
Autour du thème de l’apport de l’entrepreneur immigré au nord dans le développement des pays du sud, le PEGE de Strasbourg accueillera le 26 novembre 2005 le 3e forum annuel du Réseau africain des affaires. Quelle place occupe cette association dans la sphère des structures regroupant des entrepreneurs ? Qui sont ces hommes et femmes qui posent une appréciation décomplexée sur le monde des affaires et sur les rapports nord-sud ?
Loin des projecteurs médiatiques, le réseau africain des affaires (RESHAF) occupe une place spécifique dans le milieu associatif. Revendiquant les valeurs propres aux cercles de réflexions, il creuse patiemment un sillon dans la sphère de l’entraide et de l’échange entre les hommes de la diaspora. Après Paris, où il organisa durant les deux dernières années, avec le soutien de l’université de paris 1 Sorbonne les précédentes rencontres, le Reshaf réinvestit à l’occasion de son forum 2005 l’Alsace, sa région de naissance. Il réunira cette année à Strasbourg des universitaires et des chercheurs de divers horizons qui émettront des avis sans complaisance sur l’importance et la place du chef d’entreprise d’origine étrangère en France.
Le Reshaf est né il y a cinq ans de l’initiative d’un groupe d’entrepreneurs. Dirigé depuis sa création en novembre 2000 par Joseph Noudjou, les fondateurs du Reshaf ne se laissèrent pas influencer par les étiquettes accolées aux « immigrés ». Guidés par des objectifs concrets et des ambitions louables, ils dressent dès leurs premières actions une ligne de démarcation avec les pratiques de pur assistanat. Le maître mot découle ainsi du regard précis et positif qu’ils posent sur l’Afrique. Ils considèrent que la circulation des informations, la collaboration et le partage des connaissances sont susceptibles de bousculer les frontières érigées par l’histoire. Le Reshaf a en point de mire la réalisation d’une synergie entre les entrepreneurs évoluant en Europe et ceux travaillant en Afrique.
En stimulant la réflexion sur les questions stratégiques concernant l’entreprise, il encourage les jeunes créateurs d’entreprise de la diaspora africaine. En définitive, les membres fondateurs du Reshaf souhaitent sortir du cycle des aides et solidarités plates et stériles pour engager les Africains, des deux rives, dans des rapports revalorisant. Ils s’inscrivent, à l’échelle de l’entreprise privée, dans la ligne du nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).
Le fonctionnement du Reshaf attire au fil des années un nombre croissant d’hommes et femmes d’affaires ayant l’Afrique comme centre d’intérêt. De la cinquantaine de membres et sympathisants qu’il comptait à ses débuts entre Strasbourg, Paris et Cotonou, il rassemble actuellement des centaines d’adhérents répartis dans les quatre délégations de l’Est, de l’île de France, du Bénin et du Cameroun.
La présidence actuelle ne cache pas sa satisfaction face à la réussite de la mise sur pied des délégations. Le fonctionnement de celles-ci colle au plus près des besoins des adhérents. Les colloques et forum s’apparentent aux grandes messes qui permettent de partager les expériences du quotidien des délégations et d’ouvrir l’association au grand public. Dans la délégation de l’Est de la France, l’une des plus dynamiques, les semaines sont courtes. En dehors des réunions hebdomadaires, le bureau installé à Strasbourg est astreint à organiser périodiquement « le dîner du Reshaf ». La délégation de l’Est, qui a l’avantage de compter dans ses rang une minorité très active de membres en profession libérales (avocat, expert comptable et informaticiens…), ponctue ses rencontres hebdomadaires de nombreux échanges. Les débats abordent autant la pédagogie en matière de création d’entreprise que les techniques propres au management et à la gestion. Le délégué général du RESHAF-Est, Jonnhy Orwuzurumba, situe le dynamisme de sa délégation dans cette mécanique de symbiose qui existe entre les initiatives nationales et les projets locaux.
En cinq années, le Reshaf, qui ne bénéficie d’aucune subvention des autorités politiques, et fonctionne exclusivement grâce aux contributions de ses membres et sympathisants, a un parcours élogieux. Au bilan du Reshaf, l’on place en bonne place le Fond de soutien à l’entreprise (FSE). Ce fond, constitué à l’aide des cotisations des membres et du soutien de plusieurs établissements bancaires, vient en aide aux jeunes créateurs d’entreprise confrontés à des difficultés passagères ou souhaitant donner plus d’importance à leurs affaires. Le FSE agit à deux niveaux, soit il octroie un prêt au postulant, soit le Reshaf se porte caution solidaire auprès d’un établissement bancaire pour faciliter le crédit à ce dernier. Dans les délégations de l’Est et de l’île de France, des membres exerçant dans le domaine de l’alimentation dite exotique ont eu recours à l’aide du FSE pour asseoir leurs activités.
De nombreuses autres actions du Reshaf mériteraient d’être connues. Si la banque des projets, qui a pour but de faciliter la mise en relation des possesseurs de capitaux et les porteurs de projets, tarde à prendre de l’ampleur, les membres du Reshaf profitent pleinement des informations et conseils sur les opportunités d’affaires. Dans le domaine de la formation et de l’encadrement, l’assistance et le conseil à la gestion tiennent une place prépondérante dans les services à la disposition des membres. En 2004, près de 80% de nouveaux membres ont profité des prestations des experts comptables et avocats.
Dans son volet international, le Reshaf organise des intermédiations et les négociations entre les entrepreneurs d’Afrique et les divers fournisseurs en Europe. Il accueil en France les hommes d’affaire des pays d’Afrique, encadre et accompagne leurs relations avec les partenaires en Europe.
Les fondateurs et les membres du Reshaf ont dorénavant conscience de la responsabilité qu’ils ont à entretenir des espoirs oniriques. Les entrepreneurs africains pourront-ils être enfin jugés en fonction de leur capacité de production ? Comment effacer l’image de l’Africain tenant au bout du bras un bol vide ? Comment gommer la mentalité du receveur ? Si l’insécurité engendre la cupidité, le Reshaf n’investit pourtant pas dans la philanthropie. Il refuse tout simplement d’avaliser les compartiments établis par les évènements de l’histoire. |