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Racisme institutionnel : le ras le bol du réalisateur de la campagne anti-noirs du ministère de la sante
02/08/2005
 

Gaspar Noé, le réalisateur d'Irréversible, a tourné une série de spots pour promouvoir le port du préservatif notamment auprès des africains. Tout allait bien jusqu'à ce qu'une sombre histoire de boubous sème la discorde entre lui et un ministère de la santé aux bouffées néo-colonialistes.
 
Par Joseph Veillard (magazine Technikart)
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© Technikart  

Les Africains ayant migré en France devraient porter la capote sous leurs boubous. C'est du moins ce que semble prôner le ministère de la santé et l'institut national de prévention et d'éducation à la santé (INPES). Gaspar Noé l'a appris à ses dépens. Engagé pour tourner les trois spots de la dernière campagne de prévention contre le sida, le réalisateur de Seul contre Tous a vu son film à destinations des populations africaines refusé. Pourquoi ? Tout simplement parce que le quota de boubous n'était pas respecté à l'image. Résultat : le spot a été retourné par un autre réalisateur et Gaspar a refusé de signer la campagne de son nom, utilisant le pseudonyme de Roberto Keller. Personne n'aurait du être au courant. Mais grâce à quelques fuites de figurants et à une enquête rapide sur internet, nous avons découvert qui était le réalisateur de cette campagne destinée aux populations les plus touchés par l'épidémie du sida. On parle ici des homosexuels, des populations originaires d'Afrique sub-saharienne, mais aussi, ne croyez pas que vous y échapperez, des queutards hétéros.
Technikart : Comment t'es-tu retrouvé à réaliser les spots de la campagne contre le sida ?
Gaspar Noé :
C'est l'agence de com' qui connaissait le producteur d'Entropie, Nicolas Leclercq. Ils lui ont dit : « on voudrait contacter Gaspar Noé pour une campagne sur l'usage du préservatif ». Il était un peu surpris mais finalement, il m'a mis en contact avec eux. Ils avaient vu mes films, même le clip porno que j'avais fait pour Placebo, alors je me suis dit qu'ils savaient à qui ils avaient à faire. Il y avait trois spots : un sujet homo, un sujet hétéro et puis un troisième se déroulant dans une discothèque africaine, qu'ils n'osaient pas appeler afro ou africain et qu'ils appelaient migrant. Ça me faisait penser au juif errant. L'agence me proposait les trois spots et je me suis dit que c'était drôle. Je n'avais jamais fait un truc en milieu congolais, celui qu'ils avaient choisi. J'en étais heureux car j'adore particulièrement la manière ultra-classe dont ces gens-là se sapent. Au départ, c'était ce spot qui m'excitait le plus à tourner. Pour les deux autres, je ne voyais pas de complication possible. Ils m'ont donc filé le job.




Ça démarrait bien.

Ouais. J'ai fait des repérages dans les trois principales boîtes de nuit afro de Paris où je n'ai vu absolument personne en tenue traditionnelle. Ensuite, je suis parti dix jours à l'étranger pour travailler sur un projet de film. A mon retour, et peu avant les tournages, on m'annonce avec embarras une nouvelle demande des clients en sachant par avance quelle serait ma réaction. Il fallait désormais que les figurants africains portent des boubous, et de manière très visible.

C'était une agence du ministère de la santé ?

Non, c'était l'agence de pub BETC qui traitait avec le ministère. Je ne sais toujours pas pourquoi l'INPES a voulu me prendre. Ils se sont plantés à la base. Vu ce qu'ils attendaient de moi, ils auraient mieux fait de prendre n'importe lequel des esclaves de luxe habituels de leur agence. Pour me convaincre, les ''créas'' de l'agence m'ont répété plusieurs fois : « on veut que tu fasses un truc de type documentaire comme toi seul peux le faire ». Et avant le tournage, il y a eu plein de rendez-vous où chaque détail avait été validé. On s'était même mis d'accord pour fabriquer cinq ou six robes sexy en tissu « africain » pour satisfaire la cliente et son assistante lors du spot dit ''migrant''. Mais au moment du tournage, ils intervenaient à nouveau sur tout. Sur le plateau, il y avait une dizaine de personnes qui opinaient sur l'aspect et la gestuelle de chacun des figurants alors que sur le clip de Placebo, il n'y avait eu personne de la maison de disque. Tu passes d'un extrême à l'autre. C'est refroidissant, et à l'arrivée, même s'il y a deux, trois gadgets visuels que j'aime bien dans les spots, ça aurait pu être mille fois mieux s'ils m'avaient laissé un peu faire. Avec ces gens là, j'avais l'impression de rentrer dans une secte ou dans l'Eglise de Scientologie.

Comment ça ?

Il y avait des hiérarchies à respecter. On m'a expliqué qu'en pub, le ''réal'' ne doit pas parler au client mais à son producteur qui, s'exprimant dans leur charabia, est habilité à communiquer avec la ''TV prod'' qui elle, parle à la ''créa'' ou je ne plus quoi, qui à son tour parle au ''dir de créa'' qui lui seul peut parler au client. Tu rentres dans un système où tu n'as aucun moyen de faire correctement ton travail. C'est sûr que de l'argent, il y en avait. Tu te demandes même comment il peut y en avoir autant dans la pub. Certainement parce que les espaces publicitaires s'achètent à prix d'or. Mais c'est comme si on te demandait aussi d'enterrer toute forme de pensée devant l'imposant sas de sécurité de leur immeuble. Tu rentres dans une agence de pub et c'est le cimetière de la pensée.

Tu n'avais jamais fait de pub ?

Non, et j'espère vraiment ne pas en refaire. En tout cas pas dans ces conditions, même si les salaires attribués sont obscènes. En fait, il y longtemps, j'avais fait gratuitement un court porno pour la prévention du sida, bizarrement co-financé par le ministère de la santé et Canal+. Et là, on m'avait foutu une paix royale. Je me doutais que ça n'allait pas être pareil cette fois-ci, mais je ne pensais pas que ça irait aussi loin dans le sens contraire. C'est que si tu tombes sur, comme on dit dans leur charabia, un ''dir de créa'' totalement incapable d'établir une communication claire et censée entre le réalisateur et le client, tu ne peux vraiment rien faire.

Au ministère, ils sont gênés quand on leur parle de Gaspar Noé...

Parce que ça s'est vraiment mal passé à l'arrivée.

Ils m'ont dit qu'ils ne te connaissaient pas, qu'ils avaient travaillé avec Roberto Keller.

Ils ont dit ça ?

Je les ai appelés et on a commencé par me demander comment je savais que tu avais réalisé le spot. Ensuite, on m'a dit qu'il y avait eu des gros problèmes et qu'on me rappellerait. Et puis le lendemain, ils m'ont déclaré qu'ils ne te connaissaient pas et que c'est Roberto Keller qui avait réalisé les spots.

C'est plutôt à leur honneur de respecter mon pseudonyme. En fait, ils ont retourné le spot africain avec un autre réalisateur et je ne voulais que celui-ci me soit attribué. Moi, j'ai poliment refusé de mettre des boubous aux figurants et les clients, de manière de plus en plus autoritaire, réclamaient que dans cette discothèque avec des gens d'Afrique centrale, les noirs portent des boubous. Les 80 figurants, majoritairement congolais, désiraient pourtant tous exactement le contraire. Je les avais prévenus mille fois à l'avance que je ne ferais pas Black Mic-Mac ni un remake 2004 de Y'a bon Banania. Les gens de l'agence m'ont dit : « Tu as raison, t'inquiètes pas. On s'occupe de convaincre le client. Tu vas voir : on va fighter pour toi ». Mais ils ont baissé la tête et le jour du tournage, les clients ont continué à insister pour me faire faire un truc que je ne voulais pas faire. Ce n'était plus du tout réaliste ou documentaire, comme convenu, dans ce contexte particulier de discothèque. Les figurants et l'ensemble de mon équipe trouvaient que ça véhiculait une image clichée ou passéiste des africains qu'il n'est pas bon de perpétuer dans une France encore en partie néo-colonialiste. Mais le client avaient son idée fixe. Peut-être qu'ils avaient peur que les télé-spectateurs franco-français confondent les personnages avec des noirs nés en France, ou avec des antillais. Je ne sais pas. D'autant plus qu'ils refusaient d'utiliser le terme africain dans la voix off de ce spot. Ils jugeaient que c'était de loin le sujet le plus explosif. Ils auraient dû dès le départ demander un truc familial dans une cour de MJC, un dimanche après-midi. Et surtout le proposer à quelqu'un d'autre. En tout cas, ce qui se passait était absurde et pas réaliste.

Mais tu penses que c'est au réalisateur de décider du contenu d'une pub ?

Je me suis renseigné auprès de mon avocat, et en tant que réalisateur, tu as le droit moral de refuser de tourner quelque chose qui n'avait pas du tout été détaillé dans le script de départ. Même dans un contexte de pub. Mais la plupart des ''réal'' et autres pubards courbent le dos par avance pour financer leur maison de campagne, leur décapotable, leur collec' de chaussures en croco, salarier leur maîtresse, ou se payer la coke qui est censée leur donner une assurance et une créativité qu'ils n'ont plus depuis longtemps.





Ça s'est terminé comment ?

Malgré les tensions, l'agence a préféré ne pas suspendre le tournage et j'ai fait au mieux dans une sale ambiance. Bien sûr, le spot a été refusé car il ne correspondait pas à l'image qu'ils voulaient véhiculer des « migrants », ni surtout aux liens de subordination qu'il auraient voulu établir avec moi et le reste de l'équipe. Ils ont donc exigé au producteur Nicolas Leclerc de retourner un nouveau spot avec un autre réalisateur, en lui assurant que l'agence allait payer les frais additionnels. Deux mois après, l'agence ne lui a toujours pas envoyé le bon de commande. C'est petit. C'est pour tout cela que je n'ai pas voulu que mon nom apparaisse, et que j'ai exigé d'utiliser le pseudonyme de Roberto Keller en l'honneur du club Le Keller, par ailleurs assez hard, où on avait tourné le spot homo. Je tenais à ce que mon nom ne soit en aucun cas associé à ce troisième spot ou au ''sous-dir de non-créa'' de l'agence. Mais comme il y a eu des fuites sur internet et dans la presse par des figurants qui balançaient mon nom, des gens m'attribuent aujourd'hui le spot ''migrant'' avec des boubous. Et ça me fait vraiment chier, d'autant plus qu'ils ont utilisé la même typographie et les mêmes effets que ceux que j'avais créés pour les deux autres spots.

Ce n'était pas obligé en partant dans une histoire institutionnelle ?

Mais ils te disent qu'ils vont te laisser libre. Et puis le tournage venu, tu te retrouves avec dix personnes derrière le moniteur, même des ''cost-contrôleurs'', commerciaux et représentants de toutes sortes qui te disent de manière très verticaliste de virer tel figurant ou costume pourtant validé plus d'une fois. Sur le truc hétéro, on te dit qu'il ne faut pas que les gens s'embrassent, sur l'autre qu'il ne faut pas que les homos se touchent. Ils voulaient un spot avec des ''migrants'' mais pas de noirs en avant plan dans la fête hétéro parce qu'il y avait déjà un sujet pour eux. Pourquoi ils appellent des réalisateurs comme moi ? Est-ce pour se payer une image de ''modernes'' ? Ou est-ce par manque de respect pour les réals de pub qui mettent au placard leur pensée, comme les gens de l'agence l'ont tous fait ? La cruelle vérité, c'est que dans leur monde, le client est roi et les autres se plient en quatre pour le satisfaire de peur de perdre leur gros chèque ainsi que leur prochaine commande.

C'est toi qui fais les scripts des spots ?

Non, pas du tout. Et la voix off, je n'ai jamais compris pourquoi ils disent « voici Benoît ». A un moment, je leur ai proposé un truc qui a été refusé parce que dès que tu proposes un truc, ils refusent d'entrée de jeu, par principe. Je ne souhaite à aucun réalisateur digne de ce nom de faire de la pub avec des gens comme ça. J'ai halluciné quand ces gens-là m'ont sorti en fin de parcours et à demi-mots que le travail de montage son, de voix off et de mixage relevait de leur responsabilité de ''créa'' et non pas de celle du réalisateur. Bien sûr, je les ai envoyés péter, ainsi que leur idée foireuse d'enregistrer une voix-off de veille dame pour les spots.

A l'INPES, on m'a dit que c'était des histoires réalistes qui se passent aujourd'hui. Mais le spot hétéro, je n'ai jamais vu ça. T'as déjà été dans une soirée où il n'y a que des meufs et où quinze bombasses te sautent dessus ?

C'est vrai que tu te dis que le mec doit avoir beaucoup d'argent pour que les filles lui sourient autant. Ça fait un peu Greg le Millionnaire.

D'après Technikart

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