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Serge Bilé : "je suis très touché par le décès de John William''
19/01/2011
 

Serge Bilé revient sur le décès le 8 janvier dernier de John William, chanteur et ancien déporté dans un camp de concentration, qui avait témoigné dans le documentaire ''Noirs dans les camps nazi''.
 
Par Paul Yange
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Serge Bilé et John William en 2005  
Serge Bilé et John William en 2005
 

Bonjour Serge Bilé. John William est décédé il y a quelques jours. Que vous inspire cette disparition ? [1]

Je suis très touché car c’est quelqu’un je d’admirais en tant qu’homme et en tant que chanteur. J’appréciais également son parcours exceptionnel. C’est quelqu’un qui a été frappé par une grande douleur et par deux arrachements :

le premier par rapport à son pays d’origine, la Côte d’Ivoire où il est né sous la colonisation d’une mère ivoirienne et d’un père français qui était un colon. Et puis à l’âge de 18 mois, son père l’a arraché à sa mère et l’a amené en France (où il a grandi) sans qu’elle ne puisse rien faire. Ce premier déchirement a été douloureux puisqu’il n’a jamais pu revoir sa mère ensuite.

Le second arrachement est survenu lors de la seconde guerre mondiale alors qu’il était un tout jeune garçon âge d’une vingtaine d’années. L’usine où il travaillait à Montluçon a connu un sabotage. Ce n’était pas lui qui était l’auteur du sabotage, mais il a refusé d’en dénoncer l’auteur. Pour ça il a été arrêté par les Allemands, torturé par la Gestapo et envoyé en camp de concentration, ce qui a été quelque chose d’extrêmement douloureux pour lui. Et moi cette histoire là m’a beaucoup touché d’autant que je connaissais John William lorsque j’étais gamin.

Toute son histoire douloureuse, toute son histoire personnelle, par rapport à son pays, et toute son aventure humaine m’ont fait avoir de l’affection pour lui
Serge Bilé


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J’avais en effet eu à l’entendre en concert quand j’avais autour de 14/15 ans à Poitiers où j’étais scolarisé. Mais je ne savais pas qu’il avait cette histoire là, je ne savais pas qu’il était originaire du même pays que moi.

J’avais entendu sa voix extrêmement merveilleuse, grave, qui chantait du gospel, et j’avais été touché. Et c’est plus tard quand j’ai commencé à travailler sur la question de la déportation que je me suis retrouvé à Strasbourg en juin1994 et là je l’ai retrouvé. Et j’ai appris, au cours d’un congrès de déportés qui avait eu lieu dans cette ville, qu’il avait été déporté. J’ai découvert son histoire, il m’a parlé, et il m’a touché, m’a fait savoir qu’il était originaire du même pays que moi.

Qu'on le veuille ou non, il symbolisait ces déportés noirs ou antillais dans les camps nazis puisqu’il était le dernier survivant
Serge Bilé


Toute son histoire douloureuse, toute son histoire personnelle, par rapport à son pays, et toute son aventure humaine m’ont fait avoir de l’affection pour lui. C’est quelqu’un qui avait une grande humilité, une grande gentillesse, qui ne ressassait pas les souffrances qu’il avait vécues qui étaient abominables, mais il s’attachait à la fois à chanter et à dire les choses pour faire en sorte que ces choses abominable ne se reproduisent jamais plus.

 
 

C’est son parcours extraordinaire qui vous avait poussé à demander, en compagnie de Daniel Picouly, à demander que la légion d’honneur lui soit décernée. Ce qui avait été le cas en 2005...

J’étais touché déjà d’une chose : On connait tous l’histoire de ces gens qui ont participé à la libération de la France et qui ont contribué à soulager le monde de la barbarie. Ce sont les tirailleurs sénégalais dont l’histoire a été occultée et dont les mérites n’ont jamais vraiment été reconnus (on connait le problème des pensions). Là je découvrais en plus une nouvelle injustice qui frappait John William car qu’on le veuille ou non, il représentait toutes les personnes qui ont connu au-delà du front où se battaient les tirailleurs sénégalais l’enfer des camps de concentration. Quelque part, quelqu’ait été le nombre de ces déportés noirs ou antillais, il les symbolisait puisqu’il était le dernier survivant.

Et je pensais qu’il fallait qu’à travers lui on puisse rendre hommage à la souffrance de toutes ces personnes là, valoriser son histoire, la faire connaître, et se battre pour qu’il y ait une reconnaissance de ce qu’il avait vécu et de ce qu’il avait souffert. Nous nous sommes battus avec Daniel Picouly qui a fait un travail remarquable et c’est comme ça qu’on a pu faire en sorte qu’en 2005, avec toute la médiatisation qu’il y avait eu autour de lui à cette époque qu’il reçoive la légion d’honneur. Il était extrêmement heureux le jour où il l’a reçue comme si quelque chose se passait pour lui car il y avait reconnaissance d’une souffrance singulière qu’on le veuille ou non : celle d’un Noir déporté dans un camp de concentration.

 
 

Une citation d’Amadou Hampathé Bâ dit : "à chaque fois qu’un vieillard meurt en Afrique, c’est une bibliothèque inexplorée qui brûle..."En l’adaptant au cas de John William, on peut dire que vous avez permis à la jeune génération d’en savoir plus sur la vie de cette homme, en l’interrogeant dans votre documentaire "Noirs dans les Camps Nazis"...

Les jeunes générations ont pu découvrir non seulement l’homme qu’il était, mais aussi de la souffrance de toutes les personnes qui ont pu connaître ce drame. Ce qui était intéressant, c’est que lorsque j’ai connu vraiment toute son histoire, j’ai voulu aller plus loin. Mon souhait c’était qu’on puisse retourner sur les traces de l’endroit où il est né en Côte d’Ivoire, à Grand Bassam, retrouver sa famille qu’il ne connaissait pas, qu’il puisse retourner sur les lieux où il avait vécu ce drame de la déportation pour raconter encore l’histoire en la contextualisant. Malheureusement, je le rencontrais alors qu’il était déjà assez très âgé, et pas à même de faire ces voyages là et c’est pour cela qu’on a du abandonner l’idée.

J’aurais aimé qu’on aille plus loin. Mais malgré cela, son témoignage a été extrêmement précieux car il a permis de raconter cette histoire à travers sa propre histoire, tout comme d’autres déportés qui sont intervenus dans le film et qui ont permis par petites touches de reconstituer l’histoire de ces Noirs déportés dans les camps de concentration.

Il faut souligner le mérite que ces gens ont eu de survivre à ce drame là de la même façon que d’autres, et plus particulièrement les Juifs, qui ont connu ce drame là en plus grand nombre encore. Il fallait souligner le mérite qu’ils ont eu à traverser cette période particulièrement barbare. John William en est sorti relativement fort et grandi. J’ai trouvé qu’il n’y avait pas de haine, pas rancune en lui, mais plutôt quelque chose de profond et une grande humanité. Et c’était important à souligner.

 
 

Suite à son décès, les hommages ont été rares. Que vous inspire ce silence médiatique ?

Ça ne m’étonne pas vraiment. Qu’on le veuille ou non, il est difficile de pouvoir faire émerger une histoire qui nous concerne, qui concerne toutes les composantes africaines ou antillaises du peuple français, sans parler de l’histoire coloniale ou de tout ce qui a pu se passer en Afrique.

Il est très compliqué de faire émerger le rôle de certains Noirs dans l’histoire de France. Même devant des évidences, quand il y a des gens comme lui qui témoignent de leurs souffrances dans ces camps de concentration, on essaie toujours de disqualifier cela en essayant de faire croire que c’était minime, ce n’était pas important. Or, toutes les souffrances sont importantes. Quelque soit le nombre des gens. Il faut juste savoir rendre la place à chacun.

On voit bien que dans ce pays, les choses sont extrêmement compliquées, mais il ne faut pas baisser les bras. Au-delà de cette reconnaissance nationale qui ne vient pas toujours, ce qui est important c'est que nous même nous sachions rendre hommage. C'est important que les gens issus de ces populations africaines ou antillaises sachent rendre hommage aux gens qui issus de ces communautés ont pu faire des choses extraordinaires.


 
 

Le simple fait que nous lui rendions hommage à travers un média comme le vôtre ou à travers tous les médias, qu’ils soient d’obédience africaine ou antillaise (en espérant que d’autres vont se joindre à cela) est important. ça montre que nous reconnaissons cette souffrance et le travail fait par ces personnes là.

Petit à petit, nous allons faire en sorte que ces gens soient reconnus et qu’ils reçoivent un hommage mérité même si ce n’est pas fait immédiatement. Il faut toujours considérer que le travail qu’on fait soit même sur sa mémoire et sur son histoire est déjà important et s’il se fait bien, il va naturellement conduire à ce que cette prise de conscience soit partagée par tous.



Notes

[1] John William de son vrai nom Ernest Armand Huss était né en octobre 1922 à Grand Bassam en Côte d'Ivoire et est décédé le 8 janvier 2011 à Antibes à l'âge de 88 ans. Il a interprété plus de 350 chansons parmi lesquelles : "Si toi aussi tu m’abandonnes" du film " le train sifflera trois fois", "le bleu de l’été" du film "Alamo", "le voyageur sans étoile" (Coq d’or de la chanson française en 1961, à la suite de ce prix il reçut la médaille de la Ville de Paris), "La rose des sables" du film "Laurence d’Arabie", "une île au soleil", "Thierry la fronde", "Le jour le plus long".. En 1966 il reçoit le prix de la meilleure vente de disque de l’année au Midem à Cannes avec la "Chanson de Lara" du film "le docteur Jivago".

John William : ''Si toi aussi tu m'abandonnes'' (extrait de la bande originale du western ''le train sifflera trois fois''



John William : ''summertime'' (c'est l'été)



John William : ''le jour le plus long'' (bande originale du film ''le jour le plus long'')



John William : ''Thierry la fronde''



       
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