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Lorsqu’après les massacres d’avril 1994 le Front patriotique rwandais (FPR) faisait son entrée dans Kigali, la capitale du Rwanda, devenu pays martyr, un homme était à la tête de cette troupe, dont la plupart des éléments ont été entrainés en Ouganda : Paul Kagamé.
Sec, austère, souvent cassant, ne fumant et ne buvant pas d’alcool, le longiforme maître du Rwanda n’est pas sans rappeler Seyni Kountché du Niger, dont la rareté des sourires le disputait à son comportement ascétique. D’ailleurs comme son homologue nigérien, qui a voulu sans succès que ses compatriotes calquent leur vie sur la sienne, Paul Kagamé a imposé son style de vie aux 10 millions de Rwandais : autoritarisme asiatique (d’ailleurs son modèle reste Singapour), strict minimum pour les ministres, qui n’ont ni voitures ni villas de fonction...
Bref celui qui est président du pays des mille collines depuis 2000 mais l’était de fait depuis 1994 en tant que patron du FPR le régente comme un P-DG le ferait d’une entreprise, la touche militaire en sus ; ce qui lui réussit bien avec une croissance à 2 chiffres en 2009.
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Politiquement tout part et tout revient au FPR, qui est la colonne vertébrale de tout cette Rwanda Corporation. De réels progrès démocratiques ont été accomplis depuis 1994, et il y a une relative stabilité, qui tient aussi au caractère policier du régime : ainsi, l’opposante Victoire Ungavira n’a-t-elle pas des ennuis judiciaires pour négationisme ? Kagamé semble tenir ses troupes au point souvent d’exporter la guerre en allant faire le coup de feu contre le Front démocratique de libération du Rwanda (FDLR) au Nord-Kivu.
Le chef de l’Etat rwandais est souvent désigné comme le Bismark des Grands-Lacs ou, par ses adversaires, comme le trublion de la région. Ces derniers temps pourtant, on a la vague impression que la maison Kagamé se craquelle en commençant par le sommet : d’abord Faustin Kayumba et Patrick Karegeya, respectivement chef d’état-major de l’armée et chef des renseignements, ont été obligés de fuir pour se réfugier en Afrique du Sud.
Ils sont soupçonnés d’être les instigateurs d’explosions à la grenade courant février-mars 2010 à Kigali, fait rarissime dans ce pays où Big Brother veille au grain ; et pas plus tard que ce 20 avril 2010, deux généraux, Emmanuel Karenzi Karake et Charles Muhire, ont été suspendus et arrêtés pour « mauvaise conduite, crime grave de corruption et abus de pouvoir ».
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En fait, sporadiquement, plusieurs hauts gradés de la Grande Muette sont qui révoqués, qui embastillés pour diverses raisons. Ces actes disciplinaires peuvent être justifiés, donc nobles, car ce qui fait la force d’une armée, c’est la discipline, et quand il y a un début de délitement, ça devient désespérant et inquiétant.
En l’espèce, les officiers qui viennent de connaître ces infortunes sont des pontes du FPR, autrement dit des fidèles de Kagamé. La citadelle jugée imprenable - Kagamé lui-même affirmait il y a quelques jours qu’il ne peut y avoir de coup d’Etat au Rwanda - serait-elle attaquée de l’intérieur ? Y a-t-il réellement des velléités de déstabilisation ou est-ce une simple purge de Kagamé pour écarter tous les militaires qui pourraient lui faire ombrage ?
L’énigmatique locataire d’Urugwiro Village en connaît sans aucun doute la réponse, comme il sait aussi que « le plus fort n’est jamais toujours le plus fort pour être le meilleur ». Il arrive que le héros se fatigue aussi...
Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana
L’Observateur Paalga
www.lefaso.net
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