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La galaxie rap accueille une nouvelle étoile : Youssoupha. Plébiscité par ses pairs, ce jeune rappeur de 26 ans est en train de se faire un prénom. Une bonne dizaine d’années déjà qu’il jongle avec les rythmes et les mots. Le succès a fini par être au rendez-vous : un street album qui cartonne et une signature avec le label Hostile (EMI Virgin). Il nous promet un album d’ici la fin de l’année.
Youssoupha peux-tu te présenter aux grioonautes ?
Je m’appelle Youssoupha j’ai 26 ans je suis né à Kinshasa au Zaïre. Je suis venu en France quand j’avais dix ans et j’ai grandi dans le 95 à Cergy. Je fais du rap depuis que j’ai quatorze- quinze ans, et j’ai participé à pas mal de projets musicaux notamment Frères Lumières et Bana Kin. Et là, c’est mon premier projet solo, sorti il y a quelques mois et qui s’appelle Eternel Recommencement. C’est un street CD avec un DVD et là je suis dans la préparation de l’album Négritude.
Tu rappes donc depuis l’adolescence, mais qu’est-ce qui t’as amené vers le rap ?
Je crois que c’est le réflexe des lettres, comme j’ai tendance à le dire. Très vite je me suis rendu compte que j’étais plus littéraire que matheux. Je n’ai pas fait le rapprochement tout de suite mais aujourd’hui avec le recul je me dis que ça a dû avoir une influence sur le fait de me rapprocher du rap. Je crois qu’il y a aussi l’envie de la création, l’envie d’avoir des thèmes, des opinions, de vouloir développer son expression, etc. Le rap tombait bien, l’époque s’y prêtait en tous cas pour moi. Le rap permettait d’accéder rapidement un moyen d’expression, pour faire du rap c’est pas comme quand tu veux faire de la variété ou du rock, t’as pas besoin d’instruments. Un stylo, un bout de papier et c’est parti et des faces B t’en trouves partout pour pouvoir rapper dessus. |
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2oo6, un album à venir, le street CD qui marche bien, des scènes, la signature avec le label Hostile qui appartient au groupe EMI Virgin, tout cela tu le vis comme une évidence, tu étais convaincu dès le départ que tu allais réussir à faire tirer ton épingle du jeu?
Non du tout. La musique c’est la science la plus aléatoire du monde. On peut avoir des convictions sur son talent ou sur ce que l’on veut faire mais pas sur l’effet que ça pourra avoir sur les gens, que ce soit le public, les médias, les décideurs du monde de la musique, les maisons de disque, les labels, les boîtes de clips, la presse spécialisée etc. Ça, on ne peut pas le prévoir. L’engouement qu’il y a autour de moi en ce moment je ne le vis pas comme une surprise, mais je ne le vis pas non plus comme une évidence.
Ça fait plus de dix ans que je rappe maintenant. J’ai l’impression que c’est dans l’ordre des choses mais ça aurait pu aussi ne pas se passer de cette manière. Sachant qu’il y a des gens qui rappent depuis quinze- vingt ans et qu'une grande partie d’entre eux n’ont rien eu de concluant à la clé. Donc je ne peux pas dire que c’est quelque chose que j’attendais comme s'il y avait un rendez-vous pris avec la gloire, non.
Surtout que c’est une gloire, j’espère, en devenir mais ce n’est pas une gloire avérée.
Les photos de la pochette du street CD Eternel Recommencement sont assez « choc », ont te voit entouré d’armes braquées sur toi et ta casquette masque ton visage : pourquoi?
Déjà, il faut se remettre dans l’optique d’un street CD. Le street CD, grosso modo c’est un nouveau format du rap underground, on va dire pour se faire connaître. Et vu le nombre de rappeurs qui aspirent à percer il faut taper fort et taper juste. Et ça, dès la pochette. C’est vraiment adressé à un public de connaisseurs. Comme dans la plupart des street CD il y a tendance à avoir des armes -celui là est d’ailleurs inspiré d’un street CD fait par 50Cent il y a quelques années- n’étant pas revendicatif sur la question du port d’arme, je me suis dit, c’est tout ce monde là qui a tendance à braquer à tout va qui va me braquer. Comme si j’étais la prochaine menace sur la planète rap. C’est un peu ego-trip c’est tout à fait dans les codes du rap et ça a fait son effet et on en est contents. |

Pourquoi Eternel Recommencement ?
Eternel Recommencement, parce qu’à l’écoute c’est le morceau qui a marqué la plupart des gens. Et parce que je me suis mis dans la position où, dans le rap et même dans les autres genres, on n’invente jamais rien par rapport aux thèmes abordés. On reproche souvent au rap de parler de la misère du ghetto, c’est vrai que des fois ça peut tourner en rond dans l’approche, mais la vérité c’est que c’est vraiment la réalité de ceux qui font cette musique, les banlieusards, les fils d’immigrés etc. Et dans la chanson titre en gros je dis que je peux le décrire aujourd’hui mais il y en a d’autre qui l’ont fait avant moi et d’autres qui continueront à le faire après. D’où cette idée d’éternel recommencement.
Sur Antivénus tu reprends la musique et le thème de Vénus de Diam’s, l’adultère. C’est donc à la fois une rencontre musicale, mais aussi une rencontre d’artistes, comment ça c’est passé ?
L’un des collectifs qui m’a aidé à faire mes premiers studios c’est Le Ménage à trois. C’était un grand collectif de rap français il y a quelques années et ce collectif lui a aussi mis le pied à l’étrier. A l’époque on s’était d’ailleurs rencontrés et après elle a fait son chemin. Et là, on se retrouve à l’occasion de la sortie de ce street DVD. Là où l’on se reconnaît mutuellement, c’est par rapport à l’envie de la performance, les thèmes originaux aussi et surtout un grand amour de l’écriture. J’avais beaucoup aimé son Vénus je trouvais ça très touchant et je me suis dit il faudrait le mettre à l’envers, avec la version d’un homme. Ça nous a permis de nous retrouver parce qu’elle a beaucoup aimé, du coup on s’est revus plus souvent et on travaillé ensemble. Ce qui m’a fait très plaisir parce que c’est une très grande bosseuse avec beaucoup de talents, et je trouve qu’elle mérite amplement tout ce qui lui arrive. Nous serons peut être appelés à travailler à nouveau ensemble sur mon album. |

Tu peux en dire un peu plus sur cet album ?
L’album va s’appeler Négritude. C’est ce que j’ai toujours voulu. Maintenant ces derniers temps c’est vu différemment, bizarrement. La plupart des gens avec qui j’en parle émettent des doutes, pas le grand public, mais plutôt les professionnels de la musique ou les commerciaux. Ça a l’air de marquer une identité forte, je ne pensais pas que ce titre pourrait interpeller autant. Je voulais juste préciser que si mon album s’appelle Négritude, d’ailleurs il risque plus de s’appeler Ma Négritude, c’est une manière de dire que ma négritude c’est l’identité que j’apporte au monde occidental dans lequel je vis depuis maintenant une quinzaine d’années. Je pense qu’aujourd’hui, chacun ramène sa culture dans le monde occidental en tout cas tous ceux qui vivent ici. On vit dans des sociétés très cosmopolites. Et ce titre, ce n’est pas du tout pour mettre des murs entre les gens ou quoique ce soit. C’est plus le rappel de mon identité. Par contre je trouve ça bizarre que les gens puissent être autant interpellés, puissent être aussi frileux. Alors que je trouve ça très joli et très sain à la fois d’intituler son album Ma Négritude.
Qu’est-ce qui t’inspire pour l’écriture de tes textes, quel message entends-tu faire passer en tant que rappeur ?
En tant que rappeur, j’évite d’avoir la prétention de pouvoir changer les choses, j’ai juste l’ambition de pouvoir apporter des choses. A un moment je me dis : « voilà, je m’adresse à un certain nombre de gens et je tiens à leur rappeler que telle chose va mal ou que telle chose va bien, tel sentiment me met mal à l’aise ou met mal à l’aise certaines personnes », je suis plus un rapporteur en fait.
Par contre changer les choses, c’est par l’action, c’est par l’engagement. Un artiste peut être engagé, mais sa manière d’être engagé c’est surtout de rapporter. Je peux critiquer la politique de la Maison Blanche, je ne la change pas mais je peux rapporter ce qui ne me plait pas ou ce qui peut me plaire, encore que concernant la politique de la Maison Blanche, ce serait un peu improbable (rires). |

Tu parles justement d’engagement, le 23 avril dernier tu étais au Bataclan pour un concert organisé par le Collectif à toutes les victimes, qui apporte son soutien aux victimes des violences urbaines survenues fin 2005. C’est ta manière de te positionner dans le monde dans lequel tu vis, dans la société française ?
J’ai toujours dit que j’avais un rap populaire et militant qui s’adresse à tout le monde, et pas uniquement aux puristes du milieu. Je suis un rappeur, je ne fais pas du rap variété ou pop, je fais du rap mais je veux m’adresser au plus grand nombre. Militant toujours parce que je viens d’un milieu où quand même tout ne tourne pas rond. Aujourd’hui on a beau dire les banlieues c’est un thème vu et revu, c’est bon on a assez entendu que les banlieues ça va mal, la vérité c’est que les banlieues vont mal, elles vont même très mal. Au niveau des jeunes, au niveau des parents aussi, au niveau des décideurs sociaux, au niveau des associations.
Ce qui s’est passé par exemple avec les violences de novembre, c’était grave ça été un véritable choc, mais je pense que si jamais on ne prend pas en compte la difficulté à vivre de certaines personnes, on aura d’autres émeutes. M’engager pour ce concert là c’est aussi une manière de dire, n’oubliez pas qu’il y a des gens qui vont mal et si jamais ça a pété il y a quelques mois, ça peut péter à nouveau parce que les choses ne vont pas mieux, et il faut qu’elles aillent mieux. Il ne peut pas y avoir deux France ; une France qui s’accommode de certaines inégalités et une France laissée pour compte.
Tu as laissé s’exprimer Youssoupha, l’artiste, comment Youssoupha le jeune homme de 26 ans vit tout ce qui lui arrive, comment il se sent ?
Ce qui a foncièrement changé dans ma vie, c’est que maintenant je suis payé pour rapper ! Il faut le dire, parce que c’est une réalité. Avant ce n’était pas le cas. Depuis maintenant un peu plus d’un an je peux me consacrer exclusivement à cette passion là c’est une chance. Mais en même temps c’est un travail, vraiment, on a pris un studio, on a pris des bureaux pour pouvoir travailler. Parce que c’est bien de rapper, c’est bien de faire du studio, c’est bien de faire des morceaux, mais il faut les développer, il faut les pousser sur Grioo, à la radio ou à la télé ! (Sourire). Il y a un engouement qui se crée autour de moi, et je me dis juste qu’il va y avoir du travail, du pain sur la planche. Faire du buzz c’est bien ça fait du bruit « buzz, buzz ».
Je sens qu’il y a des gens qui attendent beaucoup de moi alors il faut travailler dur. |
Plus d'infos |

Le site de Youssoupha
www.youssoupha.com
Eternel Recommencement Elu Street Album de l’année aux Rap2K Awards
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