Retrouvez Grioo.com sur votre mobile: http://m.grioo.com
Grioo.com   Grioo Pour Elle       Village   TV   Musique Forums   Agenda   Blogs  
   Mardi 16 Avril 2024 RECHERCHER : Sur Grioo.com  Sur Google 
 Accueil  Rubriques  Archives  Forum     Qui sommes-nous ?     

   

AccueilRubriquesArticleRéaction
 
Retour à l'article: Dakar : La demande de pardon de Ségolène Royal choque l'UMP
  Dakar : La demande de pardon de Ségolène Royal choque l'UMP
En visite au Sénégal, l'ex candidate aux élections présidentielle a suscité la polémique, suite à sa demande de pardon, pour les propos tenus en juillet 2007 par Sarkozy sur « l'homme africain ».
 
 Publicité 
 
Ecrire une réaction

Dakar : La demande de pardon de Ségolène Royal choque l'UMP

Nombre de messages
:  39
Pages:  1  2 > >> 

 
( 07/04/2009 15:47 )
À Pierre-bénite / France

Whaouhhh Rama Yade qui s'offusque!!?? Visiblement les noirs elle les préfère comme elle c'est à dire instrumentalisés par son parti.
Si cette gamine avait un brin d'intelligence elle aurait immédiatement réagi au discours de sarkozy mais elle est tellement obnubilée par son désir de paraître plus française que le plus gaulois des gaulois qu'elle est prête à laisser insulter sa propre famille biologique.
Par ailleurs pour une nana qui revient d'un voyage officiel en pays "françafrique" ces propos démontrent tout son cynisme.
Ecrire une réaction
  elle a trop raison !
( 07/04/2009 22:25 )
À Lyon / France

Ségolène ? On ne peut pas lui donner complètement tort » à propos de son « pardon » de Dakar pour effacer le discours de Nicolas Sarkozy . « N’est-ce pas l’intérêt de la France qu’elle le dise ? » Signé François Goulard, le député villepiniste de Vannes. En plu, voici que Bernard Kouchner admet que le président avait prononcé « une phrase maladroite », Dans ce discours controversé, le chef de l'Etat avait déclaré que « l'Hommme africain n'est pas encore entré dans l'Histoire ». Ambiance.
Ecrire une réaction
 
( 07/04/2009 22:39 )
À Paris / France

LE PLUS RIDICULE ?C EST LEFEBVRE
Ecrire une réaction
 
( 07/04/2009 22:51 )
À Narbonne / France

non les plus ridicul c'est ceux qui aboi quand sarko a prononcé ces paroles et qu'apres ils se plaignent sur l article dezs troupes coloniale!!
alors sarko avait raison ou tort?
Ecrire une réaction
  SEGO
Tsoua ( 07/04/2009 23:06 )
À Saint Denis / France

Que les Noirs ouvrent bien les yeux, et qu'ils comprennent que nous sommes des moins que rien aux yeux des toubabs, voilà pourquoi le pardon de SEGO dérange.Le leucoderme ne doit pas se rabaisser devant le NEGRO, NOUS SOMMES TOUJOURS leurs esclaves.Nous avons intêret de changer nos habitudes, notre façon de voir les choses, il est temps, parce que le leucoderme songe déjà à la recolonisation, la reconquête de l'AFRIQUE est déjà EN COURS
Ecrire une réaction
  elle a tout à fait raison
herman ( 08/04/2009 00:07 )
À Rezé / France

Les propos de Sarkozy n'engagent que lui. D'ailleurs il n'est que le chef de l'état et surtout de l'UMP, et non le président de TOUS les français.
Des millions de citoyens maintenant en France attendent que cet individu finisse son mandat pour retrouver enfin de la dignité et du bon sens.
Ecrire une réaction
  Ramaya
olmeque ( 08/04/2009 03:20 )
À Montreal / Canada

J'avais tendance à finalement l'aprécier, mais bon...son discours m'ont bien rappeller la 1ere impression qu'Elle m'a faite. Ça veut dire quoi "les africains..." n'en fait elle plus partie, a t'elle choisie son CAMPS? En amérique du nord les gens n'ont aucune honte à s'Associer à leur origines alors que parfois, ça ne concerne que leur parents ou grand-parents et que eux sont nées sur place!!
Ecrire une réaction
 
( 08/04/2009 06:26 )
À Noisy-le-grand / France

Cette demande de pardon est-elle sincère 2 ans après les faits ?
Pourquoi ne demande-t-elle pas pardon pour les actions de Mitterand aux Rwanda dans le cadre de la FranceAfrique ?
Ne soyons pas stupides et voyons plus loin que le bout de notre nez !
Droite ou Gauche, ils n'ont qu'un seul but l'exploitation de notre Continent (matières premières et matière grise)...
De Gaulle, nous a bien dit "Un pays n'a pas d'amis mais seulement des intérets à défendre"
Ecrire une réaction
  Au posteur anonyme juste au dessus :
Maryjane ( 08/04/2009 09:32 )
À Paris / France

"Droite ou Gauche, ils n'ont qu'un seul but l'exploitation de notre Continent (matières premières et matière grise)...
De Gaulle, nous a bien dit "Un pays n'a pas d'amis mais seulement des intérets à défendre" "


M.E.R.C.I.
Ecrire une réaction
  2poids 2 mesures
x ( 08/04/2009 10:19 )
À Paris / France

sego comme sarko peuvent trés bien etre sincères tous les deux non? pourquoi faire un procés à sego alors que dès que sarko l'ouvre on ne se pose pas la question de savoir si il pense ce qu'il dit. je m'étonnes par ailleurs que ts les Noirs de grioo trés majoritairement de gauche et qui ont voté pour elle en 2007 se mettent à la critiquer de la sorte. N'ayany ni voté pour l'un et l'autre cela me fait sourire
Ecrire une réaction
  Bonne chance à Rama Yade
( 08/04/2009 10:49 )
À Pierre-bénite / France

Pour Alain Destrem, Ségolène Royal en boubou lui "rappelle sa femme de ménage!"

Je souhaite bonne courage à Ramatoulaye pour le récurage des toilettes de l'Elysée et de l'UMP!
Ecrire une réaction
  la reponse des africians en lettre ouvert au français nicolas zarkozy lisez l'article d'achille Mbembe
( 08/04/2009 10:59 )
À Nanterre / France

L'Afrique de Nicolas Sarkozy

Achille Mbembe

Achille Mbembe livre ici une critique argumentée du discours adressé à "l'élite de la jeunesse africaine" à Dakar le 26 juillet 2007 par le président de la République française, Nicolas Sarkozy, lors de sa récente visite de travail en Afrique subsaharienne, que nous publions pour information par ailleurs (article n°6785). Cette chronique, qui fait suite à de nombreuses autres d'Achille Mbembe sur notre site, est publiée dans le cadre de notre partenariat avec le journal camerounais Le Messager.http://www.africultures.com/php/index.php?nav=article&no=6784

En auraient-ils eu l'opportunité, la majorité des Africains francophones aurait sans doute voté contre Nicolas Sarkozy lors des dernières élections présidentielles françaises.
Ce n'est pas que son concurrent d'alors, et encore moins le parti socialiste, aient quoi que ce soit de convaincant à dire au sujet de l'Afrique, ou que leurs pratiques passées témoignent de quelque volonté que ce soit de refonte radicale des relations entre la France et ses ex-colonies. Le nouveau président français aurait tout simplement payé cher son traitement de l'immigration lorsqu'il était le ministre de l'intérieur de Jacques Chirac, sa collusion supposée avec l'extrême droite raciste et son rôle dans le déclenchement des émeutes de 2005 dans les banlieues de France.






Du viol par le langage

Pour sa première tournée en Afrique au sud du Sahara, il a donc atterri à Dakar précédé d'une très mauvaise réputation - celle d'un homme politique agité et dangereux, cynique et brutal, assoiffé de pouvoir, qui n'écoute point, dit tout et le double de tout, ne lésine pas sur les moyens et n'a, à l'égard de l'Afrique et des Africains, que condescendance et mépris.
Mais ce n'était pas tout. Beaucoup étaient également prêts à l'écouter, intrigués sinon par l'intelligence politicienne, du moins la redoutable efficacité avec laquelle il gère sa victoire depuis son élection. Surpris par la nomination d'une Rachida Dati ou d'une Rama Yade au gouvernement (même si à l'époque coloniale il y avait plus de ministres d'origine africaine dans les cabinets de la république et les assemblées qu'aujourd'hui), ils voulaient savoir si, derrière la manœuvre, se profilait quelque grand dessein - une véritable reconnaissance, par la France, du caractère multiracial et cosmopolite de sa société.
Il était donc attendu. Dire qu'il a déçu est une litote. Certes, le cartel des satrapes (d'Omar Bongo, Paul Biya et Sassou Nguesso à Idris Déby, Eyadéma Fils et les autres) se félicite de ce qui apparaît clairement comme le choix de la continuité dans la gestion de la "Françafrique" - ce système de corruption réciproque qui, depuis la fin de l'occupation coloniale, lie la France à ses affidés africains.
Mais si l'on en juge par les réactions enregistrées ici et là, les éditoriaux, les courriers dans la presse, les interventions sur les chaînes de radios privées et les débats électroniques, une très grande partie de l'Afrique francophone - à commencer par la jeunesse à laquelle il s'est adressé - a trouvé ses propos sinon franchement choquants, du moins parfaitement invraisemblables. Et pour cause. Dans tous les rapports où l'une des parties n'est pas assez libre ni égale, le viol souvent commence par le langage - un langage qui, sous prétexte de n'exposer que les convictions intimes de celui qui les profère, s'exempte de tout, refuse d'exposer ses raisons et s'auto-immunise tout en faisant porter tout le poids de la violence au plus faible.





Régression

Mais pour qui n'attend rien de la France, les propos tenus à l'université de Dakar sont fort révélateurs. En effet, le discours rédigé par Henri Guaino (conseiller spécial) et prononcé par Nicolas Sarkozy dans la capitale sénégalaise offre un excellent éclairage sur le pouvoir de nuisance - conscient ou inconscient, passif ou actif - qui, dans les dix prochaines années, pourrait découler du regard paternaliste et éculé que continuent de porter certaines des nouvelles élites dirigeantes françaises (de gauche comme de droite) sur un continent qui n'a pourtant cessé de faire l'expérience de radicales mutations au cours de la dernière moitié du XXe siècle notamment.
Dans sa "franchise" et sa "sincérité", Nicolas Sarkozy révèle au grand jour ce qui, jusqu'à présent, relevait du non-dit, à savoir qu'aussi bien dans la forme que dans le fond, l'armature intellectuelle qui sous-tend la politique africaine de la France date littéralement de la fin du XIXe siècle. Voici donc une politique qui, pour sa mise en cohérence, dépend d'un héritage intellectuel obsolète, vieux de près d'un siècle, malgré les rafistolages.
Le discours du nouveau président français montre comment, enfermé dans une vision frivole et exotique du continent, les nouvelles élites dirigeantes françaises prétendent jeter un éclairage sur des réalités dont elles ont fait leur hantise et leur fantasme (la race), mais dont, à la vérité, elles ignorent tout. Ainsi, pour s'adresser à "l'élite de la jeunesse africaine", Henri Guaino se contente de reprendre, presque mot à mot, des passages du chapitre consacré par Hegel à l'Afrique dans son ouvrage La Raison dans l'histoire - et dont j'ai fait, récemment encore et après bien d'autres, une longue critique dans mon livre De la postcolonie (pp. 221-230).
Selon Hegel en effet, l'Afrique est le pays de la substance immobile et du désordre éblouissant, joyeux et tragique de la création. Les nègres, tels nous les voyons aujourd'hui, tels ils ont toujours été. Dans l'immense énergie de l'arbitraire naturel qui les domine, ni le moment moral, ni les idées de liberté, de justice et de progrès n'ont aucune place ni statut particulier. Celui qui veut connaître les manifestations les plus épouvantables de la nature humaine peut les trouver en Afrique. Cette partie du monde n'a, à proprement parler, pas d'histoire. Ce que nous comprenons en somme sous le nom d'Afrique, c'est un monde anhistorique non développé, entièrement prisonnier de l'esprit naturel et dont la place se trouve encore au seuil de l'histoire universelle.
Les nouvelles élites françaises ne sont pas convaincues d'autre chose. Elles partagent ce préjugé hégélien. Contrairement à la génération des "Papa-Commandant" (de Gaulle, Pompidou, Giscard d'Estaing, Mitterrand ou Chirac) qui épousait tacitement le même préjugé tout en évitant de heurter de front leurs interlocuteurs, les "nouvelles élites" de France estiment désormais qu'à des sociétés aussi plongées dans la nuit de l'enfance, l'on ne peut s'adresser qu'en s'exprimant sans frein, dans une sorte de vierge énergie. Et c'est bien ce qu'elles ont à l'idée lorsque, désormais, elles défendent tout haut l'idée d'une nation "décomplexée" par rapport à son histoire coloniale.
À leurs yeux, on ne peut parler de l'Afrique et aux Africains qu'en suivant, en sens inverse, le chemin du sens et de la raison. Peu importe que cela se fasse dans un cadre où chaque mot prononcé l'est dans un contexte d'ignorance. Il suffit de saturer les mots, de recourir à une sorte de pléthore verbale, de procéder par la suffocation des images - toutes choses qui octroient au discours de Nicolas Sarkozy à Dakar son caractère heurté, bégayant et abrupt.
J'ai en effet beau faire la part des choses. Dans le long monologue de Dakar, je ne trouve d'invitation à l'échange et au dialogue que rhétorique. Derrière les mots se profilent surtout des injonctions, des prescriptions, des appels au silence, voire à la censure, des provocations gratuites, l'insulte par-devers l'inutile flatterie - une insupportable suffisance dont, je l'imagine, on ne peut faire preuve qu'à Dakar, Yaoundé et Libreville, et certainement pas à Pretoria ou à Luanda.





Le président ethnophilosophe

À côté de Hegel existe un deuxième fonds que recyclent sans complexe les "nouvelles élites françaises". Il s'agit d'une somme de lieux communs formalisés par l'ethnologie coloniale vers la fin du XIXe siècle. C'est au prisme de cette ethnologie que se nourrit une grande partie du discours sur l'Afrique, voire une partie de l'exotisme et de la frivolité qui constituent les figures privilégiées du racisme à la française.
Cet amas de préjugés, Lévy Brühl tenta d'en faire un système dans ses considérations sur "la mentalité primitive" ou encore "prélogique". Dans un ensemble d'essais concernant les "sociétés inférieures" (Les Fonctions mentales en 1910 ; puis La Mentalité primitive en 1921), il s'acharnera à donner une caution pseudo-scientifique à la distinction entre "l'homme occidental" doué de raison et les peuples et races non-occidentaux enfermés dans le cycle de la répétition et du temps mythico-cyclique.
Se présentant - coutume bien rodée - comme "l'ami" des Africains, Leo Frobenius (que dénonce avec virulence le romancier Yambo Ouologuem dans Le Devoir de violence) contribua largement à diffuser une partie des ruminations de Lévy Brühl en mettant en avant le concept de "vitalisme" africain. Certes, considérait-il que la "culture africaine" n'est pas le simple prélude à la logique et à la rationalité. Toujours est-il qu'à ses yeux, l'homme noir était, après tout, un enfant. Comme son contemporain Ludwig Klages (auteur, entre autres, de L'Eros cosmogonique, L'Homme et la terre, L'Esprit comme ennemi de l'âme), il estimait que l'homme occidental avait payé d'une dévitalisation génératrice de comportements impersonnels la démesure dans l'usage de la volonté - le formalisme auquel il doit sa puissance sur la nature.
De son côté, le missionnaire belge Placide Tempels dissertait sur "la philosophie bantoue" dont l'un des principes était, selon lui, la symbiose entre "l'homme africain" et la nature. De l'avis du bon père, la "force vitale" constitue l'être de l'homme bantu. Celle-ci se déploie du degré proche de zéro (la mort) jusqu'au niveau ultime de celui qui s'avère un "chef".
Telles sont d'ailleurs, en plus de Pierre Teilhard de Chardin, les sources principales de la pensée de Senghor qu'Henri Guaino se fait fort de mobiliser dans l'espoir de donner aux propos présidentiels une caution autochtone. Ignore-t-il donc l'inestimable dette que, dans sa formulation du concept de la négritude ou dans la formulation de ses notions de culture, de civilisation, voire de métissage, le poète sénégalais doit aux théories les plus racistes, les plus essentialistes et les plus biologisantes de son époque ?
Mais il n'y a pas que l'ethnologie coloniale, cette pseudoscience des conquérants et autres fabricants d'une Afrique imaginaire dont ils inventent volontiers la différence afin de révéler, dans leur splendide isolement, la présence chez autrui de formes exotiques et inaltérées, témoins d'une humanité d'une autre essence. Ainsi de Maurice Delafosse (L'âme nègre, 1921), de Robert Delavignette (Les paysans noirs, 1931) et des autres démiurges de l' "âme africaine" - cette notion idiote à laquelle les élites françaises tiennent tant. Il y a aussi le legs des expositions coloniales, la tradition des zoos humains analysée par Pascal Blanchard et ses collègues, et celle des récits de voyage les uns toujours plus fantastiques que les autres - des explorations de Du Chaillu dans les massifs du Gabon jusqu'au Dakar-Djibouti de Marcel Griaule et Michel Leiris (L'Afrique fantôme), sans compter les "découvreurs" d'art nègre, Pablo Picasso en tête.
C'est tout cela qui nourrit à son tour un habitus raciste, souvent inconscient, qui est ensuite repris par la culture de masse à travers les films, la publicité, les bandes dessinées, la peinture, la photographie, et, conséquence logique, la politique "Y'a bon banania" et "Mon z'ami toi quoi y'en a". Dans ces produits de la culture de masse, on s'efforce de créer des attitudes qui, loin de favoriser un véritable travail de reconnaissance de l'Autre, font plutôt de ce dernier un objet substitutif dont l'attrait réside précisément dans sa capacité à libérer toutes sortes de fantasmes et de pulsions.
Le conseiller spécial du chef d'état français reprend à son compte cette logorrhée aussi bien que l'essentiel des thèses (qu'il prétend par ailleurs réfuter) des pontifes de l'ontologie africaine. Pour faire de Nicolas Sarkozy le président ethnophilosophe qu'il aspire peut-être à devenir, c'est dans cette bibliothèque coloniale et raciste qu'il va puiser ses motifs-clés. Puis il procède comme si l'idée d'une "essence nègre", d'une "âme africaine" dont "l'homme africain" serait la manifestation vivante - comme si cette idée boueuse et somme toute farfelue n'avait pas fait l'objet d'une critique radicale par les meilleurs des philosophes africains, à commencer par Fabien Éboussi Boulaga dont l'ouvrage, La crise du Muntu, est à cet égard un classique.
Dès lors, comment s'étonner qu'au bout du compte, sa définition du continent et de ses gens soit une définition purement négative ? En effet, "l'homme africain" de notre président ethnophilosophe est surtout reconnaissable soit par ce qu'il n'a pas, ce qu'il n'est pas ou ce qu'il n'est jamais parvenu à accomplir (la dialectique du manque et de l'inachèvement), soit par son opposition à "l'homme moderne" (sous-entendu "l'homme blanc") - opposition qui résulterait de son attachement irrationnel au royaume de l'enfance, au monde de la nuit, aux bonheurs simples et à un âge d'or qui n'a jamais existé.
Pour le reste, l'Afrique des nouvelles élites dirigeantes françaises est essentiellement une Afrique rurale, féérique et fantôme, mi-bucolique et mi-cauchemardesque, peuplée de paysans, faite d'une communauté de souffrants qui n'ont rien en commun sauf leur commune position à la lisière de l'histoire, prostrés qu'ils sont dans un hors-monde - celui des sorciers et des griots, des êtres fabuleux qui gardent les fontaines, chantent dans les rivières et se cachent dans les arbres, des morts du village et des ancêtres dont on entend les voix, des masques et des forêts pleines de symboles, des poncifs que sont la prétendue "solidarité africaine", "l'esprit communautaire", "la chaleur" et le respect des aînés et des chefs.





La politique de l'ignorance

Le discours se déroule donc dans une béatifique volonté d'ignorance de son objet, comme si, au cours de la deuxième moitié du XXe siècle, l'on n'avait pas assisté à un développement spectaculaire des connaissances sur les mutations, sur la longue durée, du monde africain.
Je laisse de côté l'inestimable contribution des chercheurs africains eux-mêmes à la connaissance de leurs sociétés et à la critique interne de leurs cultures - critique à laquelle certains d'entre nous ont largement contribué, parfois avec sévérité, mais toujours avec humanité. Je parle des milliards de son propre trésor que le gouvernement français a commis dans cette grande œuvre et ne m'explique guère comment, au terme d'un tel investissement, on peut encore, aujourd'hui, tenir au sujet du continent des propos aussi peu intelligibles.
Que cache cette politique de l'ignorance volontaire et assumée ?
Comment peut-on se présenter à l'université Cheikh Anta Diop de Dakar au début du XXIe siècle et s'adresser à l'élite intellectuelle comme si l'Afrique n'avait pas de tradition critique propre et comme si Senghor et Camara Laye, chantres respectifs de l'émotion nègre et du royaume de l'enfance, n'avaient pas fait l'objet de vigoureuses réfutations internes ?
Quelle crédibilité peut-on accorder à des propos misérabilistes qui font des Africains des êtres fondamentalement traumatisés et incapables d'agir pour leur propre compte, en fonction de leurs intérêts bien compris ? Quelle est cette historicité supposée du continent qui passe totalement sous silence la longue tradition des résistances y compris contre le colonialisme français, tout autant que les luttes en cours pour la démocratie dont aucune ne bénéficie d'un soutien franc de la part d'un pays qui a activement pris, depuis longtemps, le parti des satrapies locales ? Comment peut-on venir nous promettre une Eurafrique chimérique sans dire un mot sur les efforts internes de construction d'un cadre économique unitaire africain ?
Par ailleurs, où sont donc passées les connaissances accumulées au cours des cinquante dernières années par l'Institut de Recherche sur le Développement, les laboratoires du Centre National de la Recherche Scientifique, les nombreux appels d'offres thématiques réunissant chercheurs africains et français qui ont tant servi à renouveler notre connaissance du continent - initiatives souvent généreuses auxquelles il m'est d'ailleurs arrivé, plus d'une fois, d'être associé ?
Comment peut-on faire comme si, en France même, Georges Balandier n'avait pas montré, dès les années cinquante, la profonde modernité des sociétés africaines ; comme si Claude Meillassoux, Jean Copans, Emmanuel Terray, Pierre Bonafé et beaucoup d'autres n'en avaient pas démonté les dynamiques internes de production des inégalités ; comme si Catherine Coquery-Vidrovitch, Jean-Suret Canale, Almeida Topor et plusieurs autres n'avaient pas mis en évidence et la cruauté des compagnies concessionnaires, et les ambigüités des politiques économiques coloniales ; comme si Jean-François Bayart et la revue Politique africaine n'avaient pas tordu le cou à l'illusion selon laquelle le sous-développement de l'Afrique s'explique par son "désengagement du monde" ; comme si Jean-Pierre Chrétien et de nombreux géographes n'avaient pas administré la preuve de l'inventivité des techniques agraires sur la longue durée ; comme si Alain Dubresson, Annick Osmont et d'autres n'avaient pas décrit, patiemment, l'incroyable métissage des villes africaines ; comme si Alain Marie et les autres n'avaient pas montré les ressorts de l'individualisme ; comme si Jean-Pierre Warnier n'avait pas décrit la vitalité des mécanismes d'accumulation dans l'Ouest-Cameroun et ainsi de suite.





Déni de responsabilité

Quant à l'antienne sur la colonisation et le refus de la "repentance", voilà qui sort tout droit des spéculations de Pascal Bruckner, Alain Finkielkraut et autres Daniel Lefeuvre. Mais à qui fera-t-on croire qu'il n'existe pas de responsabilité morale pour des actes perpétrés par un État au long de son histoire ? À qui fera-t-on croire que pour créer un monde humain, il faut évacuer la morale et l'éthique par la fenêtre puisque dans ce monde, il n'existe ni justice des plaintes, ni justice des causes ?
Afin de dédouaner un système inique, la tentation est aujourd'hui de réécrire l'histoire de la France et de son empire en en faisant une histoire de la "pacification", de "la mise en valeur de territoires vacants et sans maîtres", de la "diffusion de l'enseignement", de la "fondation d'une médecine moderne", de la mise en place d'infrastructures routières et ferroviaires. Cet argument repose sur le vieux mensonge selon lequel la colonisation fut une entreprise humanitaire et qu'elle contribua à la modernisation de vieilles sociétés primitives et agonisantes qui, abandonnées à elles-mêmes, auraient peut-être fini par se suicider.
En traitant ainsi de la colonisation, on prétend s'autoriser, comme dans le discours de Dakar, d'une sincérité intime, d'une authenticité de départ afin de mieux trouver des alibis - auxquels on est les seuls à croire - à une entreprise passablement cruelle, abjecte et infâme. L'on prétend que les guerres de conquête, les massacres, les déportations, les razzias, les travaux forcés, la discrimination raciale institutionnelle - tout cela ne fut que "la corruption d'une grande idée" ou, comme l'explique Alexis de Tocqueville, "des nécessités fâcheuses".
Demander que la France reconnaisse, à la manière du même Tocqueville, que le gouvernement colonial fut un "gouvernement dur, violent, arbitraire et grossier", ou encore lui demander de cesser de soutenir des dictatures corrompues en Afrique, ce n'est ni la dénigrer, ni la haïr. C'est lui demander d'assumer ses responsabilités et de pratiquer ce qu'elle dit être sa vocation universelle. Cette demande est absolument nécessaire dans les conditions actuelles. Et en matière de passé colonial français en particulier, la politique de l'irresponsabilité illimitée doit faire l'objet d'une critique ferme, intelligente et soutenue.
D'autre part, il faut être cohérent et cesser de tenir à propos de la colonisation des propos à géométrie variable - certains pour la consommation interne et d'autres pour l'exportation. Qui convaincra-t-on en effet de sa bonne foi si, en sous-main des proclamations de sincérité telles que celles de Dakar, l'on cherche à dédouaner le système colonial en cherchant à nommer, à titre posthume comme maréchal, des figures aussi sinistres que Raoul Salan ou en cherchant à construire un mémorial à des tueurs comme Bastien Thiry, Roger Degueldre, Albert Dovecar et autres Claude Piegts ?





Conclusion

La majorité des Africains ne vit ni en France, ni dans les anciennes colonies françaises. Elle ne cherche pas à émigrer dans l'Hexagone. Dans l'exercice quotidien de leur métier, des millions d'Africains ne dépendent d'aucun réseau français d'assistance. Pour leur survie, ils ne doivent strictement rien à la France et la France ne leur doit strictement rien. Et c'est bien ainsi.
Ceci dit, un profond rapport intellectuel et culturel lie certains d'entre nous à ce vieux pays où, d'ailleurs, nous avons été formés en partie. Une forte minorité de citoyens français d'origine africaine, descendants d'esclaves et d'ex-colonisés y vivent, dont le sort est loin de nous être indifférent, tout comme celui des immigrés illégaux qui, malgré le fait d'avoir enfreint la loi, ont néanmoins droit à un traitement humain.
Depuis Fanon, nous savons que c'est tout le passé du monde que nous avons à reprendre ; que nous ne pouvons pas chanter le passé aux dépens de notre présent et de notre avenir ; que "l'âme nègre" est une invention de blanc ; que le nègre n'est pas, pas plus que le blanc ; et que nous sommes notre propre fondement.
Aujourd'hui, y compris parmi les Africains francophones dont la servilité à l'égard de la France est particulièrement accusée et qui sont séduits par les sirènes du nativisme et de la condition victimaire, beaucoup d'esprits savent pertinemment que le sort du continent, ou encore son avenir, ne dépend pas de la France. Après un demi-siècle de décolonisation formelle, les jeunes générations ont appris que de la France, tout comme des autres puissances mondiales, il ne faut pas attendre grand-chose. Les Africains se sauveront eux-mêmes ou ils périront.
Elles savent aussi que jugées à l'aune de l'émancipation africaine, certaines de ces puissances sont plus nuisibles que d'autres. Et que compte tenu de notre vulnérabilité passée et actuelle, le moins que nous puissions faire est de limiter ce pouvoir de nuisance. Une telle attitude n'a rien à voir avec la haine de qui que ce soit. Au contraire, elle est le préalable à une politique de l'égalité sans laquelle il ne saurait y avoir un monde commun.
Si donc la France veut jouer un rôle positif dans l'avènement de ce monde commun, il faut qu'elle renonce à ses préjugés. Il faut que ses nouvelles élites opèrent le difficile travail intellectuel sans lequel les proclamations politiciennes d'amitié n'auront aucun sens. On ne peut pas, comme à Dakar, parler à l'ami sans s'adresser à lui. Etre capable d'amitié, c'est, comme le soulignait Jacques Derrida, savoir honorer en son ami l'ennemi qu'il peut être.
Aujourd'hui, le prisme culturel et intellectuel à partir duquel les nouvelles élites dirigeantes françaises regardent l'Afrique, la jugent ou lui administrent des leçons n'est pas seulement obsolète. Il ne fait aucune place à des rapports d'amitié qui seraient un signe de liberté parce que coextensifs à des rapports de justice et de respect. Pour l'heure, et s'agissant de l'Afrique, il manque tout simplement à la France le crédit moral qui lui permettrait de parler avec certitude et autorité.
Voilà pourquoi le discours de Nicolas Sarkozy à Dakar ne sera, ni écouté, encore moins pris au sérieux par ceux à qui il était supposé s'adresser.

Achille Mbembe

et la France.
Lucidite africaine en marche

Ecrire une réaction
 
Camerboy ( 08/04/2009 11:34 )
À Karlsruhe / Germany

A t-on besoin des excuses de Segolene Royal?
Elles representent quoi exactement lorsqu'on sait que la difference fondamentale entre les propos polemiques des Hommes de droite et ceux de gauche ne tient a rien quasiment.
Segolene s'est-elle excusee de la gestion des affaires africaines au temps de la gauche? des implications des Hommes et gouvernements de gauche dans divers pillages et genocides en Afrique? Tous les africains qui ont un brin de perspicacite savent que Sarkozy est un rigolo, un pantin qui ne merite aucun respect. Cette intervention de Royal n'est rien d'autre qu'une tentative de reprendre la main en externe puisqu'a l'interieur du PS elle n'a en ce moment qu'une marge de manoeuvre infime
Ecrire une réaction
  Mais que devient donc
Charlie ( 08/04/2009 11:38 )
À Le Bouscat / France

Lucien Pembou, conseiller municipal UMP d'Alfortvielle, comme il aime tant à le rappeler dans ses interventions ?
Aurait-il perdu sa langue, lui aussi ?
Ecrire une réaction
  Petit constat
Charlie ( 08/04/2009 11:46 )
À Le Bouscat / France

Après le vote par la droite d'un projet de loi vantant les aspects positifs de la colonisation, Aimé Césaire avait refusé de rencontrer Nicolas Sarkozy alors candidat à la présidentielle de 2007, malgré tous les efforts de ce dernier pour le rencontrer à Fort-de-France.

Au contraire du poète, qu'ont fait les présidents africains suite à ce discours scandaleux et insultant de Sarkozy ? Rien ou presque.
Tous ont continué à le recevoir comme si de rien n'était, comme s'il n'avait jamais prononcé ces paroles insultantes pour l'Homme Noir. Tous se sont abaissés plus bas que terre face au nabot de l'Elysée.
Il y a encore à peine 2 semaines, ils lui ont déroulé le tapis rouge, et l'ont reçu en grand seigneur et maître de l'Afrique, en lui apportant sur un plateau toutes les richesses minières de cette dernière : Pétrole au Congo-Brazza et Uranium en RDc et au Niger.
Pourquoi donc d'un côté de l'Atlantique, il y a boycotte de Sarkozy alors que de l'autre, il est reçu à bras ouverts ?
Ecrire une réaction
  Desolant
minitcho ( 08/04/2009 12:30 )
À Oldenburg / Germany

Que M.Rama Yade s'offusque des propos de M. Royal ne m'etonne guere. Que ne ferait elle pas pour plaire aux yeux de son parti? Je me demande ce qu'elle fait dans cette famille politique lorsque l'on sait que son âme crie d'autres valeurs qui sont propres à la gauche! Même si les partis de gauche semblent en France pietiner du terrain, il reste que pr une personne intelligente coe elle, Rama devrait avoir le courage d'afficher les valeurs qui sont lui semblent juste au lieu de s'alligner à un parti politique parce qu'une carriere lui a été offerte. C'est triste coe l'homme africain peut être egocentrique!
Ecrire une réaction
  UMP de mierda
Nino ( 08/04/2009 13:17 )
À Nantes / France

Cette vidéo qui a déjà fait le tour du net, est sur pas mal de blogs, est passé à vrai Journal hier soir ne choque ni Rama, ni Bertrand, ni Accoyer, ni Lefebvre...
Je sais, ils peuvent toujours dire qu'ils ne sont pas au courant

http://nino.akopo.com/post/2009/04/08/alain-destrem-d-put-ump-et-saum-tre-raciste-voit-en-s-gol-ne-en-boubou-sa-femme-de-m-nage
Ecrire une réaction
 
Mumia ( 08/04/2009 15:45 )
À / France

Tout ça c'est de la com. Quand la loi sur les "aspects positifs de la colonisation" était d'actualité, on n'a pas entendu Royal protester ni le PS.
Pour ce qui est de l'Afrique Royal/Sarko = même chose
Quant à Rama Yade, elle fait toujours aussi bien le paillasson, pas de surprise
Ecrire une réaction
 
sekou ( 08/04/2009 15:46 )
À Grenoble / France

Moi qui croyait Rama Yade africaine ! Autant pour moi.
Ecrire une réaction
  Merci Ségo
Patrick ( 08/04/2009 16:58 )
À Paris / France

Merci Ségo, paraphrasant Prévert qui diabolisait la guerre en ces termes: " Ô Barbara , quelle connerie la guerre".
Je m'exclame " Ô Ségolène, quelle connerie Sarko".

Luicen Pambou, on vous a pas entendu condamner le discours de Dakar, Calixte Béyale (Kléptomane littéraire) non plus, Gaston Kelman non plus. Les pseudos intellectuels noirs me donnent envie de gerber. Bravo Ségo, je vous aime, merci pour vos excuses.
Ecrire une réaction

Nombre de messages
:  39
Pages:  1  2 > >> 
 
 
Le site des femmes noires et métissées | Grioo Village | English version