Success story. Stéphane Eholie est chef d’entreprise. Il dirige la SIMAT, société ivoirienne de manutention et de transit, créée en mai 2001 avec un effectif de 40 personnes. Sept ans après, l’entreprise qui réalise un chiffre d’affaires de 9.65 millions d’euros, emploie 150 personnes. En décembre 2007, elle est introduite sur l’Euronext (le marché libre français), et devient la première entreprise africaine à être cotée sur cette place. Cette opération est réalisée par la cession de 320000 actions à 4.38 euros. L’action vaut aujourd’hui 12.50 euros !

Si Mr Eholie 47 ans, ancien de Bolloré où il s’est senti à l’étroit après 10 ans d’activité peut savourer son succès, c’est qu’il n’a pas ménagé sa peine. Notamment vis-à-vis des banques, dont il se plaint qu’ « elles ne nous suivent pas. » Par exemple « elles prêtent sur 3 ans pour des machines amorties en 10 ans… » L’accusation est lancée. Mme Tall la reçoit de plein fouet, mais ne bronche pas ! Ou plutôt si !

La frilosité des banques. Pour cette directrice régionale Ecobank de la zone UMOA et du Cap Vert qui ne s’en laisse pas conter, les PME-PMI africaines (a priori excepté la SIMAT, vu son succès fulgurant…) cumulent souvent plusieurs handicaps qui rendent les banques frileuses : un actionnariat essentiellement familial, peu de garanties, pas d’informations financières... En somme beaucoup d’informel ! De plus, poursuit cette sénégalaise qui a passé 17 ans à la Citibank de Dakar, les banques ne peuvent pas financer l’investissement, parce que l’épargne dont elles disposent est courte.

Le rôle attendu de l’Etat. Un conseiller du président béninois Yayi Boni, intervenant dans le débat, pense quant à lui que l’attitude des banques peut s’expliquer par « les frissons » laissés en Afrique par la faillite des banques de développement. Dans ces conditions, l’investissement en Afrique devrait être financé par l’extérieur à travers l’IDE (investissement direct étranger). A charge alors pour l’Etat, d’améliorer l’environnement juridique et financier des entreprises pour rassurer ces capitaux étrangers. Des paroles qui font écho à celles prononcées plus tôt dans la matinée par Mr Raimi, PCA de Deloitte, pendant son allocution : « l’Etat doit s’assurer que le bon droit est appliqué… »

Les clés du problème se trouvent aussi pour Mme. Evelyne Tall entre les mains de l’Etat. Ici, il doit aider les PME-PMI à parler aux banques, par exemple en créant des structures d’accompagnement des entreprises. Ainsi seraient créées pour les entreprises, des passerelles entre la microfinance et la banque. Ecobank est déjà présente sur ce créneau, reste à l’Etat d’amplifier et de systématiser la démarche.

Chargé de conclure la matinée, Ibrahim Mayaki (Directeur exécutif du Hub, Plate forme pour le développement rural en Afrique de l’Ouest et du Centre et ancien premier ministre du Niger) saisit la balle au bond pour remarquer l’émergence au cours de la période actuelle de post-ajustements structurels, d’un contexte nouveau qui se décline en une « stratégie » : celle de « réduction de la pauvreté ». Alors qu’ils étaient quasi inexistants dans les cadres précédents, deux acteurs font irruption sur la scène : la société civile et l’entreprise privée. Mais pour que l’essai soit transformé, ils doivent apprendre à se connaître et s’apprivoiser mutuellement, pendant que parallèlement l’Etat s’imprègne de la culture d’entreprise.

Comparativement aux années 60 où l’Etat bureaucratique était omniprésent, et à la période qui a suivi où ce sont les bailleurs de fonds qui quadrillaient tous les terrains dans le cadre des ajustements structurels, ce contexte nouveau qui concerne la matrice de définition de nos politiques publiques est, de l’avis de Mr Mayaki, favorable au développement du secteur privé. A condition que l’entreprise privée aide l’Etat à assainir le climat des affaires, par exemple en s’impliquant dans la lutte contre la corruption qui gangrène plusieurs appareils de nos Etats.