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Albert Tevoedjre: après les violences des banlieues parisiennes : Quelle France désormais ?... Et en quelle francophonie ?
19/12/2005
 

Albert Tevoedjre, Professeur invité à l’Université Jean Moulin (Institut de la Francophonie et de la Mondialisation) à Lyon et ancien Secrétaire général adjoint des Nations Unies, s’interroge sur la France après les violences urbaines l’ayant récemment agitée.
 
Par Albert Tevoedjre
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Albert Tevoedjre  
Albert Tevoedjre
© tevoedjre.com
 

Lorsque avec Aimé Césaire et Alioune Diop, Léopold Sédar Senghor promeut le concept de ‘‘négritude’’, il laisse à la postérité l’image d’un défi qu’il a réussi à relever :
« Je déchirerai les rires banania sur tous les murs de France ».

Et on ne les voit plus dans les villes européennes ces panneaux publicitaires avec des nègres aux dents blanches vantant les mérites du bon petit déjeuner de gros bébés tout blonds. Le combat n’est pas terminé pour autant. Il s’est tout simplement déplacé comme s’est déplacé l’esprit d’arrogance et d’asservissement. Le progrès de l’humanisation du monde connaît des lenteurs parfois dangereuses comme récemment en terre de France malgré de courageuses initiatives pour limiter les dégâts.

Le 3 novembre dernier au moment où s’ouvrait à Bamako le 23ième sommet France-Afrique, il se tenait le même jour à Paris l’Assemblée Générale de l’Alliance Francophone animée par Jean Guion et présidée par l’ancien premier ministre Pierre Messmer. Cette Assemblée Générale à laquelle participaient l’amiral Philippe de Gaulle, l’académicien Maurice Druon, le sénateur Michèle André, le ministre belge Daniel Ducarme etc… résolut d’adresser un message pressant à Bamako pour adjurer les chefs d’Etat d’instituer à l’exemple du Royaume-Uni pour les ressortissants du Commonwealth un régime de « visa francophone » au profit des étudiants, chercheurs, scientifiques etc…

Ce message joint aux questions posées à Jacques Chirac en conférence de presse sur les récentes violences urbaines et leurs conséquences, montrent bien que les relations de la France avec l’Afrique sont entrées en phase délicate et de doute prolongé. Les réactions aux douloureuses nuits de feu vécues avec effroi paraissent avoir créé un traumatisme qui a dangereusement ébranlé l’esprit de nombreux acteurs. On s’en prend pêle-mêle à la polygamie, au mariage mixte ou au rap. On se risque même, après les restrictions imposées aux pensions des anciens combattants africains, à réhabiliter par la loi ‘‘le temps glorieux des colonies’’. La nécessité ressentie par certains de créer un Conseil Représentatif des associations noires en France devrait susciter réflexion et conduire à maîtriser les amalgames qui visent les valeurs de société.

Ainsi on ne peut évacuer la question de la polygamie par la généreuse et très brève réponse de Jacques Chirac aux journalistes nerveux de Bamako. Le sujet est important et mérite quelques échanges de mutuelle éducation surtout si l’on veut que la loi soit respectée tout comme doit l’être l’origine d’une tradition en nette évolution. Peu de français connaissent encore le nom de Francis Aupiais, prêtre de la Société des Missions Africaines, ethnologue, membre de l’Académie des sciences coloniales, élu député du Dahomey en 1945. Il fut l’un des rares à pouvoir expliquer la polygamie comme une réponse sociale à la nécessité d’user de l’activité sexuelle « ad procreationem generis humani » sans mettre en danger la vie du nourrisson menacé de mort certaine en cas de grossesse précoce de la mère allaitant encore.

Francis Aupiais professait ainsi au temps où au sein du même parlement, on s’émouvait de l’apparition de quelques députés d’outre-mer. On craignait que leur trop grand nombre ne mette en danger les institutions républicaines. Henri Cullmann ne voulait pas courir le risque de voir « le code civil des français voté par une majorité de polygames et le code pénal par des fils d’anthropophages ».

Le sujet n’est donc pas nouveau. Chaque fois que la stabilité du confort social se trouve dérangée, le barbare est désigné, le barbare « aux mœurs bizarres avec sa flopée de femmes et d’enfants qui grèvent les caisses d’allocations familiales ». On ne se préoccupe évidemment pas que ce qui est « vérité en de ça des Pyrénées » se retrouve souvent « erreur au-delà » et que par exemple dans le monde des autres l’étonnement est énorme devant l’évolution en Europe de l’institution familiale élargie sans limites pour recouvrir des réalités allant du mariage traditionnel aux partenariats homosexuels avec adoption d’enfants en passant par diverses unions libres tout a fait « légitimes ». C’est la famille « nouvelle » qu’il est « politiquement correct » de reconnaître avec ses avantages économiques et sociaux. Ceci ne perturbe nullement les valeurs de civilisation et ne grève aucun budget tout comme nul ne voudrait énoncer de quelle valeur ajoutée pourrait se prévaloir la pratique usuelle mais non codifiée de « polygamie silencieuse » qui fit souffrir tant de personnages illustres ou non… Preuve, comme dit Césaire, « qu’une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte. »

Il est vrai que certains craignent pour l’ordre naturel et ne comprennent pas ces bouleversements qui créent des « athlètes génétiquement modifiés » ou font de la vache née ruminante de l’herbe du pré, une bête carnivore qui devient parfois folle… et meurtrière. Craindre pour l’ordre naturel a aussi conduit des groupes de réflexion à s’interroger sur toutes les téméraires provocations qui leur font redouter le pire : « Lorsque le péché des hommes remonte jusqu’à Dieu et répète l’arrogance de Lucifer, Yahvé ne se limite pas à des sanctions individuelles. Il s’attaque à l’univers vicié et il détruit la cité ».

Le débat ouvert sur la polygamie, que connaissait Abraham, père des croyants, ne peut que conduire à des amalgames trop simples faisant oublier, par exemple, que l’Islam, religion reconnue et respectée en France n’exclut pas les polygames de ses mosquées. Ceci permet peut-être de comprendre pourquoi sur la question difficile du regroupement familial le gouvernement de Lionel Jospin ne s’est pas empressé de céder sans réfléchir à l’intolérance qui s’affiche aujourd’hui et dont la secrétaire perpétuelle de l’Académie française, Hélène Carrère d’Encausse, se veut porte-étendard.

Les jeunes des banlieues, reconnus « fils et filles de la même République » comme dit Chirac, sont certainement prêts à rebâtir une cité pour tous comme hier la liberté fut reconquise avec tous – y compris avec ces tirailleurs sénégalais ou ces fellahs algériens, mobilisés sur tous les fronts, sans égard particulier pour leur statut personnel, ethnique ou religieux.

Les vérités dites ou sous entendues au cours des échanges de Bamako tout comme les exhortations de l’Alliance francophone interpellent une France en recherche de nouveaux repères et d’un nouveau rôle dans le monde. Ce monde ne peut être celui où les africains ne s’assument pas, ne se défendent pas et se retrouvent en marge. Un ensemble ainsi construit porte en lui-même le germe de sa destruction. Il enfante le désespoir et aussi la terreur qui vient troubler la quiétude de tous jusque dans les banlieues parisiennes. Le plaidoyer convainquant de la France dans un univers de solidarité organique se fondera d’abord sur une exigence, celle où elle trouve un intérêt national dans une francophonie vivant au quotidien le progrès, l’invention, la conquête des échanges porteurs, la richesse partagée, l’humanisme intégral. Michel Guillou a fait paraître un récent petit ouvrage qui mérite attention : « Francophonie-Puissance » (1) … Oui, puissance si elle est collective et partagée ; sinon elle ne sera pas.
Puisque c’est au sommet des volcans que l’on découvre le feu des profondeurs, le feu des banlieues, comme l’a rappelé opportunément Christiane Taubira, nous projette au cœur d’épreuves enfouies et de profondeur jamais mesurée. De Gaulle et Senghor associés y auraient trouvé l’occasion de balayer autour d’eux aventuriers sans mémoire et démagogues aux idées courtes. Ils auraient plongé dans le réel du sang versé pour la liberté pour découvrir toutes les raisons de promouvoir la juste égalité et risquer la fraternité dans la fidélité partagée. Pour une fédération mondiale francophone qui peine à naître, ils n’auraient pas hésité à invoquer Schopenhauer : « Nous n’avons plus aucune chance… il faut la saisir. » Maintenant.

(1) Michel Guillou « Francophonie-Puissance » : l’équilibre multipolaire, ellipses, Paris 2005.

Le site personnel d'Albert Tevoedjre, www.tevoedjre.com

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Mots-clés
afrique   france   francophonie   senegal   
 
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