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Colonisation : Le Drame d'Ilanga et Oléka

 
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OGOTEMMELI
Super Posteur


Inscrit le: 09 Sep 2004
Messages: 1498

MessagePosté le: Mar 20 Déc 2005 19:37    Sujet du message: Colonisation : Le Drame d'Ilanga et Oléka Répondre en citant

Le drame d’Ilanga et Oléka


La colonisation est trop souvent évoquée dans une phraséolosie qui finit d'évider cet événement des faits précis le constituant comme tel. Pourtant des documents existent, établissant des actes sans appel ; dont les auteurs et leurs commanditaires sont "indéfendables"...
Voici le témoignage d'Ilanga, parmi tant d'autres que je rapporterai. Cela se passe au Kongo du sinistre LéopoldII, pendant les années 1890 :

Citation:
Notre village s’appelle Waniendo, du nom de notre chef Niendo. C’est un grand village près d’un petit cours d’eau, entouré de vastes champs de mohago (manioc) et de muhindu (maïs) et d’autres récoltes, car nous travaillions tous dur dans nos plantations et avions toujours de la nourriture en abandance. […] Nous n’avions jamais fait la guerre dans notre pays, et pour toute arme ou presque les hommes avaient des couteaux. […]

Nous étions tous occupés à biner nos plantations dans les champs, car c’était la saison des pluies et les mauvaioses herbes poussaient vite, quand un messager est arrivé au village pour nous prévenir qu’approchait un groupe d’hommes important, que tous portaient des casquettes rouges et des vêtements bleus, et aussi des fusils et des longs couteaux, et que beaucoup d’hommes blancs les accompagnaient, dont le chef était Kibalanga [nom africain d’Oscar Michaux, un officier de la Force Publique qui reçut une épée d’honneur des propres mains de Léopold].

Niendo a tout de suite convoqué tous les chefs dans sa maison, pendant que le tam-tam appelait toute la population au village. Après une longue consultation, on nous a ordonné d’aller dans les champs et d’en rapporter des cacahuètes, des bananes plantains et du manioc pour les guerriers qui arrivaient, ainsi que des chèvres et des volailles pour les hommes blancs. Les femmes sont toutes parties avec des paniers et les ont remplis, puis elles les ont posés sur la route. […] Niendo pensait qu’en offrant tant de nourriture en cadeau il inciterait les étrangers à passer leur chemin sans nous faire de mal. Et cela s’est avéré juste. […]

Lorsque les hommes blancs et leurs soldats sont partis, nous sommes retournés à notre travail en espérant qu’ils ne reviendraient pas ; mais ils sont très vite revenus. Comme la première fois, nous avons apporté de gros tas de nourriture, mais cette fois, au lieu de s’en aller immédiatement, Kibalanga a campé près de notre village et ses soldats sont venus voler toutes nos volailles et toutes nos chèvres et ont arraché notre manioc ; mais peu nous importait, du moment qu’ils ne nous faisaient pas de mal.

Le lendemain matin […] peu après le lever du soleil sur la colline, un groupe important de soldats est entré dans le village, et nous sommes tous rentrés nous asseoir dans les maisons. A peine étions-nous assis que les soldats ont fait irruption en hurlant et en menaçant Niendo de leurs fusils. Ils se sont précipités dans les maisons et en ont sorti les gens de force. Trois ou quatre ont pénétré dans notre maison et m’ont attrapée, ainsi que mon mari Oleka, et ma sœur, Katinga. Ils nous ont traînés sur la route, et liés ensemble avec des cordes autour du cou, afin de nous empêcher de nous échapper. Nous pleurions tous, car nous savions maintenant que nous allions être emmenés comme esclaves.

Les soldats nous ont battus avec les bâtons de fer de leurs fusils et obligés à marcher jusqu’au camp de Kibalanga, qui a donné l’ordre d’enchaîner les femmes séparément, dix par corde, et les hommes de la même façon. Quand nous avons tous été rassemblés – et nous nous sommes alors aperçus qu’il y avait beaucoup de monde d’autres villages, et beaucoup d’habitants de Waniendo -, les soldats nous ont apporté des paniers de nourriture à porter, dans certains desquels il y avait de la viande humaine fumée.[…]

Nous nous sommes alors mis très rapidement en marche. Ma sœur, Katinga, avait son bébé dans les bras et n’était pas obligée de porter un panier, mais mon mari, Oleka, a été forcé de porter une chèvre. Nous avons marché jusqu’à l’après-midi. Nous avons campé près d’un cours d’eau où nous avons été contents de boire, car nous étions très assoiffés. Nous n’avuions rien à manger, car les soldats ne nous donnaient rien.

[…] Le lendemain, nous avons continué la marche, et à la halte de midi on nous donné un peu de maïs et de bananes plantains, trouvés en tas près d’un village dont la population s’était enfuie. La même chose s’est reproduite chaque jour jusqu’au cinquième jour, quand les soldats ont pris le bébé de ma sœur et l’ont jeté dans l’herbe et laissé mourir là, et ont obligé ma sœur à porter des chaudrons qu’ils avaient trouvés dans le village abandonné.

Le sixième jour, à force de ne pas manger, de marcher sans relâche et de dormir dans l’herbe humide, nous étions épuisés, et mon mari, qui marchait derrière nous avec la chèvre, ne pouvait plus se tenir débout. Alors il s’est assis sur le bord du chemin et a refusé d’aller plus loin. Les soldats l’ont battu, mais il a persisté dans son refus. Puis l’un d’eux l’a frappé sur la tête du bout de son fusil, et il est tombé par terre. Un des soldats a attrapé la chèvre, pendant que deux ou trois autres transperçaient mon mari avec les longs couteaux qu’ils placent au bout de leurs fusils. J’ai vu le sang jaillir, et puis je ne l’ai plus vu, car nous venions de franchir le sommet d’une colline, et il avait disparu.

Beaucoup des hommes jeunes ont été tués de la même façon, et beaucoup de bébés jetés dans l’herbe pour y mourir. […] Après avoir marché pendant dix jours, nous avons atteint la grande eau […] et nous avons été transportés en pirogue dans la ville des hommes blancs à Nyangwe.

[témoignage recueilli par Edgar CANISIUS]



cf. Adam Hochschild, "Les fantômes du roi Léopold, un holocauste oublié", éd. Belfond, 1998 pp160-161
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