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En s’installant à la tête de l’Etat ivoirien, le Président Alassane Ouattara a institué auprès de lui, par ordonnance n° 2011-167 du 13 juillet 2011, une commission Dialogue, Vérité et Réconciliation (CDVR), dont le rôle essentiel, est d’être l’organe principal chargé de faire comprendre à la nation ivoirienne, les causes de ses dramatiques errements, d’obtenir des confessions publiques des auteurs des crimes , et de recommander les moyens du pardon et des réparations dus aux victimes.
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L’action de la Commission Vérité et Réconciliation présidée par Charles Konan Banny se résume dans sa partie visible, à quelques clips diffusés par les médias publics, à des rencontres avec des visiteurs étrangers, et des dons faits à des populations démunies |
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Vitrice Yepke |
Cependant, depuis une année, l’action de la CDVR, présidée par l’ancien premier ministre Charles Konan Banny, se résume dans sa partie visible, à quelques clips diffusés de temps à autre par les médias publics, à des rencontres avec des visiteurs étrangers, et à quelques dons faits à des populations démunies ; Instituée pour deux ans, elle pourrait ainsi continuer, sans que son office attendu soit rempli. Qu’est-ce qui explique cette étrange situation qui ne manque de laisser perplexe plus d’un ivoirien?
En consultant la documentation élaborée par la CDVR, nous constatons qu’elle a pourtant conçu un déclinatoire de sa mission en sept phases assez simples, campées dans la sociologie culturelle du pays, à savoir : |
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Sensibiliser les populations à la mission de réconciliation, établir une période de deuil et de purification des cœurs et des terres, mener une consultation nationale dont l’objectif est de recueillir les attentes des ivoiriens vis-à-vis du processus de la réconciliation ; définir les causes profondes de la crise ivoirienne, procéder aux enquêtes et aux auditions publiques, préconiser les moyens de réparer les offenses et pertes diverses, et, enfin, ériger un mémorial symbolisant la mémoire collective ivoirienne, débarrassée des oripeaux de la division et de la haine.
Si l’on s’en tient aux dernières déclarations de la CDVR, le pays se trouverait actuellement en période de deuil, dont le terme n’a pas été annoncé ; or, il se trouve que la plupart des ivoiriens n’en sont simplement pas informés. L’on en déduit au mieux, une communication qui laisse à désirer et une véritable pénurie de moyens financiers, ou au pire, une navigation solitaire de l’instrument officiel, chargé d’éclairer la nation sur son passé récent, et de la réconcilier avec toutes ses composantes. Est-il à ce stade convenable d’imaginer une combinaison des deux facteurs précités ?
En examinant plus sérieusement le chronogramme proposé, hormis le fait qu’il aurait pu être plus ramassé du fait des contraintes de délai qui enserrent les missions de la commission, de sérieux biais méthodologiques peuvent être relevés.
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Si l’on s'en tient aux dernières déclarations de la CDVR, le pays se trouverait actuellement en période de deuil (...)or la plupart des ivoiriens n’en sont simplement pas informés |
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Vitrice Yekpe |
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D’abord des évidences |

D'une part, du fait de la corruption généralisée qui caractérise la justice ivoirienne, et de l’impérieuse nécessité de renforcer les capacités de la magistrature, Les tribunaux d’Etat, mettront vraisemblablement des dizaines d’années à juger correctement et à faire exécuter les peines, si les personnes poursuivies et reconnues coupables sont toujours vivantes, dans un pays où l’espérance de vie est faible ;
D'autre part, la jeunesse, instrumentalisée à souhait au cours de la décennie passée, semble être exclue du processus de réconciliation en cours, alors que le monde entier a hélas pu observer, à de trop nombreuses reprises, des hordes fanatisées de jeunes ivoiriens, surnommés « les patriotes », toujours menaçants, éructant des anathèmes contre tous ceux qui semblaient s’opposer au clan GBAGBO, et, occisant au choix, à la machette ou à la buchette d’allumette, les malheureux rencontrés lors de leurs funestes expéditions.
Ces innombrables laissés pour compte, qui n'ont aucun espace de parole publique depuis la fin de la crise post-électorale, ne sont pas moins citoyens, et sont une composante essentielle des forces vives du pays. Les impliquer aussi bien au sein de la CDVR, que dans tous les aspects du processus de réconciliation, est une exigence essentielle, si l’on envisage un avenir dans le rassemblement et la concorde...par la pédagogie. |
Trouver ensuite des solutions réalistes |

Face à ces paramètres, l’on pourrait par conséquent différencier les procédures judiciaires et proprement transitionnelles, selon que les victimes vivraient en milieu citadin ou rural, pour des raisons sociologiques et psychologiques.
Ce faisant, les ivoiriens s’inspireraient spécialement de l’exemple Rwandais (Agaçaça), en s’appropriant les vertus de la tradition quant au règlement des différends en matière criminelle, surtout dans l’ouest du pays ; en effet, nous sommes dans cet espace particulier, confrontés à une sociologie et des logiques complexes, où le conflit foncier et l’acception de l’altérité sont toujours très problématiques.
Ces facteurs ont habilement et cyniquement été manipulés par des intellectuels, des journalistes, des opérateurs économiques et autres cadres de la région, qui ont ainsi armé les cœurs et les bras, notamment, d’une jeunesse en perte de repères et d’emplois, depuis de trop longues années. Si l’idée du tribunal traditionnel était retenue par les autorités compétentes, les mesures et peines cumulatives suivantes, qui font sens dans l’entendement rural traditionnel, pourraient être adoptées, sur autorisation du parlement, ou par ordonnance : |

procéder publiquement aux cérémonies rituelles d’exorcisme usuelles dans le cadre des audiences criminelles, puis, après le prononcé de la sentence, dédommager les victimes, selon les normes et symboliques ancestraux
- Faire reconstruire les demeures détruites des victimes, par les familles des coupables conformément aux usages anciens, ou trouver une compensation acceptable
- Confier pour leur éducation, les jeunes de familles de victimes, aux familles de coupables, de sorte à renforcer le sentiment de communauté de destin
- Enfin, pour des raisons de sûreté, établir un système de contrôle périodique de la bonne exécution des peines, sous le contrôle du juge d’Etat, qui pourrait envoyer le coupable dans les prisons civiles, dès le premier écart relativement au jugement coutumier rendu. |

En ce qui concerne les crimes commis dans les principales villes, trop de temps a été perdu, à se questionner sur le sexe des anges, et l’agencement des trônes au paradis ; à moins de vouloir passer toute la mandature à gérer l’indécision et ses conséquences, de vigoureuses mesures doivent rapidement être prises, notamment :
- En enquêtant effectivement sur les crimes commis depuis le coup d’état de 1999, de sorte que la détermination de l’exécutif à combattre l’impunité, soit traduite en actes
- En instaurant des juridictions spéciales ad’ hoc, dans quelques grandes régions emblématiques du pays, éventuellement avec le concours de juges de l’espace communautaire ouest-Africain, afin que le règlement judiciaire de la longue crise ivoirienne soit exemplaire et pédagogique. La présidence ivoirienne de la CEDEAO, traduirait ainsi dans les faits, l’opposition de l’organe régional aux putschistes, ainsi que le sort qu’elle réserve à ceux qui, méconnaissant le verdict des urnes, tenteraient de confisquer le pouvoir.
Il y aura toujours, d’après une expression empruntée à l’historien sénégalais Cheikh Anta DIOP, des « scientistes-modernisants » qui s’opposeront à ces suggestions, notamment celles relatives à la justice coutumière, les qualifiant de passéistes. Mais, il y a fort à parier que ceux qui se gaussent de ces mesures, sont certainement les mêmes qui entretiennent précieusement des canaris et autres fioles, garnis de décoctions « secrètes », dans leur salle de bain et sous leur lit. |
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