
La situation des droits de l'homme est préoccupante au Niger du fait notamment du "dysfonctionnement de la justice" et de la "culture de l'impunité", a déclaré mercredi le président de l'Association nigérienne de défense des droits de l'homme (ANDDH), Khalid Ikiri.
Dans une déclaration à l'occasion de la célébration de la déclaration universelle des droits de l'homme, le président de l'ANDDH a dénoncé la lenteur judiciaire et les mauvaises conditions de détention tous phénomènes qui, a-t-il dit, "font que le justiciable ne croit que peu à la justice".
Il a souligné que le dysfonctionnement de la justice est à l'origine des mécontentements multiples dont on ne peut pas toujours contrôler les conséquences, appelant les autorités à être les premières à respecter les lois pour montrer l'exemple.
"En plus d'être avant dernier de la planète au point de vue de l'indice de développement humain, le Niger est aujourd'hui plus qu'hier un pays où les fondements de l'équilibre social, les éléments essentiels de la démocratie comme l'égalité des citoyens devant la loi sont par terre", a noté le président de l'ANDDH.
Il a rappelé que le taux de couverture scolaire est estimé à 40% en 2002, celui de l'alphabétisation à près de 20%, le plus faible taux du monde, dénonçant l'application d'une mesure gouvernementale de mise à la retraite après 30 ans de service et qui a occasionné le départ de la quasi totalité des enseignants expérimentés ainsi que le personnel d'encadrement.
Par rapport à la santé, les indicateurs sont également dramatiques au Niger avec un taux de couverture sanitaire de 47% (dernier pays du monde), un médecin pour 33.000 habitants, un chirurgien dentiste pour près de 770.000 habitants, un infirmier diplômé pour 9.000 habitants et une sage-femme pour 6.650 femmes en âge de procréer.
En 2002, le Niger a connu la persistance des maladies comme le paludisme avec 782.000 cas détectés.
A tous ces problèmes de maladies courantes vient s'ajouter le VIH/SIDA. On estime à 34.500 le nombre de femmes séropositives en juin 1998 dont 27.000 sont atteintes du SIDA. Des dispositions pertinentes doivent être prises afin que les tests de première intention soient confirmés non seulement à l'hôpital de Niamey, mais aussi dans les autres centres hospitaliers à l'intérieur du pays, et que les médicaments anti-rétroviraux soient rendus accessibles (aux malades) malgré leur cherté.
Du côté des travailleurs, le président de l'ANDDH a dénoncé la réduction de 30% des salaires rendant de facto difficiles leurs conditions de vie, ce qui les expose à diverses tentations notamment la corruption, la fuite de cerveaux vers le privé ou l'extérieur privant la fonction publique d'un important capital humain.
L'ANDDH s'est par ailleurs déclarée "vivement préoccupés" par la culture de l'impunité dans le pays, citant des exemples comme le charnier de Boultoungour où, en 1999, près de 150 personnes, anciens réfugiés, ont été portées disparues dans la zone Est du Niger alors qu'elles étaient censées être entre les mains des autorités locales.
L'ANDDH cite également l'assassinat du président Mainassara Baré, le 9 avril 1999, abattu froidement alors qu'il prenait l'avion pour une mission à l'intérieur du pays.
"Les assassins du président Baré courent toujours et, à ce jour, aucune enquête n'a été diligentée par les autorités pour faire la lumière sur ce crime, rechercher et punir les auteurs et leurs complices", souligne l'ANDDH.
En outre l'Association de défense de droits de l'homme rappelle que 29 prisonniers ont trouvé la mort, asphyxiés dans une cellule à la prison civile de Niamey. Ce crime est resté impuni à ce jour.
Dans sa déclaration, l'ANDDH rappelle le drame de quelque 5.000 enfants de Tibiri (650 km à l'est de Niamey), qui sont handicapés à vie, victimes d'une intoxication au fluorure (avec un taux de fluorure de 6,9 mg/litre, plus de 4 fois supérieur aux normes de l'OMS (1,5 mg/litre). Sur les 5.000 enfants, 468 sont sérieusement atteints et nécessitent des opérations chirurgicales urgentes.
"Malgré la mobilisation de la société civile en général, de l'ANDDH et la FIDH en particulier, qui ont mené conjointement plusieurs missions d'enquête sur le terrain, l'Etat, qui reste le premier responsable, garde un silence froid, à la fois sur le volet médico-social et sur le volet judiciaire", a conclu M. Ikiri. |