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[cerclefrantzfanonparis]

ON DISAIT QUE TU ETAIS UNE TERRE SANS PEUPLE, on affirmait qu'avant que des gens du nord viennent affirmer : ''ceci est à moi !'', que cette terre ne produisait pas de fruits, ni de blé, on disait que tu n'avais jamais eu de nom, jamais eu d'histoire, jamais eu de drapeau, jamais eu de fontière...

On disait que tu étais un désert, d'ailleurs, quand on frappe les Arabes, c'est toujours en les désertifiant d'abord, et voici ''Tempête du désert'', et voici ''Renard du désert'', et voici toutes les opérations ''déserts, fantômes, sables'' - comme on sait dans les déserts il n'y a pas d'hommes, il n'y a pas d'animaux mêmes, sinon des insectes et des serpents sous les pierres, des cloportes, des lézards... et les bombes géantes, les obus par milliers, les rafales, les missiles, tout cela ne fait pas du sang et de la chair morte, cela remue le sable, ça laboure, justement, ces Arabes, ils ne savent pas labourer la terre, il faut le faire à leur place...

Et puis tu es venu, ARAFAT, tu es venu avec ton nom de montagne, tu es venu avec ton nom de cascade, ton nom de fontaine, ton nom de monument, ton nom de météore igné, ARAFAT, né pour l'épopée, né pour te dresser, né pour incarner la patrie perdue, la patrie en déroute, une patrie d'errance et de détours, une patrie que toi : ARAFAT, tu as porté aux dimensions bibliques, aux dimensions mystiques, aux dimensions d'une mission immense, de l'appel prophétique, de la Révolution arabe, de la Révolution mondiale...

Oh, Palestine, mère en déroute et orpheline, clefs inutiles dans les plis de tes habits de fortune, tu as enfin trouvé un père pour tes enfants humiliés, tes enfants sur les routes du monde, tes enfants étrangers chez eux, humiliés chez eux, ombres des puissants étrangers, au bout du canon des nouveaux-venus, des nouveaux maîtres; Oh, ARAFAT, par la voix des hommes verticaux et des femmes dignes, par la voix des enfants au regard qui ne baisse pas, par la voix des poètes et des martyrs...par la bouche des orateurs et par la bouche des fusils...tu as transformé la longue plainte et les pleurs chaotiques, tu as fait taire le mugissement des victimes impuissantes, tu as appris et tu as fait apprendre le chant du combat, le chant des partisans, le chant des fedayin, le champ du peuple qui ne veut pas disparaître, qui ne veut pas mourir...

ARAFAT, ARAFAT, tu as choisi la Terre de France pour mourir, encore une fois en exil, mais cette fois chez tes amis, ce peuple étrange qui est en Occident et qui pourtant est différent, ce peuple étrange qui viola la Palestine il y a mille ans et puis qui se prit à l'aimer, à la défendre, à se marquer d'elle à jamais...et tu es mort dans ce vieux royaume de la liberté et de l'idée, qui se mêle depuis toujours de l'Universel et qui bouleverse de ses mots inventés le monde étranger...

ARAFAT, ARAFAT, TU AS DIT : ''JE SERAI BIENTOT DE RETOUR PARMI VOUS, SI DIEU LE VEUT '' et tu ne nous as pas menti...tu es de retour parmi nous, parmi nous tous, ton nom a quitté le corps humain pour mieux s'inscrire dans le corps de la nation, de tout le monde arabe, du tiers-monde, de toute l'humanité en proie à l'oppression...tu étais un Palestinien et un Arabe, et un Musulman, mais dans ton peuple il y avait des Chrétiens et des Juifs, des religieux et des communistes, des Egyptiens et des Syriens, des Grecs et des Français, des Arméniens et des Japonais, des Irlandais et des Vénézueliens, il y avait Genette, il y avait Curiel, il y avait Hamchari, il y avait Chomsky, il y avait Fanon, il y avait tous ceux qui ont attaché leur nom à l'étoile mouvante de l'égalité, à l'étoile filante à brève vie de ceux qui se dressent contre la force mécanique des vainqueurs hautains, des occupants à la mine haute et inconscients de la force lente et fermente des racines qu'on piétine...

Car dans ta Palestine sans terre il y avait de la place pour tous, il y avait des fruits pour tous, tu avais créé dans ton coeur la Palestine laïque et démocratique que tu appelais de tes voeux...Et nous avons vu ton coeur faiblir, et nous t'avons vu t'envoler dans cet avion venu de l'autre côté de la Méditerranée, aux couleurs de la liberté et de l'égalité...Et voici venu le moment, tu es de retour, cet air de triomphe tenace sur tous nos écrans, dans tous les regards, te voilà partout, rayonnant depuis Ramallah, cette étape héroïque de ton haut parcours sur la route vers Jérusalem...tu es à la mosquée lointaine, tu es dans la mosquée de nos coeurs, dans le temple de nos âmes militantes et assoifées de justice, oh, frères et soeurs en pleurs, entendez ce nom de tonnerre et le chant de ce nom...

ARAFAT, ARAFAT, tu es avec nous, tu es en nous-même... Que la terre te soit légère ! Qu'au quarantième jour ton âme ne souffre pas du détachement ! que ton esprit vole en joie parmi nous, les poursuivants de ton combat, les fidèles, les témoins, les vivants, les survivants, nous sommes tous Palestiniens, nous sommes tous avec toi, A Dieu, et l'An prochain, A Jérusalem !

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le cercle frantz fanon (fondateur : marcel manville) est une organisation loi 1901 anticolonialiste, antiraciste, antillaise et internationaliste, tiers-mondiste.