Des différents articles relatifs à la visite de Sarkozy en Afrique sub-saharienne, que pouvons-nous en déduire au-delà des mots creux et expressions vides de sens destinés à flatter l'opinion des dirigeants locaux ?


Une nuance est déjà faite entre la colonisation qui « fut une grande faute » et la traite négrière et l'esclavage « un crime contre l'humanité toute entière », a reconnu le chef de l'État français.



Le choix des termes n'est pas innocent – il faut faire confiance à Sarkozy, avocat de profession faut-il le rappeler -, le crime contre l'humanité toute entière sous-entendant que même ceux qui en ont profité, font partie des victimes.



En outre, une faute qui a duré soixante quinze ans peut-elle toujours être considérée comme une faute. Il faut relire les articles liés à la chute du communisme, là aussi une « faute » de quasi même durée, pour se rendre compte qu'il y a deux poids deux mesures, le communisme étant considéré comme un crime indélébile, alors qu'il y a peu, on trouvait en France que la colonisation n'avait pas été si mal que ça : pour qui ?


La colonisation « n'est pas responsable de toutes les difficultés actuelles de l'Afrique », qui a « sa part de responsabilité dans son propre malheur », a fait valoir Sarkozy.


C'est bien connu, les difficultés actuelles des pays d'Europe centrale et orientale, voire de Russie, tombent du ciel : c'est parce qu'ils sont nuls, ou qu'ils votent mal, le régime communiste n'y est pour rien.


« ...La colonisation n'est pas responsable des guerres sanglantes que se font les Africains entre eux, des génocides, des dictateurs, du fanatisme, de la corruption et de la prévarication... ».


- les guerres, desquelles parle t-on, de celle du Biafra par exemple, soutenue par la France pour déstabiliser le Nigéria, et éventuellement récupérer les ressources pétrolières de cette région ?

- les génocides : ce ne sont pas les Africains qui ont expérimenté la solution finale nazie,

- les dictateurs : mais qui s'est empressé de reconnaître la victoire de Faure Éyadéma, un des fils du dictateur togolais ayant régné 38 ans, alors que la TV française filmait en direct les fraudes électorales ?

- la corruption : Angolagate, Carrefour du développement, diamants de Bokassa, Elf ... pour ne citer que les affaires liées à l'Afrique et où le corrupteur n'est pas celui qu'on croit,

- les gaspillages : il suffit de lire les rapports annuels de la Cour des comptes pour se rendre compte que l'élève n'a pas encore dépassé le maître en termes de coûts.



Sarkozy ajoute qu'il n'était pas venu parler de « repentance », « de ressasser le passé ». A ses yeux, « nul ne peut demander aux générations d'aujourd'hui d'expier ce crime perpétré par les générations passées... Nul ne peut demander aux fils de se repentir des fautes de leurs pères », a-t-il ajouté.


C'est oublier un peu vite, d'une part que cette même analyse n'a pas été retenue pour ce qui concerne le peuple juif européen victime du nazisme. Ce dernier a obtenu – et à juste titre - réparation des fautes et des spoliations subies ? Mais alors ? ce qui serait bon pour le peuple juif européen blanc cesserait-il de l’être pour les Africains noirs. Il convient de préciser la couleur, quand on sait l'Europe très engagée contre un dictateur, Robert Mugabe en l'occurrence, au Zimbabwe, au prétexte qu'il spolie des Africains, qui eux ont la « chance » d'être blancs, donc dignes de considération ?


C'est oublier d'autre part, que l'existence de despotes n'est certes pas de la responsabilité de nos pères, mais de nous-mêmes. Comment croire que nous en France, ne puissions supporter 14 ans de Mitterrand et 12 ans de Chirac, mais que les Africains eux s'accommoderaient d'un Éyadéma, Bongo, Biya, Mobutu, Sassou N'Guesso... ? Qui ose croire, pour qui connaît les relations franco-africaines, qu'un Faure Éyadéma, dont plus personne ne parle aujourd'hui, est tombé du ciel tel un messie, soutenu par sa population, et vu son jeune âge pourrait rempiler pour une quarantaine d'années ?


Enfin comble de l'hypocrisie, Sarkozy exhorte les jeunes Africains formés en Europe à revenir dans leur pays pour « bâtir l'Afrique .... Il faut mettre un terme au pillage des élites africaines dont l'Afrique a besoin pour se développer », a-t-il souligné.


Mais qui pille l'Afrique : certains Africains (mais aussi Asiatiques ou autres nationalités étrangères, si possible colorées) obtiennent une carte de résident de 10 ans après deux ans de master en France (en informatique par exemple), alors que certains de leurs compatriotes, qui ont parfois passé plus de 10 ans en France (certes dans la clandestinité), ont du mal à faire valoir leurs droits.


On sait bien sur cette question de l’immigration, que Sarkozy a l’intention d’aller à la pêche aux cerveaux et aux jambes (pour le football et l’athlétisme) d’Afrique.


« Voulez-vous que cesse l'arbitraire, la corruption, la violence ? Voulez-vous que la propriété soit respectée, que l'argent soit investi au lieu d'être détourné ? », a également rajouté Sarkozy.


Qu'on m'explique comment s'y prendre, sauf à procéder comme l'Union européenne vis-à-vis du Hamas palestinien, c'est-à-dire contourner l'État pour donner directement aux populations. Pourquoi ce qu'on peut faire en Palestine aujourd'hui n'a jamais été possible en Afrique jusqu'à maintenant ?


« C'est à vous de le décider et si vous le décidez, la France sera à vos côtés comme un ami indéfectible, mais la France ne peut pas vouloir à la place de la jeunesse d'Afrique », a-t-il lancé.


Mais lorsque la jeunesse d'Afrique, guinéenne en particulier, en Janvier 2007, a demandé des comptes à son président dictateur (près de 24 ans de règne à son actif), le bilan fut de plus de 300 morts après répression à balles réelles. Où se trouvait la France (officielle s'entend) ?




Mais après avoir été négatif – peut-il en être autrement ? -, il faut néanmoins évoquer certains points positifs à l'actif de Sarkozy, dont on peut espérer que cela symbolise une « nouvelle vague ». Il eût été impossible de tout modifier d'un seul coup, mais peut-être prévenir d'une rupture progressive mais réelle : c'est tout ce qu'il faut souhaiter.


En effet, à défaut de rupture tonitruante avec les usages du passé, on a pu noté des inflexions à Paris depuis l’arrivée de Sarkozy à l’Elysée. Saisie par des ONG, qui les accusent de détourner l’argent public, la justice française a récemment décidé d’enquêter sur le patrimoine immobilier des présidents Bongo et de son beau-père congolais Sassou N’guesso, à Paris.


Autre première : deux Rwandais, recherchés par la justice internationale pour leur responsabilité dans le génocide de 1994, viennent d’être arrêtés en France, dans l’attente de leur éventuelle extradition. Enfin, le « suicide » du juge Borrel à Djibouti a été requalifié en « assassinat », au lendemain de la réception à l’Elysée de sa veuve.


On reste donc vigilant et attentif pour la suite ....