|
 |
  |
 |
|
 |
|
 |
 |
 |
 |
 |
|
 |
 |
Mactar Silla, le directeur général de Spectrum Television
©
STV |
 |
 |
|
 |
|
 |
|
 |
 |
|
|

Bonjour Monsieur Silla, depuis le mois dernier, vous avez lancé un réseau de 2 chaînes de TV gratuites au Cameroun, est ce que vous pouvez nous dire leur spécificité et leur apport dans le paysage audiovisuel camerounais ?
Effectivement, nous avons lancé depuis octobre dernier sur Douala, 2 chaînes de télévision privées du groupe Spectrum STV1 et STV2, qui sont des chaînes généralistes, gratuites, diffusées sur le réseau hertzien et qui sont un aboutissement d’un projet de longue date initiées par des jeunes entrepreneurs camerounais, notamment les frères Mukete qui sont dans le domaine des Media depuis une bonne douzaine d’années. Ils ont pensé tirer avantage de la libéralisation de l’audiovisuel au Cameroun d’une part, mais aussi participer au développement du pays à travers un secteur de pointe. Etant en contact avec eux depuis de nombreuses années, ils ont donc fait appel à mes services afin de relever avec eux, le défi d’une entreprise audiovisuelle de qualité, d’une chaîne de proximité ancrée localement tout en ayant une vocation panafricaine et internationale. Nous ambitionnons d’offrir en termes de standards, de vision, de gestion, de procédures, un exemple éloquent de ce que l’Afrique audiovisuelle est capable d’offrir en ce 21ème siècle.
Donc depuis le 1er octobre, nous sommes opérationnels dans la région de Douala, nous sommes sur satellite, notamment sur PanAmSat 4 depuis le 15 novembre dernier, et depuis lors, nous améliorons rapidement notre couverture puisque nous sommes désormais présents dans la région Centre qui couvre Yaoundé, la capitale et ses environs, celle du Littoral ainsi que dans la province du Sud-Ouest. A l’étranger, le satellite nous permet d’être visible de l’Afrique du Sud aux Pays-Bas, en passant par le Moyen-Orient. Pour le moment, la seule partie non couverte par l’empreinte du satellite est la pointe avancée de l’Afrique Occidentale.
Nous voulons être une chaîne de proximité, de culture, d’information avec des journaux télévisés en direct depuis nos studios de Douala, avec une équipe de jeunes d’une moyenne d’âge de 25-26 ans, recrutés sur la base d’appel d’offres ou d’une candidature spontanée. Pour cela, nous avons investi sur une plate-forme technologique, numérique de très grande qualité avec deux spécificités principales : STV1 en Anglais, avec un positionnement à court terme plus jeune, plus musicale et sportive (football du Brésil, des Pays-Bas) et STV2 en Français, avec un positionnement plus généraliste avec une montée en puissance de la production locale (au moins 30% comme l’exige la loi)
Juste une précision, est-ce que c’est une chaîne camerounaise ayant une vocation panafricaine ou alors est-ce une chaîne panafricaine émise à partir du Cameroun ? .
C’est une chaîne camerounaise, émettant depuis le Cameroun qui se veut une vitrine du Cameroun et qui participe à la politique audiovisuelle du Cameroun. Elle se veut un exemple pour l’ensemble du continent et peut être que lorsque nous aurons plusieurs exemples de ce type, nous pourrions fusionner les expériences pour proposer une offre importante de plusieurs programmes de toute l’Afrique à destination du reste du monde.
Nous envisageons de proposer 1/3 des programmes locaux, 1/3 des programmes Africains, et 1/3 des programmes du reste du monde. Et le Cameroun étant une sorte d’Afrique en miniature, et étant situé au coeur de l’Afrique, nous sommes de facto panafricains, et nous pensons que les programmes que nous proposerons seront pleinement Africains car conçus, fabriqués, consommés dans cette Afrique en miniature qu’est le Cameroun, d’une part et émanant du Cameroun vers le reste de l’Afrique et du monde d’autre part.
|
|
 |
|
 |
|
 |
 |
 |
 |
 |
|
 |
 |
Une vue des investissements TV du groupe - ici une salle de montage -
©
STV |
 |
 |
|
 |
|
 |
|
 |
 |
|
|

Vous expliquez que vous avez fait un certain nombre d’investissements, vous avez une plate forme technologique et numérique, vous avez acheté un certain nombre de droits sportifs et musicaux, est ce que nous pouvons avoir une idée des investissements que le groupe a déjà réalisé ou compte le faire ?
Les investissements sont très importants. Pour évaluer ces investissements, il faut tenir compte de l’histoire du groupe, tout le processus qui a amené à l’aboutissement de cette plate-forme et à sa mise en oeuvre, des investissements réels, et tout le potentiel qu’offre cette plate-forme aujourd’hui, et d’un certain nombre de facteurs techniques, humains, financiers entre autres actuels et futurs. A titre personnel, si SPECTRUM TELEVISION m’appartenait aujourd’hui et compte tenu de tous les éléments que je viens de citer, je ne la cèderai pas à moins de 15 Milliards de FCFA (NDLR 22,9 Millions d’Euros environ)
Alors combien de personnes travaillent aujourd’hui chez Spectrum TV, la branche télévision du groupe ?
Nous sommes au moment où je vous parle une cinquantaine de personnes et nous souhaitons être 70 personnes en tout très rapidement avec des recrutements en cours. Mais les manières de faire la télévision aujourd’hui ont changé, nous ne pouvons et ne souhaitons pas tout faire. Nous comptons donc faire appel à des compétences extérieures pour la production de certaines émissions. Nous voulons véritablement aider au développement d’une industrie audiovisuelle avec des producteurs locaux, ayant des projets sérieux. Nous avons d’ailleurs commencé au moment où je vous parle à conclure des accords de partenariat et d’achat de droits de diffusion avec des sociétés de production locales et africaines. Par exemple, rien que sur le Cameroun, nous avons conclu l’achat d’une trentaine de programmes de 15 à 30 mn chacun. Nous comptons ne pas nous arrêter en si bon chemin et je pense que c’est indispensable, si nous souhaitons gagner la bataille des contenus en Afrique.
Si on en vient à votre modèle économique, si j’ai bien compris, vous avez une diffusion locale en hertzien et une diffusion extérieure sur le satellite, quel est votre modèle de revenus ? Est ce exclusivement la publicité ou bien vous escomptez également des revenus du fait de votre accession au satellite ?
Pour le moment sur le territoire camerounais, notre modèle s’inscrit dans une perspective de couverture nationale en clair, non-payante sur le réseau hertzien. Pour cela nos sources de revenus seront essentiellement issues de la publicité. Il y a déjà des annonceurs qui commencent à arriver et la tendance devra s’amplifier des le début 2005, qui sera, Inch Allah, l’année du véritable essor de notre projet avec notre lancement officiel, la couverture du territoire national avant la fin du premier semestre, notamment de toutes les capitales provinciales.
A l’extérieur, ce sera un autre « Business-Model » payant basé d’abord sur le règlement des droits d’auteur, leur acquisition et l’extension des droits sur les territoires couverts.
Mais est-ce que le marché publicitaire local suffira à couvrir les investissements colossaux que vous avez eu à faire face ? Est-ce que les synergies avec les autres branches du groupe que vous êtes en droit d’attendre, vous permettront d’équilibrer vos charges opérationnelles ?
Nous allons effectivement développer des synergies à l’intérieur du groupe. Mais ce qui est sûr, c’est que si le secteur audiovisuel, a priori, était aussi rentable, plusieurs personnes auraient investi le secteur au lieu de se ruer sur l’immobilier ou d’autres secteurs. C’est un secteur où si le retour sur investissement est obtenu en 5 ans, c’est un projet qui est très « succesful ». Nous n’en sommes pas là. Notre objectif immédiat est de générer au cours de l’exercice 2005 suffisamment de revenus pour assurer notre équilibre budgétaire, de manière à couvrir au moins les charges de fonctionnement et les frais de production. L’objectif est donc de dégager suffisamment de revenus pour être à même, progressivement et à un instant donné de pouvoir couvrir nos charges.
Et je crois qu’au-delà des aspects financiers, il y a aussi un aspect culturel, éducatif non négligeable, lié en somme aux enjeux de développement d’un pays. C’est ce que j’appelle une entreprise citoyenne et patriote. En effet, les personnes qui sont dans ce secteur savent très bien que le retour sur investissement n’est pas pour demain car la télévision ou plutôt la bonne télévision coûte très cher. Elle est dévoreuse de programmes, de production, d’énergie, de matériels et nécessite des ressources humaines de qualité, à renforcer constamment dans leurs capacités grâce à la formation.
Est-ce que justement étant donné que vous avez des investissements importants, que la rentabilité n’est pas pour tout de suite et que vous l’avez dit, vous opérez dans un secteur vital, celui de la culture, vous avez le soutien des autorités ? Quels sont vos rapports avec les autorités ? Comment vous avez perçu le monopole de la chaîne publique ?
Pour faire un lien avec votre question précédente, je signalerai que beaucoup de ressources publicitaires vont sur d’autres supports. Sans doute est-ce lié au monopole de la chaîne nationale dont vous faîtes état, à la qualité des programmes, à une volonté de saisir d’autres supports comme l’affichage, la presse, etc. Je pense qu’avec l’offre que nous proposons aujourd’hui (nous venons par exemple de conclure un partenariat avec AFRISAT), il y aura une sorte de redistribution des potentialités du marché publicitaire.
S’agissant des aspects législatifs et réglementaires, notre point de repère demeure le décret d’avril 2000. Il est très clair tant dans sa formulation en considérant que tout opérateur existant avant son adoption et ayant rempli les obligations édictées, notamment le dépôt de dossier, pouvaient de facto continuer leur activité, leur exploitation. Ce qui nous a été confirmé par une lettre du Ministre de la Communication, le Pr. Jacques Fame Ndongo. Donc nous avons des rapports cordiaux et professionnels avec les autorités, et nous faisons tout pour nous conformer à la loi, notamment en matière de diffusion. C’est l’une des raisons qui nous ont poussé par exemple à être sur le satellite puisque la loi stipule qu’il faut un centre unique de diffusion. Aujourd’hui, nous sommes le seul opérateur privé à respecter cette obligation. De la même manière nous contribuons à l’accès au plein emploi de jeunes Camerounais et nous nous faisons un point d’honneur et un principe de fonctionnement de respecter la loi camerounaise. Et enfin, nous contribuons par la qualité de nos productions, de notre antenne, du know-how qui se dégage à propager une image positive à l’extérieur du pays. En raison de tous ces éléments, je pense que les autorités camerounaises ont eu, des le départ, un préjugé favorable. La pratique quotidienne, l’engouement du public, notre apport aujourd’hui au paysage médiatique Camerounais nous font penser qu’elles n’avaient pas tort. Nous entendons continuer sur cette lancée en ayant une vision très claire de nos objectifs, en cultivant nos valeurs et en essayant, jour après jour, avec l’ensemble des opérateurs du secteur de contribuer à l’édification et a la consolidation d’un secteur médiatique dynamique, créatif, crédible, hautement professionnel qui respecte le public. A STV, nous aurons toujours notre professionnalisme en bandoulière !
Est-ce que c’est aussi facile de pouvoir réaliser des productions locales alors que l’on sait qu’il y a une tendance des acteurs reconnus à vouloir s’expatrier en occident ? Quelles sont vos principales difficultés dans la production de contenu ?
C’est un problème essentiel que vous soulevez. Au-delà des infrastructures, de la technologie, la grande bataille que nous devons gagner en Afrique, c’est celle des contenus. A défaut de vouloir faire du remplissage (on prend une camera et on tourne n’importe comment comme je l’écrivais dans « Le Paria du Village Planétaire ou l’Afrique a l’heure de la télévision mondiale » (NEAS 1994)), il nous faudra bien respecter des standards, des normes de qualité sont des principes que nous nous sommes fixés en ce qui nous concerne et ceci est une œuvre de longue haleine. Mais avant d’y arriver, nous parcourons le pays durant des semaines et des mois. Nous avons fait récemment un tour des provinces du Cameroun pour sortir une série d’émissions de 20 x15mn qu’on appelle « Cultural Show ». C’est un format budgétivore parce qu’il requiert de nombreux talents et personnes qui comprennent le langage du son, de l’image, qui savent tourner, des déplacements, des consommables, des frais de logement etc. C’est pourquoi nous voulons que des structures de production émergent autour de nous, qui disposent d’argent frais, afin de pouvoir tourner et de se voir déléguer certaines taches des structures de diffusion. Mais c’est toute une démarche, une organisation, une moralisation, une professionnalisation vers une industrie audiovisuelle locale, dynamique et performante. De ce point de vue, les exemples du Nigeria, du Ghana, de l’Afrique du Sud, de l’Egyte, du Burkina Faso présentent un intérêt certain.
Aujourd’hui après la plate-forme technologique, nous orientons massivement nos investissements dans la formation et la production. La télévision c’est sans doute la technologie mais pour le public, ce sont des contenus.
Cette semaine par exemple, je fais venir un de mes anciens collaborateurs chez TV5 pour faire de la formation et partager son expérience avec nos équipes. C’est de la formation sur site !
Donc nous avons fait le pari de programmes forts mais les coûts sont très élevés. Un programme comme le « Au cœur de la cité » tournée en province, c’est 3-4 millions de FCFA de coût. En Europe, n’est peut-être rien en termes de budget de production, mais en Afrique, c’est beaucoup.
L’étroitesse du marché et des possibililites fait que nos talents s’expatrient mais beaucoup acceptent de venir prêter main forte, soit au coût local ou tout simplement pour aider.
Tenez, par exemple, le cinéaste Moussa SENE Absa , réalisateur de « Madame Brouette » avait accepté lorsque j’étais Directeur Général de la Radio-Television Sénégalaise (RTS) de démarrer la célèbre série GOORGORLU (présentée a Cannes au MIP-TV 2002), écrite par TT.FONS, le caricaturiste sénégalais sans renumération.
C’est dire qu’il y a des Africains, véritables militants de la culture, prêt a faire des choses dans ce domaine. Je peux en dire autant de plusieurs Camerounais et Africains. A nous tous de jouer, en toute confiance, avec patience et détermination !
|
 |
|
 |
|
 |
 |
 |
 |
 |
|
 |
 |
Les matériels ont été presque intégralement montés par les ingénieurs locaux
©
STV |
 |
 |
|
 |
|
 |
|
 |
 |
|
|

Pour terminer, vous êtes sénégalais, comment trouvez-vous votre expérience professionnelle et personnelle au Cameroun ?
C’est une expérience très valorisante pour moi. Parce que c’est très bien quand on est dans les grands groupes TV5, WorldSpace, AfricaOnline mais quand on va au Cameroun, en Afrique, on s’attend à évoluer dans un environnement plus difficile. Mais moi j’ai trouvé un pays avec des potentialités incroyables.
Au niveau technique, tout ce qu’on a monté, a été fait par des Camerounais. Il faut le souligner. C’est un pays chaleureux que je connais d’ailleurs de longue date. D’ailleurs, mon destin est un peu lié au Cameroun parce que la CRTV a été inaugurée en 1985, je crois, j’étais le conseiller juridique de l’URTNA et j’étais présent. Depuis cette date, je ne suis pas resté une année sans venir au moins trois fois au Cameroun. De plus, j’ai toujours croisé des camerounais professionnellement, notamment quand j’étais à TV5 où ma principale collaboratrice était à l’époque Denise Epoté-Durand. A Worldspace également, mon principal collaborateur Alex Blériot MOMHA était un camerounais et directeur de programmes. Et puis je pourrais aussi citer Lise Laure Etia, Michel Lobé Ewané, etc..qui ont été des proches collaborateurs. Le Cameroun, c’est le pays que j’ai le plus visité, que je connais le plus en dehors de mon propre pays. Je me sens donc très bien ici et je ferai tout pour que les instants que je passe ici soient couronnés de succès.
Mactar Silla, 48 ans, est le directeur général de SPECTRUM TV. Licencié en droit et docteur es-Lettres, il est spécialiste de littérature et de civilisation anglaise. Au cours de sa carrière professionnelle, Mactar a été notamment enseignant a l’Université de Dakar, directeur général de RTS (la télévision sénégalaise), TV5 Afrique, et de Worldspace Afrique de l’Ouest, Directeur Régional d’AfricaOnline. Il dispose de 22 années d’expérience dans le monde des médias et des télécommunications.
SPECTRUM TELEVISION – STV1 et STV2 –
Tel : +237 343 14 44 / 237 343 19 00 et Fax : +237 343 22 55
|
 |
|
 |
 |
 |
 |
|
|
Donnez
votre opinion ou lisez les 34 réaction(s) déjà écrites
Version
imprimable de l'article
Envoyer
l'article par mail à une connaissance
Partager sur:
Facebook
Google
Yahoo
Digg
Delicious
|
|
|
Les dernières photos publiées sur Grioo Village |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Top |
|
|
|
|
|
|
  |
 |
|
|