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"Solitaire": le dernier album de Doc Gyneco
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Que symbolise à vos yeux la récompense qui vous a été remise lors de la dernière édition des Victoires de la Musique ?
C’est encourageant pour le futur. C’est très encourageant pour un artiste d’être honoré pour son travail et par le public. Je sais également que les gens aux Antilles aiment bien qu’on leur passe un petit bonjour. Je n’hésite donc pas à leur passer, de temps en temps, un petit coucou avec un titre en créole.
Vous avez été honoré pour votre album Solitaire dans la catégorie rap. Aimeriez-vous être classé dans la variété française ?
J’aurais préféré l’être avec mon second album Quality street sorti en 1997.
Vous êtes moins hardcore qu’auparavant ?
De nos jours, il est certainement plus fin d’écrire des textes ou faire de la musique commerciale que d’être hardcore. Etre hardcore c’est facile. Le petit garçon de 13 et demi, de ma cité, est plus hardcore. Aujourd’hui être hardcore c’est passer pour un clown, un rigolo. Je suis plus trash, plus fin, d’où j’aime bien être classé dans cette variété.
Etre hardcore c’est trop facile. Maintenant cela ne veut plus rien dire. Ils vont le regretter les mecs d’avoir gueulé comme ça pour rien. Quand tu vois certains textes d’auteurs qui ont été récompensés aux Victoires de la musique, tu te dis : « ces mecs font passer des messages en finesse et leurs textes ils veulent dirent tellement de choses. » C’est plus ça mon truc.
Sur la page d’accueil de votre site Internet on peut observer que le métro parisien et la carte des départements d’Outre-mer (DOM) occupent une place de premier choix. C’est votre monde ?
C’est le monde de ma double culture. C’est le piment dans le cassoulet. C’est la rencontre de la langue française avec la langue créole. C’est en quelque sorte ma planète avec d’un côté le XVIIIème arrondissement de Paris et de l’autre les Antilles.
Le XVIIIème arrondissement c’est mon monde. J‘y ai passé 20 ans et c’est là que se trouvent également mes amis. Aucun soleil d’aucune planète ne pourra enlever la grisaille de ce quartier de mon cerveau. La carte des DOM, des Antilles/ Guyane c’est la source.
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Si jamais, j’ai besoin de repos et si jamais un jour je voulais quitter la France, c’est aux Antilles que j’irai |
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Doc Gyneco |
Si jamais, j’ai besoin de repos et si jamais un jour je voulais quitter la France, c’est aux Antilles que j’irai. Mais tu sais j’aime être au combat. A mon sens, c’est trop facile d’aller aux Antilles. Là-bas c’est trop beau, c’est trop propre et moi je suis encore un vagabond-chien.
Je ne veux pas aller me reposer, tout de suite, dans la montagne, au bord de l’océan, manger du poisson, faire des grillades sur la plage et danser sur du bon zouk. Je veux encore aller au charbon.
Plutôt que d’aller là-bas, c’est en France que je veux aller au combat car même si on dit que c’est beau et facile à vivre il y a encore beaucoup de combats à mener en France. |
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"Quality Street": l'avant-dernier album du Doc
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C’est-à-dire ?
Il y a de multiples combats dans la vie. Il faut choisir. A quoi ça rime de rester ici quand on a l’occasion de pouvoir partir et d’être très bien ailleurs. Je le répète mais en réalité la vie ici en France est très dure. Mais j’aime les combats, tous les combats.
Doc Gynéco, seriez-vous un artiste engagé ?
Je ne suis pas engagé pour les jeunes de ma cité, ni pour le hip-hop, le break-dance ou encore les clowns qui agressent les passants dans la rue. Je suis engagé pour tous ceux qui le méritent, pour les cas sociaux, ceux qui ont besoin d’un ticket pour acheter des pâtes et du riz. Je suis engagé également pour toutes ces personnes qui n’ont jamais mis les pieds au Louvre, autant ceux qui n’en ont pas envie et que je pourrais emmener ici ou qui n’en ont peut-être pas les moyens. Ouais, c’est cet engagement-là qui m’intéresse.
Qu’écoutez-vous en variété française ?
J’écoute Georges Brassens. J’écoute le groupe Kassav, j’écoute Renaud...
Autrement ce qui me touche chez ces artistes c’est leur plume. C’est l’époque dont il parle, la manière dont ils parlent de leur temps. J’ai l’impression de vivre une France que j’ai jamais connu et qui m’aurait plu. Une époque qui est aujourd’hui derrière nous, révolue. Ces artistes parlent avec des mots dont je n’ai même pas l’image. Mais, je comprend ce qu’ils veulent dire et faire passer. Un visage, ils appellent ça une ganache. C’est trop fort !
J’aurais aimé vivre à cette époque. C’est comme si tu demandais à un Renoi [Noirs] s’il n’aurait pas voulu vivre dans les années 70 du temps d’artistes comme James Brown. J’aime leurs écritures. On les trouve impossibles, je les trouve belles. Je suis nostalgique de ce temps.
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Les clivages religieux, raciaux, etc..., ne m’intéressent pas.
Je trouve ça bête et idiot de faire autant de différences. |
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Doc Gyneco |
Le métissage est un mot omniprésent dans votre vocabulaire, dans votre musique. Quelle définition donnez-vous à ce mot ?
Les clivages ont pris une importance énorme dans notre monde actuel. Il y a des clivages religieux, de races et de couleurs. Mais tous ces clivages ne m’intéressent pas. Je trouve ça bête et idiot de faire autant de différences.
Dans la musique aussi, il est quelque fois difficile de trouver un mec pour jouer de la guitare saturée dans un morceau hip hop, comme quand Desvarieux de Kassav en joue dans une chanson de zouk. Je pense que c’est un concept génial.
Personnellement, je suis contre toutes formes de clivages. Je suis pour les mélanges. Tout ce qui est bon peut se mélanger.
Comment voyez-vous la France d’aujourd’hui ?
Je la vois arbitre, un arbitre sur son propre terrain. Si la France ne veut plus se battre, moi je veux bien être un soldat. Il lui manque des soldats. |
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"Liaisons dangereuses": le second album du Doc
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Avez-vous été parfois puni sévèrement ?
J’imagine que tu connais cette éducation ? J’ai pris des volées sur la tête. Tu connais les volées, les raclées ? Tu vois de quoi je parle ?
Vous en voulez à vos parents pour cette sévérité ?
Oh non ! Heureusement qu’ils étaient présents pour moi. Moi je suis de Basse-Terre à Petit-Paris. Je n’avais pas d’argent pour aller régulièrement aux Antilles. Ma mère avait beaucoup de frères et sœurs. Mes parents sont venus s’installer en France pour travailler. J’allais aux Antilles quand l’administration payait les congés bonifiés. Tu te souviens de ça ? Lorsque j’avais 15 ou bien 16 ans l’Etat a arrêté de payer ces congés.
Vos parents comment voyaient-ils la France ?
Ils ne l’ont jamais vu comme un eldorado. Ils savaient où ils mettaient les pieds. Ils voulaient juste avoir un travail sérieux et payer des études à leurs enfants. Ils ne m’ont jamais demandé d’aller très loin, juste de trouver un travail et de constituer une famille. C’est tout. |

Récemment une grande artiste nous a quitté : Edith Lefel. Qu’évoque pour vous cette disparition ?
J’avais vu un clip, qu’elle avait fait à New-York. Edith Lefel représente quelque chose d’important dans la communauté antillaise. Je savais que son producteur était Ronald Rubinel. Sa disparition m’a choqué, je n’ai rien compris, parce que la dame était jeune. Je n’ai rien compris…
C’est mon frère qui me l’a annoncé. Ca m’a paru étrange. Je me suis dit elle est partie… On m’a dit qu’elle avait eu une crise cardiaque. Jusqu’à présent je ne comprend toujours pas, je ne sais pas quoi dire.
Je ne vais jamais aux enterrements. Tu sais chez nous comment ça se passe ? C’est une fête normalement.
Sa disparition vous a donc touché ?
La disparition d’Edith Lefel m’a touché. C’est trop triste, je ne sais pas quoi en penser. Je ne connaissais pas vraiment son œuvre mais je connaissais son nom, notamment par le bouche à oreille.
Ce que je savais d’Edith Lefel c’est que c’était une grande dame chez nous. Sans plus, c’est comme lorsque l’on me parle de Zouk Machine ou d’un autre groupe... Tout le monde me disait : « Mais si, Edith Lefel habitait à côté de chez machin, à Morne-à-l’eau… »
Le fait que les médias nationaux n’en aient pas parlé, qu’est-ce que cela vous inspire ?
Drucker en a parlé aux Victoires de la Musique, autrement Patrick Poivre d’Arvor a lu une petite brève en fin de journal télévisé. C’est déjà bien car le journaliste ne la connaissait peut-être même pas. C’était mon travail. C’était mon rôle de présenter Edith Lefel au grand public. Je n’en ai pas eu le temps et je le regrette. |
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Gyneco (à gauche) aime bien Stomy (au milieu), en compagnie de Ahmed Daye du secteur Ä (à droite)
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shoes-up.com |
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Vous animez une chronique, chaque vendredi soir, dans une émission télévisée. A quand votre propre émission ?
J’ai mis du temps avant de me rendre compte que je pouvais être chroniqueur dans une émission télé. Je ne sais si ce que je fais-là je le fais bien. Si l’opinion publique me demande une émission et si je le sens je la ferai. Mais il faut aussi que je pense à gagner un petit peu de sous. Il faut que je crée des choses et que j’arrête de participer à faire évoluer celle des autres.
J’ai envie aussi de créer moi-même des programmes, de te mettre toi ou elle présentateur.
Avez-vous l’intention de transmettre votre expérience à des plus jeunes et de monter votre propre label ?
Bien sûr. Mais je ne trouve pas de gens capables. C’est tout un travail. Je ne trouve pas de jeunes compétents. Je veux produire des gens mais sans signer et me mettre en avant, sans créer de posse [groupe], de gang ou de crew. Je vais trouver un artiste, je vais le teindre en blond et je l’appellerai Eminem. Mais ne dirai pas que je suis Doctor Dre. C’est ça l’erreur.
Comment voyez-vous actuellement le milieu du rap ?
Il y a trop de business. Les mecs vendent des t-shirt, des pulls… Ils ont une réalité qui n’est pas celle qui m’intéresse. Ils ont une réalité TF1. Ils sont au courant des émeutes qui se préparent, de qui a braqué tel fourgon. Ils veulent savoir qui est le gangster qui est tombé en prison ou encore qui va sortir bientôt.
Ce n’est pas la réalité en France ?
Non, non. La réalité française c’est des gens qui n’ont pas d’argent pour payer l’eau, l’électricité ou le loyer. |
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"1ère consultation": le tout premier album
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Qu’écoutez-vous actuellement en rap français ?
Tout, notamment Alphonse Brown, écrit m’a t-on dit, par le rappeur Faf Larage et interprété par l’animateur de télévision Mickaël Youn, titre qui est actuellement numéro un. Quand tu regarde le classement français. C’est devenu clownesque.
Plus sérieusement vous écoutez quoi ?
Il y a le dernier Stomy Bugsy.
Vous dites cela, parce que Stomy Bugsy c’est la famille.
J’écoute du zouk-love. Zouk-love ! Tu sais ce que les gens aux Antilles disent à propos des rappeurs : « les rappeurs sont des fous. Ils font n’importe quoi. Qu’est-ce que cette bande de jeunes [ il prend l’accent d’une grand-mère créole et termine en pouffant de rire] ». Là-bas il n’y a pas de rap. Ils écoutent du rap américain, du ragga et du reggae.
Les femmes sont omniprésentes dans vos chansons, dans votre vie. Quelle est votre définition de la femme ?
Les femmes sont Dieu. Elles sont celles pour qui j’ai de l’intérêt autant dans mes chansons que dans la vie. Ce sont elles que j’écoute le plus souvent. Les mecs je ne les écoute pas, ils ne racontent que des conneries.
L’association des Chiennes de garde emmenée par Isabelle Alonzo ne vous a pas raté lorsque vous avez sorti le titre Ma salope à moi.
P… quel nom ! Elle ont un nom plus fort que le mien. J’avais fait fort avec Doc Gynéco mais les Chiennes de garde là (rires)…
Elles avaient raison quand elles ont dit que j’allais loin. Mais disons que j’ai vécu pendant vingt ans dans un monde d’hommes, de petit-homme. J’allais à l’école pour jouer au foot. On traînait en bas de l’immeuble, il n’y avait pas une meuf [femme] avec nous.
Alors quelque part les meufs c’était un à-côté. Ces meufs c’étaient ou nos sœurs ou nos mères ou alors les sœurs des copains (rires). Quand on sortait avec elles, il fallait dire : « Ah ! ouais… »
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Nicolas Sarkozy
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http://www.midilibre.com |
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Que voulez-vous dire exactement ?
Il fallait avoir une espèce de respect bizarre. Le titre Ma salope à moi, il est venu de ce sentiment. Maintenant, il y a des mecs qui sont mariés avec les meufs qui ont tourné, qui sont sorti avec pleins de gars du quartier. Ton meilleur copain s’est marié avec l’une de ces meufs et a eu des enfants avec elle. T’es obligé de respecter ça.
Que pensez-vous des initiatives du ministre de l’intérieur Nicolas Sarkozy, notamment à propos de la prostitution ?
C’est comme je lui ai dit. Je le mets au défi qu’il n’y ait plus demain dans les rues une seule prostituée, qu’il n’y ait plus un seul bout de shit dans tous les quartiers de Marseille jusqu’à Paris. S’il y parvient, je vote pour lui jusqu’à la fin de ma vie. Mais j’aimerais bien voir ça.
Comment voyez-vous les relations entre les Africains et les Antillais ?
Dans les années 80, les relations étaient très bonnes. Nous étions tous ensemble. Il y avait même des Chinois et tout d’un coup chacun à commencer à aller de son côté. Certains ont dit : « Ah moi je vais rester dans mon ambiance d’Antillais et vice-versa ». Tout ça s’est fait naturellement et ça je regrette. Pour ma part, je ne me suis jamais comporté comme ça.
Dans mon équipe tu trouveras toujours des mecs de toutes qualités, de toutes sortes et de tous genres. Sauf que je ne traîne pas avec des délinquants, des criminels, des je-ne-sais-pas-quoi… les mecs qui sont recherchés ça ne m’intéresse pas. Je ne traîne qu’avec des gens qui veulent s’en sortir, qui ont faim c’est tout. |
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Frantz Fanon, Aimé Césaire et Cheikh Anta Diop sont particulièrement appréciés par "le doc"
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Vous évoquez rarement vos enfants ?
Je regrette de ne pas pouvoir m’occuper davantage d’eux pour le moment. Le faire ça signifierait accepter de ne plus aller au combat. Tu te souviens dans le film Usuals suspects quand les bandits débarquent chez Kaizer Sauze alors qu’il était tranquille avec sa famille et qu’ils lui demandent : « Tu nous donnes le coffre ou bien on tue tes enfants. Kaizer Sauze a pris son tarpé [pétard=arme] et a préféré les tuer seul ».
C’était certainement sa manière de mener son combat. Moi, je suis trop barbare. Mes enfants ne pourraient pas tenir une seconde avec moi ou encore traîner dans les endroits où je vais.
Le jour où je m’occuperai vraiment d’eux, c’est le jour où j’aurai arrêter réellement d’aider les gens.
Comment voyez-vous l’avenir pour eux ?
J’essaierai d’insister sur leur scolarité. Il faut qu’ils sachent que l’Art, le sport sont des loisirs. J’espère qu’ils auront pleins de diplômes, car moi j’ai passé mon temps à étudier tout ce qu’il ne fallait étudier, notamment l’anatomie féminine, des truc comme ça (rires).
Pouvez-vous nous recommander quelques auteurs que vous appréciez ?
Frantz Fanon, Aimé Césaire, Cheikh Anta Diop.
Grioo.com a publié des biographies de deux des trois personnages cités par Doc Gyneco :
Cheikh Anta Diop
Frantz Fanon
D’après RFO |
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