Le hasard des dates permet de rapprocher deux discours, tous deux prononcés à l’ONU celui de Nicolas Sarkozy, le 25 septembre 2007 [1], et celui de Thomas Sankara, le 4 octobre 1984 [2]. Ce rapprochement nous est suggéré par l’actualité : Nicolas Sarkozy vient de prendre la présidence du Conseil de sécurité et nous commémorons ces jours-ci le vingtième anniversaire de l’assassinat, le 15 octobre 1987, de Thomas Sankara. À bien des égards le discours de 1984 est plus actuel que celui de 2007. Qu’on en juge : sur l’ONU, aujourd’hui, on en est encore aux vœux pieux : « Sa réforme pour l’adapter aux réalités du monde d’aujourd’hui est une priorité pour la France », alors qu’il y a vingt-trois ans le problème était posé en termes clairs : « Nous proposons également que les structures des Nations unies soient repensées et que soit mis fin à ce scandale que constitue le droit de veto. »
Sur les dangers encourus par le monde : d’une part, en 2007, l’enfoncement des portes ouvertes : « C’est à l’échelle planétaire qu’il faut poser et résoudre les problèmes du monde. Personne sur la Terre ne peut se mettre tout seul à l’abri des conséquences du réchauffement climatique, du choc des civilisations, des grandes épidémies. » ; d’autre part, en 1984, une proposition concrète : « Que tous les budgets de recherches spatiales soient amputés de 1/10 000e et consacrés à des recherches dans le domaine de la santé et visant à la reconstitution de l’environnement humain perturbé par tous ces feux d’artifices nuisibles à l’écosystème. »
Sur les malheurs du monde : d’un côté la crainte des nantis : « Les pauvres et les exploités se révolteront un jour contre l’injustice qui leur est faite », de l’autre la réalité de la tragédie : « Souhaitons seulement voir le Conseil admettre et appliquer le principe de la lutte contre l’extermination de 0 millions d’êtres humains chaque année, par l’arme de la faim qui, de nos jours, fait plus de ravages que l’arme nucléaire. »
Dans l’un et l’autre discours, à vingt-trois ans d’intervalle, il y a l’appel à un « nouvel ordre mondial ». Celui de Nicolas Sarkozy est aussi vague que bien intentionné : « Je lance un appel solennel aux Nations unies pour qu’elles prennent en main la question d’une plus juste répartition des profits, de la rente des matières premières, des rentes technologiques ». Thomas Sankara est plus précis : « Il n’y a plus de duperie possible. Le Nouvel Ordre économique mondial pour lequel nous luttons et continuerons à lutter, ne peut se réaliser que si, prenant conscience de notre importance dans le monde, nous obtenons un droit de regard et de décision sur les mécanismes qui régissent le commerce, l’économie et la monnaie à l’échelle planétaire. »
L’un et l’autre trouvent des accents pathétiques pour décrire le désespoir de la misère et dénoncer la dictature de l’argent. En 2007, l’éternel constat est évident. « Je veux dire avec gravité qu’il y a trop d’injustices dans le monde pour que le monde puisse espérer vivre en paix. » Mais en 1984, cet humanisme de façade avait déjà été décrit : « Du reste, tous les nouveaux “maîtres à penser” sortant de leur sommeil, réveillés par la montée vertigineuse de milliards d’hommes en haillons, effrayés par la menace que fait peser sur leur digestion cette multitude traquée par la faim, commencent à remodeler leurs discours et, dans une quête anxieuse, recherchent une fois de plus en nos lieux et places, des concepts-miracles, de nouvelles formes de développement pour nos pays. »
L’implacable lucidité de Thomas Sankara réduit d’avance les trémolos sarkozistes à ce qu’ils sont : un bon coup de « com », un coup d’épée dans l’eau.
Odile Tobner _________________ " Vitam impendere vero "
... si possible!
Comment dire cette chose
Si mourir devient
Mourir seulement
Vivre ne sera
Plus que vivre.
Une mort s’est mêlée
De crier
Voici l’entêtement
Naïf d’un sang surcousu
Comment accuser
La loi pour meurtre
Cette mort qui déprotège
Les vivants
Voici Napoléon bis
N’ayez pas peur
Nous aurons un jour
Dieu pour prothèse
Sankara est mort
Qui peut tuer la fulgurance
Mes pauvres bêtes
Vous vous êtes trompés
D’assassinat
La mort vous en voudra
De la prendre
Pour une conne.
Mongo Beti – La première concerne la sécurité du Président et l’avenir du régime ipso facto. Devant la campagne insidieuse qui se développe dans la presse en France, beaucoup d’Africains pensent que c’est le signe avant coureur d’une offensive tous azimuts et se souviennent avec angoisse de Lumumba de N’Krumah. Ils craignent une stratégie de l’élimination physique.
a) Êtes vous conscient de ce danger et surtout de cette angoisse des Africains ?
b) Êtes-vous conscient de l’existence de cette stratégie et surtout de cette campagne de presse ?
Avez-vous lu l’article paru récemment dans une feuille infâme appelée Black Magazine ou
quelque chose comme ça. Souhaitez-vous en parler longuement ? On m’a parlé d’un certain
Paul ou Pierre Michaud : le connaissez-vous ?
Thomas Sankara – Vous me permettez là de répéter ce que vous savez peut-être déjà. En effet, nous et notre Révolution ne plaisons guère à bien des gens. J’allais dire que c’est chose normale, compte tenu des intérêts de classe que nous sommes amenés à défendre. Il est donc logique et normal que nous ayons des ennemis, des ennemis de classe, puisque nous avons la ferme résolution de défendre nos intérêts de classe, au détriment des leurs, et cela en toute légitimité. De ce point de vue, il n’est pas étonnant que partout nos ennemis s’organisent pour affronter la Révolution, pour salir et dénigrer par voie de presse toutes nos actions de façon insidieuse et malhonnête. C’est le cas des journaux entièrement financés, des émissions radio commandées et de toutes sortes d’actions bassement orchestrées pour donner à notre Révolution une image totalement dénaturée. Cette stratégie est bien connue. Elle a servi à plusieurs occasions à l’impérialisme pour déstabiliser bien des régimes révolutionnaires convaincus, comme N’Krumah, Lumumba, que vous me citez, et contre Allende au Chili etc. Nous en sommes conscients. C’est un réel danger dans la mesure où ce sont des grands moyens qui sont déployés, jour et nuit, pour intoxiquer l’opinion internationale sur les luttes émancipatrices des peuples.
N’Krumah, Lumumba et tant d’autres ont été des victimes de l’impérialisme, de cette stratégie néocolonialiste. Les dignes fils de l’Afrique les ont reconnus du reste comme de véritables patriotes,des hommes politiques qui avaient un juste et grand amour pour l’Afrique et les Africains. Aujourd’hui nous ne pouvons que les admirer et c’est un honneur pour nous de montrer qu’ils étaient des précurseurs, des guides, des pionniers, dans la voie de la dignité de l’Afrique. Il y a partout aujourd’hui, aux quatre coins du continent, des N’Krumah, des Lumumba, des Mondlane, etc. Que Sankara soit éliminé aujourd’hui physiquement, il y aura des milliers de Sankara qui relèveront le défi face à l’impérialisme. Au niveau de notre Faso, la détermination de notre peuple, de notre jeunesse, enlève toute inquiétude quant à la poursuite de la lutte pour la dignité du Burkina et de notre continent. Toutefois, pour mille et une raison, notre peuple et la jeunesse révolutionnaire africaine restent attachées à Sankara et ne souhaitent jamais que le moindre malheur lui arrive. Concernant le journal Black Magazine et surtout son manipulateur Paul Michaud, maître chanteur bien connu au Burkina, nous pensons que les insanités qu’ils déversent n’auront aucune emprise sur des gens normaux. Michaud s’est présenté à nous dans les premiers jours de la Révolution pour réclamer des millions, à lui promis sous le CSP 2, pour faire l’image de marque du pays. Rabroué, il est revenu de nouveau, en disant que la couleur du régime importait peu pour lui et qu’il était à la recherche de l’argent. Rejeté une deuxième fois, cet escroc affairiste annonça qu’il travaillerait de façon offensive avec l’opposition en France. Son dernier contact avec la Révolution fut1, par le truchement de quelqu’un qui, moyennant 30 000 FF, s’emploierait à décourager Michaud de mettre son projet à exécution. Éconduit à son tour, l’entremetteur n’a donc pas pu arrêter le scénario du maître chanteur. Mais, voyez-vous, nous avons trop à faire pour nous occuper de tels individus exécrables.
MB – Concernant la corruption Je m’interroge sur la nature de la corruption dans les sociétés africaines.
a) Est-elle un héritage maudit de la colonisation ?
b) Est-elle une de nos traditions ? (Après tout, les roitelets nègres qui livraient leurs
frères aux marchands d’esclaves contre une poignée de verroterie, c’est bien connu).
La question se pose parce que, me semble-t-il,selon la manière dont on y répond, on ne combat pas la corruption de la même façon.
Qu’en pensez-vous ?
TS – Sans être un sociologue averti, ni un historien des sociétés précapitalistes africaines, je ne pourrai pas affirmer que la corruption est propre aux sociétés africaines. C’est un phénomène lié avant tout au système capitaliste, système socio-économique qui ne peut véritablement évoluer sans développer la corruption. Elle est donc incontestablement un héritage maudit de la colonisation. Ainsi, logiquement, pour combattre valablement la colonisation, le colonialisme et même le néocolonialisme, il faut aussi s’attaquer à la corruption. Par rapport aux rois féodaux que la colonisation a utilisés, les poignées de verroterie, vues d’Afrique, ne ressemblaient pas à de la corruption, dans la mesure où le mode d’échange était bâti sur le troc. Pour les roitelets, leurs “frères” étaient vendus par eux contre une valeur quelconque que nous considérons avec le recul comme de la pacotille. Chaque chose n’a de valeur qu’à partir du service pratique qu’il rend et du milieu dans lequel son usage répond à quelque chose. Un roi qui ne s’était jamais vu dans un miroir n’hésiterait pas à l’obtenir contre un homme, c’est-à-dire contre un de ses sujets. De ce fait il donne une valeur correspondante en échange de cette chose. Il ne peut être considéré comme corrompu, même si le colonisateur ou l’explorateur, compte tenu du système économique auquel sa société était parvenue, vient à lui sur des bases de corruption.
MB – Ceci ne pose-t-il pas le problème général de la tradition ? N’y a-t-il pas incompatibilité entre la révolution, un processus dont un des enjeux est la modernisation de nos sociétés, et la tradition dont l’effet est très souvent un frein au progrès ? Plus précisément, si on veut libérer la femme, ne faut-il pas lutter contre l’excision, la polygamie ?
TS – D’une manière générale les traditions africaines relèvent d’une idéologie rétrograde. Cela n’empêche que, dans toute chose ou tout phénomène, il y a un aspect progressif et un aspect régressif. Dans nos traditions, c’est l’aspect progressif qu’il faut apprendre à cerner, pour permettre à la société d’évoluer beaucoup plus rapidement vers le progrès, vers le modernisme dont vous parlez. On ne fait pas de révolution pour régresser dans le temps. C’est pour aller toujours de l’avant. La Révolution ne peut qu’étouffer tous les aspects négatifs de nos traditions. C’est cela notre combat contre toutes les forces rétrogrades, toutes les formes d’obscurantisme, combat légitime et indispensable pour libérer la
société de toutes les emprises décadentes et de tous les préjugés, dont celui qui consiste à marginaliser la femme ou à la chosifier. Je suis d’avis que, pour libérer la femme, il faut lutter contre l’excision et la polygamie. Il faut surtout savoir engager la lutte. Interdire par des lois ou toute autre chose ne peut être la meilleure solution. Nous luttons pour l’égalité de l’homme et de la femme, pas d’une égalité mécanique, mathématique, mais en rendant la femme l’égale de l’homme devant la loi et surtout devant le travail salarié. L’émancipation de la femme passe par son instruction et l’obtention d’un pouvoir économique. Ainsi le travail au même titre que l’homme, à tous les niveaux, la même responsabilisation et les mêmes droits et devoirs sont des armes contre l’excision et la polygamie, armes que la femme n’hésitera pas à utiliser pour se libérer elle-même et non par quelqu’un d’autre.
MB – Il y avait du bon dans les traditions africaines, c’est vrai ! Par exemple le ou la palabre traduit certainement l’exigence constante du consensus. Néanmoins n’est-il pas vrai que, dans leur ensemble, les traditions africaines, ou ce qui reste, sont foncièrement rétrogrades?
La logique du processus révolutionnaire n’est-elle pas de déboucher sur une révolution culturelle ?
TS – Dans la mesure où la révolution sociale est la transformation radicale de la société à tous les niveaux, tout processus révolutionnaire ne peut que déboucher sur une révolution culturelle. Car la culture fait corps avec la société en ce sens qu’il n’y a pas de société humaine sans culture et de culture sans correspondance avec une société.
MB – Un exemple : la vénération de l’âge. Cette valeur n’est-elle pas de celles qui se prêtent le plus aisément à la manipulation du néocolonialisme ? Ainsi la presse française oppose régulièrement l’âge d’Houphouët-Boigny aux jeunes générations ivoiriennes qui veulent demander des comptes à leur président.
TS – La vénération de l’âge est un aspect de la culture africaine. Personne ne peut le nier dans la mesure où, dans nos sociétés, la gérontocratie est apparue comme le système de pouvoir qui a toujours été adopté et appliqué. Il est normal que le néocolonialisme utilise nos propres systèmes, notre vision du monde, pour manipuler à son profit. L’image du vieux, symbole de la sagesse, de l’expérience, du mérite est encore bien acceptée en Afrique face à l’image du jeune, symbole de l’inexpérience, de l’incertitude, de la rupture avec la normalité. [Ce] sont des aspects de nos traditions que connaît bien le néocolonialisme, qui entend les exploiter pour manipuler l’opinion africaine. C’est dans ce sens que la presse française et occidentale coupe court aux débats entre générations africaines, pour masquer les contradictions aiguës de classes au sein de certaines sociétés africaines, croyant briser l’élan des jeunes, qui veulent en finir avec un passé moisissant, qui paralyse de jour en jour leur pays.
MB – Concernant la coopération. Peut-on justifier le maintien de relations privilégiées avec la
puissance qui nous a colonisés ? Sinon, pourquoi continuez-vous à participer aux conférences au sommet des chefs d’État francophones, qui sont si mal perçus par la jeunesse scolarisée africaine ?
TS – Comme, du point de vue dialectique, toute chose ou toute action s’explique, les relations avec tel ou tel pays, fût-il une puissance colonisatrice, ont une explication, ne serait-ce que, s’agissant de la puissance colonisatrice, de par l’histoire. Tout se situe là, au-delà des divergences idéologiques qui peuvent surgir. Et il y a les relations d’État à État. Lutter pour son indépendance face au colonialisme ne veut pas dire que l’on se prépare, une fois celle-ci obtenue, à quitter la terre pour aller s’isoler quelque part dans le cosmos.
Quant aux conférences au sommet des chefs d’État francophones, ils servent, chaque fois que nous avons l’occasion d’y prendre part, de tribune, de tremplin pour notre révolution, pour la faire connaître, de dire ouvertement ce qu’elle pense de ces conférences ou instances politiques. Y participer pour dénoncer ce qui ne va pas dans l’intérêt des peuples africains est une stratégie beaucoup plus payante que les sarcasmes envoyés de l’extérieur. C’est de la sorte que nous percevons les choses dans le cadre de notre processus révolutionnaire.
MB – Sur le plan de la domination de nos peuples, la gauche française au pouvoir a-t-elle eu une pratique différente de celle de la droite ? Pouvez-vous confier à la revue Peuples Noirs Peuples Africains au moins une part de votre expérience personnelle ? Par exemple comment Guy Penne a-t-il été l’instigateur d’un coup de force contre vous ?
TS – Par rapport aux attentes des peuples africains, de façon générale la gauche française a déçu bien des gens, surtout au niveau de la jeunesse africaine. Depuis les indépendances, de 1960 à 1981, nous n’avions connu que la droite. Avec mai 1981, une nouvelle expérience pleine de promesses pour les Africains se présentait. La simple comparaison était déjà quelque chose. Très tôt, tout le monde s’est rendu compte que fondamentalement les choses n’avaient pas bougé. Bref ce fut blanc bonnet et bonnet blanc. Mon expérience personnelle, qui est aussi l’expérience des peuples africains, est que la démarche pour défendre les intérêts français dans les ex-colonies (Tchad, Centrafrique) et colonies
(Kanaki, Comores…) rappelle étrangement les principes d’action foccartiens.
Le coup de Guy Penne a été suffisamment dénoncé et porté à la connaissance de l’opinion
internationale pour que je me permette de revenir là-dessus.
MB – Concernant la zone franc : La justification la plus courante du maintien de nos pays dans la zone franc, c’est la convertibilité du franc CFA, mais est-ce un avantage pour les pauvres, c’est-à-dire les 9/10èmes de notre société ? En quoi le paysan africain, dans son village, a-t-il besoin d’une monnaie convertible ?
Bref, le franc CFA n’est-il pas une arme de domination des Africains ?
Le Burkina révolutionnaire envisage-t-il de continuer à traîner ce boulet ?
TS – Que la monnaie soit convertible ou inconvertible n’a jamais été la préoccupation du paysan africain. Il a été plongé à son corps défendant dans un système économique contre lequel il est impuissant. Il faut, je pense, l’organiser pour qu’il se protège contre les méfaits d’un tel système. C’est là que se situe le problème, dans la mesure où la monnaie n’est pas isolée de tout système économique. Dans ce cadre je dirai que le franc CFA, lié au système monétaire français est une arme de la domination française. L’économie française et, partant, la bourgeoisie capitaliste marchande française bâtit sa fortune sur le dos de nos peuples par le biais de cette liaison, de ce monopole monétaire. C’est pourquoi le Burkina se bat pour mettre fin à cette situation à travers la lutte de notre peuple pour l’édification d’une économie autosuffisante, indépendante. Cela durera combien de temps encore, je ne puis le dire.
MB – Concernant l’assistance technique : personnellement j’ai toujours considéré que c’était d’abord une question de délai. Dans quel délai pensez-vous que le Burkina Faso se passera de toute assistance technique non africaine ?
Avez-vous une stratégie de recrutement d’assistants techniques africains ? Laquelle ?
TS – C’est bien difficile à déterminer car c’est un domaine assez complexe, où d’énormes moyens financiers et techniques sont nécessaires. Mais le délai le plus court possible serait le mieux. Il n’y a pas de meilleure stratégie que le renforcement de la coopération Sud-Sud en matière d’assistance technique. Tous ceux qui voudraient discuter avec nous de leur assistance au Burkina seront les bienvenus. La terre du Burkina est une terre libre de fraternité et d’amitié entre les peuples. Les Burkinabés sont donc prêts à accueillir qui que ce soit désireux de venir travailler avec eux pour bâtir la société ouvelle. C’est notre stratégie pour le moment.
MB – Concernant la Ligue des États Noirs, Dont M. Mobutu Sese Seko s’est fait l’apôtre : pensezvous qu’il faille prendre une telle initiative au sérieux ? Surtout venant de gens qui n’ont cessé de saboter l’OUA ?
TS – Le camarade Président Sankara a donné son point de vue sur cette affaire de Ligue des États Noirs. Une ligue des États noirs pour quel but, pour défendre quels intérêts ? Ou c’est une mode, parce qu’il existe ailleurs quelque chose de semblable. Je ne vois pas la nécessité d’une telle chose, ‘embrouiller une fois de plus les consciences des Africains. L’OUA est encore une réalité. Pourquoi ne pas chercher à renforcer et à revigorer une telle organisation panafricaine, beaucoup plus significative, que de se lancer, par pur snobisme ou sur commande, dans la création de structures politiques, qui ne seront en fait que des caisses de résonance de l’impérialisme international. J’avoue que je ne vois pas certains chefs d’État visiblement frappés d’illogisme.
MB – Concernant le panafricanisme : On n’en parle plus aujourd’hui, ou si peu. La jeunesse
africaine, pour laquelle le panafricanisme fut une mystique, un élan d’espérance, un ressort
extraordinaire, est donc aujourd’hui profondément frustrée. Pensez-vous reprendre le flambeau de N’Krumah ? Comment ? Par les rapprochements régionaux peut-être ?
TS – En effet le panafricanisme, dans sa conception pure, a été un grand espoir pour, non seulement les Africains, mais pour les Noirs de la diaspora. Ce phénomène politique a fait couler et fait couler encore, dans bien des milieux, beaucoup d’encre. Je ne m’étendrai pas dessus. Mais je pense que c’est un problème, une question très sérieuse pour les Africains, s’ils veulent véritablement s’affranchir de toute domination étrangère. Tout le monde constate aujourd’hui avec amertume, face aux méfaits et autres exactions de l’impérialisme en Afrique, que N’krumah avait très bien raison d’aller de tous ses voeux à l’unité du continent. Néanmoins l’idée demeure et il nous appartient, il appartient aux patriotes
africains, de lutter partout et toujours pour sa concrétisation. Il appartient à tous les peuples
panafricanistes de reprendre le flambeau de N’Krumah pour donner espoir à l’Afrique.
MB – Concernant la langue française et la francophonie. Personnellement je considère que ce sont là deux problèmes différents : la position de la langue française est un fait qui trouve son origine dans l’histoire. La francophonie est une stratégie de contrôle de notre créativité et même de notre devenir. Acceptezvous cette distinction ?
a) Envisagez-vous une substitution des langues nationales du Burkina au français, dans son rôle actuel de langue officielle ? Ou bien pensez-vous que le français doit demeurer (longtemps encore ? définitivement ?) dans ce rôle ?
b) La francophonie est théoriquement la mise en commun d’institutions culturelles (cinéma,
édition, télévision, diffusion presse, etc.) qui sont contrôlées par la France mais auxquelles
nous n’accédons que parcimonieusement. Ne pensez-vous pas qu’il est urgent que nous
créions nos propres institutions, notre propre appareil culturel ?
Exemple : j’ai appris que le Burkina avait créé un prix du roman. Malheureusement le montant de ce prix n’est que de 150 000 francs CFA.
Ne pensez-vous pas que c’est trop peu pour motiver les auteurs de talent ?
Si je pouvais me permettre un conseil, je dirais qu’un montant de deux millions de francs CFA neserait pas excessif pour récompenser le gagnant (l’expérience a montré que la solution d’un seulgagnant est de loin la meilleure).
TS – Je suis parfaitement d’accord avec vous quant à cette distinction. Le fait historique est là et la stratégie néocolonialiste aussi est là. La francophonie n’est rien d’autre. Malheureusement ce sont plutôt des “Africains” qui la défendent plus que les Français eux-mêmes. C’est le paradoxe, mais un paradoxe qui s’explique parfaitement par l’acculturation et l’aliénation culturelle parfaite de ces Africains-là.
Au niveau du Burkina, nous sommes en train de procéder à une réforme totale de l’éducation, où le problème des langues nationales et de la langue française est au centre des débats. La question n’est pas encore tranchée, mais les choses semblent évoluer vers l’utilisation de la langue française comme langue d’unification de nos multiples nationalités ; et cela du point de vue de l’efficacité et de la meilleure solution du problème qui se pose à nous. Cela ne voudra pas dire que nos langues nationales seront rejetées, loin de là.
La langue en général, étant au-dessus des classes, il nous appartiendra, en tant que révolutionnaires, de savoir mettre la langue française au service de la défense de nos intérêts de classe. C’est dans ce cadre que nous sommes appelés à créer nos propres institutions, pour un appareil culturel au service de notre peuple, sinon notre lutte ne pourra aboutir, compte tenu de l’influence nocive qu’entraîne l’invasion culturelle dont nous sommes l’objet du côté français essentiellement. La Révolution, dans notre contexte actuel, est avant tout la libération mentale. Et nous devons le faire au plus tôt pour toute victoire.
Á propos du roman, je pense que vous voulez parler du concours Sidwaya du meilleur roman. C’est vrai le montant du prix est dérisoire mais il faut prendre en compte ici l’aspect moral et surtout la volonté politique de rompre avec les habitudes, pour ne pas dire la servitude. Ce sont toujours les pays impérialistes qui organisent ce genre de concours, pour inviter ensuite les Africains à y participer pour les enfermer dans leur prisme culturel. Ce concours est une rupture, pour montrer que les Africains sont aussi capables d’organiser de telles choses pour exposer leur vision du monde au reste du monde. Je pense que le prix littéraire de l’Afrique Noire attribué en France ne dépasse pas 100 000 francs
CFA. Mais beaucoup d’Africains se battent pour y prendre part. Ils pourront le faire pour le prix du meilleur roman de Sidwaya, qui est à ses débuts. Quand nos moyens nous le permettront, le prix pourra évoluer vers les deux millions dont vous parlez.
MB – Concernant l’urbanisation sauvage : J’ai observé deux villes africaines, Alger et Brazzaville. Surtout Alger. Á peine loge-t-on les habitants d’un bidonville dans un HLM qu’ils sont aussitôt remplacés par les bataillons de l’exode rural. Les dirigeants livrent ainsi une course désespérée à ce développement délirant de la capitale. Á la limite, les capitales africaines vont bientôt absorber tous les budgets nationaux.
a) En êtes-vous déjà là avec Ouagadougou ?
b) Sans adopter l’attitude extrême d’un Pol Pot, ne pensez-vous pas qu’il faut en finir avec cet héritage qui hypothèque notre développement ? La ville coloniale a été créée pour le
colonisateur, non pour l’Africain.
TS – Comparativement Ouagadougou n’est pas aussi peuplé que Brazzaville et Alger. Mais ce phénomène se constate. Nous lui trouvons une solution par une vigoureuse politique de lotissement à grande échelle. Tous les bidonvilles sont cassés pour y reconstruire des logements décents. Ainsi la cité An II, la cité An III, les logements SOGOGIB, les cités du 4 août, les lotissements populaires sont des réponses à cette question.
Dans cette perspective nous tentons de réduire au maximum la différence entre la ville et la campagne en développant en campagne toutes les infrastructures pour rendre agréable la vie en campagne et freiner de la sorte l’exode rural. Ainsi des centres socioculturels, des centres populaires de loisirs, des salles de cinéma, des dancings et des orchestres modernes ont été implantés en campagne. Il y a des héritages coloniaux que nous ne pouvons que prendre en compte, tout en prenant le soin d’éliminer leurs méfaits. C’est le cas de la ville.
MB – Et maintenant le registre personnel et pittoresque, qui passionne malheureusement les foules ! Êtes-vous marxiste ? Depuis quand ? Á la suite de quelle évolution ?
On vous accuse (bassement, c’est vrai, et vous pouvez légitimement objecter que cela ne mérite pas une réponse) de pratiquer une politique inspirée d’un sentiment de vengeance personnelle et non pas fondée sur un choix idéologique. C’est peut-être le moment de vous expliquer.
TS – Je suis pour le moment anti-impérialiste. Il en est de même pour le camarade Président. Nous pensons que cela relève d’une idéologie bien précise. C’est déjà suffisant pour nous, pour être utile à notre peuple, surtout lorsque ce peuple ne s’embarrasse pas d’étiqueter ses dirigeants mais les juge surtout à la tâche révolutionnaire. On verra plus tard…
MB – Á propos du parti unique. Ne croyez-vous pas que ce type d’organisation est discrédité et ne suffit plus à motiver les populations ? Plutôt que le parti unique, ne pensez-vous pas qu’un parti dominant, modèle Congrès indien, ferait mieux l’affaire ?
TS – Ce qui est discrédité c’est le parti unique bourgeois, parce que obéissant à une idéologie d’injustice, donnant le premier rôle à une minorité au détriment de la majorité.
Un parti unique démocratique, c’est-à-dire un parti du peuple, ne peut en aucun cas être discrédité, parce qu’au service d’un peuple, des intérêts de la majorité. C’est sur une telle base qu’il faut voir la question du parti unique, qui est aussi une vision des masses.
Si le Congrès indien sert d’exemple aujourd’hui, il est indéniable que c’est un parti unifié, bien que je ne le connaisse pas dans sa structuration, qui est au service du peuple indien.
MB – Est-ce que, selon vous, le socialisme est incompatible avec le pluralisme de l’information ?
TS – Je pense que le socialisme va de pair avec le pluralisme de l’information. Car le socialisme c’est le peuple au pouvoir avec un système économique qui permet à ce peuple de réaliser les objectifs de son bonheur. Or un peuple c’est à la fois l’unité dans la diversité de goût et de sensibilité. Informer c’est satisfaire aussi des goûts. Ce que s’emploient à faire beaucoup de pays socialistes, je crois.
MB – Sans le pluralisme, peut-on éviter le glissement vers les maux classiques de la
bureaucratisation : incompétence, inefficacité, népotisme, irresponsabilité, etc., finalement stagnation donc désaffection des masses ?
TS – Je vous retourne votre question. Le pluralisme n’entraîne-t-il pas ces maux classiques ? Je pense que tout dépend des hommes et de leur compréhension des choses, de l’histoire. Pluralisme ou sans pluralisme, il faut mettre en place ce qui élimine l’injustice. C’est l’injustice sociale qui entraîne tous ces maux. Or l’injustice sociale tient à un système économique qu’il faut éliminer pour éliminer dans la rigueur nécessaire ces choses-là.
MB – La Révolution burkinabé envisage-t-elle d’abandonner un secteur ou plusieurs secteurs de l’économie nationale à l’initiative privée ? Ou bien croyez-vous que l’État peut tout faire ? D’avance merci !
TS – La révolution burkinabé considère l’initiative privée comme une dynamique qu’elle prend en compte dans l’étape actuelle de la lutte du peuple burkinabé. Le discours d’orientation politique du 9 octobre est clair là-dessus. L’État ne peut pas s’engager dans une étatisation tous azimuts, même si le contrôle d’un certain nombre de secteurs vitaux de notre économie s’avère indispensable.
Au camarade Mongo Beti, 3/11/85
La patrie ou la mort, nous vaincrons ! _________________ " Vitam impendere vero "
... si possible!
Figure incomparable de la politique africaine et mondiale [1949-1987], radicalement insoumis à tous les paternalismes et docilisations pourtant plus sûrs placements en longévité politique post-coloniale, Thomas Sankara a légué aux générations futures la verve et l’énergie de l’espoir, l’emblème de la probité et la conscience historique de l’inaliénabilité de la lutte contre toutes oppressions. Prononcé lors de la 39ème Session de l’Assemblée Générale des Nation-Unies, le 4 octobre 1984, ce discours historique à n’en point douter, mérite de constituer l’humus fertilisant des nouvelles consciences en mouvement, avides de justice, de liberté, d’enrichissements mutuels.
« Permettez, vous qui m’écoutez, que je le dise : je ne parle pas seulement au nom de mon Burkina Faso tant aimé mais également au nom de tous ceux qui ont mal quelque part. Je parle au nom de ces millions d’êtres qui sont dans les ghettos parce qu’ils ont la peau noire, ou qu’ils sont de cultures différentes et qui bénéficient d’un statut à peine supérieur à celui d’un animal.
Je souffre au nom des Indiens massacrés, écrasés, humiliés et confinés depuis des siècles dans des réserves, afin qu’ils n’aspirent à aucun droit et que leur culture ne puisse s’enrichir en convolant en noces heureuses au contact d’autres cultures, y compris celle de l’envahisseur.
Je m’exclame au nom des chômeurs d’un système structurellement injuste et conjoncturellement désaxé, réduits à ne percevoir de la vie que le reflet de celle des plus nantis.
Je parle au nom des femmes du monde entier, qui souffrent d’un système d’exploitation imposé par les mâles. En ce qui nous concerne, nous sommes prêts à accueillir toutes suggestions du monde entier, nous permettant de parvenir à l’épanouissement total de la femme burkinabè. En retour, nous donnons en partage, à tous les pays, l’expérience positive que nous entreprenons avec des femmes désormais présentes à tous les échelons de l’appareil d’Etat et de la vie sociale au Burkina Faso. Des femmes qui luttent et proclament avec nous, que l’esclave qui n’est pas capable d’assumer sa révolte ne mérite pas que l’on s’apitoie sur son sort. Cet esclave répondra seul de son malheur s’il se fait des illusions sur la condescendance suspecte d’un maître qui prétend l’affranchir. Seule la lutte libère et nous en appelons à toutes nos sœurs de toutes les races pour qu’elles montent à l’assaut pour la conquête de leurs droits.
Je parle au nom des mères de nos pays démunis qui voient mourir leurs enfants de paludisme ou de diarrhée, ignorant qu’il existe, pour les sauver, des moyens simples que la science des multinationales ne leur offre pas, préférant investir dans les laboratoires de cosmétiques et dans la chirurgie esthétique pour les caprices de quelques femmes ou d’hommes dont la coquetterie est menacée par les excès de calories de leurs repas trop riches et d’une régularité à vous donner, non, plutôt à nous donner, à nous autres du Sahel, le vertige. Ces moyens simples recommandés par l’OMS et l’UNICEF, nous avons décidé de les adopter et de les populariser.
Je parle aussi au nom de l’enfant. L’enfant du pauvre qui a faim et louche furtivement vers l’abondance amoncelée dans une boutique pour riches. La boutique protégée par une épaisse vitre. La vitre défendue par une grille infranchissable. Et la grille gardée par un policier casqué, ganté et armé de matraque. Ce policier placé là par le père d’un autre enfant qui viendra se servir ou plutôt se faire servir parce que présentant toutes les garanties de représentativité et de normes capitalistiques du système.
Je parle au nom des artistes - poètes, peintres, sculpteurs, musiciens, acteurs - hommes de bien qui voient leur art se prostituer pour l’alchimie des prestidigitations du show-business.
Je crie au nom des journalistes qui sont réduits soit au silence, soit au mensonge, pour ne pas subir les dures lois du chômage.
Je proteste au nom des sportifs du monde entier dont les muscles sont exploités par les systèmes politiques ou les négociants de l’esclavage moderne.
Mon pays est un concentré de tous les malheurs des peuples, une synthèse douloureuse de toutes les souffrances de l’humanité, mais aussi et surtout des espérances de nos luttes.
C’est pourquoi je vibre naturellement au nom des malades qui scrutent avec anxiété les horizons d’une science accaparée par les marchands de canons. Mes pensées vont à tous ceux qui sont touchés par la destruction de la nature et à ces trente millions d’hommes qui vont mourir comme chaque année, abattus par la redoutable arme de la faim...
Je m’élève ici au nom de tous ceux qui cherchent vainement dans quel forum de ce monde ils pourront faire entendre leur voix et la faire prendre en considération, réellement. Sur cette tribune beaucoup m’ont précédé, d’autres viendront après moi. Mais seuls quelques-uns feront la décision. Pourtant nous sommes officiellement présentés comme égaux. Eh bien, je me fais le porte-voix de tous ceux qui cherchent vainement dans quel forum de ce monde ils peuvent se faire entendre. Oui, je veux donc parler au nom de tous les « laissés pour compte » parce que « je suis homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger ». _________________ " Vitam impendere vero "
... si possible!
Quand l’Homme est venu, son pays était une "synthèse douloureuse de toutes les souffrances de l’humanité". Ainsi son pays détenait un triste palmarès :
-Record mondial de mortalité infantile
-Balance agricole constamment négative
-Balance commerciale permanemment déficitaire
-Dette publique extrêmement élevée
L’Homme voulut faire de son pays une terre de dignité et de liberté. Alors courageusement, il sut redéfinir la somme du possible et du pensable par laquelle le développement d’un pays comptant parmi les plus démunis du monde pouvait être envisagé. Partant de l’évidence que le sous-développement et la dépendance ne pourraient trouver d’issue sans l’intégration des habituels exclus du jeu social : les paysans, les femmes et les jeunes, l’Homme s’engagea dans un processus de transformation social progressiste et progressif.
Sa révolution ?
Simple : travailler plus, dépenser moins et mieux, et produire plus en se préoccupant des besoins prioritaires de son pays ! Il le dit lui-même : " Notre révolution est et doit être permanente, l’action collective des révolutionnaires pour transformer la réalité et améliorer la situation concrète des masses de notre pays. Notre révolution n’aura de valeur que si en regardant derrière nous, en regardant à nos côtés et en regardant devant nous, nous pouvons dire que les Burkinabé sont, grâce à la révolution, un peu plus heureux, parce qu’ils ont de l’eau saine à boire, parce qu’ils ont une alimentation abondante, suffisante, parce qu’ils ont une santé resplendissante, parce qu’ils ont l’éducation, parce qu’ils ont des logements décents parce qu’ils sont mieux vêtus, parce qu’ils ont droit aux loisirs ; parce qu’ils ont l’occasion de jouir de plus de liberté, de plus de démocratie, de plus de dignité. Notre révolution n’aura de raison d’être que si elle peut répondre concrètement à ces questions. "
L’Homme, qui faisait ce qu’il dit et disait ce qu’il fait, décida de trouver des solutions adaptées aux questions existentielles précitées. Il s’engagea à la fois sur plusieurs chantiers :
L’orientation économique en fonction des nécessités et des besoins réels du peuple et non selon les impératifs et les intérêts de l’économie capitaliste mondiale
La réforme agraire par laquelle la terre appartient à celui qui la cultive
La réforme administrative pour assurer une bonne gouvernance
La libération de la femme par la participation à la vie politique et économique, la lutte contre la prostitution, l’adoption d’un code de la famille, l’interdiction de l’excision…
La protection de l’environnement par la lutte contre la désertification
Etc.
En quelques années, l’Homme fit faire à son pays un bond qualitatif. Mais il restait conscient que les questions essentielles de son peuple étaient celle de tout son continent et de tous les peuples exploités et opprimés. Panafricaniste et anti-mondialiste, il su devenir la voix des sans voix. Rigueur morale... Intégrité... Naïveté… Courage suprême. La félonie eût raison de l’Homme. Par un après midi, l’Homme fut fauché par des balles assassines.
L’Homme est tombé, mais il avait eu le temps de semer la graine et l’arroser de son sang ; il avait eu le temps d’enlever un maillon de la chaîne libérant ainsi les opprimés, la jeunesse africaine. Il aura été un précurseur d’une politique alternative à la dépendance et à l’asservissement que les institutions économiques mondiales continuent d’encourager par leur modèle de développement fondé sur l’endettement. Mais plus important, l’Homme aura contribuer à faire comprendre à son peuple et à tous les opprimés qu’il ne peut y avoir d’alternative crédible venant d’ailleurs pour les sauver. C’est en comptant d’abord sur eux-mêmes, sur leurs capacité intrinsèques à " oser inventer l’avenir " qu’ils trouveront les clés de leur développement et de leur liberté.
Aujourd’hui, en chacun de nos mouvements pour l’épanouissement social, politique et culturel, l’Homme vit en nous. L’Homme restera à jamais gravé dans la conscience collective. Et, son exemple servira toujours de bréviaire aux combattants de la libération humaine.
L’Homme s’appelait Thomas Sankara. _________________ " Vitam impendere vero "
... si possible!
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