Cathy Super Posteur

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Posté le: Mer 14 Déc 2005 02:10 Sujet du message: la Minustah en Haïti : Petits meurtres entre amis |
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L’opération meurtrière de la Minustah menée à Cité Soleil du 24 au 28 novembre dernier et les jours précédents, que nous rapportions en couverture dans notre édition antérieure: «Massacres à Cité Soleil - La Minustah applique ‘la solution finale’», semble pour une fois avoir attiré l’attention des responsables de la force onusienne d’occupation et de ses commanditaires, qui commencent à s’inquiéter des répercussions de leurs actions dans l’opinion publique internationale. À tel point, par exemple, que le Premier ministre libéral canadien Paul Martin est allé jusqu’à faire emprisonner le journaliste militant Yves Engler qui le dénonçait publiquement le jeudi 1er décembre alors qu’il vantait sa politique étrangère canadienne à l’hôtel Hilton à Montréal (voir notre article à ce sujet ci-dessous).
Sur place, c’est-à-dire en Haïti même, c’est le porte-parole des Casques bleus de l’ONU, le colonel Boulbars El Ouafi du contingent marocain qui a appelé notre rédaction ce même jeudi 1er décembre. Tout en précisant «respecter la liberté d’expression», - ce qui est tout à son honneur, puisque Paul Martin qui dirige un pays démocratique la viole, cette liberté, carrément au vu et au su de tous - le représentant de la Minustah nous disait être en possession de notre article et nous manifestait son désaccord en ces termes: «Je voulais juste vous dire qu’il n’y a pas eu d’opération a Cité Soleil. Il n’y a pas eu d’opération. Vous voulez me croire, il n’y a pas eu d’opération. Il y a une présence très limitée des Casques bleus, il y a trois postes de contrôle… Il n’y a pas eu d’opérations.» On pourrait comprendre à la limite qu’il ne soit pas au courant de tout ce que font les différents contingents de la Minustah, mais on n’a pas tout à fait saisi ses subtilités sémantiques, quand il a poursuivi pour nous expliquer: «Ce qu’on veut dire par opération, c’est quand il y a des militaires qui viennent qui se déploient, qui commencent à avancer qui échangent des tirs avec des … Il n’y a pas eu d’opération, il n’y a eu que le déploiement de trois postes de contrôle, ils ne contrôlent rien du tout, ils sont là, ils marquent leur présence, ils n’ont attaqué personne, ils n’ont rien fait. Tout ce qu’ils ont fait c’est que lorsqu’on leur a tiré dessus ils ont répondu….» Si on se réfère au lexique de George Bush, de Cheney et de Rumsfeld, il ne se serait alors agi que de «dommages collatéraux»?
Reprenant, cependant il nous parlait des Jordaniens, sûrement ce bataillon jordanien dont l’arrivée réjouissait tellement le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en Haïti et responsable civil de la Minustah, Juan Gabriel Valdés, qui s’écriait par ailleurs: «Nous avons maintenant nos 300 soldats jordaniens qui sont préparés à agir à Cité Soleil.» Pour sa part le colonel Boulbars el Ouafi reconnaissait: «C’est le deuxième bataillon jordanien, quand il est venu, il a pris position, on a annoncé qu’ils étaient là-bas pour avancer, pour permettre aux ONG d’avancer, et puisqu’il y a eu des tirs, il se sont arrêtés. Il s’agissait d’une unité qui vient d’arriver, qui n’a pas voulu la rupture, il voulait à tout prix établir des relations correctes avec la population…» Mais d’après Valdés, les Jordaniens sont là pour «agir à Cité Soleil», pour casser ces nègres «très intelligents», comme il le faisait remarquer dans une interview.
Finalement le porte-parole de la Minustah reconnaissait: « (…) Donc je vous dis que le premier jour, depuis lundi dernier, ça fait maintenant 11 jours et plus qu’ils sont là. Dès le premier jour ils ont reçu des tirs et ils n’ont tiré personne et après ils ont commencé à exercer leur droit de … ça c’est la vérité, c’est toute la vérité. C’est à vous donc faire ce que vous voulez. Mais ça c’est entre parenthèse je voulais juste vous le dire ça engage la Minustah, ça m’engage comme citoyen du monde et ça m’engage en tout. Je clos la page. Mais pour le reste, c’est ce que vous pouvez me permettre, me donner le droit de répondre à votre article sur le massacre à Cité Soleil.»
On a bien accepté d’avoir par écrit sa version, pour lui permettre d’exercer «son droit de réponse», mais jusqu’au moment d’aller sous presse on ne l’avait pas reçue.
Quant aux massacres perpétrés par la Minustah par des Casques jordaniens ou autres au cours de ces journées, on n’a pas été les seuls à les rapporter. Une agence de presse brésilienne publiait des informations sur ces tueries à Cité Soleil, provoquant même la réaction de l’ex-commandant de la Minustah Augusto Heleno Ribeiro qui n’avait pour tout argument pour défendre ses complices que de dire qu’elles provenaient d’éléments pro-Aristide. Cette fois des journaux brésiliens ont estimé à plus d’une quinzaine le nombre de personnes tuées. D’ailleurs, dans les zones avoisinantes de Cité Soleil on pouvait facilement entendre jusqu’au matin du lundi 28 novembre les fortes détonations lancé des chars blindés de la Minustah, donnant l’assaut les «bandits», qui sont plus souvent qu’autrement de jeunes enfants, des femmes ou des gens se rendant travailler. Heleno Ribeiro peut bien se défendre, car il a été formellement accusé par le Tribunal international sur Haïti et son dossier sera bientôt aux mains de la Cour pénale internationale.
Les propos de l’ambassadeur du Brésil en Haïti, Paolo Pinto, sont d’ailleurs assez significatifs pour faire comprendre la détermination des forces d’occupation d’en finir avec la population de Cité Soleil, bastion de nombreux partisans du président constitutionnel en exil Jean Bertrand Aristide: «Nous sommes impliqués dans une situation où souvent il est nécessaire d’utiliser la force; c’est une force militaire. Ce n’est pas un groupe humanitaire, c’est une force militaire qui vient ici pour aider les Haïtiens, l’Etat haïtien et la police nationale d’Haïti.» Mais l’essentiel, «ce n’est pas un groupe humanitaire» qui n’est pas non plus sur place en tant que «citoyen du monde».
Depuis lors, le colonel Boulbars el Ouafi se sera sans doute informé, puisqu’il n’est pas rare de le voir en tête-à-tête avec l’un des commanditaires de ces «déploiements», l’ambassadeur canadien Claude Boucher qui lui aura sans doute communiqué un document audiovisuel sur les nombreux massacres effectués à Cité Soleil.
Pour terminer, au cas où il s’avérerait trop difficile pour les «enquêteurs» de la Minustah de retracer la trace de leurs victimes, nous leur fournissons ci-après quelques noms d’au moins une dizaine de personnes tombées sous leurs balles au cours des «déploiements» effectués entre le 25 et le 28 octobre dans différents quartiers de Cité Soleil, notamment: à Soleil 17: Belangello Cadet, Saïla Belfort, Isenaut Louis, Garry Pierre; à Bois-Neuf: Faustin Etienne, Charles Jean-Baptiste; à Belekou: Claudy ainsi connu, à Santo; à Boston: Githo ainsi connu; à Pelé: Dorsainvil Bovert, Rose-Marie Charles, Clermont Jérôme, sans oublier en cette occasion Luckson Docius, abattu le 24 novembre vers les 10 heures du matin par un détachement de Casques bleus brésiliens et jordaniens accompagnés de 18 chars blindés, au moment où il se trouvait dans son atelier de ferblantier. Né en 1957, Luckson laisse sans aucun recours sa compagne âgée elle de 44 ans et 5 enfants: Mackenson, 17 ans, Garry, 15 ans, Modeline 12 ans, Julie, 9 ans, Wilker, 6 ans. Ces cinq enfants comme beaucoup d’autres des quartiers populaires n’ont point besoin que l’ambassadeur brésilien ni quelqu’un de son acabit leur apprenne que «la Minustah n’est pas un groupe humanitaire»!
Source : http://www.haitiprogres.com/ _________________
"- A quoi est due la chute d'Adam et Eve ?
- C'était une erreur de Genèse."
(Boris Vian / 1920-1959)
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