Aux lendemains des indépendances, la France dans ses anciennes colonies sous la houlette du président-Général de Gaulle a mis en place des gouverneurs locaux censés s'assurer que les ressources naturelles et géopolitiques de ces pays bénéficieraient toujours à l'ancienne puissance coloniale.

Lorsque ces états eurent la possibilité d'élire démocratiquement leur représentant comme au Togo ou en Centrafrique, ceux-ci furent renversés ou/et assassinés avec l'aide de l'armée française ( Sylvanus Olympio, Abel Goumba à la suite de Boganda, Mehdi Ben Barka, Outel Bono, Ruben Um Nyombé, Félix Moumié); des pions aux mains de Foccart-De Gaulle (Eyadéma, Bongo, Déby, Bokassa...) furent portés à la tête de ces nouveaux états « indépendants » dont bon nombre sont issus des services secrets français ou de l'armée française.

Ces kleptocrates dictateurs mandatés par la France ont obtenu avec le temps (pour ceux qui ont réussi à se maintenir) une certaine autorité et autonomie au regard de la France et sont régulièrement réélus grâce à des élections présidentielles truquées sous le guidage de leurs parrains français.

C'est ce que nous appellerons des gouverneurs à peau noire pour reprendre l'expression de François-Xavier Verchave .



UNE NEO-COLONIE NOMMEE GABON. GOUVERNEUR : OMAR BONGO

« Omar Bongo.est pour moi un ami de longue date et qui a témoigné de sa fidélité à nos idéaux communs et à notre engagement commun pour une certaine idée franco-africaine.» Jacques Chirac, allocution à Libreville le 22 juillet 1995.

« Les flots d'argent qui se déversaient dans les sables d'une Afrique nominalement indépendante, loin d'assécher l'ancienne métropole, l'irriguaient, voire arrosaient du beau monde.Une bonne partie des quartiers chics de Paris vivaient alors sur le miracle des liquidités repartant parfois souterrainement, aux sources.Pour les happy fews, le taux de retour de l'aide au développement tartinée sur la rente, déjà bien onctueuse, du pétrole et des produits tropicaux, était mirifique. A la limite de l'écoeurement.» (Antoine Glaser et Stephen Smith, L'Afrique sans Africains, Ed. Stock, 1994).

Omar Bongo Odimba qui dirige le Gabon sans partage depuis décembre 1967, ne s'est pas fait prier pour changer la constitution en 2003. Ce qui lui confère désormais la possibilité de diriger ce pays pendant de longues années encore, au grand dam de l'écrasante majorité des Gabonais plutôt "fatigués de la même personne depuis quarante ans".

Omar Bongo en 7 dates, 30 décembre 1935 : Naissance officielle à Lewaï, Haut-Ogooué ; 1952 : Certificat d'études à Brazza ; 1953 : Jeunesses SFIO ; 1958 : Service de renseignement de l'armée ; 1959 : Le Gabon demande à devenir un département français ; 1966 : Vice-président du Gabon aux côtés de Léon M'ba ; 1967 : Il devient président de la République du Gabon.

Pour un peu plus d'un million d'habitants, le Gabon dispose de richesses exceptionnelles : pétrole, uranium, bois, manganèse, lithium... Dès la pseudo-indépendance du 17 août 1960, la France signe des accords de coopération qui laissent à Paris le droit de s'accaparer les richesses minières du Gabon. Léon M'Ba président vassal de la françafrique n'hésite pas à promouvoir un article faisant du Gabon une véritable chasse gardée de la France, un réservoir français de matières premières .

Article 5 : « La République française est tenue informée des programmes et projets concernant l'exploitation hors du territoire de la République Gabonaise des matières et produits stratégiques. « En ce qui concerne les matières premières et produits, la République gabonaise réserve par priorité leur vente aux Etats de la Communauté après satisfaction des besoins de sa consommation intérieure et s'approvisionne par priorité auprès de ces Etats ». Affaires africaines, p.43,

En février 1964 Léon M'Ba est démis suite à un coup d'état. Mais le 19 février 1964, les parachutistes français rétablissent par un putsch Léon M'Ba, le président déchu, dans ses fonctions. Bongo est nommé aux affaires étrangères, puis au cabinet du président Léon Mba. Très vite Bongo est dans les petits papiers du seigneur des néocolonies françaises : Jacques Foccart, tandis que le président-général Charles de Gaulle le décrit comme un « type valable ».

A tel point que Jacques Foccart, conseiller de Charles de Gaulle, songe à lui pour succéder à Mba, miné par un cancer. Voilà comment, en1967, après le décès de Léon M'Ba, et suite à un bricolage constitutionnel, le «type valable» de 32 ans devient le plus jeune chef d'Etat du monde. C'est d'ailleurs à Paris, dans l'enceinte de l'ambassade du Gabon, que l'élu des Français prête serment. Albert Bongo est une pure création néocoloniale mis en place à la tête du Gabon par Jacques Foccart sous la bénédiction du général de Gaulle pour assurer le relai militaire français dans la guerre du Biafra qui fera 1 à 2 millions de morts.

Dès lors la France peut accélérer ses livraisons d'armes au Biafra via Libreville avec le soutien d'Houphouët Boigny. Durant cette période comme le souligne Pierre Péan dans son livre, Affaires Africaines, Albert-Bernard Bongo n'est qu'une marionnette dépendant des services de Foccart.

Si Albert Bongo vient à faire une déclaration erronée concernant le Nigéria et la sécession Biafraise, celle-ci est aussitôt rectifiée par les services du SDECE ou/et de Jacques Foccart (Affaires Africaines 7, p.81-82).

Par la suite Bongo ne cessera d'être réélu par la fraude électorale cautionnée par ses mentors de la Françafrique et fera assassiner ses opposants politiques comme Germain M'Ba assassiné par Bob Denard le 18 septembre 1971, selon Pierre Péan dans Affaires Africaines (7p.13).

Le Gabon sera considéré par Foccart et ses successeurs comme une plate-forme pétrolière, militaire et financière.

« Les troupes françaises au Gabon sont constituées des 600 hommes du 6ème BIMa (Bataillon d'Infanterie de Marine, ex-coloniale) et d'une compagnie tournante de l'armée de l'Air. Créée par Bob Maloubier la garde présidentielle est encadrée par des militaires français plu sou moins détachés, tels les généraux Roland Meudec puis loulou Martin. Equipée de blindés légers, renforcée par des éléments marocains, c'est la meilleure unité combattante du pays. Quant à la DGSE, elle dispose bien évidemment d'un chaperon auprès du président local. » (Noir Silence, 8 p.197).

« Le Gabon a été une excroissance de la République dirigée conjointement par Jacques Foccart, le parti gaulliste et Elf. En 1993,.le président Bongo s'est maintenu au pouvoir grâce à un coup d'état électoral, opéré avec la bienveillante neutralité du gouvernement français ». (Pierre Péan, Audition par la mission d'Information sur le rôle des compagnies pétrolières. Pétrole et éthique, rapport cité, t.I, p.158-159. cité par F.X Verschave dans Noir Silence, p.198).

Selon l'ancien directeur de la DGSE Pierre Marion, Omar Bongo après plus de trente années de règne va devenir le plus ancien homme politique françafricain et influencer en retour la politique française par de nombreux pots de vins et moyens de pression : « Les subsides de Bongo servent à tout le monde lors des élections françaises et créent un sorte de colonialisme à l'envers ».

Ainsi les partis politiques et les compagnies françaises telles que ELF s'enrichissaient sur le dos du peuple gabonais dont les conditions de vie étaient de plus en plus dramatique.

Selon le PNUD: « On ne compte (au Gabon) que 19 médecins pour 100.000 habitants, l'espérance de vie n'est que de 52 ans, seulement 38% des enfants sont vaccinés contre la rougeolle-contre une moyenne de 79% dans les pays en développement. Un enfant sur sept meurt avant l'âge de 5 ans.le rang du Gabon à l'indicateur du développement humain (IDH) le fait reculer de 71 places par rapport à un classement seulement basé sur la production par habitant» (PNUD, 1999).

Les valises d'argent frais ont certes atterri au RPR et à l'UDF, mais aussi au PS. Et les amitiés maçonniques ont fait le reste.

Pour apaiser le courroux du bienfaiteur, outré par un brûlot de Pierre Péan , la France rose lui dépêche tour à tour le défunt François de Grossouvre, Roland Dumas - «mon ami intime» - puis le Premier ministre Pierre Mauroy.

On promet même au roi des Batéké, reçu avec faste l'année suivante, une centrale nucléaire.

Il compte aujourd'hui parmi ses plus ardents avocats l'ex-ministre Catherine Tasca ou Michel Rocard. Bongo puise dans une fortune colossale, bâtie avec le concours d'Elf, de quoi huiler les rouages de son pouvoir . A tous les coups il gagne. Réélu président, Omar Bongo peut compter sur la bienveillance d'une France à qui il doit tout et qui lui doit tant

On ne s'étonnera pas de voir Bongo Odimba, le facétieux, être réélu grâce au trucage des élections made in France : Pour la Saint-Nicholas, on ressort la machine électorale made in France. La machine vote massivement Bongo. Le miracle informatique, rodé en maints pays d'Afrique, multiplie à volonté les électeurs et les votants, transforme une minorité en majorité, une défaite ou un ballottage en victoire. Avec 4 chiffres significatifs : 66,55%. Bingo pour Bongo ! Pourquoi lésiner ?