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Correction de la copie de l’écolier Olivier Petré-Grenouille

 
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Soundjata Kéita
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Inscrit le: 06 Mai 2005
Messages: 1655
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MessagePosté le: Jeu 08 Sep 2005 20:50    Sujet du message: Correction de la copie de l’écolier Olivier Petré-Grenouille Répondre en citant

Correction de la copie de l’écolier Olivier Petré-Grenouilleau : 0/20

7 septembre 2005

par Ogotemmeli



Analyse de "Journal de bord d’un négrier". Ce texte a été publié par Bernard PLASSE. C’est le journal de bord de son aïeul, Jean-Pierre PLASSE, qui fut « subrécargue » sur un bateau négrier au nom de l’Espérance ; c’est-à-dire qu’il était le représentant légal de l’armateu
r à bord, ayant mission de « traiter » pour le compte dudit armateur.
JOURNAL DE BORD D’UN NEGRIER Jean-Pierre PLASSE, éd. Le Mot et le Reste, 2005

Ce texte a été publié par Bernard PLASSE. C’est le journal de bord de son aïeul, Jean-Pierre PLASSE, qui fut « subrécargue » sur un bateau négrier au nom de l’Espérance ; c’est-à-dire qu’il était le représentant légal de l’armateur à bord, ayant mission de « traiter » pour le compte dudit armateur. Il s’agit donc de la traduction, en Français contemporain, d’un document original, d’une source directe sur le Yovodah datée de 1762, l’année où a eu lieu cette expédition vers l’Afrique en vue d’en ramener du bois d’ébène. Jean-Pierre PLASSE décrit et explique ce qu’il s’est passé lors de cette expédition, avec une foule d’événements/informations dont il est directement témoin oculaire, sinon protagoniste.

Olivier PETRE-GRENOUILLEAU a été sollicité pour la préface, c’est-à-dire aussi pour estampiller de son autorité l’exceptionnel intérêt de ce document-témoignage précieux sur la « Traite des Noirs ». Bien entendu, le préfacier gourou de la version commercialiste n’y a vu que matière à confirmer ses thèses : « Les chefs locaux et les courtiers sont généralement très mal considérés. A lire Plasse il ne s’agit que de fripons, souvent ivrognes, parfois cruels. Récurrente, cette image est déjà à l’époque un poncif. Traduisant l’irritation des capitaines de négriers obligés de se soumettre aux autorités locales afin de négocier des esclaves, ce stéréotype nous rappelle que les vrais maîtres de l’échange, sur les côtes d’Afrique, sont les Africains eux-mêmes. [...] la nécessité de passer par l’intermédiaire des élites africaines explique cette traite itinérante [...] Tous les types de traite défilent ainsi, au fil des pages : traite itinérante, troque sur rade foraine ou à terre, achats directs, par le biais de courtiers noirs, de gouverneurs blancs ou de structures étatiques africaines solidement implantées. » pp10-11 Après avoir cité (longuement : désolé) des extraits du texte, je vais montrer que ce témoignage oculaire permet de conclure rigoureusement au contraire de Pétré-Grenouilleau : que les vrais maîtres de cette déportation de Nègres sont les Européens, qu’en fait d’« élites africaines » comme prétend OP-G, il s’agit bel et bien « de fripons, souvent ivrognes » comme le décrit Plasse !!! Question de tropisme ? Faut voir...

Plasse indique des noms de personnes, fleuves, villages, etc. constitutifs du microcosme africain du Yovodah.

• P37 : « royaume des Carous » , « vice-roi » au nom de « William ou Guillaume »
• P40 : « Tous les villages de la côte ont un vice-roi qui gouverne ses sujets sous les ordres de rois qui se tiennent dans l’intérieur de leurs royaumes. Le vice-roi ici s’appelle Louis. [...] Il faut avoir toujours un nègre courtier par rapport à la langue du pays, lequel entend les langues d’Europe comme le Français, l’Anglais et le Hollandais et auquel on donne une bagatelle pour sa peine. »
• P41 « village de Mésurade », « celui [village] de Saint-Paul », « vice-roi [de Saint-Paul] appelé Pierre », « Il y a des courtiers nègres qui ont résidé en Europe. L’un des leurs, un nommé Cupidon fut en France avec Monsieur de Leremberg, capitaine de vaisseau de la Compagnie qui l’a gardé le temps convenu avec son père et le renvoya chez lui. »
• P47 : « Mana », « Sextos », « Young Sextos », courtier au nom de « Cazary »
• P51 : « Witte Klip » ou « Roche blanche », « cap Formosa »
• P53 : village de « Corra », « rivière Tabot ou Saint-Jean »
• P58 : village et rivière de « Sanguin »
• P59 : « village appelé Ratisset », « Sextos Crou nous reste au sud-est depuis Sanguin jusqu’à la pointe de Crou »
• P60 : villages de « Drou », « Balou », « Wapo »
• P62 : villages de « Growa », « Tabou »
• P63 : « rivière Cavalin », « Ce vice-roi était décoré d’une couronne de plumes de coq, il était assis sur une sellette de bois. Tous les assistants de son conseil étaient de grands hommes de taille gigantesque avec de longues barbes ce qu’on ne voit guère aux nègres. »
• P65 : villages de « Berbi », « Grand Tabou », « le chef de la bande était un grand homme nègre, rougeâtre et borgne »
• P67 : village de « Nove Town »
• P68 : « Ils crient tous comme des brigands qu’ils sont, en ont aussi bien la figure avec leur longue barbe de chèvres et leur moustache leur donne l’air cruel. Ce n’est pas sans raison qu’on a nommé cet endroit [Nove Town ?] Côte des Males Gens ; ils le sont en effet. »
• P73 : « Capitaine Christ », nom du père d’un courtier nègre.
• P74 : village de « Tahou »
• P76 : villages de « Drouin » et de « Coffy Anamabou »
• P77 : rivière de « Saint-André »
• P78 : « ils semblent des brigands, avec leurs longues barbes dont les unes sont en tresses, d’autres en queue avec une paille de riz ou autre chose. »
• P79 : « après avoir doublé les collines rouges commence la Côte des Bonnes Gens », « cap Cazou », « cap Lahou », un courtier nommé « Pierre »
• P83 : village nommé « Jaque-Jaque »
• P84 : « rivière de Bassan »
• P86 : village de « Grand Bassan »
• P88 : « comptoir d’Axim », « village saint-Appolonie »
• P90 : « fort Saint-Antoine d’Axim ». Selon les informations de Plasse, au 16/09/1762 le Gouverneur du fort Saint-antoine était Huy de Cooper. Son « Cavissery », c’est-à-dire son homme d’affaires « était une espèce de mulâtre ».
• P92 : « on forma deux puissantes armées dont l’une était composée de gens de terre et l’autre du ressort du fort [Saint-Antoine], c’est-à-dire des villages maritimes pour mettre l’ennemi entre deux feux. »
• P95 : « la garnison [du fort Saint-Antoine] n’est pas considérable par le nombre de blancs parce qu’elle est supplée par des nègres attachés à la Compagnie dont ils sont à la solde comme soldats d’Europe. », « Pierre Bomba », un « courtier et quartier-maître »
• P96 : « fort Dorothéa à Akoda appartenant aux Hollandais », « Butré ou Boutré, fort Hollandais, situé sur une petite montagne, appelée Ballenslein. Son gouverneur est Monsieur Barréveste. », « Monsieur Jean Barrène, gouverneur du fort de Rory », « Sacondé, autre fort Hollandais »
• P97 : « le fort d’Orange de sacondé où monsieur Clockner est gouverneur », « Chamas, lieu où l’on prend des canots pour le service de la traite de Juda », « fort St Sébastien de Chamas » dont le gouverneur est « Monsieur Hendrick Walmsburk », « château de la Mine »
• P98 : « la rivière de St Jean », « Tous les enfants [du village de St Jean ?] qui viennent des blancs du comptoir restent dans l’idolâtrie sans que leurs pères se donnent la peine de les instruire à la religion chrétienne. Cependant, ils sont libres en naissant. Les garçons sont employés au service de la Compagnie et les filles restent aussi dans les comptoirs et font, quand elles sont en âge, ce que leur mère a fait. » »
• P100 : « on découvre à Commary un fort Anglais et un Hollandais commandé par M. Armand », « le château St Georges de la Mine » où « Monsieur Vourtkeman, [est] sécrétaire du général » et « Monsieur Peter David Crasmis, général »
• P101 : « des rimadours qui sont des nègres faits à l’usage de la barre de Juda et autres lieux du bas de la côte »
• P102 : « A l’est du dit château [ST Georges de la Mine], sur une montagne, il y a un fort appelé St Gago, son commandant est un enseigne. Ce fort est situé pour tirer sur le village en cas de révolte de la part des nègres. »
• P103 : « Le général [Peter David Crasmis] mène le train d’un prince. Ses domestiques sont décorés par de grandes chaînes d’or en bandoulière, au bout desquelles est attachée une large plaque du même métal. Il y a un orchestre de musique instrumentale, tous gens d’Europe qui jouent pendant le dîner auquel n’assistent que les principaux officiers et tous les capitaines des navires en rade. [...] Tous les officiers, tant militaires que de la plume, ont une femme négresse des plus jolies qu’ils puissent trouver. Elles sont servies par des esclaves et bien ajustées avec beaucoup de bijoux de toute espèce. », « cap Corse »
• P104 : « fort de Nassau de Mourée », « Cornentin, fort Hollandais », « village de Berka », « Acara, où il y a trois forts près les uns des autres, qui sont anglais, Danois et Hollandais. », « rivière de Volta »
• P105 : « Grand Popo », villages de « Ruita », « Quita »
• P106 : « Quita est un village commandé par un cavissery. [...] Celui [le Nègre] dont je me servi, comme intermédiaire dans la traite, est le fils du grand cavissery, appelé Jolly. », village de « Agouja »
• P109 : « Porte Neuve », « Abadagris »
• P111 : « la pointe des Casins »
• P112 : village de « Grégoi »
• P113 : Le « gouverneur nègre de Grégoi » est appelé « Yavogand commandant du village, et de la Praye qui est la côte maritime et ses dépendances. », « Dada, roi Dahomé »
• Pp124-125 : « Ce pays de Juda était autrefois le royaume d’Ardre qui fut détruit par Dahomé, chef d’une province des environs qui servait ceux qui en avaient besoin contre une somme d’argent. Ainsi il avait été commandé par le roi d’Ardre pour aller combattre contre les gens de Popo avec qui il avait la guerre. Il les battit si bien qu’il s’en rendit maître. Mais au lieu de remettre sa conquête à celui pour qui l’avait faite, il vint à tourner les armes contre lui qui, n’étant pas prévenu d’une pareille trahison, n’eut pas d’autre parti que celui de se sauver pour n’être pas fait prisonnier. Voilà comment ce Dahomé parvint à se faire proclamer roi de ce royaume qui en est à sa troisième dynastie. L’actuel monarque s’appelle Dada. Son lieu de domicile est à la ville de Bomé, à trente lieus de Grégoi. Son palais y est fort grand muni de casernes et de vastes magasins. Sa garde est de huit mille hommes bien armés. »
• P127 rivières de « Napo, de l’Euphrate et de Jekin »
• P129 : « jadis, les Hollandais en avaient un [fort] qui fut rasé par ordre du roi [de Dahomé] et que les Portugais le remplacèrent. Cependant, nous savons que le fort français est le plus ancien de tous et conséquemment il a aussi la préséance sur les autres, l’Anglais et en dernier, le Portugais. [...] Quoique le roi soit bien aise qu’il y ait des forts pour garder son pays et pour y maintenir le commerce. »
• P130 : « Dans chaque fort [construit au Dahomé] il n’y a que cinq à six blancs et une compagnie de soldats nègres attachés à la compagnie qui leur donne le prêt. [...] La distance des dits forts de l’un l’autre est d’une coup de pierrier et sur la même ligne. Pour leurs gouverneurs quels qu’ils soient, la guerre en Europe ne les concerne pas. Ils se fréquentent et donnent des repas très souvent surtout le dimanche. [...] Le commerce des gouverneurs est considérable, surtout quand il n’y a pas de navire en rade et qu’ils ont de quoi traiter. C’est alors qu’ils obtiennent les captifs à grand marché et qu’ils vendent plus tard aux navires une once de plus que le cours, c’est-à-dire une ancre d’eau de vie. [...] D’ailleurs ils achètent pour l’ordinaire tous les rebuts de camp et ils tachent de vous les donner pour bien bons, se prévalant de quelques petits services qu’ils rendent aux capitaines, lesquels ne peuvent presque rien leur refuser. [...] On leur [aux gouverneurs] paye en partant un droit pour les captifs qu’on entrepose dans les cachots du fort. »


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SUR LA COTE DES MALES GENS
Onomastique et toponymie


Depuis le Cap Vert jusqu’à l’ouest de la Côte d’Ivoire (pour prendre des repères actuels), les noms de lieux et de personnes que donne Plasse ont essentiellement une origine européenne. Si bien qu’à si méprendre, on se croirait en Europe : « Saint-André », « Mésurade », « Pierre », « Cupidon », « Saint-Paul », etc. Ainsi au milieu du dix-huitième siècle, ces milliers de kilomètres de côtes africaines de l’Atlantique ont été déjà largement occidentalisées ; c’est-à-dire que leur configuration politico-socio-économique est déjà fondamentalement surdéterminée par le rapport séculaire à l’Europe. Pis, les fameux rois nègres pourvoyeurs d’esclaves n’y sont que des « courtiers » et « vice rois », dont les services sont payés essentiellement de « bagatelle » et autres « ancres d’eau de vie ». Ils ont généralement des noms très exotiques pour d’authentiques Africains de l’époque, puisqu’ils s’appellent « Cupidon », « William ou Guillaume », « Capitaine Christ », etc. En fait de « royaume », ils règnent sur un « village », selon l’auteur. Mais je pense qu’il s’agit davantage de campements et autres petits hameaux où se sont regroupés quelques Nègres de pauvre condition désireux, effectivement, de vendre leurs services aux Négriers, bien souvent chichement rétribués.

« Vice-roi », « Courtier », « Rimadour »

Ces petites gens ont été attirés ou retenus là par les activités des négriers, qu’ils n’ont ni créées, ni sollicitées ; et au contraire dont ils sont la créature. J’entends ici « créature » au sens figuré où ces gens sont là à cause des négriers ; mais également au sens strict : certains de ces Africains sont en réalité des métis, notamment portugais. Cela pourrait expliquer « leur longues barbes de chèvres et leur moustache [...] dont les unes sont en tresses, les autres en queue [...] ». En tout cas, dès le quinzième siècle les Portugais fondaient des colonies de peuplement dans des îles aux environs du Cap Vert, dont ils exploitaient les terres avec les premiers bois d’ébène. Et l’on sait qu’il y a eu partout des interactions consanguines entre maîtres blancs et esclaves nègres ; notamment lors de viols des derniers par les autres. En outre, des esclaves nègres vivant au Portugal étaient renvoyés en Afrique, en vue d’échanger leur liberté contre quatre nouveaux esclaves. On comprend qu’une fois devenus libres, au fil de siècles, certains descendants de ces Nègres occidentalisés « grillés » auprès de leurs communautés africaines d’origine n’aient eu d’autre choix que de s’établir à part en Afrique même ; lorsqu’ils n’ont pas/pu regagner l’Europe. Ils ne pouvaient s’installer à l’intérieur des terres, où s’étaient progressivement retirées les populations nègres côtières pour se préserver des razzias. Il restait donc à ces sortes de « parias sociologiques » de se tourner vers la mer, vers les négriers auxquels ils servaient de petite main d’œuvre, comme de rabatteurs de bois d’ébène. Evidemment, je ne peux raisonnablement exclure que quelques uns parmi eux aient pu s’enrichir dans cette position particulièrement périlleuse, marginale. Il est bien connu que les plus grandes mutations, les plus grands bouleversements, socio-historiques procèdent souvent de stimuli marginaux... Toutefois, rien dans le journal de Plasse ne vient fonder cette hypothèse ; contrairement à ce qu’en dit Pétré-Grenouilleau !

Quant aux volumes de bois d’ébène que « traitent » ces courtiers et vice-rois, ils ne consistent bien souvent qu’en quelques unités, rarement plus d’une dizaine. Ce ne sont donc aucunement ces grands marchands africains d’esclaves, richissimes, dont une fantasmagorie éculée pourrait faire croire qu’ils étaient capables d’affréter des (milliers de) négriers embarquant chacun, à fond de cale, environ quatre cents bois d’ébène. D’ailleurs, cette partie de la côte africaine est dite « Côte des Males Gens », car non seulement on y « traite » très peu d’esclaves, avec des gens souvent peu recommandables (des « brigands », « cruels ») ; mais également le négrier est parfois confronté à des populations récalcitrantes, nuisant à la bonne marche des « affaires » par des attaques sporadiques de navires et équipages.

Eléments de géopolitique africaine au XVIIIème siècle Avant de voir ce qu’il en est de la « Côte des Bonnes Gens », où le business de la déportation massive de Nègres est beaucoup plus florissant, je voudrais élargir le champ de perception de l’Afrique au dix-huitième siècle. De l’Afrique les protagonistes européens de la traite atlantique comme Plasse ne connaissent que les « courtiers », « villages » et « vice-rois » qu’ils rencontrent sur les côtes. Autant dire qu’ils n’en connaissent presque rien, ni sociologiquement (Plasse voit des « marabouts » là où il n’y en a guère), ni encore moins politiquement. C’est à la fin du dix-huitième siècle que commence véritablement l’exploration, « la découverte », de l’Afrique par les Européens ; laquelle atteindra son apogée au dix-neuvième siècle, aboutissant à la colonisation du continent noir. Le monde africain de cette époque est tout entier concentré autour des grands cours d’eau intérieurs, des fleuves (Issa/Niger, Kongo) et des grands lacs (Tchad). Et bien entendu, dans cette Afrique là la toponymie est autochtone, avec de véritables villes, dont nombreuses sont cosmopolites : Gao, Ségou, Kano, Gwanja, Noupé, Damagaram, Mungono, Nguru Ngilewa, etc. Quant aux dirigeants, point de « vice-rois », mais de véritables souverains gouvernant des sociétés politiques dont certaines ont une superficie comparable à celle de toute l’Europe occidentale : Songhay, Kanem, Katsina, Baguirmi, Zamfara, Gobir, etc. En conséquence, cette traite des Noirs, au XVIIIème siècle , n’a pas lieu en Afrique, avec pour partenaires des souverains africains ; elle se tient dans l’arrière-monde africain, avec un personnel nègre spécialement crée à cet effet. J’insiste sur ce que ce personnel a été « crée » par les négriers, parce qu’il leur était nécessaire, notamment pour des raisons que Plasse évoque.

En effet, il ne suffit pas de leur supériorité militaire aux Blancs pour conquérir l’Afrique ; encore faut-ils qu’ils eussent les moyens médicaux d’y habiter : Pp130-131 : « Ce pays est très nuisible pour la santé des Européens qui ne sont pas quinze jours à terre sans tomber dangereusement malades. Il n’en va pas de même pour les Portugais nés au Brésil, dont le climat ne diffère pas beaucoup de celui-ci. Néanmoins ils ne laissent pas de tomber malades à la différence que leurs maladies ne sont pas sérieuses comme celles de ces premiers. » Mêmes dans leurs forts luxueusement arrangés, et militairement protégés, les Européens étaient peu nombreux à y résider, à cause d’une hostilité écologique de l’Afrique à leur constitution biologique. Ces Européens étaient donc absolument obligés d’employer des Nègres pour mettre le grappin sur l’Afrique ; quitte parfois à les contraindre par la force des armes dont ils ne manquaient pas. Pour toutes ces raisons et d’autres encore : la théorie de rois nègres attendant tranquillement les Blancs sur les côtes africaines afin de leur vendre du bois d’ébène est une pure et simple invention d’une honteuse historiographie négationniste !!! Ce sera à partir du dix-neuvième siècle avec l’application de découvertes scientifiques, notamment de Louis Pasteur (1822-1895), et bien plus tard celle d’Alexander Fleming (1881-1955) que les Européens pourront s’installer en Afrique. A l’exception néanmoins des Boers en Afrique du Sud, dont le climat est tout de même moins hostile aux Blancs...


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SUR "LA COTE DES BONNES GENS"

Au début du Yovodah les Portugais razziaient. Ils tentèrent de s’enfoncer dans les terres avec les lançados pour razzier au-delà des côtes. Mais cette façon de procéder atteignit ses limites, notamment en raison des risques sanitaires, voire militaires, trop importants que cela impliquait. D’autre part, à partir du XVIIème siècle, la demande de bois d’ébène pour les plantations d’Amérique croît exponentiellement. Il devient ainsi structuralement impossible d’y répondre par les moyens habituels de razzias directes. Ainsi, pour se perpétuer, le système du Yovodah devait-il nécessairement recruter du personnel nègre, seul capable de perpétrer des razzias au loin, à l’intérieur des terres. P57 : "Dans ces villages les habitants sont fort pauvres. Ils vendent quelques captifs, qu’ils attrapent à la faveur de la nuit dans les villages intérieurs, quoiqu’il n’y ait point de guerre." Les premiers contingents de ce personnel sont constitués de Nègres déjà serviles affranchis à cet effet et ramenés sur les côtes africaines. Ce sont vraisemblablement ces fameux "courtiers" et "vice-roi" aux noms si exotiques dont parle Plasse : "Marie Grand, courtier des Français, qui est un Nègre [...]" (P57). Ainsi le Yovodah se donne une apparence de "commerce" lorsqu’il demeure fondamentalement de la razzia ; quoique par procuration : les Blancs ne razzient plus directement, mais ils commanditent des razzias, suscitent des guerres, fournissent tant et tant d’armes à feu pour ce faire.

Le fort et son gouverneur sont les pivots du trafic de Nègres. Cette nouvelle configuration du Yovodah prend toute son ampleur sur "la côte des bonnes gens", qui commence depuis le "cap Lahou" (au sud-est de l’actuelle Côte d’Ivoire), peut être subdivisée en "côte de l’ivoire", "côte de l’or"et "côte des esclaves". Plasse y dénombre pas moins de quatorze forts qui sont les institutions maîtresses d’œuvre de ce système. On en compte parfois jusqu’à trois au même endroit, comme à "Acara" et à "Bomé". Il y a même deux châteaux, tel le "Château de la Mine". Ces forts emploient principalement du personnel nègre. Chaque officier a sa Négresse objet sexuel (P103), et les enfants de ces viols sont généralement employés dans l’économie du Yovodah. Certains à de hautes fonctions, telle que celle de "Cavissery", c’est-à-dire homme d’affaires du gouverneur du fort. Ledit gouverneur blanc (ou son homologue général de château) est le véritable parrain de ce trafic de Nègres : (P130) "Pour les gouverneurs, quels qu’ils soient, la guerre en Europe ne les concerne pas. Ils se fréquentent et donnent des repas très souvent surtout le dimanche. [...] Le commerce des gouverneurs est considérable, surtout quand il n’y a pas de navire en rade et qu’ils ont de quoi traiter. C’est alors qu’ils obtiennent les captifs à grand marché et qu’ils vendent plus tard aux navires une once de plus que le cours, c’est-à-dire une ancre d’eau-de-vie. [...] D’ailleurs ils achètent pour l’ordinaire tous les rebuts de camp et ils tachent de vous les donner pour bien bons, se prévalant de quelques petits services qu’ils rendent aux capitaines, lesquels ne peuvent presque rien leur refuser. [...] On leur paye en partant un droit pour les captifs qu’on entrepose dans les cachots du fort." Certes le gouverneur est, semble-t-il, chichement appointé par la Compagnie, mais il mène grand train, règne militairement en maître sur toutes les contrées alentours, dont les populations sont sous sa protection/domination comme un seigneur blanc dans son fief africain. Ainsi le fort St Gago (P102) "situé pour tirer sur le village en cas de révolte de la part des nègres". P103 : "Le général mène le train d’un prince. Ses domestiques sont décorés par de grandes chaînes d’or en bandoulière, au bout desquelles est attachée une large plaque du même métal. Il a un orchestre de musique instrumentale, tous gens d’Europe qui jouent pendant le dîner auquel n’assistent que les principaux officiers et tous les capitaines des navires en rade."

Le "Dada du Dahomé"

Le récit de Plasse nous donne plus une quinzaine de noms de forts et/ou gouverneurs, pour un seul exemple d’institution africaine rivalisant de puissance : c’est le "Dada du Dahomé", à la tête d’une armée de huit mille hommes bien équipés, capable de faire raser un fort. Il s’ensuit que ce sont bel et bien les Blancs qui contrôlent directement cette économie de prédation de bois d’ébène, à l’exception toute relative du "Dada". Sur l’origine du Dahomé, voici ce que dit Plasse : "Ce pays de Juda était autrefois le royaume d’Ardre qui fut détruit par Dahomé, chef d’une province des environs qui servait ceux qui en avaient besoin contre une somme d’argent. Ainsi il avait été commandé par le roi d’Ardre pour aller combattre contre les gens de Popo avec qui il avait la guerre. Il les battit si bien qu’il s’en rendit maître. Mais au lieu de remettre sa conquête à celui pour qui il l’avait faite, il vint tourner les armes contre lui, qui, n’étant pas prévenu d’une pareille trahison, n’eut pas d’autre partri que celui de se sauver pour n’être pas fait prisonnier. Voilà comment ce Dahomé parvint à se faire proclamer roi de ce royaume qui en est à sa troisième dynastie." PP124/125. Sous réserve de croiser ces informations de Plasse avec d’autres sources, on peut en déduire ceci : un chef de guerre nègre, appelé Dahomé, vendant ses services au mieux offrant, résolut de circonvenir un territoire sur la côte des esclaves pour son propre compte, grâce à son expertise guerrière. Etait-ce un mercenaire extrayant du bois d’ébène sur commande ? Toujours est-il que la puissance militaire qu’il constitua en fit bientôt un interlocuteur incontournable des Blancs, lesquels l’avaient certainement aidé à constituer une telle puissance, en échange de sa fidèle coopération à leur trafic de Nègres. Aussi selon Plasse, les trois forts de Bomé avaient-ils vocation stratégique à protéger la position du Dahomé dans ce trafic : "quoique le roi soit bien aise qu’il y ait des forts pour garder son pays et pour le maintenir le commerce [...]" (P129) . Par analogie, on pense ici aux implantations militaires françaises en Afrique destinées à protéger les dictateurs locaux contre les populations et opposants, mais surtout qui ont vocation stratégique à sécuriser les réseaux françafricains de pillage des ressources naturelles de l’Afrique (dite francophone) par la France ; tout en aidant parfois les potentats locaux à massacrer les populations jugées récalcitrantes... Cette alliance objective entre le Dada et les négriers n’est pas la cause du Yovodah, elle en est un des effets. J’entends par là que la genèse du Dahomé est surdéterminée par l’existence séculaire préalable de l’économie du Yovodah.

Petré-Grenouilleau est un négationniste négrophobe

Petré-Grenouilleau parle avec évidente exagération de "structures étatiques africaines solidement implantées" (P11) en référence au seul cas du Dahomé ; tout en taisant la quinzaine de forts et châteaux européens, pourtant nommément mentionnés, avec leurs gouverneur, général, cavissery, etc. régnant sur l’économie de cette côte des esclaves. Or avec huit mille hommes, même bien armés, la puissance militaire du Dada n’est que celle d’un petit chef de guerre, comparativement aux armées des principales sociétés politiques négro-africaines du XVIIIème siècle. A titre d’exemple, les Askia du Songhay pouvaient lever, à cette même époque, une armée composée de 30000 sofas, cavaliers, archers, piroguiers, etc. Par conséquent, le Dahomé de 1762 n’a rien d’un puissant Etat africain ; c’est plutôt un jeune "royaume qui en est à sa troisième dynastie", là où les souverains du Songhay alignent une vingtaine de dynastes, depuis les Sonni (Ali Ber) jusqu’aux Askia (Mohamed TOURE). C’est le lieu d’ouvrir une parenthèse sur les subterfuges négrophobes d’OP-G : "S’il est bon de savoir une chose, il est toujours mieux de se la représenter avec les yeux des contemporains. Sans cela il n’est pas, il ne peut pas être de vraie histoire." Sauf que les yeux de Plasse ont vu tout le contraire de ce que Pretré-Grenouilleau prétend savoir sur la "traite des Noirs" et qu’il répand à travers ouvrages, émissions radio, télé, et autres lieux de diffusion exclusive des poncifs commercialistes. - il voit des "élites africaines" là où Plasse décrit des "ivrognes" affublées du titre farfelu de "vice-roi", régnant sur de petits hameaux en guise de "villages" situés à des milliers de kilomètres des grands centres civilisationnels africains contemporains. Comme si pour Pitre-La-Grenouille, au XVIIIème siècle l’Afrique ne peut avoir pour "élites" que des "ivrognes" aux noms pittoresques de "Pierre", "Paul", "Cupidon", etc. C’est pourtant le siècle des Askia, Mani, Oni, Oba, Mogho, etc. - Il voit des "structures étatiques africaines solidement implantées" là où Plasse raconte la gestation d’un royaume côtier, créature du Yovodah ; alors que le Kanem, Katsina, Bornou, Kano, sont plus anciens et plus florissants, loin à l’intérieur des terres africaines. Toutes interprétations fallacieuses visant seulement à accréditer, au mépris des faits, la calomnie d’élites africaines ayant vendu leurs concitoyens aux Blancs. Une besogne n’ayant rien d’un travail d’historien, et relevant assurément du pur jus de négationnisme !!! En fait OP-G a eu un énorme culot de préfacerce "journal de bord" en le présentantcomme pièce probante de ses thèsesnauséabondes ; lors même que le récit de Plasse est redhibitoire pour son entreprise négrophobe. Depuistant de temps quel’on demandait à connaître des noms de rois nègres ayant vendu les leurs : on apprend,on fond sans grande surprise, par Plasse qu’il s’agissait de "Pierre", "Paul", "capitaine Christ", "Cupidon", etc. courtiers des Blancs ou "vice-roi" de "village", imbibés d’eau-de-vie. Point donc de magnats nègres richissimes du trafic de bois d’ébène ; à l’exception notoire du "Dada de Dahomé" !!! Le comble, c’est que OP-G, ce soi-disant expert en "traites négrières", nous serve ces manœuvres de négriers pour des "élites africaines", sans même craindre le ridicule (qui, il est vrai, ne tue pas...). Bref, l’on tient ici une preuve irréfutable de ce que Petré-Grenouilleau est un négrophobe qui se planque derrière une érudition mal assimilée pour distiller son venin négationniste.

La colonisation de l’Afrique est l’aboutissement du Yovodah

Ailleurs, j’ai soutenu maintes fois que le Yovodah avait saccagé le cœur de la civilisation négro-africaine. Or, ici je dis qu’au dix-huitième siècle le Yovodah se déroule dans l’arrière-monde négro-africain, aux marges atlantiques de ce monde. N’y-a-t-il pas contradiction ? Cette contradiction n’est qu’apparente ; étant d’abord la conséquence de dichotomies artificieuses maintenues dans l’étude de l’histoire de l’Afrique par une historiographie obsolète : où la "traite des Nègres" n’est étudiée que pour elle-même, à part ; sinon comme élément d’un corpus intitulé "traites négrières". Où la colonisation de l’Afrique est étudiée isolément, sinon comme modalité africaine de la colonisation du monde par l’Europe. Où les Indépendances sont également considérées de la même manière, à part. Or ces événements constituent trois temps d’une même et unique conjoncture historique caractérisée par la domination-exploitation de l’Afrique par l’Europe/Occident depuis cinq cents ans : c’est la conjoncture du Yovodah, événement matriciel de cette occurrence. En conséquence, il n’y a aucune "discontinuité" ou "rupture" entre le Yovodah, la Colonisation et les Indépendances. Certes, l’apogée du Yovodah proprement dit (la prédation de bois d’ébène) se situe dans l’entre-deux révolutions industrielles (1750-1850) ; mais le paroxysme de la conjoncture du Yovodah consiste en la période coloniale (1860-1960). Tandis que les Indépendances (ou la Néocolonisation) sont le prolongement des desseins colonialistes avec d’autres moyens et méthodes. Ainsi code noir, code de l’indigénat, code de l’investissement et « pacte colonial » forment un corpus de l’arsenal juridique inventé par les Blancs pour saigner l’Afrique, après en avoir sévèrement entamé les ressources humaines. Il fallait encore réduire les résistances au cœur de l’Afrique ; ce qui fut fait par les "pacifications" coloniales. C’est donc cette période coloniale qui a été particulièrement dévastatrice des cultures matérielles négro-africaines, avec tant et tant de villes et villages incendiés, rasés par les forces coloniales. Au demeurant, la visite de musées occidentales et leurs somptueuses collections d’art nègre/primitif montre à quel point le saccage et le pillage ont été intensifs. Donc oui, au dix-huitième siècle il y a encore d’importantes sociétés politiques dans le maillage des grands réseaux hydrauliques africains. Mais à la fin du dix-neuvième siècle (a fortiori au début du vingtième) il n’en reste que de petites agglomérations moribondes, exsangues, méthodiquement laminées par les moyens militaires de la colonisation. Donc oui, la conjoncture historique du Yovodah qui dure depuis cinq cents ans a ravagé l’Afrique et la réduite à la misère que nous connaissons. Et le Yovodah est bien la plus grave catastrophe survenue en Afrique depuis un demi-millénaire. Toutefois, je reste profondément convaincu que cette conjoncture est en voie imminente d’épuisement...

Ogotemmeli

http://www.africamaat.com/article.php3?id_article=386

PS: mais bons vous comprenez, certains réclameront les papiers d'Ogotemmeli, afin de juger de la pertinence de la présente analyse de notre camarade "chercheur en histoire".



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OGOTEMMELI
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MessagePosté le: Dim 11 Sep 2005 21:54    Sujet du message: Répondre en citant

Heu, Sogolon Mari Diatta, j'ai déjà publié ce texte sur le forum, au topic intitulé : "JOURNAL DE BORD D'UN NEGRIER". Je viens de vérifier que tu en as pris connaissance et y as laissé un post. Africamaat a bien voulu le publier à nouveau, mais ce n'était pas nécessaire de le remettre ici. Peut-être est-ce une petite méprise?

En tout cas, ce "journal de bord" de JP Plasse apporte d'importantes précisions sur les "nègres ayant vendu d'autres nègres". Aussi ai-je été étonné de voir que ceux que cette question turlipine (notamment Panafricain et Tchoko) ne soient pas intervenus pour nous dire ce qu'ils pensent du témoignage oculaire de Plasse (et de l'analyse qui en a été faite)...

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Dernière édition par OGOTEMMELI le Dim 11 Sep 2005 22:26; édité 1 fois
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Soundjata Kéita
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MessagePosté le: Dim 11 Sep 2005 22:07    Sujet du message: Répondre en citant

Aucune méprise de ma part, j'ai au contraire profité de l'occasion de l'arrivée du pseudo débat sur la probité intellectuel de ceux qui, comme toi, luttent pour défendre notre point de vue et démontrer la vacuité intellectuel de l'autre grenouille diplômée.
Bref, j'ai estimé qu'une bonne piqûre de rappel ne faisait pas de mal.


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Tchoko
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MessagePosté le: Lun 12 Sep 2005 03:40    Sujet du message: Répondre en citant

OGOTEMMELI a écrit:
En tout cas, ce "journal de bord" de JP Plasse apporte d'importantes précisions sur les "nègres ayant vendu d'autres nègres". Aussi ai-je été étonné de voir que ceux que cette question turlipine (notamment Panafricain et Tchoko) ne soient pas intervenus pour nous dire ce qu'ils pensent du témoignage oculaire de Plasse (et de l'analyse qui en a été faite)...
Fraternellement

Salut,

Juste quelques précisions :

1), dans ton analyse, tu essaies de démontrer que "les vrais maîtres de cette déportation de Nègres sont les Européens, qu’en fait d’« élites africaines » comme prétend OP-G, il s’agit bel et bien « de fripons, souvent ivrognes » comme le décrit Plasse !"..
Les vrais maîtres sont les Européens et non les élites africaines, contrairement à ce que dit OPG, on est d'accord. OK.

2) Par contre, ce que moi je rajoute c'est que, malgré que les vrais (ce qui sous-entendrait qu'il y'en aurait d'un autre type ?) maîtres de cette déportation soient les Européens, des élites africaines ont malheureusement participé à cette yovodah et pas tjrs contre leur gré...

3) Ta démonstration se cantonne au témoignage d'un négrier, et ne saurait être sujet à généralisation. J'y reviendrai d'ailleurs beaucoup plus tard parce que j'avoue ne pas avoir tout compris le fil.

4) En parcourant ton texte, je tombe sur ceci :
Citation:
Cette alliance objective entre le Dada et les négriers n’est pas la cause du Yovodah, elle en est un des effets. J’entends par là que la genèse du Dahomé est surdéterminée par l’existence séculaire préalable de l’économie du Yovodah.
ce qui me fait penser qu'on a en fait une interprétation différente du mot "responsabilité" et que c'est là que se situe nos divergences principales.

On dit d'abord que les complices africains ne sont pas vraiment africains, en plus d'être ivrognes et je ne sais quoi, puis quand on finit finalement par admettre qu'il y'avait au moins une élite africaine qui se pliait à ce trafic odieux, on la discrédite et on explique le fait qu'elle ait traité avec les négriers par une volonté politique de défense/d'expansion (légitime à cette époque avec en plus les effets de ce bizness qui étaient la prolifération des armes dans cette région qui développèrent les instincts bélliqueux). Et c'est là où on n'est pas d'accord sur les responsabilités.

5) Je tâcherai de te retranscrire ici des témoignages de négriers ou de navigateurs que j'ai chez moi, dès que je peux. Mais déja, je te mets ici à disposition un témoignage de Pacheico Pereira tirée de son carnet de voyage intitulé "Esmeraldo de situ orbis", à la fin du XVè. Il s'exprime en ces termes (je ne sais plus exactement où il avait débarqué donc je ne sais plus de quel royaume il parle, mais c'est exactement la citation ) :
Citation:
"Le royaume est continuellement en guerre avec ses voisins et prend un grand nombre de captifs que nous échangeons contre 12 à 15 bracelets de laiton par prisonnier, ou contre des bracelets de cuivre (ce qu'ils préfèrent). De là les esclaves sont emmenés [à la côte d'or] où ils sont vendus et payés en or."

Source : Esmeraldo de Situ Orbis, Côte occidentale d'Afrique, du sud marocain au Gabon, par Duarte Pacheco Pereira. Édition bilingue établie par Raymond Mauny.
Question : la demande venait de qui et l'offre venait de qui ? Est ce les Africains qui ont demandé les bracelets qu'ils ont entrevus et proposé les captifs ou les Européens qui ont proposé les bracelets et demandé des hommes ?
Bref, tjrs est-il qu'encore une fois, même pour ce témoignage, il ne saurait permettre de décrire le trafic tel qu'il se déroulait dans toute l'Afrique.

Ce qui est chiant quand on parle des razzias, c'est qu'on s'évertue à vouloir les décrire comme un système uniforme et homogène sur une bonne partie de l'Afrique et pendant plusieurs siècles, ce qui n'était pas le cas. Il a existé diférentes formes de traite (différentes manières de commercer entre négriers et africains j'entends) spatialement et temporellement. Il y'avait des royaumes riches et des royaumes pauvres, des zones en guerre et des zones en paix, ce qui fait que les besoins étaient différents et la capacité à tromper les élites africaines variaient selon ces besoins. Mais grosso modo, les Européens ont profité d'une situation géopolitique favorable, avec la ruse et l'infiltration. On y reviendra, mais ce qui est dommage, c'est que la plupart des témoignages qu'on a de cette époque sont écrits par des non africains.

PS : Par contre, l'honneteté veut que je précise que la traduction que j'ai retranscrite ici de l'extrait du journal de bord de péreira a été effectuée par Raymond Mauny. Pour ceux qui ne le connaissent pas, c'est un de ses intellectuels français qui ont critiqué NNC et l'Afrique Noire précoloniale. Mais sera ce une raison suffisante pour me dire que c'est une traduction erronée ? J'espère que non...

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OGOTEMMELI
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MessagePosté le: Lun 12 Sep 2005 07:17    Sujet du message: Répondre en citant

Tchoko, je comprends bien tes préoccupations dans ce débat ; et je les réprouve comme j'ai eu l'occasion de le dire dans le topic que tu as ouvert pour en discuter.

J'ai déjà dit aussi que le point de vue que je défends n'est pas suffisamment étayé, non pas parce qu'il ne peut pas l'être, mais parce que le job reste à faire. Ce n'est pas pour autant que la version grenouillesque est vraie et fondée. Le texte de Plasse est un cas précis, circonstancié, qui prouve que OP-G est un nigaud qui tente de faire prendre des vessies pour des lanternes, comme je pense l'avoir montré.

Il est donc injuste de ta part d'indiquer seulement que ce cas particulier n'est pas généralisable. Que fais-tu de l'imposture qui voulait faire dire à ce texte le contraire de ce qu'il dit? De plus, si en 1762 Plasse ne rencontre que des "vice-rois" de "village" sur la "Côte des males gens", tous les négriers qui y étaient en même temps que lui, ou à la même période (sur plusieurs années antérieures et ultérieures à 1762) n'ont logiquement pas pu y rencontrer autre chose ; encore moins des "élites africaines"...
Ce que l'on sait par ailleurs de la situation géopolitique de cette partie de l'Afrique atteste bien qu'entre le XVIIème et le XVIIIème siècles, il n'y a pas de royaumes africains dans cette régions, et que ceux du Djolof et du Waalo sont à peine bourgeonnants dans l'embouchure du Sénégal...

Tu sembles connaître un autre témoignage au XVème siècle qui prouve le contraire de ce qui est décrit par Plasse : je t'oppose d'emblée la "Chronique de Guiné" de Eanes de Zurara, dont je possède une copie, où il est bien établi que les Portugais procédaient à des razzias aux XVème siècle (et au seizième aussi) ; ce qui est généralement admis.

Bref, j'y reviendrai
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OGOTEMMELI
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MessagePosté le: Lun 12 Sep 2005 07:41    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
malgré que les vrais (ce qui sous-entendrait qu'il y'en aurait d'un autre type ?) maîtres de cette déportation soient les Européens, des élites africaines ont malheureusement participé à cette yovodah et pas tjrs contre leur gré...

Il y a comme une inconséquence dans ton propos : si les "vrais maîtres" sont les "Européens", alors les vrais responsables (à vrai dire les seuls) sont ces mêmes Européens!!! Il me suffit de tenir les VRAIS RESPONSABLES, au lieu de m'évertuer à en phantasmer de FAUX (qui eux seraient Africains). D'où la nature absconce de ces préoccupations (autophobes?) que j'avais déjà pointée...
En outre, quelles sont ces fameuses "élites africaines" esclavagistes?

Citation:
On dit d'abord que les complices africains ne sont pas vraiment africains, en plus d'être ivrognes et je ne sais quoi, puis quand on finit finalement par admettre qu'il y'avait au moins une élite africaine qui se pliait à ce trafic odieux, on la discrédite et on explique le fait qu'elle ait traité avec les négriers par une volonté politique de défense/d'expansion

En l'occurrence, ce n'est pas "On" qui "dit", c'est Plasse un subrécargue qui a noté ce qu'il a vu : des vice-rois de village imbibés d'eau-de-vie, dont certains étaient "rougeâtres", qui "dealaient" des captifs qu'ils razzaient dans l'arrière pays côtier, même en temps de non-guerre. Il n'y a donc pas à nier l'existence de ces "complices africains", j'ai seulement tenter d'analyser les circonstances de cette complicité, en me fondant sur ce témoignage direct.
Le cas du Dada du Dahomé est célébrissime, puisque c'est l'un des rares arguments opposés aux Africains pour imputer leur responsabilité, lors même qu'il est suffisamment établi que la quarantaine de forts et leur gouverneurs étaient les véritables parrains du trafic de Nègres sur les côtes atlantiques africaines.
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