Lettre à Idrissa Seck…

.Pour modifier le cours de son destin dans le bon sens, un pays a besoin de la grâce de Dieu, associée à la détermination de son peuple à poser les véritables actes consacrant la rupture avec la paresse, le manque de courage et d’initiatives, la médiocrité et surtout la langue de bois. La paresse pousse ses victimes à toujours rechercher la facilité qui est la source de toutes les banalités. Aujourd’hui, cette maladie ronge l’exécutif de mon pays. Le manque de courage et d’initiatives est une malédiction pour tout peuple qui aspire à rendre son existence meilleure. Cette malédiction a élu domicile dans mon pays en ces temps qui courent. La médiocrité est à la morale et à l’économie d’un pays ce que le SIDA est au corps : une mort brutale ou lente, certaine et dure à endurer. Elle se promène allégrement dans ma cité depuis longtemps mais, avec l’actuel régime, elle a atteint des proportions inquiétantes. La langue de bois est un encouragement accordé à l’autoritarisme. Le silence de dix millions d’habitants devant l’arbitraire est une catastrophe nationale. Heureusement que des voix acceptent de s’élever pour dire non, même si, parfois, un emprisonnement s’en suit !

Idy a parlé. Merci ! Idy a soufflé la fin de la récréation qui vient de durer plus de deux ans. En me replongeant dans ce passé ressent, l’envie me vient de vomir. Vomir sur tout ce cinéma de mauvais goût qui a tenu en allène tout un peuple, bloqué le travail, attiré le regard de nos voisins sur notre démocratie charcutée, sur notre justice malmenée, sur notre Assemblée manipulée par un pouvoir qui a eu du mal à cacher sa peur face à l’ambition présidentielle d’un citoyen sénégalais du nom de Idrissa Seck. Idy a parlé et la pilule est dure à avaler du côté de ses adversaires. Idy a parlé et des langues se délient encore pour cracher le feu sur l’homme qui n’a fait que conforter l’évidence : la FIN imminente du règne des folles promesses du prophète des bavardages creux, du pilotage à vue, du désespoir du monde paysan, de l’accroissement du taux de chômage chez les jeunes. La FIN imminente du règne dictatorial du prophète des pénuries dont celle de l’électricité, du gaz, d’espoir chez les jeunes dont une partie se suicide dans l’océan Atlantique.

Reçois les félicitations de tous ceux qui refusent de cautionner la politique de l’autruche ! Ceux qui t’avaient accusé de délit d’atteinte à la sûreté de l’Etat et de détournement de deniers publics, ainsi que tous ces sournois que tes déboires arrangeaient vont affûter leurs armes pour te détruire ; heureusement que tu es un homme de foi, de grande lucidité, d’abnégation et de savoir. La jalousie, l’égoïsme, et la rancœur viscérale de tes adversaires ne pourront venir à bout de ta démarche, à l’instar de celle d’autres leaders politiques tel que Amath Dansokho, pour sortir mon pays du dictat de ces éleveurs de boniments. Hier encore, ton discours a séduit, ta parole a enflammé les âmes. Je ne doute pas que tes faits feront de même. Tu tiens le bon bout… Continue ! Ne te laisse pas distraire ! Oublie leurs menaces absurdes et inélégantes. Ne nous déçoit pas ! L’autre avait ton charisme d’aujourd’hui mais nous ne le reconnaissons plus. Nous osons croire que, si tu es élu un jour, tu feras mentir ce propos : le pouvoir dénature l’homme, la soumission aveugle le dégrade.

Ils exigent aujourd’hui de toi des explications sur l’argent des chantiers de Thiès à fournir au peuple et disent que tu n’es pas encore totalement sorti des griffes de dame justice pour pouvoir former un parti et postuler; eux qui sont actuellement aux commandes de notre chère République sont mieux placés que quiconque pour éclairer la lanterne du peuple sur cette affaire et sur d’autres. S’ils ne peuvent pas prouver ta culpabilité, c’est parce qu’ils confortent la thèse selon laquelle, le but recherché en t’emprisonnant était de détruire un adversaire politique gênant.

Ton discours du 04 Avril avait démoli l’un de leurs derniers mensonges sur cette affaire dite des chantiers de Thiès : ton fameux deal avec leur chef pour ta sortie de prison. Si tu l’avais fait, nous ne t’aurions pas reconnu. Notre génération a besoin d’une nouvelle classe politique pétris de valeurs, soucieux de leur propre dignité et respectueux envers leur peuple. Aujourd’hui encore, tu viens de mettre fin à des mois de supputations sur tes retrouvailles avec celui que tu sais. Nous attendons avec impatience ta déclaration de patrimoine et nous demandons à tous ceux qui veulent briguer nos suffrages d’en faire autant. Nous attendons avec impatience ton programme de façon plus détaillée si c’est acceptable du point de vue stratégique en politique avant la campagne officielle et nous demandons à tous ceux qui veulent briguer nos suffrages d’en faire autant. Eclaire le peuple sur ta participation à la gestion du pays depuis le 19 mars 2000 jusqu’au 22 avril 2004. Fais le sans complaisance car le peuple a aussi besoin de cela !

Ne nous promet jamais la lune, nous ne saurons quoi en faire. Ce qui a perdu celui que nous avions élu en 2000, c’est le mot promesse. Ce qui a perdu ce denier, c’est aussi son incohérence dans le choix de ses collaborateurs ; une incohérence qui frise le ridicule en faisant la promotion de la transhumance d’hommes et de femmes sans éthique politique. Ce qui l’a perdu, c’est d’avoir ignoré qu’il devait juste assurer, vu son âge et son parcours politique, une transition avec ceux qui l’ont porté au pouvoir en toute loyauté et en toute efficacité et toutes les compétences patriotes de ce pays ; juste une transition et céder démocratiquement la place à d’autres plus jeunes. Ce que nous attendons de toi et de tous les hommes politique qui auront à déclarer leur candidature pour les élections présidentielles de 2007, une fois au pouvoir, c’est de parler peu et de travailler beaucoup pour corriger toutes ses failles entretenues par des incompétents qui ignorent encore leur handicap. Si mon peuple, par la grâce de Dieu, te conduit au palais par la voie des urnes, si vous ne le faites pas, si Dieu nous laisse la vie sauve, nous vous le rappelleront car nous avons choisi de mettre notre peuple au dessus de tout.

Tu n’as plus le choix Idrissa. Tu dois continuer ton combat avec toutes les forces vives de cette nation, les partis politiques, la société civile, les personnalités religieuses, les travailleurs, la jeunesse, les femmes, les sénégalais de l’extérieur pour qu’ensemble, nous puissions tourner, démocratiquement, la page de ce régime qui hoquette en permanence. Heureusement que tu fais parti de ceux qui savent qu’ « on ne participe pas à la chasse à l’éléphant en se contentant de regarder passer son cadavre devant sa case. »




          	                                    Tafsir Ndické Dièye 
                                                                            Ecrivain sénégalais 
                                                                 Auteurs de romans policiers dont :
                                                               « Ces fossoyeurs de la République »
                                                         Editions Melonic Québec Canada juillet 2005