Ces lobbies ignobles qui s’attaquent à nos icônes du refus à l’image de Amadou Toumani Touré du Mali.

Je disais dans mon second roman intitulé Ces fossoyeurs de la République que notre continent, l’Afrique, est un prisonnier du bavardage creux de la majeure partie de ses dirigeants et prétendus intellectuels qui ne cessent d’accuser les autres d’être à l’origine de tous ses maux. J’ai toujours pensé qu’il est plus facile de chercher un bouc émissaire que de s’interroger sur ses propres tares. Personne ne viendra développer le continent africain à la place des africains.

Mais au lieu de ramer dans la même direction pour rendre nos pays et notre continent compétitifs en ces temps de mondialisation dominés par les grands ensembles, les nouvelles technologies de l’information et de la communication, nous préférons nous perdre très souvent dans des colportages de bassesses, des coups bas, des débats sans intérêts. Nous n’hésitons pas à jeter l’opprobre sur notre concitoyen de façon directe ou indirecte en s’attachant même, et sans gène, les services de véritables mercenaires de la plume. De véritables « plumes à gage » pour détruire l’image de l’autre, même si nous sommes conscients du fait que son apport dans le développement du pays ou du continent est immense.

Pendant ce temps, les autres continents, les autres pays avancent à pas de géant. Notre continent nous a tout donné mais nous avons choisi de saborder le navire très tôt, dès les indépendances, en plein océan. Même si l’espoir est encore permis grâce à la détermination de certains de ces fils à redresser la barque, il faut reconnaître que le ver est encore dans le fruit avec tous ces assoiffés de pouvoir qui s’agitent avec des armes indignes de leur rang d’homme politique ou d’homme d’Etat.

De part sa superficie de 30 330 000 km2, dont 622 000 km2 pour les îles, notre continent occupe la deuxième place dans le globe. Voilà un continent qui avait tout pour garder la tête haute dans la cour des grands. Voilà un continent très riche en ressources minérales, en minéraux précieux, en combustibles fossiles tels que le charbon, le pétrole, le gaz naturel. Voilà un continent doté de grands gisements d’or, de diamants, de cuivre, de bauxite, de manganèse, de nickel, de platine, de cobalt, d’uranium, de germanium, de lithium, de titane, de phosphates, de fer, de chrome, d’étain, de zinc, de plomb, de thorium, de zirconium, de vanadium, d’antimoine, de béryllium, d’argile, de mica, de soufre, de sel, de natron, de graphite, de gypse , de calcaire.

L’Afrique regorge d’importantes routes commerciales, 30 490 km de côtes maritimes, de grands bassins hydrauliques dont le Nil avec ses 6650 km, fleuve le plus long du monde drainant le nord-est de l’Afrique, le Congo long de 4 400 km arrosant une grande partie de l’Afrique centrale, le Niger long de 4 200 km situé dans la partie occidentale du continent, le Zambèze avec ses 3 540 km coulant dans la partie sud du continent, le Lac Tchad avec son eau douce. Sa végétation, sa faune et sa flore font courir d’innombrables touristes et investisseurs du monde et ses terres cultivables s’étendent à perte de vue, baignée dans un climat et une pluviométrie généralement favorables à l’agriculture sous un soleil qui, une grande partie de l’année, et dans plusieurs zones, fait rêver.

Au sein de ses populations très accueillantes, existe un gisement impressionnant de matière grise, de ressources humaines capables de transformer tous ces trésors du continent cités plus haut en un immense chemin du bonheur pour ses fils en prenant en compte, dans les stratégies pour ce faire, les réalités de nos cultures riches et diversifiées. Malgré tout, nos communautés, prises dans l’étau de la pauvreté, des conflits armés, des régimes à pensée unique, d’un endettement terrible et incompréhensible, souffrent le martyr depuis des décennies.

Dans ce contexte de souffrances multiples de notre continent, nous ses enfants, avons souvent tord de tout rejeter sur le dos de son histoire, certes, marquée par les innombrables crimes contre l’humanité qu’il a eu à subir de la part de l’Europe; je veux nommer, entre autres, la traite négrière et la colonisation. Notre continent est fatigué de voir que la plupart de ses hommes politiques se comporte encore en inspecteurs de l’administration coloniale. Notre continent est fatigué de voir un pan important de ses intellectuels devenir les bras armés de certains politicards qui aspirent à présider aux destinées de nos peuples et qui ne rêvent que de cortèges motorisés en semant dans les rues des cortèges funèbres ou des conteneurs de mensonges. Les querelles de leadership ont causé trop de tord à l’Afrique ; refuser de l’admettre, c’est courir à notre perte.

Les autres nous observent nous entre-déchirer en nous faisant faire mutuellement du mal par des actes ou des paroles d’une cruauté exécrable, en nous ouvrant même leurs médias et en riant sous cap. L’assassinat de Patrice Lumumba et de Thomas Sankara ainsi que le traitement inhumain infligé à l’inoxydable Nelson Mandela sont encore présents à la surface de la conscience de tous les citoyens du monde épris de justice, de paix et d’équilibre des choses. Ces lobbies ignobles, véritables syndicats du crime organisé, nous arrachent nos icônes du refus et de l’honneur en concoctant des plans machiavéliques visant à ternir leur image sur le plan international par le biais d’une certaine presse prête à tout pour survivre.

Le rêve de Patrice Lumumba, de Thomas Sankara, de Nelson Mandela, pour ne citer que ceux là, est d’avoir un continent uni, paisible et prospère qui cesse d’être sous la perfusion de l’aide des pays dits développés, de compter sur la force des autres pour exister. Ce rêve subit encore les humeurs de certaines de nos élites dirigeantes mais aussi d’une classe de nos écrivains et artistes comploteurs qui, pour aider un clan à monter aux affaires ou à y demeurer, n’hésitent pas à mettre leur talent aux service du pire au détriment du meilleur. Ils se compromettent pour gérer des plans de carrière sur le dos de leur peuple. Ceci constitue une épine à enlever du pied de l’Afrique si nous voulons qu’elle arrête de claudiquer. La mission de l’artiste et de l’écrivain est de servir les bonnes causes, être du côté du peuple et de ceux qui oeuvrent pour rendre son existence meilleure.

Heureusement, nos leaders africains, il faut le reconnaître, ne sont pas tous, des incompétents doublés de profiteurs insouciants du présent et de l’avenir de leur peuple. C’est cela qui nous donne encore des raisons d’espérer. Parmi ceux là qui permettent à notre fierté d’africain de rester debout au milieu des nombreuses difficultés existentielles auxquelles nous faisons face, figure celui que l’on surnomme à juste titre, « Le soldat de la démocratie ».

D’aucuns ont été très choqués par une plume dont l’anonymat est révélateur, au sens photographique du terme, de sa lâcheté et de sa volonté manifeste de nuire à autrui ; une plume encagoulée qui renvoie l’image du Ku Klux Klan tristement célèbre pour son cynisme à l’état sauvage face aux combattants des droits de l’hommes qui luttaient pour qu’en Amérique, les hommes puissent naître libres et égaux devant la loi, sans distinction de race, de sexe, de religion, d’idéologie et d’âge. Ce qui rassure quant à l’issue de l’entreprise nauséabonde de cette plume anonyme et méchante, vient de la conviction du plus grand nombre que la mauvaise foi et les querelles de bas étages n’ont jamais triomphé de la véracité des faits papables.

Pour son réveil, notre continent a grandement besoin d’une nouvelle élite dirigeante à l’image de Amadou Toumani Touré, cet homme de mission qui parle peu et travaille beaucoup, fait ce qu’il dit et dit ce qu’il fait dans l’intérêt supérieur de sa nation tout en acceptant, pour le principe sacro saint de la liberté de presse et d’opinion, de recevoir les critiques de ceux qui ne sont pas du même avis que lui. Alors, que les démons de la division et du retard orchestré du continent arrêtent de diaboliser ces perles rares de notre élite dirigeante ; cela ne milite pas en faveur du développement de nos pays!

Lorsqu’un bâtiment ne répond plus aux normes de sécurité établies, la responsabilité commande de le détruire et de le remplacer par un autre. Ceci nécessite un nouvel architecte, un nouveau plan, une nouvelle équipe et de nouveaux matériels. Amadou Toumani Touré fut le nouvel architecte que le Mali attendait. Homme de conviction, il a eu à jeter les bases de la nouvelle république du Mali après la chute de Moussa Traoré en mettant en place une constitution, un climat de paix, les conditions qui ont permis l’organisation des premières élections libres et démocratiques de son pays, le Mali indépendant, et en cédant le pouvoir aux civiles en 1992 comme il l’avait promis. Une première en Afrique que le monde entier avait salué en son temps.

La promesse, disait l’autre, est le plus bel usage du langage, c’est le langage par lequel on s’engage. Même si, elle est libre et révocable, elle doit forcer son auteur à une éthique de responsabilité. Il venait ainsi de démentir le dicton selon lequel, le pouvoir dénature l’homme. C’est cet homme de valeur, cette référence de la jeunesse de mon continent que des apprentis sorciers à la solde d’hommes sans scrupules, tapis dans leur peur de paraître au grand jour et d’être la risée de leur peuple, cherchent à salir sur la scène internationale.

Ce leader africain dont l’étendue et la beauté de ses réalisations constatées se marient parfaitement avec son sens élevé de la responsabilité, son amour incontestable de sa patrie et la noblesse de ses promesses respectées vis-à-vis de son peuple ne mérite pas cela. Il sort, comme Thomas Sankara, Patrice Lumumba, Nelson Mandéla, du lot de nos dirigeants corompus que tout intellectuel sérieux se doit de combattre démocratiquement pour le salut de notre cher continent. C’est mon humble avis. Je ne doute pas qu’il puisse exister des imperfections dans son œuvre comme il en existe dans toute œuvre humaine. Cependant, comme disait le poète Amadou Lamine SALL « L’étoile la plus belle est vaine sans un morceau de ciel pour faire son miroir ».

                                          Tafsir Ndické Dièye 
                                          Ecrivain sénégalais
                                Auteur de romans policiers dont :
                                Ces fossoyeurs de la République
                                Edition Mélonic juillet Québec 2005
                                E-mail : ndickedieye@yahoo.fr