoire pour s’émanciper du Pacte colonial ? Peu importe, en fait. Les sanctions, perfidies et autres campagnes coloniales, si elles en repoussent l'échéance, ne peuvent modifier ni l’essence, ni la finalité de la lutte en cours. L’Etat français, qui en d'autres occasions l’a pourtant déjà appris à ses dépends, se refuse encore à capituler devant l’absurdité de sa démarche, mais l’évidence de l’inutilité de la guerre faite à une nation aussi déterminée que le peuple ivoirien finira par s’imposer d’elle-même à l’opinion publique et aux dirigeants français.
« Il existe des hommes malheureusement trop puissants […], qui ne veulent voir d’hommes noirs, ou tirant leur origine de cette couleur, que dans les fers de l’Esclavage » (Louis Delgrès)
Inspiré par le frère de Louis XVIII, Jacques Chirac n’accepte pas les velléités d’affranchissement de Laurent Gbagbo et appelle lui aussi au versement d’une rançon pour accepter l’émancipation ivoirienne. Mais au lieu de le faire ostensiblement, il préfère œuvrer par des voies souterraines, tout en s’appuyant sur la bienveillante complicité de la communauté internationale.
Les mécanismes que l’on retrouve aujourd’hui dans la dette des pays du Tiers Monde sont réunis à Haïti dès le dix-neuvième siècle. A travers le Pacte colonial, la dette est également établit comme élément fondateur de l’Etat ivoirien et de la plupart des pays d’Afrique dits francophones. Les ressources naturelles doivent impérativement être proposées en priorité à la France, qui les achète de moins en moins cher, puisque les cours des matières premières sont aujourd’hui encore fixés par les états néo colonisateurs. L’essentiel des revenus résultant de ce commerce biaisé sert en grande partie à rembourser une dette qui l’est déjà depuis longtemps, pendant que, placé dans un compte d’opérations auprès du Trésor français, le reliquat est de facto géré par l’Elysée.
Les Africains n’ont-ils pas le droit de demander pourquoi leurs énormes richesses sont pillées, malgré le fait qu’ils en ont davantage besoin que d'autres ?
(Mahmoud Ahmadinejad, Président de la République islamique d’Iran, à G. W. Bush)
En exerçant à la fois un chantage politique et économique, cette dette sert à préserver les intérêts des gouvernements du Nord et de leurs entreprises en rendant utopique tout développement au Sud. Depuis plus de quatre décennies, à cause de l’étau de la « dette », savamment entretenu à coup « d’aide au développement », aucun aménagement majeur de l’espace de vie des Africains ne peut être effectué, aucun investissement important n’est fait pour le développement des infrastructures routières, portuaires, sanitaires, industrielles ou énergétiques. Depuis plus de quarante ans, l’exploitation des richesses de ses « anciennes » colonies profite exclusivement à la France et aux dictateurs qu’elle a mis en place pour défendre ses intérêts. En Afrique aujourd’hui comme en Haïti autrefois, la France s’arroge le droit de s’approprier des ressources qui ne lui appartiennent pas et de décider ce qui est bon ou non pour les sous-hommes à la peau noire.
La France ne peut pas tolérer la dénonciation par les dirigeants ivoiriens de ces « accords » qui fondent le non droit en droit. Elle se fixe donc des objectifs clairs : frapper du sceau de l’infamie ceux qui ont osé goûter aux effluves de la liberté. Ecraser toute tentative d’émancipation remettant en cause le spoliateur cercle vicieux qu’elle a mis en place et qui est le socle de son économie. Maintenir les Africains dans l’asservissement, quoiqu’il en coûte.
La résistance à l’oppression est un droit naturel. N’en déplaise à Chirac, à Schori, à l’ONU et aux français aux nez épatés et aux lèvres pâteuses qui dirigent encore ci et là les derniers bastions de la France à fric. Depuis l’élection présidentielle de 2000, les Ivoiriens ont fait leurs ces paroles de Malcolm X : « Nous déclarons notre droit sur cette terre, à être des êtres humains, à être respectés en tant qu’êtres humains, à accéder aux droits des êtres humains dans cette société, sur cette terre, en ce jour, et nous comptons le mettre en oeuvre par tous les moyens nécessaires. » La France, qui défend bec et ongles l’application du texte juridique le plus épouvantable que l’Afrique dite francophone aie connue depuis l’abolition de l’esclavage, est reconnue comme ennemi commun par un nombre sans cesse croissant d’Africains. Au fur et à mesure qu’elle se prolonge dans le temps, la lutte des Ivoiriens pour la conquête de leurs droits fondamentaux à la liberté et à l’autodétermination prend de l’ampleur, s’internationalise. Jusqu’au jour, quel qu’il soit, où ils seront libres, totalement et définitivement. Et avec eux, le reste de l’ancien empire colonial d’un pays qui, par son histoire et son inaptitude à en tirer les leçons, confirme qu’il n’a pas sa place parmi les grandes nations de ce monde.
Nathalie Yamb _________________ La vie est un privilege, elle ne vous doit rien!
Vous lui devez tout, en l'occurence votre vie
Pacte colonial : L’emploi selon que vous êtes Noir ou Blanc…
Une lectrice fournit un éclairage sur les mécanismes utilisés par les entreprises françaises pour annihiler le développement et le savoir-faire du salarié africain.
Par Nathalie Yamb*
" Je suis aveugle, mais on trouve toujours plus malheureux que soi... J'aurais pu être noir. " (Ray Charles)
La France aime se plaindre de l’Afrique " boulet ", mais elle n’hésite pas à réprimer l’émergence de nouvelles classes politiques et de générations voulant extirper le continent de la médiocrité dans laquelle il a volontairement été maintenu par les anciennes puissances coloniales.
Ceci s’applique aussi bien au secteur public que privé. Alors que les entreprises françaises implantées en Afrique se plaignent constamment du mauvais niveau de leurs employés locaux, ce sont les mêmes qui répugnent à embaucher des nationaux remarquables, compétents et bardés de diplômes des meilleures universités occidentales et africaines.
Et quand bien même elles les recrutent, elles leur offrent des rémunérations ridicules, leur imposant en sus des supérieurs hiérarchiques expatriés aux qualifications et aux états de service bien souvent douteux ou laissant à désirer. Les multinationales françaises aiment les cadres locaux médiocres, de la même façon que l’Elysée chérit les pantins installés par ses soins à la tête des Etats dits francophones d’Afrique sub-saharienne. Dans un cas comme dans l’autre, ce sont eux qui les aident à entretenir leur faux discours sur les limites des Africains. Autre avantage : le cadre médiocre ne conteste ni les idées, ni les méthodes de son employeur. Ce qui permet aux expatriés, borgnes au pays des aveugles, de donner l’impression qu’ils sont encore indispensables en Afrique et que leurs traitements disproportionnés sont mérités.
Bras cassés
Les sociétés gauloises utilisent volontiers l’Afrique comme dépotoir pour des employés dont elles n’ont que faire en France. Le gros du staff tricolore est constitué de bras cassés ou de barbouzes à col blanc. La probabilité qu’un cadre français expatrié en Afrique fasse un retour triomphal à un poste de responsabilité au siège de son groupe est infinitésimale. Le retour en France est souvent synonyme de punition. Ces patrons d’entreprises venus d’ailleurs, qui, sous les tropiques, usent fréquemment de méthodes de gestion féodales tout en jouissant d’avantages salariaux indécents, se retrouvent généralement dans le tiers inférieur de l’échelle hiérarchique dans leur pays d’origine. Un directeur financier Afrique de l’Ouest basé à Abidjan se mue en comptable de la filiale de Lons-le-Saunier ; un directeur marketing et commercial au Cameroun (re)devient chargé de clientèle à Evreux. Passer de la villa de 6 chambres avec piscine dans les quartiers chics à un 50 m_ perché au 6ème étage d’un immeuble sans ascenseur en banlieue ou du 4x4 climatisé avec chauffeur au métro ou à la Renault Clio est une perspective tellement traumatisante que beaucoup préfèrent démissionner plutôt que rentrer chez eux.
Et c’est ainsi que s’enclenche le processus de recyclage d’un bataillon peu performant, mais assuré de pérennité tant qu’il adhère aux objectifs et participe au fonctionnement du système françafricain. L’observation attentive de la carrière des expatriés français en Afrique fait ressortir un itinéraire standard. Dans l’ordre alphabétique : Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée, Mali, Niger, Sénégal, Tchad. Il est piquant de constater qu’en Afrique australe et même dans les pays anglophones d’Afrique centrale ou de l’ouest, où la gestion des expatriés est soumise à de très stricts contrôles et régulations, le nombre de cadres français est anecdotique cependant que le niveau "qualitatif" de ces derniers dépasse notablement celui de leurs congénères évoluant en Afrique dite francophone.
Réseaux maffieux
Pendant ce temps, le cadre africain ayant débuté sa carrière dans l’Hexagone à la suite de brillantes études, est assez rapidement astreint à un état de stagnation durable, incapable de franchir le "plafond de verre". Cette frontière invisible est issue d’une règle non écrite mais systématiquement mise en œuvre qui dispose qu’à partir d’un certain niveau, les postes soient réservés aux Français – et dans une moindre mesure, aux étrangers de type caucasien – mais ne soient en aucun cas accessibles à un Noir, surtout lorsqu’il est d’origine africaine. Comment, dès lors, ne pas comprendre sa frustration quand, après son retour au pays natal, le même Noir voit là aussi son ascension socioprofessionnelle entravée par des ressortissants français aux curriculum vitæ peu impressionnants, qui vampirisent indéfiniment les positions clé et les étages supérieurs uniquement du fait de leur appartenance à la "bonne" race ou au bon réseau mafieux?
Il est à noter que lorsque par extraordinaire un cadre africain est envoyé en France en expatriation, il ne bénéficie d’aucun des avantages accordés au français qui vient travailler en Afrique : pas d’appartement de 350 m_ avec employés de maison, téléphone, Internet, eau et électricité payés, pas de véhicule avec chauffeur et surtout pas de rémunération dix fois supérieure à celle du salarié français.
" L’Afrique a plus besoin d’hommes de conviction que d’hommes d’ambition " (Mamadou Koulibaly)
Les firmes françaises, habituées à surfer sur l’inaptitude des gouvernants africains, qui se montrent incapables de faire cesser les discriminations que subissent les nationaux relativement aux traitements salariaux, à la formation et au transfert de compétences, ont du mal à faire face à l’arrivée sur le marché d’entreprises africaines ou anglo-saxonnes dont les objectifs de rentabilité vont de pair avec la recherche et le développement constant de la compétence et de la performance du salarié africain et/ou qui réinvestissent l’essentiel de leurs profits sur le continent […].
Piège ivoirien
Bien qu’un bon nombre de pays africains dits francophones disposent du cadre légal nécessaire pour réprimer et éradiquer l’apartheid salarial pratiqué par les multinationales hexagonales, peu veillent à la stricte application des textes existants, qui auraient pourtant pour finalité une plus grande équité, une prompte nationalisation des emplois et du savoir-faire, et une limitation de la fuite des capitaux, favorisée par la prolifération sans fondement des cadres expatriés. Outre le fait que le travailleur expatrié bénéficie d’une rémunération indue qui n’est que très rarement justifiée et encore moins souvent déclarée dans sa globalité aux institutions fiscales du pays d’accueil, sa mise à disposition est en effet refacturée par la maison mère dans le cadre d’une assistance technique fictive, permettant une remontée additionnelle de fonds vers la France.
La pusillanimité des dirigeants africains d’expression française s’explique par le fait que la plupart d’entre eux ont été imposés à leurs peuples par l’ancienne puissance coloniale. En contrepartie, ils se sont engagés à sécuriser les intérêts et investissements français, quitte à sacrifier au passage le bien-être et l’avenir de leurs concitoyens. C’est parce qu’elle est incapable de rompre avec sa tradition de "faiseuse de rois" orientant ouvertement tant la politique intérieure qu’extérieure de ce qu’elle considère comme son pré carré en Afrique dite francophone, que la France s’est retrouvée piégée en Côte d’Ivoire.
L’apparition d’hommes politiques pour qui l’intérêt du peuple qui les a portés au pouvoir – une fois n’est pas coutume – prévaut et qui sont autant déterminés à dénoncer les accords indignes aliénant le développement de leur pays qu’à procéder à toutes les réformes économiques et sociales qui s’imposent, est perçue – à juste titre – comme un facteur déstabilisateur du système bien rôdé de spoliation que personne n’avait jusque-là osé remettre en cause. Ce sont ces hommes de conviction, qui s’appuient dorénavant sur des populations de plus en plus éduquées et clairvoyantes, qui sonneront bientôt le glas du Pacte colonial.
Que la France et les nègres abdiquent et laissent les Africains travailler pour l’Afrique !
Inscrit le: 13 Juil 2006 Messages: 123 Localisation: France
Posté le: Mer 02 Aoû 2006 08:35 Sujet du message: francafrique dans une afrique sans fric ?!étrange, non ....
Très bon décorticage de la politique FrancAfricaine...
Malgrès tout cette clairvoyance et toutes ces dénonciations "publiques" en ce qui concerne les relations etre la france et l'afrique francophone, nous avons toujours a déplorer les comportements "d'esclaves" qu'on souvant eu à l'égard de la colonie, nos dirigeants" boiteux et décébralisés " ainsi que toute une clique de "tarés" locaux jouant le jeu de la france et enfonçant jour après jour par leurs imcopétences, leurs mépris du bien être des leurs et leur cupidité l'afrique noire et francophone dans les gouffres de la Medriocrate!
Merci encore pour vos articles éclairs.... _________________ Histoire et Culture Africaine du passé : Racine de l'arbre de la Conscience Noire qui font les fruits de Notre Renaissance et de Notre Avenir !
Je connais un cadre sup européen qui travaille au Cameroun, responsable régional dans un grand groupe, dont la nullité abyssale est à peine croyable.Ce sont ses employés camerounais qui lui montrent comment bosser! Il faut le voir pour le croire...
Mais le train de vie de ce "responsable" est hallucinant... _________________ Mentalité de la cueuillette=sida économique
« nan laara an saara » :
"Si on se couche, on est mort" . Joseph Ki-Zerbo
Inscrit le: 13 Juil 2006 Messages: 123 Localisation: France
Posté le: Ven 04 Aoû 2006 23:29 Sujet du message:
LA FRANCAFRIQUE va continuer à nous tuer.
Tant que la diaspora noire africaine de France continuera de mettre un voile sur ce problème... Alors qu'elle reste [b]la source principale de notre sous-développement et de notre envie d'immigration [/b..... _________________ Histoire et Culture Africaine du passé : Racine de l'arbre de la Conscience Noire qui font les fruits de Notre Renaissance et de Notre Avenir !
Ca me fait du bien tout ça ! Merci ma soeur Nathalie ! La France est très dangereuse pour nos populations africaines. Aujourd'hui encore, après les Ibos, les bamelekés et les Tutsis, la France est capable d'accoucher un autre génocide en Côte d'Ivoire.
Nous n'avons pas le droit de continuer cette coopération génocidaire avec la France. Il faut qu'elle s'en aille. Des peuples, conscients et responsables, n'ont pas le droit de coopérer encore avec la France, avec ce qui s'est passé au Rwanda. La doctrine militaire française est une doctrine génocidaire. Il faut que la France, ses militaires et ses "humanitaires" quittent définitivement l'Afrique. Nous n'avons pas d'autre choix, si nous voulons vivre en paix.
Avec la France et son franc CFA, aucun individu ne pourra développer humainement et matériellement l'Afrique. Avec la France, ses militaires et ses "humanitaires" , l'Afrique sera toujours sur-exploitée, dévastée, saignée et génocidée. Il faut donc couper tout lien politique, militaire et économique avec elle. Il est en tout cas vain de nier cette réalité ou d'en avoir peur, parce qu'elle nous dérange. _________________ -Toute action ensemble pour nous Africains est un produit de la liberté!
Merci, Godless, pour ce lien.
De plus en plus d'Africains acquièrent une conscience rigoureuse de la conjoncture historique où nous sommes.
Et c'est toujours si réconfortant de l'expérimenter, ici comme ailleurs.
Il y a indéniablement une génération de journalistes, essayistes, etc. tout à fait capable de renouveller le genre du magazine de presse panafricaine ; mais qui serait cette fois édité en Afrique, pour un lectorat local, centré sur les préoccupations africaines.
Les Panafricanistes doivent s'unir, ou périr...
comme Um Nyobè,
comme Patrice Lumumba,
comme Walter Rodney,
comme Amilcar Cabral,
comme Thomas Sankara,
Et tant de leurs valeureux Ancêtres, souvent trop seuls au front...
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