
Le sommet de l'Union africaine qui se tenait ce week-end à Banjul devait notamment statuer sur le cas Hissène Habré dont l'extradition vers la Belgique avait été demandée par un groupe de belges d'origine tchadienne victimes de torture sous son régime.
L'ex-dictateur sera finalement jugé au Sénégal, ainsi que l'a déclaré le président sénégalais Abdoulaye Wade à Banjul en Gambie :
[i Nous avons pensé que le Sénégal était le pays le mieux placé pour juger (Hissène Habré) et je pense que nous ne devons pas fuir notre responsabilité. Les Africains doivent être jugés en Afrique, c'est pourquoi j'ai refusé l'extradition de Hissène Habré vers la Belgique", a-t-il ajouté, écartant également l'idée d'une transmission de la procédure belge à la justice sénégalaise.
"Ce n'est pas un problème facile, il concerne l'ensemble du continent africain", a poursuivi M. Wade, qui a demandé l'assistance de l'UA pour l'organisation du procès. "Notre souci est la recherche de la vérité, autant pour Hissène Habré que pour les prétendues victimes", a-t-il conclu.
Réfugié au Sénégal depuis la chute de son régime au début des années 90, l'ancien chef de l'Etat tchadien a été inculpé par un tribunal belge pour crimes contre l'humanité, crimes de guerre et actes de torture, sur plainte de trois Belges d'origine tchadienne pour des atrocités commises lorsqu'il était au pouvoir de 1982 à 1990.
La justice sénégalaise avait d'abord refusé de juger Habré en 2001, puis s'était déclarée incompétente en novembre 2005 pour statuer sur une demande belge d'extradition. Il est vrai que le dossier était politiquement explosif. Le président sénégalais avait alors renvoyé l'affaire devant l'Union Africaine afin de trouver une solution.
Les chefs d'Etat africains réunis à Banjul ont examiné dimanche matin le rapport d'un comité d'experts mandaté par l'Union Africaine en janvier lors du sommet de Khartoum, qui a préconisé dans ses conclusions de privilégier une solution africaine à cette affaire.
Trois solutions étaient discutées à huis clos par les chefs d'Etat et de gouvernement présents à Banjul : un procès devant la justice sénégalaise, le renvoi d'Hissène Habré devant un tribunal de son pays et son jugement devant la cour africaine des droits de l'homme. C'est la première solution qui a finalement été retenue.
"Si le Sénégal, qui a refusé de juger Hissène Habré il y a sept ans, s'engage maintenant, nous ne pouvons que nous réjouir", a déclaré Reed Brody de l'organisation "Human Rights Watch" (HRW), chef de file des ONG de défense des droits de l'homme qui assistent les victimes de l'ancien dictateur tchadien. "Il faut que le Sénégal fasse vite", a-t-il ajouté. Il a également souligné que "les victimes avaient attendu quinze ans, que cela faisait sept ans que leur première plainte avait été déposée et deux des sept premiers plaignants étaient déjà morts". |