Depuis sept ans la politique a pris le dessus sur tout le reste et dans le mauvais sens. Des hommes qui font dans la magouille, le mensonge, la violence verbale ou physique s’accaparent des leviers de notre économie. Pour mieux nous endormir, ils nous parlent toujours de taux de croissance. Ils sont aidés souvent en cela par des institutions telles que la Banque Mondiale et le FMI qui ont fini de montrer leur cynisme aux pays pauvres du continent dont le notre avec des décennies d’ajustements structurels. Mon pays se meurt dans les grilles de la faim. Et pourtant, un fonctionnaire de la Banque Mondiale ose nous dire que notre économie se porte bien. Par pitié, cher monsieur, profitez de notre faiblesse et taisez-vous ! René Dumont aimait jouer aux billes avec les filles à l’école. Il gagnait avec facilité les parties. Pour continuer le jeu, il leur refilait des billes à chaque fois. C’est ainsi qu’il voyait les relations entre les pays développés, les institutions financières internationales et nos pays pauvres.

Mon cher François, quelle impudence ! Des citoyens pensent à des assises nationales pour sauver ce qui peut encore l’être. Et c’est le moment choisi de façon extraordinaire par ce fonctionnaire de la BM pour faire une sortie aux allures de propagandes en faveur de nos gouvernants. Le pays est comme un octogénaire malade. Là où on touche sur son corps, ça fait mal. Le régime doit saluer cette initiative du front siggil Sénégal qui appelle à un dialogue national pour doter le pays « d’un système d’administration fiable » et lui permettre de « retrouver sa démocratie » comme le précise Abdoulaye Wilane. Il n’y a pas de honte à reconnaître ses failles lorsqu’on est mu d’une volonté de tendre vers le meilleur, vers la perfection. Nous ne reviendrons pas ici sur le diagnostic pertinent des difficultés que vit le peuple sénégalais effectué par ce front. Mêmes les enfants de dix ans peuvent les énumérer sans se tromper tellement elles sautent aux yeux. Deux mots suffisent pour les résumer : crise généralisée. Mais nos gouvernants eux ne le savent peut être pas ou ne veulent pas le reconnaître. Ils sont en vacances et laissent derrière eux leurs hauts parleurs qui s’égosillent pour faire échouer l’initiative de l’opposition regrouper autour du front siggil Sénégal. La Cap 21 s’agite comme un cheval fou. Elle a intérêt à le faire. Qui gère ton ventre, gère aussi tes principes. La Cap 21 est obligée de sortir à travers le pays pour montrer à son patron qu’elle sert à quelque chose.

Wilane, ne vous laissez pas distraire par ces protecteurs du régime qui font tout avec un zèle qui irrite même et souvent des membres du parti de leur patron. Aujourd’hui, le dépit habite tous les citoyens responsables de ce pays face au sabotage organisé de nos deniers avec toutes ces créations faites pour mieux affamés les plus démunis. Le sénat n’est plus un sujet de débat, c’est une institution effective et aura son budget qui pouvait servir à soulager d’autres problèmes prioritaires pour le peuple. Cette pléthore d’institutions, de ministères, d’agences doit être au cœur des préoccupations de ces assises nationales. L’Etat a un train de vie qui risque de plonger ce pays dans une situation immaîtrisable si rien n’est fait pour le changer. Mais notre cher François n’en a que faire. Le Sénégal, selon lui, fait partie des dix meilleurs élèves de la classe en Afrique au sud du Sahara.

Ces gouvernants narguent le peuple. Cela n’augure rien de bon. Wade doit saisir cette occasion des assises ainsi proposées pour écouter, pour une fois, les différentes composantes du peuple et essayer de se corriger pour le bien de tous. Ce groupuscule qui se beurre sur le dos des autres ne peut pas durer. Les masses ont faim. Nos villages se vident. Nos villes de l’intérieur de même. Notre capitale s’essouffle. Mon cher François, vos chiffres, vos dires n’y changent rien. Une révision de la vision du président s’impose. Un changement de priorités interpelle le gouvernement. Je souhaite que ces assises en gestation puissent apporter un élan nouveau dans la marche de notre pays. Le peuple doit saisir cette opportunité pour se faire entendre. Saisir cette occasion pour manifester son raz le bol face à ce régime qui l’étrangle dans tout ce qu’il fait, lui faire comprendre qu’il est le seul souverain, la seule constante. Ceux qui continuent à ronger leurs chaussures pour défendre ces gens ne vivent pas le malaise de notre société. Ces profiteurs professionnels doivent de temps en temps se départir de leur égoïsme grave pour écouter les pleurs des citoyens, regarder tous ces regards désespérés, toutes ces mains réduites à la mendicité. Nous ne devons pas tomber dans le découragement. Cela arrange ces gens là. Continuons à garder espoir et à chercher des voies et moyens pour sortir notre pays de ce gouffre dans lequel les patrons de ces souteneurs de la Cap 21 l’ont plongé. Ne disons pas que ces assises ne serviront à rien. Accordons à cette opposition une chance de nous prouver qu’elle a bien maîtrisé les leçons du passé. Si c’est sincère et partagé par tous, cela aura un certain effet positif dans la marche des choses dans ce pays. Des dictatures plus coriaces ont été obligées de se plier à la volonté de leur peuple. Alors, ayons confiance !

Je termine par ce cri du cœur d’un personnage de mon second roman intitulé Ces fossoyeurs de la République (Editions Mélonic – Québec). « Avons-nous élu un président ou un pigeon voyageur ? Avons-nous élu un président ou un simple vadrouilleur ? Son avion est dans les airs, mon peuple est dans la galère. Ici, tout est clair, le système nous déchire. Aux élus les merveilles, aux électeurs les mirages. Jusqu’à quand ce sommeil de mon peuple pris en otage par des politiciens désaxés, obéissant aux humeurs d’un despote ? Ce pays est très mal gouverné. Cela m’attriste et m’irrite. Ils divisent nos religions, avilissent nos traditions, dévaluent nos institutions, dilapident nos provisions et brandissent le mot « démocratie » pour masquer leur démagogie… »

Tafsir Ndické Dièye Ecrivain sénégalais ndickedieye@yahoo.fr