The Report Grioonaute
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Posté le: Mer 20 Déc 2006 23:34 Sujet du message: Le prix inhumain du sucre |
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Le prix inhumain du sucre
Près d’un million d’Haïtiens vivent en République Dominicaine, la plupart employés dans la canne, soumis à des conditions dignes du 19ème siècle. L’agence Progressio et l’organisation Amnesty International ont récemment rappelé aux autorités et au public cette réalité très éloignée de l’imaginaire touristique de cette destination très prisée.
Une mission de législateurs US était en mission dans le pays la semaine dernière pour observer les conditions de vie des travailleurs de la canne, pour la plupart haïtiens, qui vivent dans les fermes dominicaines baptisées « bateys ».
D’après le ministre dominicain des Affaires étrangères, Carlos Morales Troncoso, la mission était sans doute orchestrée par des ONG voulant démontrer les conditions de vie déplorables auxquelles sont confrontés les Haïtiens.
Ce qui est sans doute vrai : au même moment de l’autre côté de l’Atlantique, au siège londonien d’Amnesty International, une exposition photos, organisée par l’agence de développement international Progressio, était consacrée à ce sujet.
La manifestation, intitulée « Portraits illégaux », voulait justement faire prendre conscience du contraste entre la réalité touristique de la République Dominicaine et la réalité sociale de ces travailleurs défavorisés, exploités, privés de leurs droits basiques et jamais reconnus par les autorités locales qui refusent de les régulariser ou d’accorder la nationalité à leurs enfants nés dans le pays.
D’où cette question posée par l’auteur des clichés, Gianni Dal Mas, aux clients des pays industrialisés : « Savez-vous combien coûte réellement votre sachet de sucre, quel est le prix humain à payer pour produire ce sucre ? ».
Selon les estimations, près d’un million d’Haïtiens vivent en République Dominicaine, la plupart employés dans la canne et soumis à des conditions dignes du 19ème siècle.
La responsable pour l’Amérique latine et les Caraïbes de l’agence Progressio, Lizzette Robleto, accuse : « Ces travailleurs sont extrêmement vulnérables, subissent l’exploitation d’employeurs peu scrupuleux qui violent leurs droits humains élémentaires et vivent dans des conditions sanitaires épouvantables. Pour toucher un salaire de misère, 3 dollars par tonne de cannes coupées, il endurent des journées de 15 heures sous la garde d’hommes armés qui ont pour mission de les empêcher de quitter la plantation ».
Amnesty International dénonce de son côté les « expulsions collectives et arbitraires des Haïtiens et Dominicains d’origine haïtienne de la part des autorités dominicaines depuis mai 2005 » ainsi que le « climat grandissant de xénophobie et de harcèlement dirigé à leur encontre ».
« Afin d’aider à réduire les comportements xénophobes, le gouvernement doit aussi faire connaître la contribution positive de ces travailleurs haïtiens et dominico-haïtiens à la société dominicaine » estime Progressio qui demande au gouvernement dominicain de prendre les mesures nécessaires à se mettre en règle avec la Charte interaméricaine des droits humains.
D’après les récentes déclarations du ministre Carlos Morales Troncoso aux médias nationaux, la situation pourrait se régler d’elle-même avec la mécanisation du travail de la canne.
Pas sûr que la reconversion des Haïtiens dans le secteur de la construction soit la réponse suffisante aux vrais problèmes de discrimination et de violence arbitraire.
eCARAIBES
©Gianni Dal Mas/Progressio, coupeurs de canne saison 2002
Amnesty : climat grandissant de violence raciste
« La pratique d’expulsions collectives signifie qu’en République dominicaine les Haïtiens et Dominicains d’origine haïtienne vivent dans la peur permanente d’être expulsés, sans avoir une chance réelle de pouvoir contester la décision d’expulsion, et dans des conditions qui vont à l’encontre de leurs droits humains fondamentaux » dénonce Amnesty depuis plusieurs années.
D’après les organisations non-gouvernementales locales de défense des droits humains, plus de 8.000 Haïtiens et Dominicains d’origine haïtienne ont été expulsés arbitrairement en Haïti depuis mai 2005.
Au mois de mars dernier, la secrétaire générale d’Amnesty international, Irene Khan, avait déjà écrit au président dominicain Leonel Fernández pour lui faire part des « vives inquiétudes » de son organisation concernant « la détérioration de la situation des droits humains des travailleurs immigrés haïtiens et des citoyens dominicains d’origine haïtienne en République dominicaine ».
« Les Haïtiens et Dominicains d’origine haïtienne sont devenus les victimes d’actes de violences collectives à caractère raciste qui ont pris la forme d’attaques physiques et même de lynchages. Dans un tel contexte, il a été avancé que les victimes n’ont pas reçu de protection adaptée de la part des autorités dominicaines et que les plaintes officielles n’ont pas été instruites comme il se doit » dénonçait aussi Irene Khan qui rappelait enfin que le Président Fernandez avait lui-même reconnu publiquement le caractère abusif et inhumain des expulsions collectives d’Haïtiens conduites par ses fonctionnaires.
A l’occasion d’un séminaire sur la politique d’immigration, qui s’est tenu le 23 juin 2005, Fernandez avait déclaré : « Je me sens moi-même offensé lorsque je vois que ce que nous faisons traditionnellement sont des expulsions de masse, qui violent très certainement les droits humains des Haïtiens, et nous ne pouvons nous permettre de donner au monde l’image d’un pays qui viole les droits fondamentaux de ses voisins. » |
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