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Quel est le meilleur souvenir de ta carrière ?
C’est le fait d’avoir cotoyé beaucoup de grands joueurs, des gens exceptionnels et des personnalités comme Guy Roux, qui m’a donné l’occasion de signer mon premier contrat professionnel et d’exercer un métier formidable. Par la suite j’ai cotoyé des joueurs comme Abedi Pelé qui m’a aidé, m’a communiqué une envie de me surpasser. Ily a aussi mon frère Basile, avec qui j’ai partagé de bons moments comme des moments moins gais. Le football m’a permis d’avoir une vie sociale riche. J’ai aussi pu connaître des gens en dehors du milieu footballistique, des gens qui sont prêt à vous aider. Mais pour en arriver là, il faut beaucoup travailler. Aujourd’hui, je me suis installé à Lens car j’y ai passé 7 années de ma carrière.
On va revenir une vingtaine d’années en arrière. Tu as été repéré par Guy Roux. Quelles étaient tes ambitions à cette époque ?
Comme beaucoup d’africains, je suis arrivé en France pour continuer mes études. (En classe de 5è). Le hasard a fait que j’ai joué dans le club de Romainville en région parisienne. Pendant des matchs du championnat de France Cadet contre Auxerre, Basile et moi avons été repérés par Guy Roux. Ensuite nous avons signé un contrat d'un an pour voir si nous avions le niveau pour devenir professionnel. Ça s'est tres bien passé. Basile a joué tout de suite. Pour moi ça été plus long car je jouais attaquant. Basile est rapidement devenu le meilleur défenseur de l’équipe. Je suis resté 5 années à Auxerre. Pendant une saison, j’ai été prêté à Lille où j’ai pu cotoyer Abedi Pelé et Gaston Mobati. Après cette année à Lille, j’ai signé à Lens qui évoluait en 2ème division et j’ai participé à la remontée en première division. J'y suis resté 7 ans. Ça été parfois difficile car les gens me voyaient seulement comme le petit-frère de Basile et il fallait que je fasse quelque chose qui puisse marquer les esprits. En 1994, j’ai terminé meilleur buteur du championnat de France, ce qui n’est pas donné à tout le monde. |
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Roger Boli lors de son jubilé
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Justement, bien avant 1994, tu avais été sélectionné en équipe de France Espoirs. Qu’est ce que ça t’inspire ?
Aujourd’hui avec la nouvelle réglementation, un joueur qui évolue avec les espoirs peut rejouer pour son pays d’origine, ce qui était impossible à l’époque. Pour moi, ne pas pouvoir jouer avec la Côte d’Ivoire suite à ma sélection avec les espoirs français a été le plus grand regret de ma carrière car je pense que j’aurais pu apporter pas mal de choses à cette équipe.
La Côte d’Ivoire a d'ailleurs remporté la CAN 1992.
Oui et j’aurais bien aimé participé à cette aventure, pas seulement parce que les éléphants l’avaient emporté, mais parce qu’elle se déroulait au Sénégal qui est le pays de mon épouse. J’avais souvent l’entraîneur Yeo Martial au téléphone. La Côte d’Ivoire avait fait tout son possible avec ses moyens de l’époque pour me sélectionner, mais finalement ça n’a pas pu se faire.
Tu as fini meilleur buteur du championnat, et beaucoup te considéraient à l'époque comme un des meilleurs attaquants de France. Comment expliques-tu ta non-sélection avec l’équipe de France A ?
Je pense que c’est du à des circonstances défavorables. L’année où j’ai fini meilleur buteur, l’équipe de France ne marchait pas très bien. Elle avait été éliminée du mondial contre la Bulgarie. Je pense aussi que je n’ai pas marqué l’esprit des sélectionneurs car même après, j’aurais pu être sélectionné une ou deux fois, mais ça n’a pas été le cas. |
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Roger Boli termina meilleur buteur du championnat de France en 1994 avec 20 buts
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Le fait d'évoluer dans le Nord n’a t-il pas été un handicap ?
j’ai eu beaucoup d’articles dans les journaux cette année là, j’ai fait Telefoot..etc j’ai eu Aimé Jacquet au téléphone. Mais il devait rebatir l’équipe, et j’avais 28 ans. Peut-être que si j’en avais eu 25, il m’aurait pris. Je n’entrais peut-être pas dans les plans du sélectionneur. Avec la Côte d’Ivoire, ça aurait été plus facile pour moi et certainement plus bénéfique.
Une parenthèse : dans le championnat de France et en Europe plus généralement, on avait le cliché du joueur africain talentueux, mais qui était trop fêtard ou pas assez présent à l’entraînement. As tu ressenti ce cliché à ton égard et qu’en est-il de la situation aujourd’hui ?
Justement, je pense que certaines sélections, le Senegal, le Cameroun avec les matchs produits en Coupe du Monde ont entraîné un plus grand respect pour les africains. De plus, aujourd’hui, beaucoup de nos joueurs africains ont été formés à l’étranger, ce qui apporte beaucoup à nos sélections. Quand on regarde le Senegal, on se rend compte que beaucoup de joueurs ont été formés en France. Le fait de passer par les centres de formation est aussi bénéfique pour les footballeurs africains qui font plus attention à leur hygiène de vie, à être plus professionnels..etc
Les clubs ont plus de respect pour les africains, mais il faudrait que la FIFA change quelque chose : il faudra modifier le calendrier de la CAN qui empêche parfois les clubs de prendre les meilleurs africains. Imaginez par exemple que Lens doit se séparer de quasiment neuf joueurs ! pratiquement neuf titulaires. Si les clubs ont le choix à valeur égale entre un africain ou un européen, ils prendront l’européen.
Est ce que l'effort ne doit pas être fait des deux côtés ? la CAN avait été avancée au mois de janvier il y a quelques années afin de tomber en Hiver pendant la période de la trêve.
Il faudrait peut-être qu’en Europe il y ait une trève à ce moment là car les championnats sont faussés par l’absence de tous ces joueurs africains. De plus, les clubs auraient intérêt à assister à une compétition comme la CAN qui permet de détecter quelques nouveaux talents. Il faudrait que tout le monde fasse le forcing auprès de la FIFA pour que les clubs n’aient pas à se sentir lésés. |

Justement, au niveau des salaires, les joueurs africains sont-ils au même niveau que leurs homologues ?
Pour être honnête, ils sont encore un peu en dessous. Pour les décideurs, un international africain n’a pas la même valeur qu’un international européen. Pourtant, un international camerounais a la même valeur qu’un international A français. Il suffit de voir les matches entre la France et les sélections africaines, ils sont équilibrés. Il faudrait une évolution à ce niveau. Il ne faut pas forcement juger le joueur avec la sélection où il joue, mais par rapport à son niveau de jeu véritable. Je prends l’exemple d’un joueur comme Samuel Eto’o qui est un super footballeur. Pour le faire évoluer dans un grand club européen, il faut lui donner un salaire proche de celui de Thierry Henry.
As tu pensé à créer quelque chose comme une agence qui défende les intérêts des footballeurs africains ?
J’y ai déjà pensé, mettre en place ce type de structures, une société de management qui gère la carrière des footballeurs africains avant et après, un peu comme l’UNFP. Mais le problème qui est important est de savoir si les footballeurs africains feront confiance à leurs frères. Bien sur il faut que les gens qui évoluent dans cette structure soient compétents. Et ça marche dans les deux sens : un joueur qui n’a pas de qualité ne peut pas être placé dans un club de division 1. Je veux des joueurs de qualité dont je puisse défendre les intérêts.
Il y a des choses sur lesquelles on peut travailler comme la gestion immobilière, la gestion de leur patrimoine, s’occuper du joueur de façon à ce qu’il ne pense qu’à son métier. Mais il faudrait une envie de ces joueurs africains, qu’ils fassent confiance à d’autres africains. Actuellement, j’ai sous contrat des jeunes joueurs. Akale, Diawara, Kalou... Ce sont des gens qui sont bien dans leur tête, et qui ont envie de réussir dans leur carrière. Et aussi leur reconversion.
On remarque qu'il y a des joueurs, africains ou autres qui n’arrivent pas à gérér leurs revenus. Comment cela s’explique t-il ?
Ils sont mal suivis, il y a beaucoup d’erreur. Il y en a par exemple qui ne savent pas qu’ils ont des impôts à payer. Ils faut que les joueurs soient suivis par des gestionnaires, des gens qui sont des professionnels dans leur domaine. |
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En pleine action
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rclens.fr |
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Dans ton cas, comment as-tu géré ta carrière en pensant à l’après ?
J’ai toujours pensé que ma vie serait belle après ma carrière. Pendant la carrière, on n’a pas forcement le temps de profiter de la vie, on est concentré sur ses objectifs, on a l’entraînement, il y a la pression des matchs...on ne pense qu’au foot..Quand on voit ce qui est arrivé à beaucoup de nos joueurs africains, c’est terrible. Quand on voit les difficultés qu’ils ont à vivre après avoir été au sommet de la gloire...c’est difficile. J’ai toujours voulu éviter ça et quelques années avant la fin de ma carrière, j’ai réfléchis à ce que je voulais faire. J’ai voulu continuer dans le monde du foot qui m’a tout donné et m’impliquer en tant qu’agent de joueur.
Au niveau de la famille africaine, on sait qu'elle est nombreuse et lorsqu’on réussit, elle s'agrandit naturellement. Comment gère t-on ces sollicitations familiales au quotidien? Une tante qui vient parcequ’elle a un problème, un cousin resté au pays ?
Il faut communiquer et avoir une certaine force de caractère, même si parfois on peut être dur. Tant qu’on ne communique pas, les gens pensent qu’on est milliardaire et qu’on peut dépenser n’importe comment. Ça aussi ça fait partie de la gestion. Il faut aussi que le footballeur soit isolé, de sa famille, des cousins, la tante etc...Ils peuvent évidemment rester géographiquement proche de lui pour qu’il ait le sentiment d’être entouré. Mais je pense que ne pas vivre au quotidien avec l’ensemble de la famille africaine est bénéfique pour la carrière. La famille aussi doit faire des efforts en protégeant le joueur.
As tu toujours des relations avec des anciens comme Angloma, Abedi Pelé, Bernard Lama que tu as cotoyés?
On garde une certaine amitié, même si on ne se voit pas tout le temps car chacun a ses occupations. Aujourd’hui cependant, il y a beaucoup de moyens de communications qui nous permettent de rester en contact. Abedi Pelé qui travaille avec la FIFA et qui est aujourd’hui un homme important au Ghana arrive à donner quelques tuyaux. On fait aussi quelques matchs d’anciens même si on ne joue plus au même rythme qu’auparavant (rires). Je pense qu’on va tous se retrouver à la CAN en Tunisie dans une bonne ambiance (rires) et sans pression. C’est ça l’avantage de l’après-carrière. |
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Basilou
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cote-ivoire.com |
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As tu toujours des contacts en Côte d’Ivoire ?
J’ai moi même contacté le président de la fédération ivoirienne et on a trouvé un entraîneur, Robert Nouzaret qui fait un excellent travail. Il est dommage que la sélection ivoirienne n’ait pas réussi à se qualifier pour la Coupe des Nations. A mon avis, la Côte d’Ivoire est une équipe à suivre de près dans les deux ans.
J’en profite aussi pour parler d’un joueur, Saliou Lassisi qui connaît des difficultés à la Roma. Il s’est bléssé tout de suite après son arrivée, et a fait une saison blanche. Depuis qu’il est revenu, le club ne le paye pas, il n’a pas le droit de porter les couleurs de la Roma sur décision personnelle du président. Je me bats nuit et jour pour qu’il puisse retrouver sa liberté contractuelle et être payé. Ça fait deux ans qu’il n’a pas touché de salaire. On vient de gagner le procès avec la ligue italienne qui a demandé à la Roma de payer le salaire de l’année dernière déjà. On aimerait qu’il puisse retrouver sa liberté contractuelle et jouer.
En tant qu'agent comment se présente ta structure ?
Ma société existe depuis 3 ans, est basée sur Lille. J’ai passé ma licence à Paris. J’ai une carte agent FIFA et je suis agrée par la FFF. Je suis basé sur Lille ce qui a l’avantage d’être proche de Paris avec notamment le TGV. J’ai deux-trois personnes qui travaillent pour moi comme salariés et d’autres qui ne sont pas salariés, mais avec qui je collabore, notamment des personnes qui sont en Afrique.
Au début ça n’a pas été facile avec les joueurs qui ont besoin de référence avant de pouvoir accorder leur confiance. Actuellement ça se passe bien, j’ai fait beaucoup de transferts l’été dernier. J’ai l’ambition d’avoir les meilleurs joueurs africains dans mon écurie. |
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Roger Boli et un membre de l'équipe Grioo
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grioo.com |
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Comment travailles tu avec l'Afrique ?
J’ai des relais dans les pays africains, qui m’informent. Quand on me signale un bon joueur, pas un joueur qui a fait un seul bon match, mais qui a été performant dans la durée, je me déplace et en général il me suffit d’une fois pour déterminer s’il est bon. Je sais aussi à quels clubs il peut plaire compte tenu de mon expérience. Tel ou tel joueur peut correspondre au style de Marseille, mais pas à celui de Lens ou de Nantes.
Quelles sont tes relations avec les autres agents de joueur ?
Il y a Pape Diouf que je connais bien puisqu’il a été mon agent et qu’il est incontournable. Il a réussi et c’est un très bon agent. Mais sans prétention, je voudrais aller au delà de ce qu’il a fait, faire autre chose en créant une large structure où on s’occupe de tout ce qui concerne le joueur : sa carrière, son après-carrière...Il faut mettre tous ces jeunes joueurs dans de bonnes conditions. En ce qui concerne les relations avec les autres agents, on peut solliciter ponctuellement d’autres agents pour un problème particulier, mais en général, on travaille seul.
As tu des nouvelles de "Basilou" ?
En ce moment "Basilou" vit à Paris où il a pas mal d’activités. Il était sur le continent africain pendant quelques années. Il avait besoin de changer d’air. On est contact et je lui dis tout le temps que les jeunes ont besoin de son expérience. Il doit leur faire profiter de ses conseils avec toute l’expérience qu’il a accumulée. Il y a des choses qu’il sait que les jeunes ne savent pas. Des gens comme lui, comme Abedi Pelé ou Joseph Antoine Bell travaillent déjà avec la FIFA. J’espère qu’il travailleront avec notre structure. |

Roger, nous te remercions
Je profite de cette occasion pour dire que je suis heureux de voir des africains prendre des inititatives pour essayer de faire avancer les choses. |
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