
Kinshasa s'est réveillée vendredi au son des fusils et des obus, échos d'une tentative manquée de coup d'Etat contre le gouvernement de transition congolais déjà très éprouvé ces derniers temps. Le président Joseph Kabila a exhorté la population à conserver son sang-froid. "Restez calmes, préparez-vous à résister car je n'autoriserai personne à tenter un coup d'Etat ou de faire dérailler notre processus de paix", a-t-il lancé à la télévision publique. "En ce qui me concerne, je vais bien", a ajouté le chef de l'Etat, en uniforme militaire kaki.
Il a affirmé que les forces de sécurité avaient arrêté 12 des putschistes, apparemment menés par le major Eric Lenge de la garde présidentielle. Les forces gouvernementales appuyées par un hélicoptère le poursuivaient vendredi dans sa fuite vers le Bas-Congo avec 21 hommes. Il ne s'agirait que d'un "mouvement isolé" auquel ont participé des officiers de la garde de Kabila. Les mutins demandaient le paiement d'arriérés de salaire sur plusieurs mois, d'après des sources diplomatiques occidentales.
Le coup d'Etat a commencé après minuit lorsque le major Lenge a annoncé à la radio publique que ses forces avaient "neutralisé" le gouvernement de transition. L'électricité a été coupée dans Kinshasa. Les dissidents se sont ensuite retranchés dans une base militaire de la capitale, selon plusieurs ministres. La majorité des cinq millions de Kinnois ont été réveillés par des tirs nourris dans le centre-ville. Habitants et diplomates signalaient des rafales d'armes automatiques et tirs d'obus de char sur la base militaire ainsi que des fusillades autour de la résidence privée de Kabila.
Le gouvernement congolais affirme que Lenge et ses hommes ont réussi à sortir pour se diriger vers l'aéroport international de Kinshasa puis au sud. Selon des responsables diplomatiques occidentaux, Lenge a appelé les ambassades américaine et britannique ainsi que la mission des Nations unies dans la nuit pour tenter de se rendre après l'échec de son appel au renversement du gouvernement par les forces de sécurité. Le porte-parole de l'ONU Hamadoun Touré a démenti.
Joseph Kabila, qui a succédé à son père Laurent-Désiré Kabila assassiné en 2001 par l'un de ses gardes du corps, a assuré qu'il contrôlait la situation mais l'ex-Zaïre reste fragile. En mars, une première tentative de coup d'Etat ou une mutinerie des forces de sécurité avait échoué, tandis que mercredi la ville de Bukavu, dans l'Est, est repassée sous contrôle gouvernemental après sept jours aux mains d'ex-rebelles ayant abandonné l'armée régulière.
La chute de la ville avait entraîné des émeutes à Kinshasa, soumettant à rude épreuve le gouvernement de transition formé en 2003 à l'issue de la guerre civile de 1998-2002. Le nouvel exécutif fait cohabiter des loyalistes, ex-rebelles et opposants.
Koffi Annan, le secrétaire général de l'ONU a par la suite condamné ce coup d'Etat et a exhorté "tous les acteurs à faire preuve de cohésion et de détermination pour permettre une conclusion heureuse à la transition", selon un communiqué diffusé par son porte-parole à New York.
Le secrétaire général a réaffirmé que la mission de maintien de la paix onusienne et les autres agences des Nations unies présentes sur le terrain "se tenaient prêtes à aider le gouvernement d'union nationale et de transition à atteindre ses objectifs".
D'après AP
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