Depuis les assauts dramatiques des enclaves de Sebta et Melilla, l’Europe, en effet, n’a d’yeux que pour cette préoccupation Les différentes rencontres, euro-européenne, euro-méditerranéenne, voire même franco-africaine, ont eu à introduire dans leur ordre du jour et en première place le problème de l’immigration clandestine. Un problème, certes, qui doit être pris en compte par les différentes parties concernées, mais au sujet duquel on doit se pencher sur les origines ayant engendré ce phénomène. Phénomène qui relève d’abord de la détresse humaine des populations des régions subsahariennes et notamment la jeunesse. Une jeunesse en mal de perspectives dans son pays : développement au ralenti, pauvreté, sécheresse, maladies, richesses lapidées en plus des guerres, une des conséquences des ex-colonisateurs.

L’Europe, qui n’a eu de cesse de faire miroiter l’Eldorado à ces populations s’offusque face au phénomène de l’immigration et engage une politique fondée sur le sécuritaire pour «éradiquer» le flux migratoire. Pis encore, la politique européenne prônée ces derniers mois, une politique du tout-sécuritaire, tout en ouvrant ses portes pour encourager le flux migratoire des compétences africaines, à savoir la matière grise. Les dernières déclarations du Président français, leader de l’Europe au Sommet franco-africain, sont précurseurs de la politique déjà en cours. Celui-ci a soutenu que «la France entend contribuer à la renaissance de l’Afrique. Quel avenir l’Afrique va-t-elle offrir à sa jeunesse ? C’est là la vraie question de ce sommet». Une question à laquelle le sommet n’a pas apporté une réponse attendue par les leaders africains présents, si ce n’est l’encouragement de cette jeunesse africaine détentrice de diplômes de haut niveau pour «aller sous les cieux européens». Le ministre de l’intérieur français, Nicholas Sarkosy, déposera dès le mois prochain un nouveau projet de loi sous l’intitulé «maîtriser l’immigration subie pour développer une immigration choisie». Un projet de loi qui correspond aux propos tenus par le premier ministre, Dominique de Villepin, fin novembre dernier, où il a soutenu : «nous voulons accueillir les meilleurs étudiants, les plus motivés, ceux qui ont un projet d’études de haut niveau.»

Par ailleurs, l’apport européen pour le développement de l’Afrique demeure en deçà des défis et des attentes du fait que les approches des uns et des autres sont dégagées selon les besoins et les objectifs à atteindre. Et pour faciliter cette immigration «choisie», six nouveaux Centres pour les études en France (CEP) verront le jour l’année prochaine, l’un au Cameroun et un autre à Madagascar, pour ne citer que ces deux là. Aussi, la rencontre euro-méditerranéenne qui marque les 10 ans du traité de Barcelone, est indicatrice, on ne peut mieux, du fossé creusé entre les deux rives depuis l’approche qui a sanctionné le traité de 1995, et dont «le bon voisinage» des deux rives est tributaire des ombres d’une histoire commune dont la volonté politique des ex-colonisateurs demeure absente. Le président français a affirmé, lors du Sommet franco-africain, que son pays demeurera «l’avocat inlassable de l’Afrique», un avocat dont le Parlement a adopté une loi glorifiant «le rôle positif du colonisateur».

L’«immigration clandestine, le nouveau cheval de bataille mené par la France, l’Italie, et l’Espagne, trois pays aux larges frontières maritimes, semble prendre le dessus sur toutes les préoccupations de l’heure chez nos voisins européens qui comptent organiser une rencontre euro-africaine sur la question le mois prochain, sans pour autant ouvrir les perspectives d’un réel débat de fond sur cette détresse humaine, de prime abord, et non pas d’une menace seulement.