Le spectacle qu'offre le continent Africain est désolant, avec des conflits qui se déclenchent et s'enchaînent sans discontinuer. A la fin présumée de certaines confrontations succède de nouvelles autres, parfois aux confins de l'ancien terrain de bataile. Soudan, Somalie, et Côte d'Ivoire sont les derniers en dates. Que ce soit pour des intérêts purement économiques, pour la quête du pouvoir ou simplement pour asseoir une certaine hégémonie, on se rebelle, les armes à la main. Où est donc passé le dialogue, la culture de l'arbre à palabres si chère à nos ancêtres, en un mot, la guerre du verbe. On ne sait plus palabrer, du moins plus avec les mots. La kalachnikov a remplacé l'arbre, et du coup, la paix est devenue une notion très éphémère. La paix ne traduit parfois que le recul pris pour mieux fourbir ses armes, et repartir à l'assaut de la citadelle du pouvoir!

Le peuple de la nation n'est jamais qu'une grande famille, pour laquelle les dirigeants seraient les chefs. Mais d'où vient l'idée qu'on peut décider à tout vent de transformer sa concession familiale en terrain de guerre, simplement parce que quelqu'un à oser contester le pouvoir? D'où vient l'idée qu'on peut sacrifier ses enfants durant la guerre qu'on a déclenchée dans la concession, pour prétendre présider à la destinée des survivants, dans l'hypothèse où la guerre prendrait fin? Et comment la communauté internationale parvient-elle à se prendre au jeu de la force d'interposition qui arbitrerait la bataille, comme s'il s'agissait d'une confrontation ludique entre deux formations sportives?

D'où vient l'idée qu'on doit concéder à certains, la possibilité de revenir de temps à autre, au statut primitif de l'animal qui pour faire avancer sa conviction, doit tuer "physiquement" son adversaire? En effet, le spectacle de la guerre, et particulièrement la guerre civile, ne diffère en rien de celui qu'offrirait des chiens enragés qui se battraient dans la gadoue, pour un morceau de gibier putréfié, parce que tué par ces mêmes chiens depuis trop longtemps. La boue et la viande pourrie ne seraient que la terre saccagée et le peuple mis à mal.

Les partisans de la logique guerrière disent toujours que cette alternative est l'ultime voie de recours quand le dialogue n'est plus possible. Mais qui dit guerre, dit pertes en vies humaines! La seule guerre qui soit propre est celle du verbe, celle des mots échangés avec force conviction autour d'une table, celle des palabres débattues autour d'un arbre, et ce, sans débordement sanglant… Pourquoi ne pas décréter toute guerre illégale, et particulièrement la guerre dite civile, qui survient entre ressortissants d'un même pays !? Celui qui est incapable d'argumenter par le verbe, ou même de soutenir son propos, ne peut et ne doit pas songer à diriger une nation. On ne peut pas continuer à accepter les soulèvements armés pour légiférer quand on bute sur le dialogue.