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[Wigonnawin]

Les Mûlatresses de Saint-Louis

Saint-Louis est la capitale des mûlatresses, leur univers fermé d'où elles entrevoient la belle et douce France.

La belle est douce France objet de soupirs énamourés, patrie perdue.
A Saint-Louis, l'élément mûlatre se distingue nettement de l'élément noir.
On dirait les immigrants d'une race d'aristocrates déchus vivant dans un perpetuel effort pour en imposer à leur entourage, les Nègres.

Entre mûlatresse même, il y a des cloisonnement étanches. ils se distinguent entre eux non seulement par des titres de noblesse authentiques ou fausse, mais encore et surtout par la teinte de leur peau et un nom de famille devenu célèbre grâce à l'aïeul blanc qui a été magistrat, officier ou grand négociant.

Mais la volonté de ségrégation la plus nette se marque chez les mûlatresses qui se divisent en 3 grandes classes :

En marge de ces 3 categories, il faut placer certaines mûlatresses de toutes teintes échappées du troupeau, qui ont fait piquer au noir leur lèvres inferieure, tout comme les négresses noires, tresser leurs cheveux à l'indigène et qui mordent avec dignité en pleine rue , l'habituel " sotiou", morceau de bâton tendre qui rend les dents éclatantes de blancheur.

C'est un spectacle un panorama séduisant d'éspèces et de sous-éspèces, de couleur épidermiques, de toilettes, de grâces diverses; un monde hétéroclite dominé par des antagonismes latents et des rancunes sans cause.

Le sort des mûlatresses de première et de seconde classe est plus digne d'attirer l'attention du psychiatre. Elles ont grandi dans l'idée qu'autrefois tous les noirs de Saint-Louis étaient leurs esclaves, que malgré la pseudo-abolition de l'esclavage et les efforts de la Démocratie qui voudrait le nivellement races et des classes, il est impossible qu'elles descendent jusqu'à considerer les Noirs comme des egaux.

Les vieilles grand-mères et les vieilles tantes qui représentent l'ordre ancien montent leur garde. Conservatrices farouches en matière religieuse ou sociale, elles tiennent à conduire au bon port leurs petites filles, les Nini, les Madou et les Nenette.

Aussi les mûlatresses de Saint-Louis détonnent-elles dans un milieu où Blancs et Noirs authantiques vivent normalement, sans heurte et sans bruit, chacun dans le cadre qui répond à ses moeurs.

Elles savent peu de choses de la vie bourgeoise, autrement dit de la bienséance, mais elles sont à cheval sur ce peu: une maladresse commise par un Noir leur arrache des cris d'horreur.

Une expression qui leur est familère et chère est : " Ceci a de l'allure" :
-Ce chapeau a de l'allure; ...ce pull( pull-over) a de l'allure; ... ce manteau a de l'allure...

Elles sont en perpétuelle lutte avec le soleil et la nature de leur pays qui pousse à la lassitude, à la mélancolie plutôt qu'aux gaietés et aux allures compassées; un trait dominant de leur humeur est une effervescence un peu simulée.

Il est étonnant de voir comme elles sont agiles et remuantes dans ce cadre d'Afrique si plein de mollesse.
Peu d'entre elles ont vu Paris; mais toutesvous diront la féerie des Champs-Elysées, le charme du Trocadéro, les merveilles des Tuileries. Et quand vous les grise par trop fort, elles parlent de leur prochaines rentrées en France.

Surtout n'allez pas leur demander si elle parlent ouolof ( la langue de leurs aïeux nègres ). Elles ne comprennent que français - et peut-être l'anglais - car l'anglais est une langue de civilisé et il a de l'allure.

Elles parlent parlent d'ailleurs le français avec une vivacité et une couleur que leur envieraient les Parisiennes les plus intoxiquées. Elles sont à l'affût des tournures de languages frais émoulues de Paris. Elles les roulent entre leurs lèvres épaisses en y ajoutant bien malgré elle un certain parfum de gutturalité chaude et authentiquement nègre.

Ce que la nature n'a pas voulu faire, la poudre le réalise à la perfection. Quelle merveilleuse chose pour blanchir! Les mûlatresses chargent leur figure et leur cou de cette poudre qui, chez l'européenne, était peut-être faite pour réhausser l'éclat de la blancheur naturelle.

Abdoulaye Sadji .(Sénégal)
( Nini, Edition présence Africaines, Paris.)
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"ô j'ai vu des femmes donner la vie à des petits dieux
et j'ai vu l'espoir de mon peuple dans leurs yeux
En verité, les miens vont triompher"
Car il n'est pas de terre où n'ait coulé ton sang,
de langue où ta couleur n'ait été insultée.

http://al-encre-noir.skyblog.com

[Wigonnawin]

"Saint-Louis du Sénégal est une ville particulière. Pour les administrateurs et les commerçants en poste dans cette ville tropicale, il n'est pas question de faire venir femme et enfants. Pour combler leur solitude, ils épousent à la « mode du pays » une africaine que tout le monde considère ici comme leur femme légitime. Ces épouses, appelées signares, ont d'abord été des Noires. Assez vite, les générations suivantes d'Européens, installées dans le pays, ont préféré s'unir aux filles à peau claire de leurs prédécesseurs. C'est une véritable bourgeoisie métisse, qui naît à Saint-Louis"

"[...]obligée cependant de constater la naissance à Gorée d'un élément mulâtre souvent dynamique qui finira par jouer (en particulière la mulâtresse qu'on appelait " SIGNARES ") un rôle important dans l'Ile.

Anne PEPIN, Cathy LOUETTE et Victoria dALBIS étaient par exemple des Signares célèbres.

Ces Signares devenaient souvent un pari convoité par les nouveaux arrivants blancs en particulier, si elles avaient pour père un personnage important de la compagnie.

À cette époque, on constatait que sur 13 propriétaires de l'Ile, 9 appartenaient à des Mulâtres.
En effet, les hommes mulâtres allaient chercher leur fortune sur le continent Africain ou même en France tandis que les femmes mulâtresses demeuraient dans l'Ile, commerçant par leurs esclaves de case, pour le compte de la compagnie, pour elles mêmes ou pour leurs maris d'occasion.

Ainsi, les unions plus ou moins passagères qu'on appelait " Mariage à la mode du pays ", ne tardèrent pas à se multiplier et à jouir même d'une certaine légitimité. Les enfants héritant des biens amassés par leurs pères durant leur séjour. Et à l'époque, la richesse d'une famille se manifestait par Le nombre de ses esclaves. On pouvait dire qu'en 1767, Cathy LOUETTE, la Signare du Capitaine Français AUSSENCE était la femme la plus fortunée de l'Ile, avec 25 captifs, 43 captives de case."

(membres.lycos.fr/tuffi/goree.htm)
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"ô j'ai vu des femmes donner la vie à des petits dieux
et j'ai vu l'espoir de mon peuple dans leurs yeux
En verité, les miens vont triompher"
Car il n'est pas de terre où n'ait coulé ton sang,
de langue où ta couleur n'ait été insultée.

http://al-encre-noir.skyblog.com

[Nénuphar]

C'est intéressant...
Qu'est-ce que ça veut dire "piquer au noir leur lèvre inférieure"? (J'en profite pour me cultiver sur Grioo... )

[Wigonnawin]

[Missmeteor]

Je trouve ce texte sur saint Louis très interessant car en Haïti il y a ce même genre d'ambiance.
Un sentiment sous jacent de superiorité
Je ne sais pas si c'est l"effet de groupe lorsqu'il y a plusieurs communautés qui cohabitent car en Afrique c'est aussi le cas

Dans mon pays d'origine mon père m' a raconté que dans le temps ( dans les 60's) il y avait une sorte de bar boite de nuit reservé aux metis(se). Les noirs n'y était pas les bienvenus, parcontre les européens avaient la porte grande ouverte et c'est même là qu'il fallait aller pour se trouver un bon parti "autochtone" à épouser
Il parait que lorsque cette boite de nuit a été fermée la communauté metisse a été mécontente pendant plusieurs années.

Pourtant il avait d'autres endroits où tout le monde avait le droit de se rencontrer mais apparemment , c'etait pas pour eux.

Ce que je voulais dire aussi c'est que le metissage 50/50 ca ne dure qu'une génération,, je dis ça pour ceux qui revent d'un monde peuplé de metis ca serait plutot dificile car lorsqu'un couple mixte engendre un enfant metis cet enfant sera libre plus tard de faire un enfant avec un blanc ou avec un noir et à ce moment il sera difficile pour cet enfant de dire qu'il est partagé entre deux .

voila Juste pour donner mon avis car la discussion "temoignage de metis" est deja pleine de messages et il m'a semblé comprendre qu'il vallait mieux y poster un témoignage de metis pour enrichir le débat plutot que de s'ecarter donc je poste plutot ici après avoir fait une recherche sur le sujet.
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Ce n'est pas parce que je ne peux pas tout faire que je ne ferai pas ce que je peux faire.

[Diali]

Dans mon post sur la femme dans la littérature africaine (dans le "salon littérature" donc !), je suis en train de faire l'analyse de Nini, la mulâtresse d'Abdoulaye Sadji.
L'objectif de ce post est de faire des sortes de fiches de lecture, avec notamment une description des personnages féminins.

Pour ce qui concerne Nini, comme cet ouvrage a été cité notamment par Fanon dans Peau noir, masques blancs qui a fait l'objet d'un autre post, j'en ai fait une lecture ciblée sur les problématiques globales noir/blanc (pour simplifier).

Le contexte à St-Louis est particulier mais très révélateur. Le personnage de Nini, analysé presque comme un cas psychiatrique par Sadji, permet d'aborder une grande partie de la problématique.

[Diali]

[ebony son]

Je ne sais pas s'il faut en rire de ces fameuses signares ou mulatresses de saint louis! decidement le senegale est une patrie curieuse dans cette partie de l'afrique ayant l'art et le merite de produire les bounty et les nègres les plus complexées que le monde ai jamais vu!
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L'aigle qui plane ne se doute pas que ceux qui sont en bas devinent ses intentions.

[Diali]