
Les échecs constants des sommets des chefs d'Etat de l'Union africaine (UA) ont conduit au fiasco de cette organisation et ceci se reflète dans le dysfonctionnement de ses principales instances, a déclaré, à Conakry, le leader libyen, Mouammar Kadhafi.
Pour Kadhafi, un éventuel report de la création du gouvernement fédéral africain pendant le 9ème sommet de l'UA prévu début juillet à Accra, ramènerait l'UA à l'ère de la défunte Organisation de l'unité africaine (OUA) qu'elle a remplacée. Et c'est pour cela, a-t-il déclaré, que cette rencontre est "très importante, car elle sera un virage historique pour l'Afrique".
De son point de vue, la présente Union africaine en tant que projet continental n'a déjà pas d'avenir, parce que ses institutions, notamment la Commission et le Conseil exécutif "ont échoué dans leurs missions" et un Parlement panafricain qui s'est révélé n'être qu'une "entité de décor sans aucune compétence".
Cet échec du projet de l'UA, a-t-il indiqué, est le résultat précisément de l'absence d'un gouvernement fédéral qui exécuterait leurs décisions. "Nous avons décidé de créer une Banque centrale africaine, un Fonds monétaire africain et des Commissions techniques spécialisées, ce qui n'a pas été fait car aucune de ces institutions n'a encore été créée, jusqu'à présent", a-t-il affirmé.
"Avec ce fiasco de la Commission de l'UA, ont aussi échoué tous les sommets des chefs d'Etat et de gouvernement qui se sont tenus jusqu'à nos jours, depuis la création de l'Union africaine", a soutenu Kadhafi, qui a exhorté les autres leaders africains à ne pas imposer, de ce fait, leurs volontés aux populations mais à travailler pour l'intérêt de celles-ci, en instaurant, à partir du sommet d'Accra, un gouvernement continental afin de créer une identité et une monnaie uniques.
Il s'exprimait ainsi, lundi à Conakry, devant la foule qui l'a accueilli avant de terminer une visite officielle en Guinée-Conakry, une étape de la tournée qu'il effectue à travers certains pays de l'Afrique de l'Ouest pour mobiliser les soutiens de la Société civile et des gouvernements de ces pays à sa proposition de création des Etats unis d'Afrique.
Dans cette campagne qui comprend des parcours par la route avec une délégation composée d'hommes d'affaires libyens en un cortège d'une centaine de véhicules, le leader libyen a aussi visité le Mali et la Sierra Leone où il a réitéré auprès des pouvoirs publics et de la Société civile locaux son discours d'apologie de l'afro-fédéralisme, exhortant les populations à ne pas permettre que leurs leaders reportent le rêve de l'unification du continent.
"Il y a 44 ans, nous avons parlé de l'unité de l'Afrique. Pourquoi cette union ne se fait pas? Pourquoi les conditions des populations n'ont pas changé"?, s'est-il interrogé pour après répondre que parce qu'il n'y a jamais eu d'intégration politique qui aurait pu unifier le contrôle des énormes ressources naturelles de l'Afrique pour réaliser son développement socioéconomique et délivrer le continent de toutes les formes de dépendance et d'hégémonie.
Avant d'entamer sa tournée, Kadhafi avait organisé, dans la capitale de son pays, Tripoli, un forum qui a réuni des représentants de la Société civile africaine pour échanger des idées sur la pertinence du projet de l'intégration politique du continent africain.
Le leader libyen a profité de cette occasion pour souligner que l'unification de l'Afrique "a cessé d'être un simple rêve pour devenir un objectif qui s'impose du fait des changements au niveau international et dans les frontières du continent où on ne peut ignorer l'influence de l'Union européenne (UE) qui s'est créée aux portes de notre continent".
"C'est pourquoi, a-t-il poursuivi, les Africains ne peuvent pas ignorer la puissance croissante des Etats-Unis dans le monde et des grands espaces tels que les pays du Commonwealth, la Russie, l'Amérique Latine, la Chine, l'Inde ou le Japon. La négligence, par l'Afrique, de ces changements internationaux et la formation de ces espaces, va lui causer les pires dommages".
"L'Afrique doit traiter positivement ou négativement avec les grandes puissances vu que l'Europe sera demain 'l'ennemi' en cas de guerre ou 'le partenaire' en cas de coopération", a-t-il préconisé en insistant que, malgré tous les obstacles dans et hors du continent, le projet de formation d'un gouvernement fédéral africain "est inévitable".
Kadhafi a réaffirmé qu'il était impératif de rattraper le temps perdu depuis les années 60 du dernier siècle après la création de l'OUA et de répondre aux aspirations des citoyens africains qui convoitent leur unité au fur et à mesure que la primauté de l'unification des régions géographiques défendue par d'autres cercles "est une question impossible à cause des divergences et des conflits qui existent entre les pays".
Par exemple, s'est-il interrogé, est-ce qu'il serait nécessaire pour unir l'Erythrée et l'Ethiopie qui sont "en état de guerre", ou l'Algérie et le Maroc "en situation de quasi- guerre" ou encore la Libye et l'Egypte, "une mission impossible". Toutes ces questions, a-t-il conclu, "disparaîtront dans le cadre d'un gouvernement fédéral". |