Yazol Grioonaute 1
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Posté le: Mar 08 Mar 2005 00:05 Sujet du message: Déprogrammer et reprogrammer la jeunesse panafricaine (1) |
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Le 6 août 2003, africamaat.com, menaibuc.com et l'observatoire panafricain, organisaient à l'école des Mines à Paris une conférence orchestrée par l'historien Jean Philippe Omotunde (Africain-Caribéen de la Guadeloupe, auteur du livre "Les racines africaines de la civilisation européenne") et le professeur Moléfi Kete Asante (Africain-Américain de Temple University) sur le thème ci-dessus.
Qu'est ce qu'on a pu en retenir ?
1- L'intervention de JP Omotunde…
Elle avait pour objectif de cerner la problématique philosophique qui se pose aux Africains, Africains-Caribéens et Africains-Américains (nord et sud) et d'en déterminer, à travers la définition de la conscience de soi, les issues idéologiques possibles, face à l'idéologie européocentriste qui nous environne. Ceci afin de permettre aux uns et autres de bien comprendre que seule l'Afrocentricité correspond à une évolution logique de notre pensée.
La conscience de soi
Ainsi, s'il fallait définir la conscience de soi, on pourrait dire que c'est l'ensemble des sensations, perceptions et réflexions qui déterminent l'existentialité d'un individu, sa représentation, sa place et sa mission dans le monde actuel. Il va de soi que ces sensations, perceptions et réflexions qui conditionnent son mode de penser et sa faculté de s'affirmer en tant que personnalité originale, doivent être le fruit de l'expérience de ses ancêtres (générations qui l'ont précédé), de sa culture et de son contexte environnemental.
Mais dans le cas de l'africain, cet ensemble de facultés, a été considérablement altéré par un contact hostile avec une conscience étrangère agressive, assoiffée de domination et de conquête.
Hors contact hostile : l'individu acquiert une confiance en lui indestructible, parce qu'il maîtrise les legs et les expériences successives de ses ancêtres et sait en tirer profit à tout moment. Il a donc une perception sensorielle, culturelle et intellectuelle du monde qui repose sur son patrimoine historique.
Suite à un contact hostile : l'individu acquiert un certain nombre de frustrations et de complexes plus ou moins refoulés, parce qu'il ignore la puissance de son patrimoine historique. Va donc germer dans son esprit une conscience frustrée, fruit de ce contact hostile, parce qu'on ne lui a renvoyé qu'une image dévalorisante et infériorisante de son humanité profonde et de ses ancêtres. Il s'en suit alors une négation radicale de la conscience de soi qui va intérioriser cette hostilité et assumer sa déconstruction et sa destruction.
Ce processus connaît généralement les étapes suivantes :
La Négation du sujet : l'individu sujet, se projette en objet (il n'est point le centre de sa pensée et analyse le monde selon le système de valeurs d'un autre),
L'aliénation du sujet : l'individu rejette plus ou moins consciemment son originalité culturelle,
L'assimilation : l'individu veut absolument ressembler à la conscience hostile qui lui sert de modèle,
La désintégration : l'individu se projette dans la conscience hostile et chercher à l'imiter sur tous les plans (langage, gestuel, épiderme…).
A ce stade, il convient de noter qu'il existe une troisième alternative : l'individu va chercher à se marginaliser pour ne pas céder à la pression psychologique le forçant à ressembler à la conscience agressive mais tout en ayant malheureusement intériorisé frustrations et sentiments d'infériorité, fruit du contact hostile. Ceci fonctionne encore une fois, parce qu'il ignore la puissance de son patrimoine historique ancestral.
Le rôle de l'éducation
L'éducation peut se définir comme le mode de transmission d'un certain nombre de valeurs qui déterminent la future puissance de réflexion d'un sujet et sa capacité à résister aux agressions psychologiques de la conscience étrangère hostile. Cette éducation englobe les idées et valeurs culturelles et historiques véhiculées dans la cellule familiale, les thématiques abordées en milieu scolaire (en est-il le sujet ou l'objet) et l'ensemble des images véhiculées par les média (TV, radio, presse).
Lorsqu'une conscience extérieure agressive force l'ensemble de ces émetteurs à renvoyer à des individus précis, une image culturelle négative d'eux-mêmes et de leur passé, naît alors la conscience frustrée aliénée.
Quelles sont les caractéristiques de cette conscience malheureuse :
Le sujet ne s'autorise pas à penser par lui-même et va toujours rechercher la tutelle intellectuelle du maître (principe de la subordination),
Le sujet va chercher la zone de complémentarité avec le maître (la musique, le sport, principe de complémentarité)
Le sujet va intérioriser son infériorité et l'hostilité ambiante sans se rebeller (principe de la fatalité)
Le sujet va éviter les zones de conflits avec le Maître (principe de la fuite en avant)
Le sujet va dévaloriser ses potentialités et minimiser ses ambitions personnelles et collectives pour faire plaisir au maître (principe d'auto-dévalorisation)
Le sujet va s'identifier aux qualificatifs négatifs que inculque la conscience étrangère hostile et voire même les idéaliser (principe d'identification).
Cette conscience frustrée africaine à connu des étapes précises :
1- L'esclavage : le sujet se perçoit comme un bien meuble,
2- L'abolition : le sujet découvre la liberté mais prend conscience qu'il n'y est pas préparé > retour vers le maître.
3- L'acceptation de son infériorité : pour forcer la capitulation du sujet, la conscience hostile lui inculque par tous les moyens un sentiment d'infériorité.
4- La valorisation de l'infériorité : le sujet va condamner la conscience hostile (colonialisme) tout en glorifiant son infériorité (ex. Césaire)
5- La complémentarité : Le sujet va mettre ses potentialité au service du maître. Le blanc est le chef d'orchestre, le Nègre est le batteur qui suit la partition du maître (Senghor).
Pour exister de façon autonome, une conscience doit impérativement remplir les conditions suivantes :
1- Etre le sujet et non l'objet dans toutes les situations (ex. le programme scolaire),
2- Etre dans son paradigme idéologique (ensemble de valeurs culturelles)
3- Maîtriser son patrimoine historique et culturel
4- Bâtir des projets défendant ses intérêts matériels et moraux propres exclusivement.
Ainsi pour la conscience occidentale agressive et hostile, seules les expériences faites par les Européens satisfont aux critères jugés valables par eux seuls, pour les inclure dans l'histoire universelle de l'humanité.
Les expériences africaines sont ainsi arbitrairement jugées indignes d'en faire partie et demeurent dépréciées, dévalorisées et étudiées en marge de l'histoire universelle (ex. On dit l'ethnologie et non l'histoire des populations africaines).
Il en résulte que dans un tel cadre philosophique, le nègre ne peut que sacrifier tous les jours, sur l'autel de son aliénation culturelle, les liens biologiques et historiques qui l'unissent à ses ancêtres. Il devient une marionnette entre les mains de la conscience agressive occidentale qui voit en lui un "simple animal de compagnie".
Le professeur Nicolas de Grimaldi, en analysant le fonctionnement de la conscience aliénée face aux agissements de la conscience agressive nous le confirme (Cf. " Aliénation et liberté ") :
"En nous assignant (la conscience agressive) à n'être rien de plus que ce peu d'espace que notre corps occupe, en nous soustrayant à tout système de signification (...) elle manifeste que pour elle, notre existence est absolument insignifiante".
Quelle rupture catégorique pouvons nous proposer pour atomiser la conscience frustrée africaine et annihiler l'agression de la conscience hostile ?
Cette rupture totale nous a été proposée depuis les années 50 par le savant africain Cheikh Anta Diop. Pour lui, il est primordial de faire émerger une mentalité Nègre autonome, non soumise aux effets de l'idéologie coloniale. C'est à dire qu'il est temps de mettre nos potentialités intellectuelles à notre service pour défendre nos intérêts.
L'afrocentricité, dans cette perspective, est donc la seule voie valable, pour tous les Nègres qui défendent l'universalité de l'intelligence humaine, l'égalité intellectuelle et culturelle entre les hommes et le respect des droits fondamentaux de toute personne humaine. Toute autre alternative demeure une forme déguisée de colonialisme mental.
2- L'intervention du professeur Molefi Kete Asante
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"L'Africain c'est celui qui défend l'Afrique", Jean-Philippe OMOTUNDE
"Une identité humiliée est une identité radicalisée", Nicolas SARKOZY (chez Marc Olivier FOGIEL le 06/02/05) |
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