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Le Kosovo : un précédent gênant pour l’Occident |
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Le président russe Dimitri Medvedev (à gauche)
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getty/afp |
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En acceptant que les frontières internationales puissent bouger avec la reconnaissance de l’indépendance du Kosovo en février dernier, les USA et d’autres pays occidentaux ont de fait accepté un précédent gênant. En effet, en toute cohérence, ces pays ayant reconnu l’indépendance du Kosovo doivent reconnaître aussi l’autonomie des régions sécessionnistes de la Géorgie que sont l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie. En effet, sur quel critère défendre aujourd’hui « l’intégrité du territoire géorgien » ? C’est ici un pur pragmatisme politique qui fait office de critère : on reconnaît les sécessions lorsqu’elles arrangent les pays amis ou ennuient les pays ennemis, et on ne les reconnaît pas dans les cas inverses. De même, la contre-réaction russe a été jugée « disproportionnée » par George Bush. Une autre contre-réaction violente, lors d’une « crise » plus au Sud-Ouest il y a deux ans (au Liban), n’avait pas eu droit au même qualificatif de la part du dirigeant américain. Pragmatisme là encore.
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La guerre, un massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent mais ne se massacrent pas |
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Paul Valery |
Le camp occidental n’est pas cohérent dans ses critères, et cela a bien arrangé la Russie. En effet, si les occidentaux n’ont pas vu d’un mauvais œil la sécession du Kosovo de la Serbie, pourquoi objecteraient-ils à la sécession de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie ? La Géorgie tentant de récupérer ces territoires sécessionnistes peut alors – selon les critères occidentaux avec le Kosovo – légitimement être tenue pour « l’agresseur ». On comprend alors la gêne des négociateurs occidentaux. Mais le camp pro-russe n’est pas vraiment cohérent non plus : en effet, la toute proche Tchétchénie a été victime du rouleau compresseur russe lorsqu’elle a montré des velléités d’indépendance au milieu et à la fin des années 90. En toute logique, le précédent tchétchène aurait dû faire pencher la Russie en faveur de la réaction géorgienne. D’un côté comme de l’autre, il semble donc bien que les choix stratégiques soient basés sur un pur pragmatisme déterminé par une ligne de démarcation OTAN/Russie. |
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Affaiblir l’OTAN ? |

Il se pourrait que par le durcissement de sa contre-réaction, la Russie ait choisi de rappeler à l’ordre les anciennes républiques qui, à trop vouloir se rapprocher de l’OTAN ou de l’Europe (ce deuxième cas étant celui de l’Ukraine) ont irrité le Kremlin. Et cela représente un test : il paraît assez évident que même si les Etats-Unis soutiennent la Géorgie et lui ont promis son entrée dans l’OTAN contre des bases militaires US en Géorgie (c'est-à-dire aux frontières de la Russie !), ils ne vont pas prendre le risque – surtout à quelques mois des présidentielles – d’intervenir militairement contre l’autre super-puissance. La possibilité d’un « super-conflit » serait bien trop élevée. Voilà donc un coup de poker qui permet à Moscou de démontrer la fragilité des garanties occidentales et d’affaiblir ainsi l’OTAN. |
Une bataille de l’énergie ? |

Un autre élément sûrement non négligeable expliquant la violente contre-réaction russe peut-être une stratégie énergétique. La Géorgie est en effet traversée par le célèbre oléoduc Bakou-Tbilisi – Ceyhan ouvert en mai 2006. Le tracé de cet oléoduc avait été dessiné de manière à soigneusement éviter la Russie. Les hydrocarbures de la mer caspienne pouvaient ainsi arriver en méditerranée et rejoindre les terminaux occidentaux. Cet oléoduc représentait donc un moyen pour l’occident de desserrer l’étau énergétique de Moscou. Il ne faut sans doute pas minimiser la pression que pourrait constituer sa destruction partielle ou son contrôle russe (sous prétexte de « maintien de la paix ») sur l’état du marché. En rendant la région du tracé de l’oléoduc « à risque » (ou plutôt « encore plus à risque » puisque certains parties sont proches de zones de conflits latents), Moscou affaiblit encore la capacité d’approvisionnement énergétique de l’Occident et accroît ainsi indirectement sa dépendance.
On comprend que pour étendre leurs sphères d'influence, les super-Etats jouent ainsi encore une partie d’échec. Mais les perdants sont toujours les mêmes : les populations simples, loin des arcanes du pouvoir. A Gori, ville géorgienne tenue par les Russes et dont la population a fui en grande partie, une femme hurle aux journalistes le 11 août : « On n’a pas besoin des américains, ni des russes, laissez-nous ! Tout ce que vous voulez c’est notre pays, mais vous n’en avez rien à faire des géorgiens et des ossètes ». Elle n’a sans doute pas tort, et cela semble encore confirmer la citation de Paul Valéry: « La guerre, un massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent mais ne se massacrent pas »...
Emmanuel Martin est docteur-chercheur en économie,
Responsable de la publication de www.UnMondeLibre.org |

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