
A l’heure de sa mort c’est un hommage vibrant que toute la Guadeloupe fait à cet érudit de la vie, à « cet homme d’une exceptionnelle qualité humaine » au parcours atypique et exemplaire.
Guy André Lazart Cornely est né à Pointe à Pitre en septembre 1921 en Guadeloupe.
Tous les témoignages sur cet homme populaire sont unanimes. Décrit comme une figure humaine emprunte d’une grande gentillesse et d’une grande humilité, il s’est imprégné, pendant toute sa vie, de l’essence de disciplines très diverses en gardant toujours en tête, un seul objectif : le partage de ses connaissances avec ses compatriotes.
Véritable passionné de conaissances, il a été tour à tour, militaire, chercheur en biologie et botanique aux connaissances inégalées, historien puis conteur.
Décoré pour sa participation à la seconde guerre mondiale
En 1939, il a dix huit ans quand il intègre la marine nationale et participe à l’opération du débarquement en Normandie.
Le 6 juin 1944, au large des côtes normandes, Guy Cornely, avec 50 autres soldats français, fait parti de l’équipage du Courbet, un grand batiment de la marine française.
La mission de ces hommes étaient de saborder leur moyen de navigation pour servir de barrage et constituer ainsi le pont qui allait alimenter l’offensive contre les allemands.
Parti de Portsmouth en Angleterre, la veille, le Courbet va essuyer plusieurs tempêtes avant de se placer au petit matin, en face des côtes françaises, paré pour le sabordage. Un souvenir impérissable dans l’esprit de Guy Cornely qui, lors d’un reportage retraçant son histoire pendant la seconde guerre mondiale nous confiait qu’après les premières décharges, et alors que le bateau prenait déjà l’eau, le commandant du Courbet se rendit compte qu’il avait oublié des documents importants, dans son bureau au fond du bateau.
Cornely fut le soldat désigné pour les lui ramener, et c’est sans précipitation, ni panique alors que l’eau lui arrivait déjà au niveau des jambes que ce dernier les lui ramena.
Par la suite, la mission reprit son cours, le sabordage ayant pu créer une digue et une forteresse qui permirent aux autres soldats d’opérer sur la plage.
En mettant pied à terre sur la terre normande, Guy Cornely se rappelle de cette pensée qu’il avait eu en cet instant historique : « me voici schoelcher... je libère ta France après que tu m’aies libéré. »
Une fois la guerre finie, il se mit en route vers la Guadeloupe.
Il faudra attendre l’année 1994, pour qu’il soit officiellement récompensé par les autorités françaises.
Eminent chercheur à l’institut Pasteur
Une fois la guerre terminée, et après être revenu sain et sauf au pays, il se prend d’affection pour la flore de son île. Il épouse la carrière de botaniste, naturaliste, mais il est également, très connu comme un parasitologue très actif.
A partir de l’année 1944, il travaille à l’institut Pasteur de la Guadeloupe, établissement au sein duquel il prend une part active, dans la lutte contre les maladies qui frappent durement la population guadeloupéenne. Notamment, la lutte contre le vecteur de la bilharzie mais aussi l’éradication de la maladie appelée « la maladie du gros pied » grâce à l’action d’un mollusque.
D’anciens collègues se remémorent ses méthodes paternalistes envers les plus jeunes et c’est avec amusement qu’ils évoquent les surnoms dont Guy Cornely les affublaient affectueusement.
Un véritable érudit
Son incroyable parcours ne s’arrête pas là, véritable touche à tout et passionné par son pays, il avait l’art de captiver l’attention, et s’était improvisé conteur.
Au contact de Vélo, tambouyé de talent, il s’était improvisé chanteur, et avait composé avec celui ci, un morceau de Gwoka figurant dans l’album « Nostalgie Caraïbes »
Il avait aussi développé depuis toujours un sens de la phrasée et s’était lancé dans la publication d’un recueil intitulé l’enfant pour lequel il avait reçu le prix alysée en 2003.Max Rippon, poète guadeloupéen et auteur de nombreux recueils de poésie, décrivait les poèmes de Guy Cornely comme étant « des textes du terroirs, des paroles de sous bassement avec une grande magie de quelqu’un qui connaît le pays dont il parle, et qui fait l’inventaire des racines, jusqu’au dernier degré et qui tutoie chaque roche, chaque fossile, chaque tesson. »
Ouvert à la modernité, il s’était essayé à la radio sur le réseau RFO (réseau france outremer) en collaborant notamment avec robert Dieupart dans une émission consacré à l’histoire de la Guadeloupe.
Une émission qu’il anima pendant plusieurs années et qui a marqué, encore aujourd’hui, un nombre considérable d’auditeurs.
Malgré cette vie chargée, il demeurait un être simple.
De nombreuses personnes se rappellent encore de cette image pittoresque de Guy Cornely, sillonnant à vélo les rues de son quartier du Raizet aux Abymes, là où il avait décidé de finir ces jours. Gentillement surnommé « Papy Cornély » par les petits jeunes du quartier, il est resté proche de la population qui l’avait vu naître.
Quand on lui parlait de la mort, Guy Cornely disait toujours : « si an pati on jou, fò pa zòt tris paskè an fè tousa an té ni a fè si latè " » « si je pars un jour, il ne faut pas que vous soyez triste, puisque j’aurai fait tout ce que je devais faire sur terre »
Ses derniers jours
Quelques jours avant sa mort, il participait au tournage du documentaire que réalise Euzhann Palcy en collaboration avec gérard César sur les dissidents pendant la deuxième guerre mondiale. Vers la fin du tournage la semaine dernière, pressentant sa mort de façon imminente, il a fait part à la réalisatrice, de la prémonition qu’il ne verrait certainement pas le documentaire achevé et a émis le souhait que tous ses amis puissent regarder ce film. Trois jours après, le mardi 26 avril 2005, il s’éteignait au centre hospitalier de Pointe à Pitre où il se faisait soigner depuis peu.
Réaction à l’annonce de la mort de Guy Cornély
A l’annonce de la mort de Guy Cornely, jacques Gillot, président du conseil général et sénateur de la Guadeloupe s’est exprimé en ces termes : « C’est un pan entier de la culture et du patrimoine qui disparait... »
Victorin lurel, président du conseil régional et député de la Guadeloupe a salué son humanisme et sa capacité « à transmettre son savoir, à la fois populaire, didactique et savant. »
Durant toute la semaine RFO, saluera la mémoire de ce grand homme. Johann Nertomb le 28 avril 2005
D'après RFO |