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[Bantu Kelani]

Congo-Kinshasa: Ne Muanda Nsemi dans le mouvement de résistance chez les Ne Kongo


Le Potentiel (Kinshasa)

14 Février 2007
Publié sur le web le 14 Février 2007

Freddy Mulumba Kabuayi
Kinshasa

Les événements tragiques, qui se sont passés dans la province du Bas-Congo les 31 janvier et 1er février 2007, ne peuvent surprendre les historiens et les sociologues qui connaissent l'évolution des peuples Kongo depuis leurs premiers contacts avec le monde occidental.

Les Ne Kongo n'ont jamais digéré la perte de prestige qu'avait leur royaume sous le règne du roi Mvuemba Alphonso Ier (1507-1541) - fils du roi Nzinga Nkuvu - occasionnée par la domination et la colonisation européenne. En effet, vers le XV siècle, le royaume Kongo avait des relations politiques, économiques, diplomatiques et religieuses avec le royaume du Portugal et le Vatican.


Durant ce règne, le royaume Kongo eut un évêque sacré à Rome sous le nom de Don Henrique, fils du Roi. Cet évêque mourut et fut enterré à Rome. En plus, le royaume Kongo eut auprès du royaume du Portugal un ambassadeur en la personne de Don Antonio Emmanuel, Ne Nsaku ne Vunda.

LES PRECURSEURS KIMPA VITA ET SIMON KIMBANGU

Mais, l'esclavage et la colonisation vont détruire tout ce prestige. C'est ainsi qu'il est apparu des prophètes qui essayèrent de fédérer tous les Ne Kongo dans une organisation pour résister à toute domination.

La première résistance fut menée par Kasola (Francisco) surnommé Bula Matari qui prêcha au Kongo de 1628 à 1634. Il fut suivi par Mafuta, une femme Nganga de la fin du XVIIème siècle et au début du XVIIIème siècle.

Les plus célèbres de ces prophètes furent Kimpa Vita (Dona Béatrice) née vers 1684 et exécutée le 2 juillet 1706 ainsi que Simon Kimbangu, né en septembre 1889, cond**né à mort en 1921 et décédé en prison le 12 octobre 1951 au Katanga. Kimpa Vita a résisté contre les Portugais et les missionnaires capucins. Simon Kimbangu, lui, a résisté à la colonisation belge et à l'Eglise catholique.

Si Kimpa Vita et Kimbangu ont résisté à la domination et à la colonisation européennes, Ne Muanda Nsemi, chef spirituel de Bundu dia Kongo, résiste à la domination de l'Etat patrimonial depuis le règne de Mobutu (1965-1997) jusqu'à ces jours.

Sous le régime de Laurent Désiré Kabila (1997-2001), un procès sur Bundu dia Kongo s'est déroulé à la Cour de sûreté de l'Etat. Les adeptes de ce mouvement religieux ont été accusés par l'Etat congolais de haute trahison.

A la différence des Kimbanguistes qui utilisent la Bible, les adeptes de Bundu Dia Kongo ont leur livre sacré de la race négro-africaine, appelé le « Makongo » ou le «Makaba».

REHABILITATION DE LA SAGESSE AFRICAINE

Pour eux, l'objectif poursuivi se résume en la réhabilitation de la Sagesse africaine, afin d'y puiser la Force et le modèle de leur organisation, de leur développement spirituel et matériel. Pour cela, il faut regarder avec les yeux de la tradition négro-africaine, et non pas avec les yeux de la Philosophie occidentale qui sépare religion, science et politique. Pour les adeptes de Bundu dia Kongo, il y a Akongo, l'être suprême, le Dieu Créateur de l'Univers tandis que le Bukongo, c'est la sagesse Divine, la Sagesse Kongo d'origine divine, la culture Kongo.

Ancien chef du département de laboratoire à l'Hôpital général de Kinshasa (ex-Mama Yemo), Ne Muanda Nsemi était aux études aux facultés des sciences (chimie) à l'Unikin (Université de Kinshasa) lorsqu'ont éclaté en 1969 les troubles estudiantines au début du régime Mobutu. Troubles qui ont été réprimés dans le sang, certains étudiants ayant été, en guise de sanction, enrôlés dans les Forces armées congolaises.

C'est durant cette période que Ne Muanda Nsemi dit avoir eu une vision dans sa chambre. Selon lui, il a été sacré, en 1969, instructeur des prêtres et des politiciens abordant la religion, la science et la politique, pour préparer l'avènement en Afrique d'une civilisation moderne particulièrement adaptée à la mentalité négro-africaine.

Un fait tout de même curieux à signaler : malgré le procès contre les adeptes, le chef spirituel de Bundu dia Kongo n'est pas inquiété par la justice congolaise. Par ailleurs, on observe qu'il fait beaucoup d'adeptes chez les Ne Kongo parmi lesquels on dénombre plusieurs intellectuels et cadres universitaires.

Le cas de Ne Muanda Nsemi, fondateur de Bundu Dia Kongo sort de l'ordinaire. Il mélange politique, science et religion. Cette situation s'explique en partie par la crise que traverse le pays depuis l'écroulement du régime autoritaire du maréchal Mobutu.

Dans son droit de réponse adressé au journal La Référence Plus le 22 octobre 2002, le chargé de communication de Bundu Dia Kongo souligne que, dans la tradition ancestrale Kongo, lorsqu'une profonde crise sévit, le Nganga (prophète) exerce aussi le rôle politique jusqu'à la fin de la crise, moment où il remet le pouvoir (politique) au politicien qu'il sacre.

En cette période de profonde crise au Kongo Central, il sied de rappeler que Ne Muanda Nsemi a été choisi en 1969 par les vieux sages Ne Kongo pour être leader du peuple Ne Kongo dans un Congo Fédéral.
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