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L’ambassadeur américain expliquait dans le télégramme classé confidentiel, que :
« Robert Mugabe a gardé le pouvoir depuis 1980 parcequ'il est plus intelligent et impitoyable que tout autre homme politique au Zimbabwe. Pour rendre au Diable l'hommage qui lui est dû, c'est un tacticien brillant qui a prospéré sur sa capacité à changer abruptement les règles du jeu, à radicaliser l'agenda politique, et à forcer tous les autres à réagir à son agenda. Cependant, il est handicapé par plusieurs facteurs :
-son égo, et sa croyance dans sa propre infaillibilité.
-Son focus obsessionnel sur le passé comme justification de tout ce qui se passe aujourd’hui et de tout ce qui se passera dans le futur ;
-sa profonde ignorance des problèmes économiques (couplée à la croyance que ses 18 doctorats lui donnent l’autorité de suspendre les lois de l’économie, y compris celle de l’offre et de la demande). (En fait Robert Mugabe possède plus d’une dizaine de doctorats honoraires et au moins six licences et masters" Ndlr)
-son style essentiellement tactique à court terme
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Robert Mugabe a gardé le pouvoir depuis 1980 parcequ'il est plus intelligent et impitoyable que tous les autres hommes politiques locaux |
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"Bien que ces compétences tactiques l’aient aidé à garder le pouvoir pendant 27 ans, il n’a pu au cours des sept dernières années (2000-2007 NDLR) garder le pouvoir que par une série de mesures populistes mais autodestructrices qui conduiront finalement à sa défaite. En réaction à sa défaite lors du référendum de 2000 sur la constitution, un Mugabe vengeur a déchaîné ses "green bombers" pour mettre en œuvre la réforme agraire et a ainsi détruit le secteur agricole zimbabwéen, qui fut à une époque le pilier de l’économie.
Alors que des milliers de fermiers blancs ont vu leurs fermes saisies, des centaines de milliers de Zimbabwéens noirs ont perdu leur gagne-pain et ont été réduits à la pauvreté absolue." En 2005, ayant été forcé à manipuler les résultats d’une élection qu’il avait perdue, Mugabe s’est à nouveau déchaîné, punissant la population urbaine en lançant l’opération Murambatsvina. Le résultat a été la destruction du secteur informel, duquel dépendaient 70 à 80% des habitants de zone urbaine, de même que le déracinement de 700 000 Zimbabwéens. La tendance inflationniste actuelle a vraiment commencé avec Murambatsvina, étant donné que les loyers et les prix ont augmenté suite à une baisse de la demande."
(...) Nos contacts au sein de la Zanu PF sont unanimes à nous dire que des réformes sont désespérément nécessaires, mais qu’elles ne se produiront pas tant que le vieil homme sera en place et que par conséquent il doit partir. ("Avoir le courage de faire en sorte que ça arrive c’est autre chose" soulignait l’ambassadeur américain pour dire que les détracteurs de Mugabe ne franchiraient pas forcément le pas en le combattant ouvertement au sein du parti). |
L’Opposition |
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Morgan Tsvangirai et Robert Mugabe en août 2010
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L’ambassadeur américain passait également en revue l’opposition (P7) : "l’opposition est loin d’être idéale, et je pars en étant convaincu que si nous avions eu des partenaires différents, nous aurions pu faire plus. Mais il faut jouer avec la donne qui vous est attribuée. En gardant cela à l’esprit, les dirigeants actuels de l’opposition ont peu d’expérience en gestion et devraient avoir besoin d’énormément d’aide et d’assistance s’ils venaient à arriver au pouvoir." Morgan Tsvangirai, principal opposant à Robert Mugabe était décrit par le télégramme américain comme "brave, engagé, et étant largement un démocrate".
Il était aussi considéré comme le seul membre de l'opposition valable et capable de mobiliser les foules, mais avec plusieurs défauts : "indécis, peu ouvert aux conseils, et avec un jugement questionnable quand il s'agit de choisir ceux qui l'entourent. Il est l'élément indispensable au succès de l'opposition mais pourra se révéler être un albatros qu'elle aura autour du cou une fois au pouvoir. En résumé il est une sorte de Lech Walesa : le Zimbabwe a besoin de lui, mais ne devrait pas compter sur ses capacités de dirigeant pour faire redécoller le pays."
Un autre opposant, Arthur Mutaramba, était ainsi dépeint : "extrêmement intelligent, ambitieux et porté sur la rhétorique anti occidentale, mais encore à plusieurs égards un poids plume qui a passé trop de temps à lire les manuels de campagne politique américaine et trop peu de temps à penser aux vrais problèmes". Un troisième opposant, Welshman Ncube, était également brièvement passé en revue : |
Le gouvernement d'union nationale : une ''solution'' qui prolonge la crise |
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Robert Mugabe en compagnie du président sud-africain Jacob Zuma le 26 novembre 2010
©
reuters |
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"Welshman Ncube a démontré qu’il était une figure contribuant profondément à la division de l’opposition, et plus tôt il est poussé hors du devant de la scène, mieux ce sera". Le MDC, parti de Tsvangirai était décrit comme un parti "où le talent est rare en dehors des cercles dirigeants (...) Le salut de l'opposition pourrait venir de la diaspora : "la plupart des meilleurs professionnels du Zimbabwe, entrepreneurs, hommes et femmes d'affaires, ont fui le pays. Ils sont les alliés naturels de l'opposition..."
Enfin l’ambassadeur américain émettait plusieurs hypothèses quant au futur du Zimbabwe, parmi lesquelles celle du partage du pouvoir via un gouvernement d’union nationale (ce qui s’est finalement produit), option qui n’avait pas sa préférence :
"Un arrangement de transition ou un gouvernement d’union nationale constitué sous l’égide de l’Afrique du Sud est moins attractif. Mbeki a toujours favorisé la stabilité et dans son esprit, ceci signifie un gouvernement d’union nationale dirigé par la Zanu PF avec quelques éléments du MDC. Il est probable que cette solution prolonge plus qu’elle ne résolve la crise et nous devons nous garder de laisser Pretoria dicter une issue qui perpétue le statut quo aux dépens du vrai changement et des réformes.
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Mugabe et son acolyte sont comme les tyrans partout. S’ils ont la possibilité de vous intimider, ils le feront. Mais ils ne sont pas habitués à ce que quelqu’un leur résiste et leur réplique. Ils sont pris de surprise et c’est à ce moment qu’ils font des erreurs |
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L’ambassadeur américain concluait en disant que la position américaine au Zimbabwe avait contribué à accélérer le changement, et les Etats-Unis devaient continuer à jouer un rôle leader dans le dossier zimbabwéen car d’autres pays ne le pouvaient pas : le Royaume-Uni était handicapé par son passé colonial et ses problèmes domestiques, l’Union Européenne était divisée, les Africains ne commençaient qu’à exprimer leur voix, les Nations-Unies ne jouaient aucun rôle...
"Selon les standards de ce régime" ajoutait-il, "agir dans l’intérêt du peuple peut être considéré comme un échec. Mais je pense que c’est le contraire qui est vrai et que nous pouvons de façon justifiée être fiers d’avoir contribué à accélérer l’agenda présidentiel en matière de liberté. Le peuple de ce pays le sait et le reconnait et c’est la vraie mesure de notre succès ici." |
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