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Guy Deslauriers, réalisateur d'Aliker : "Il a fallu se battre pour que ce film existe" Le réalisateur d'Aliker revient pour grioo.com sur son dernier film qui retrace la vie du journaliste martiniquais Andre Aliker Par David Reinhardt le 03/06/2009 |
L'affiche de ''Aliker''
Je pense qu'un personnage comme André Aliker est un personnage important pour le pays et le lieu dont je suis originaire (Martinique). Au delà de ce territoire, c'est quelqu'un d'important pour les caraïbes et l'Afrique. D'une manière générale pour tous les pays où la condition et la dignité humaines sont bafouées.
Paradoxalement, André reste un personnage assez méconnu. Il est connu par les Martiniquais, par une certaine population, par les gens d'un certain âge mais les moins jeunes ignorent son histoire. C'est Dommage. J'ai eu connaissance de son histoire il y a plus d'une quinzaine d'année. Néanmoins, il a fallu du temps pour que les choses se mettent en place.
Vous avez travaillé conjointement avec Patrick Chamoiseau, comment s'est passé cette collaboration?
La collaboration avec Patrick Chamoiseau s'est bien passée voire très bien. Cela dit, ce n'était pas notre première collaboration. Nous avons eu à travailler ensemble par le passé. On a réalisé en commun des long métrages et des documentaires. Notre collaboration date d'une quinzaine d'années. J'ai beaucoup de plaisir à travailler sur des projets avec lui. Patrick Chamoiseau, est un écrivain talentueux qui a le soucis de toujours bien faire. Il fut très disponible tout le long des tournages.
Bissol (Lucien Jean Baptiste)
Le choix de Stomy a été très simple. On a lancé un casting. Le directeur de casting a rencontré énormément de comédiens. Tous les acteurs intéressés par le rôle, vivant en France ou aux Antilles se sont présentés. J'ai proposé au directeur de casting le nom de Stomy. Je ne le connaissais pas personnellement. Je ne le connaissais qu'à travers ses premiers films. Il a accepté notre invitation et est venu à l'audition. Sa prestation fut très convaincante. Il est tout de suite devenu un potentiel « Aliker ». On a continué le casting. Après une deuxième sélection, les choses se sont précisées. Le petit plus fut son physique et sa ressemblance avec André Aliker.
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| Guy Deslauriers |
Vous travaillez depuis 2005 sur le film. Il devait sortir en 2008. Qu'est-ce qui a conduit au report du film?
La production fut assez compliquée. Trouver les moyens fut très difficile. Le budget du film était de l'ordre de 2,5 millions d'euros. Ce qui représente un petit budget pour un film d'époque. C'est un long métrage qui a été conçu grâce à l'équipe technique et aux comédiens qui se sont mis à la disposition du projet. Le film n'a pas pu démarrer dans les délais initiaux. Des problèmes techniques et matériaux (sinistre de la pellicule du film) ont perturbé le bon déroulement du film. Confrontés aux difficultés financières, on a du interrompre durant 6 mois le tournage.
Emilie (Johan Titus) et Marcel (Xavier Thiam)
André Aliker est un personnage à multiples facettes. On en montre quelques unes dans le film. C'est par exemple un commerçant, ce qu'on ne montre pas. C'est un militant communiste, un syndicaliste doublé d'un journaliste. Cette posture il la met aux services des ouvriers. Ce qui m'a paru intéressant est de montrer cette duplicité et faire le lien. Le fonctionnement sur ces deux plans montrent à quel point il peut se mettre ses camarades syndicalistes à dos. On a voulu trouver un équilibre. On a mis en avant la façon dont le journalisme sert sa cause. On le voit sur le terrain. On n'a pas voulu faire un film uniquement sur un journaliste.
Un passage nous a interpellé. Lors de la première tentative, de meurtre, vous avez choisi délibérément d'omettre la scène, passant directement à une autre (Jeté dans la mère, Aliker a la vie sauve)
C'était pour éviter une redîte. On le voit effectivement jeté à l'eau. On a voulu passer à une image violente et marquante. On a gardé pour la scène finale le passage où on livre son corps à la mer.
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| Guy Deslauriers |
Votre film qui cadre avec l'actualité met en exergue l'exploitation des populations locales par les Békés!
Nous avons voulu raconter la fin de la vie d'un homme de stature qui doit être présent dans le patrimoine de la Martinique, de l'outre-mer et de l'Afrique. Ce qui m'a intéressé est de remettre les choses à plat. Les Békés sont toujours là. Ils sont moins en vue, et maitrisent toujours le système. Les classes ouvrières sont toujours aussi nombreuses. Il y' a un retour en arrière. J'ai le sentiment qu'on pourra embaucher et débaucher les travailleurs aussi facilement que dans les années 30. Le personnage d'Aliker est extrêmement moderne, par son engagement, par son combat, ses idées, par son métier, bref, un journaliste moderne avant l'heure.
Aliker (Stomy Bugsy)
J'aimerais en faire d'autres. Pour l'instant je ne sais pas. Quand on vient d'Afrique ou des Antilles on a la responsabilité de dire l'histoire. Nous avons des évidences à raconter avec lesquelles beaucoup de personnes ne sont pas d'accord. Ce qui rend la réalisation du film difficile. Aliker est un exemple criant. Il a fallu notre détermination. Les écueils furent nombreux, les entreprises pour faire échouer le film également. Il a fallu se battre contre des gens qui sont tapis dans l'ombre pour que ce film existe. La mort d'Aliker est toujours impunie. C'est tout un système qui a marqué sa désapprobation.
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| Guy Deslauriers |
Quelles pourraient-être les réactions à la sortie du film?
J'ai du mal à imaginer les réactions. Le film est déjà sorti en Guadeloupe et en Martinique. J'espère avant tout que cela va permettre au plus grand public Français de découvrir un grand personnage, qui a fait don de sa vie pour les idées qu'il défendait. Au delà de çà, il pourra permettre au téléspectateur de réfléchir sur les réalités sur les pays d'Outre-mer, de l'Afrique et des Caraïbes, de revisiter l'histoire de ces nations telle qu'elle a été orientée par les grandes puissances.
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