samuel Grioonaute régulier
Inscrit le: 28 Jan 2005 Messages: 468
|
Posté le: Mar 05 Aoû 2025 15:35 Sujet du message: |
|
|
Les dirigeants africains, par frilosité, nous maintiennent toujours dans l’esclavage monétaire et n’osent pas sortir du franc CFA, conditionnés qu’ils sont depuis toujours par les faux économistes africains et autres ’’conseillers’’ tout aussi frileux et lâches, qui n’arrêtent pas d’alarmer tout le monde sur de prétendus ‘’dangers’’ menaçant la stabilité monétaire en cas de sortie du CFA. Or, si ne pas appartenir à la zone CFA équivaut ipso facto à l’instabilité monétaire, alors tous les autres pays du monde seraient confrontés à l’instabilité monétaire, car aucun autre pays au monde, en dehors de nous, n’appartient à la zone CFA. Tous les autres pays du monde, sans exception, ont leur propre monnaie distincte, séparée et indépendante. Et pourtant le ciel ne leur tombe pas sur la tête faute d’appartenir à la zone CFA.
Car, si tant est que le franc CFA est un remède magique contre l’inflation et garantit une stabilité monétaire à nulle autre pareil, moi je voudrais bien qu’on m’explique pourquoi Djibouti, un minuscule pays de la Corne de l’Afrique et qui a pourtant sa propre monnaie distincte et indépendante (le franc djiboutien), a un taux d’inflation (0,4%) moins élevé que tous les pays de la zone CFA, sans exception ; pourquoi le Maroc, un pays qui a pourtant sa propre monnaie distincte et indépendante (le dirham), a un taux d’inflation (0,4%) moins élevé que tous les pays de la zone CFA, sans exception ; pourquoi les Seychelles, un autre minuscule pays africain qui a aussi sa propre monnaie distincte et indépendante (la rupee), a un taux d’inflation (0,48%) moins élevé que l’écrasante majorité des pays de la zone CFA, y compris les plus performants en matière d’inflation tels que le Bénin (1,8%), le Burkina Faso (1,6%), la République Centrafricaine (1,2%), le Gabon (0,7%), le Sénégal (0,8%), etc. Voir ici pour juin 2025 : https://tradingeconomics.com/country-list/inflation-rate?continent=africa
Je pense que, tout comme le meilleur n’est pas garanti, le pire n’est pas non plus garanti, contrairement à ce qu’on veut nous faire croire. Il existe bel et bien des moyens d’éviter une trop forte instabilité monétaire ou une trop forte inflation qui en est l’un des aspects. D’ailleurs dans le cas le plus connu à l’issue d’une création de nouvelle monnaie, celle de la Guinée, l’hyperinflation n’a pas résulté juste de l’existence d’une nouvelle monnaie. On oublie trop souvent de dire que la Guinée n’a pas été confrontée à une hyperinflation juste parce qu’elle a créé sa propre monnaie indépendante. Non. Au contraire, tout allait bien après la création de la nouvelle monnaie. L’hyperinflation qui a suivi a été artificiellement créée et entretenue par la France qui a fabriqué des milliards de fausse monnaie et en a inondé le marché guinéen. Donc, ce n’est pas parce que la Guinée a créé sa propre monnaie qu’elle a été confrontée au problème de l’hyperinflation. C’était un problème sciemment créé par la France. Et la France compte sans doute refaire la même chose avec l’AES. A n’en pas douter.
Mais nous ne sommes plus dans les années 60. La France n’a plus les leviers de commande comme autrefois. L’environnement monétaire est devenu beaucoup plus complexe et moins centralisé. Sans compter qu’aujourd’hui, dans tous nos pays, nous disposons de toutes les expertises imaginables et de nouveaux partenaires possibles. Nous avons donc de multiples moyens d’échapper à cette ’’malédiction’’ programmée, cet épouvantail qu’on agite pour nous faire peur et nous empêcher de prendre le chemin de la liberté. En tout état de cause, l’hyperinflation n’est ni inévitable, ni nécessairement fatale.
De toutes les façons, ce n’est pas parce qu’il y a un risque que nous devons renoncer à notre souveraineté monétaire. Des pays (Nigeria, Ghana, etc.) ont connu et connaissent encore aujourd’hui (Venezuela, Zimbabwe, etc.) une hyperinflation mille fois plus forte que celle qu’on prédit chez nous. C’est un problème qui est déjà derrière eux pour certains (Ghana, Nigeria, etc.) ou qui est encore présent pour certains autres (Venezuela, Haïti, Liban, Iran, Argentine, etc.), mais ces pays ne se sont pas effondrés pour autant et n’ont pas sombré dans le chaos total pour autant. Au Venezuela, l’inflation moyenne par an tourne autour de 180 % et 200 % aujourd’hui. La monnaie libanaise (la lira) a perdu entre 95% et 100% de sa valeur. En Iran l’inflation a dépassé les 100% en un an. Etc. Etc. D’ailleurs, ces cas ne sont rien à côté de certains cas historiques bien connus. En Hongrie, entre 1945 et 1946, le taux d’inflation MENSUEL était estimé à 4,19 × 10²⁶ % (soit 419 000 000 000 000 000 000 000 000 %). Les prix des produits sur le marché DOUBLAIT TOUTES LES 15 HEURES. Il a fallu même imprimer un nouveau billet de 100 TRILLIONS DE TRILLIONS !!!! Oui, vous avez bien lu. En 2008 au Zimbabwe, le taux d’inflation MENSUEL avait atteint 79,6 milliards % !!!! Le prix des produits DOUBLAIT TOUTES LES 24 HEURES. Et il existe beaucoup d’autres cas encore. Mais as-tu entendu dire que ces pays n’existent plus ou que les dirigeants envisagent d’abandonner toute idée de monnaie nationale ou d’en confier la gestion à quelqu’un ? Non ! L’inflation est juste un problème courant, d’ailleurs très courant dans le monde moderne, mais ce n’est pas la fin du monde. Ces pays n’ont songé, à aucun moment, à renoncer à leur souveraineté à cause de l’inflation. Nous, on nous dit : ’’Attention ! Attention ! Ça va être la catastrophe si vous créez votre propre monnaie’’. Or, non seulement LA CATASTROPHE N’EST PAS GARANTIE, mais ce n’est pas parce qu’il pourrait y avoir des problèmes qu’il faut renoncer à notre indépendance. Car il n’y a pas d’alternative à l’indépendance. C’est soit l’indépendance, quel qu’en soit le prix, soit l’esclavage. On ne peut pas conditionner son indépendance à ceci ou à cela. L’indépendance ne souffre d’aucune conditionnalité. Certes, l’indépendance vient avec des responsabilités, mais il faut s’assumer.
De nombreux pays ont connu une hyperinflation inouïe qui s’en sont relevés et sont aujourd’hui des économies prospères. C’était le cas de la Hongrie au sortir de la Seconde guerre mondiale et plus récemment, le cas du Nigeria et du Ghana il y a tout juste quelques années. En 2022 au Ghana, l’inflation a bondi à 31,26 % et même 54% à la fin de cette année-là, signe évident d’une crise sérieuse, pour ensuite descendre à 22,85 % (soit une baisse d’environ 15 points) en 2023. Le mois dernier, en juin 2025, l’inflation est tombée à 13,7 %, son niveau le plus bas depuis décembre 2021 et les dirigeants locaux tablent aujourd’hui sur une inflation à 9%, voire moins en fin d’année. Cela fait des décennies que le Ghana connaît ce jeu de yoyo entre pics d’inflation et creux (désinflation) traduisant une certaine instabilité monétaire. Pourtant le Ghana a sans aucun doute l’économie la plus solide d’Afrique de l’Ouest tant en termes d’IDH (le Ghana se situe au 143eme rang mondial contre 157eme pour la Côte d’Ivoire par exemple) qu’en termes de PIB/habitant (8.027 dollars en 2024 pour le Ghana contre 7645 dollars pour la Côte d’Ivoire). Qu’on arrête donc d’agiter constamment l’épouvantail de l’inflation pour tenter de nous dissuader d’avoir notre propre monnaie. L’inflation est un phénomène récurrent et, d’une certaine manière, inévitable dans les économies modernes, une donnée permanente des économies modernes et les raisons en sont autant structurelles, monétaires que politiques. Personne ne peut les maîtriser toutes et garantir une totale stabilité monétaire et le franc CFA ne garantit pas une totale stabilité monétaire.
La zone CFA fait mieux que beaucoup de pays, mais il y en a aussi beaucoup qui font mieux que la zone CFA aussi bien en Afrique que hors d’Afrique. Les raisons sont diverses : on peut évoquer la non convertibilité, l’industrialisation, des facteurs géopolitiques, etc., mais c’est un fait. Beaucoup de pays en Afrique et hors d’Afrique font mieux que la zone CFA en termes de maitrise de l’inflation et de stabilité monétaire. Les faits sont les faits et les faits sont têtus. Par exemple, parmi les 10 pays qui, en 2022, avaient le taux d’inflation le plus bas (Afghanistan, Sri Lanka, Costa Rica, Bahamas, Brunei, Panama, Sénégal, El Salvador, Djibouti, voir ici https://worldpopulationreview.com/country-rankings/inflation-rate-by-country), seul le Sénégal appartenait à la zone CFA. Pourtant nous avons 14 pays africains appartenant à la zone CFA. Parmi les 10 pays ayant la plus forte inflation, toujours en 2022 (Argentine, Syrie, Sud Soudan, Palestine, Zimbabwe, Turquie, Iran, Nigeria, Malawi), certains sont indéniablement des puissances économiques à l’échelle régionale (Argentine, Turquie, Iran, Nigeria) et d’autres (Syrie, Sud Soudan) sont des pays faillis, non pas tant en raison de l’inflation que de la guerre. L’inflation n’est pas la première cause de leur situation économique dégradée. Elle en est même un effet. Seul le cas du Zimbabwe relève, dans une certaine mesure, de l’inflation. Donc, certaines économies sont plus ou moins stables que d’autres, mais on ne peut pas arguer du risque d’inflation pour nous empêcher de créer notre propre monnaie. C’est un problème auquel nous pouvons être confrontés comme nous pouvons ne pas y être confrontés : il n’est ni fatal, ni irrémédiable. |
|